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Jean Massart - La Presse Clandestine dans la Belgique Occupee

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<strong>La</strong> <strong>Presse</strong> <strong>C<strong>la</strong>ndestine</strong> <strong>dans</strong> <strong>la</strong> <strong>Belgique</strong> <strong>Occupee</strong><br />

Et d'abord, qui est−il, ce maitre exacteur? Un hobereau comme il y en a des milliers en Allemagne. Il<br />

represente obscurement cette caste militaire, nobiliaire et reactionnaire qu'on ne trouve plus ailleurs qu'en terre<br />

germanique. <strong>La</strong> noblesse git <strong>dans</strong> l'ame et non <strong>dans</strong> les parchemins. Von Bissing offre le type du Teuton<br />

cupide et fourbe, en meme temps que celui du hobereau tyrannique. Une telle nature exclut tout scrupule et<br />

toute finesse. Pour se donner un semb<strong>la</strong>nt de raffinement, von Bissing assista a des concerts et organisa meme<br />

une audition d'orgue au Conservatoire de Bruxelles; il visita aussi les musees, sans oublier de s'y faire<br />

photographier (lui, insignifiant, en face du buste de notre grand Constantin Meunier!) ni de faire publier ce<br />

cliche en premiere page d'un illustre allemand vendu en <strong>Belgique</strong>...<br />

Nous eumes d'abord pour gouverneur von der Goltz pacha: il <strong>la</strong>issa d'execrables souvenirs en preparant <strong>la</strong><br />

besogne que son successeur devait accomplir.<br />

Von Bissing, vieux panache de soixante−douze ans, commandait provisoirement un corps d'armee. Quand les<br />

hostilites ec<strong>la</strong>terent, le VIIe corps partit... sans von Bissing! Le ramollot ne quitta pas les bords du Rhin! Mais<br />

ses troupes, en se ruant contre Liege, emportaient une proc<strong>la</strong>mation que le conquerant en pantoufles leur avait<br />

dediee afin qu'elles n'eussent point d'hesitation a repandre <strong>la</strong> terreur au de<strong>la</strong> de leur frontiere. En guise d'adieu<br />

il adressa a ses hordes le papier suivant, ou il mit toute son ame allemande:<br />

“Lorsque les civils se permettent de tirer sur vous, les innocents doivent patir pour les coupables. A diverses<br />

reprises, les autorites militaires ont dit qu'il ne faut pas epargner de vies <strong>dans</strong> <strong>la</strong> repression de ces faits. Sans<br />

doute, il est regrettable que des maisons, des vil<strong>la</strong>ges florissants, voire des villes entieres, soient detruits! Mais<br />

ce<strong>la</strong> ne peut vous <strong>la</strong>isser entrainer a des sentiments de pitie intempestive; tout ce<strong>la</strong> ne vaut point <strong>la</strong> vie d'un<br />

seul soldat allemand. D'ailleurs, ce<strong>la</strong> va de soi; il est superflu d'y insister.”<br />

De loin, l'auteur de cette sinistre proc<strong>la</strong>mation put se delecter a <strong>la</strong> lecture des horreurs que l'invasion commit<br />

en <strong>Belgique</strong>: il restera, pour l'opprobre de son nom, l'un des fabricants ou des propagateurs de l'infame<br />

legende des francs−tireurs belges qui servit a l'extermination de milliers de nos compatriotes—parmi lesquels<br />

beaucoup de vieil<strong>la</strong>rds des deux sexes, ainsi que des femmes en couches et nombre d'enfants! Plus tard, von<br />

Bissing put voir de pres, a Louvain et ailleurs, l'oeuvre immonde des brutes auxquelles il avait par avance<br />

donne pretexte a tuer, piller et bruler! Le chacal put parcourir ces cimetieres d'innocents...<br />

Demeure a Dusseldorf, von Bissing s'embusqua <strong>dans</strong> l'administration interieure: il devint—poste<br />

glorieux!—inspecteur des camps de prisonniers... Or, ce bon apotre decouvrit que le public allemand, du<br />

moins <strong>la</strong> jeunesse, montrait un certain empressement aupres des baraquements ou l'on parque les captifs; a cet<br />

interet se me<strong>la</strong>it parfois un peu de pitie... Vite von Bissing publia des avis “pour qu'on cesse d'etaler vis−a−vis<br />

des prisonniers un apitoiement dep<strong>la</strong>ce”! Une de ces diatribes vaut d'etre citee: “Ayez donc plus de conscience<br />

allemande? Dois−je encore repeter cette remontrance? On le dirait! D'apres les rapports qui me sont transmis<br />

de Munster et d'ailleurs, on a encore offert aux prisonniers des friandises, notamment du choco<strong>la</strong>t, et ce<br />

malgre <strong>la</strong> defense faite. Votre ame compatissante, mais antiallemande, n'entend−elle pas les cris de detresse<br />

de nos prisonniers en France? Soyez surs que, <strong>la</strong>−bas, on ne leur donne point de choco<strong>la</strong>t!.. Ce sont surtout<br />

des enfants, des adolescents, en particulier des jeunes filles, qui se pressent continuellement autour des<br />

prisonniers. Elles manquent tout a fait d'education! Il appartient aux familles et aux ecoles de changer ce<strong>la</strong>: si<br />

les avertissements restent sans effet, on recourra efficacement a des punitions exemp<strong>la</strong>ires pour reprimer ces<br />

facons d'agir antiallemandes.”<br />

Avec sa mensongere allusion aux mauvaises conditions de vie des prisonniers allemands, ce texte constitue un<br />

document precieux. Retenons que <strong>la</strong> jeunesse allemande n'est pas incapable de sentiments genereux, mais que<br />

ses educateurs s'accordent pour tuer ce bon germe. <strong>La</strong> pitie envers des ennemis desarmes est antiallemande: ils<br />

font entrer ce<strong>la</strong>, et bien d'autres monstruosites, <strong>dans</strong> le coeur et <strong>dans</strong> <strong>la</strong> tete des enfants, soit par <strong>la</strong> persuasion,<br />

soit par <strong>la</strong> force! Etonnez−vous alors de <strong>la</strong> ferocite des adultes! Instruction et barbarie obligatoires! Chez les<br />

cannibales, <strong>la</strong> bonne education consiste a devorer les captifs; chez d'autres sauvages; on les empale ou on les<br />

II. COMMENT LES BELGES SE COMPORTENT EN BELGIQUE 109

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