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Nicolas campiche<br />

Premiers signes de reprise dans l’investissement alternatif p4<br />

Marc Lasry<br />

Une période rêvée pour investir dans les sociétés en difficulté p8<br />

Geraldine Sundstrom<br />

Les perspectives des marchés émergents p17<br />

Fernando borges<br />

L’opportunité brésilienne p19<br />

Adam J.Levinson<br />

L’économie américaine p20<br />

Nicholas bloy<br />

Le consommateur asiatique p22<br />

Guillaume Fonkenell<br />

Obligations des marchés émergents p23<br />

david M.Rubenstein<br />

Private equity: un modèle de placement qui fonctionne p27<br />

Rémy best<br />

Les leçons tirées d’un saut en parachute p34<br />

NUMÉRO 5 | dÉceMbRe 2010<br />

INVESTISSEMENTS ALTERNATIFS


AVANT-PROPOS<br />

Nous sommes heureux de vous présenter ce cinquième<br />

<strong>Pictet</strong> Report. Il s’inspire de notre deuxième conférence sur<br />

les investissements alternatifs, qui s’est tenue à Zurich à la<br />

mi-septembre 2010. Cette fois encore, comme en 2009, nous<br />

avons rassemblé un panel d’experts très diversifié, composé<br />

de gérants de fortune et d’investisseurs, pour deux jours de<br />

discussions animées résumées au fil des pages suivantes.<br />

L’accent y est mis sur les hedge funds et le private<br />

equity, les deux principales formes d’investissement alternatif<br />

qui nous intéressent ici. Toutefois, les intervenants ont<br />

également apporté de nombreux éclairages sur les perspectives<br />

économiques mondiales, la reprise partielle des marchés<br />

financiers, la situation des entreprises et de secteurs particuliers.<br />

La conférence a débuté par une évaluation de l’actuel<br />

cycle du crédit et du défi que constitue le refinancement à<br />

une époque où le crédit n’est plus aussi librement accessible<br />

qu’au milieu de la dernière décennie. Puis, l’attention<br />

s’est portée sur le rééquilibrage du pouvoir entre marchés<br />

développés et émergents.<br />

Enfin a été évoquée l’évolution du secteur des<br />

investissements alternatifs, avec pour question la mesure<br />

dans laquelle il convergeait vers la gestion traditionnelle<br />

d’actifs long only.<br />

Compte tenu du rééquilibrage du pouvoir à l’échelle<br />

de la planète en faveur des marchés émergents ainsi que des<br />

perspectives économiques plus sombres pour les économies<br />

développées, les investisseurs doivent en effet s’assurer que<br />

leurs stratégies peuvent s’adapter à cette nouvelle situation<br />

et nous espérons que vous trouverez les réflexions de nos<br />

contributeurs aussi stimulantes que précieuses.<br />

<strong>Pictet</strong> & Cie<br />

Zurich 2010<br />

Equipe éditoriale de <strong>Pictet</strong> & Cie – Stephen Barber, Ninja Struye de Swielande et Olivier Capt<br />

Traduction/contrôle qualité – Peggy Mabillard/Wilhelm Sissener et Francine Jacquemet<br />

Conception et conseil éditorial – Winkreative | Rapporteur – John Willman | Photographie – Magnus Arrevad


SOMMAiRe<br />

introduction<br />

Nicolas campiche<br />

Premiers signes de reprise dans<br />

l’investissement alternatif p4<br />

Première partie:<br />

investissement distressed<br />

Marc Lasry<br />

Une période rêvée pour investir<br />

dans les sociétés en difficulté p8<br />

Table ronde<br />

Nager à contre-courant ou la clé<br />

du succès p10<br />

• Les défis du refinancement<br />

• Où se situent aujourd’hui les<br />

opportunités distressed?<br />

• Comment investir dans des actifs<br />

dépréciés?<br />

deuxième partie:<br />

idées de placement<br />

Geraldine Sundstrom<br />

Les perspectives des marchés<br />

émergents p17<br />

Fernando borges<br />

L’opportunité brésilienne p19<br />

Adam J.Levinson<br />

L’économie américaine p20<br />

Nicholas bloy<br />

Le consommateur asiatique p22<br />

Guillaume Fonkenell<br />

Obligations des marchés<br />

émergents p23<br />

Troisième partie:<br />

du placement alternatif au<br />

placement grand public?<br />

david M.Rubenstein<br />

Private equity: un modèle de<br />

placement qui fonctionne p27<br />

Table ronde<br />

Convergence entre investisseurs,<br />

mais persistance d’une certaine<br />

défiance p30<br />

• L’évolution du secteur<br />

• Une question de confiance<br />

• Marchés émergents ou économies<br />

développées?<br />

• Quelles sont les inquiétudes des<br />

participants à la table ronde?<br />

Post-scriptum<br />

Rémy best<br />

Les leçons tirées d’un saut en<br />

parachute p34<br />

pictet report | décembre 2010<br />

investissements alternatifs 3


4 introduction<br />

iNTROdUcTiON<br />

Premiers signes de reprise<br />

dans l’investissement alternatif<br />

Des arguments forts incitent à conserver<br />

hedge funds et private equity au sein des portefeuilles<br />

Au cours des douze derniers mois, le secteur des investissements alternatifs<br />

a connu des fortunes diverses, sur une tendance entamée en<br />

2007. Mais le volume des actifs gérés par les hedge funds a continué<br />

d’augmenter, tout en restant inférieur à son pic de 2007. Le private<br />

equity a quant à lui touché le fond fin 2009, mais n’a pas encore<br />

retrouvé une croissance stable. Toutefois, les arguments incitant à<br />

conserver des investissements alternatifs au sein des portefeuilles<br />

demeurent très convaincants.<br />

S’agissant tout d’abord des hedge funds, les actifs sous<br />

gestion ont augmenté pour la deuxième année consécutive,<br />

atteignant USD 1648 milliards. Les 23 milliards de<br />

dollars nets collectés au cours des six premiers mois de 2010<br />

demeurent certes bien inférieurs aux afflux de 2006 et 2007,<br />

mais ils succèdent à deux années de sorties nettes. Les institutions<br />

américaines continuent à les soutenir puissamment,<br />

contribuant aux afflux à hauteur d’environ 80%.<br />

Secteur deS hedge fundS – actifS et flux en uSd miaS<br />

Actifs sous gestion<br />

Flux<br />

2,500<br />

2,000<br />

Montant cumulé des actifs nets sous gestion<br />

Flux annuels nets<br />

270<br />

220<br />

1,500<br />

170<br />

1,000<br />

120<br />

500<br />

70<br />

0<br />

20<br />

-30<br />

-500<br />

-80<br />

-1,000<br />

-130<br />

-1,500<br />

-180<br />

90 91 92 93 94 95 96 97 98 99 00 01 02 03 04 05 06 07 08 09 10<br />

Source: <strong>Pictet</strong> Alternative Investments<br />

Au 30.06.10<br />

NicOLAS cAMPiche<br />

CHIEF EXECUTIVE OFFICER<br />

PICTET ALTERNATIVE INVESTMENTS<br />

En dépit des attentes de forte consolidation, le nombre<br />

de hedge funds – qui frise les 7000 – a baissé de moins de<br />

10% par rapport au pic de 7634, atteint en 2007. On note<br />

toutefois une tendance à la concentration, 93% des afflux<br />

s’investissant dans les plus grands fonds, ceux qui gèrent<br />

plus de 5 milliards de dollars d’actifs. Le premier quintile de<br />

hedge funds contrôle ainsi désormais 80% du total des actifs<br />

du secteur, tandis que la moitié des fonds gère moins de 100<br />

millions de dollars.<br />

Les fonds de hedge funds continuent en revanche à se<br />

consolider et le processus de «nettoyage» consécutif à 2007<br />

se poursuit, la liquidation de firmes telles qu’Ivy et Tremont<br />

se traduisant par des sorties massives de capitaux. Au cours<br />

du premier semestre 2010, les sorties nettes se sont chiffrées<br />

à 14 milliards de dollars. Les actifs sous gestion – 564 mil-<br />

liards de dollars – représentent environ un tiers du total des<br />

actifs des hedge funds.<br />

Le graphique montrant la performance des hedge<br />

funds depuis 2007 compare l’indice d’actions MSCI World,<br />

deux indices de hedge funds – HFRX Global Hedge Fund<br />

et HFRI Fund of Funds – et Pleiad, un fonds de fonds de<br />

<strong>Pictet</strong>. Tous se sont redressés après leur chute de 2008, mais<br />

les actions restent encore d’un peu plus de 30% inférieures<br />

à leur sommet d’octobre 2007, alors que les indices de<br />

hedge funds n’ont plus à rattraper qu’environ 14 ou 15%.<br />

Les bons gérants sont toutefois quasiment tirés d’affaire,<br />

environ la moitié d’entre eux ayant retrouvé, voire dépassé,<br />

leurs plus hauts précédents.<br />

S’agissant du private equity, le tableau apparaît légèrement<br />

différent. Il est encore trop tôt pour affirmer que la<br />

croissance est revenue dans ce secteur, mais le plus bas a<br />

certainement été atteint fin 2009. La croissance devrait<br />

rester relativement anémique pendant les deux prochaines<br />

années, et ce pour deux raisons principales: premièrement,<br />

on note encore un vaste surplus d’engagements de capi-<br />

pictet report | décembre 2010<br />

investissements alternatifs


taux parmi les commanditaires; deuxièmement, ces mêmes<br />

commanditaires sont confrontés à des problèmes persi-<br />

stants de liquidités. L’activité de levée de fonds devrait donc<br />

rester léthargique pendant quelque temps encore.<br />

L’anticonformisme paie en<br />

matière de private equity<br />

Les transactions, également au point mort, sont quant à elles<br />

retombées à leurs niveaux de 2001 et 2002, soit une minu-<br />

scule fraction de ceux de la période 2005-07. L’âge d’or des<br />

taux d’intérêt faibles, de l’endettement massif et des «méga-<br />

transactions» est bel et bien fini. Le volume des transactions<br />

devrait rester inférieur à la moyenne pendant un certain<br />

temps, freiné par les tensions sur les marchés du crédit.<br />

Mais n’oublions pas que l’anticonformisme paie en<br />

matière de private equity. Si l’on analyse rétrospectivement,<br />

sur une période de 15 à 20 ans, le rendement des fonds en<br />

fonction de leur date de lancement, on s’aperçoit que ceux<br />

créés pendant les périodes d’effondrement telles que 1991-<br />

92 et 2001-02 sont aussi ceux dont la performance a été la<br />

plus forte. Rien de surprenant à cela, car les périodes de<br />

récession permettent au private equity d’acquérir des entreprises<br />

à bien meilleur compte. L’endettement est moindre,<br />

donc les fonds propres sont plus importants, et c’est ce que<br />

nous observons actuellement dans certaines transactions.<br />

Nous pensons donc que 2010 et 2011 devraient constituer<br />

de bons points d’entrée en private equity – sous réserve du<br />

choix du bon gérant.<br />

Aujourd’hui, la transparence en<br />

matière de private equity est bien plus<br />

grande qu’il y a quelques années<br />

Nous voyons plusieurs tendances se développer dans<br />

les secteurs des investissements alternatifs au cours des<br />

prochaines années. La première est la convergence de la<br />

gestion traditionnelle et alternative. Celle-ci s’observe<br />

d’ailleurs d’ores et déjà pour les stratégies de hedge funds<br />

130/30 et les fonds de rendement absolu en structures traditionnelles.<br />

Désormais, une nouvelle vague d’OPCVM cherche<br />

à combler le vide et, bien que seul le temps puisse nous<br />

dire si de tels fonds sont appelés à connaître la réussite,<br />

l’écart entre gestion alternative et gestion traditionnelle se<br />

resserre lentement.<br />

La seconde concerne la divergence qui va se créer, car<br />

le secteur se scinde en deux groupes. Le premier s’attache<br />

à répondre aux besoins des institutions, ce qui requiert<br />

des infrastructures plus importantes. Celles-ci étant<br />

fondS de hedge fundS – actifS et flux en uSd miaS<br />

Actifs sous gestion<br />

pictet report | décembre 2010<br />

investissements alternatifs 5<br />

introduction<br />

900<br />

700<br />

500<br />

300<br />

100<br />

-100<br />

-300<br />

105<br />

100<br />

95<br />

90<br />

85<br />

80<br />

75<br />

70<br />

65<br />

60<br />

55<br />

50<br />

45<br />

Montant cumulé des actifs nets sous gestion<br />

Flux annuels nets<br />

-150<br />

91 92 93 94 95 96 97 98 99 00 01 02 03 04 05 06 07 08 09 10<br />

Source: <strong>Pictet</strong> Alternative Investments, HFRX FOHF<br />

Au 30.06.10<br />

Performance dePuiS le début du mouvement de<br />

baiSSe deS marchéS actionS (oct. 2007 = uSd 100)<br />

Oct.07 Janv.08 Avr.08 Juil.08 Oct. 08 Janv.09 Avr.09 Juil.09 Oct.09 Janv.10 Avr.10 Juil.10 Aôut10<br />

Pleiad HFRI Fund of Funds HFRX Global Hedge Fund MSCI World<br />

Source: <strong>Pictet</strong> Alternative Investments<br />

Remarque: PAF-Pleiad catégorie d’actions I en USD, net de frais,<br />

HFRI Fund of Funds Composite Index, HFX Global Hedge Fund Index, MSCI World Index Net<br />

Du 31.10.2007 au 31.08.2010<br />

levée de fondS de Private equity – montantS<br />

trimeStrielS en uSd miaS<br />

47<br />

195<br />

Flux<br />

450<br />

350<br />

250<br />

150<br />

97<br />

50<br />

-50<br />

86<br />

85<br />

68


souvent beaucoup plus grandes, il peut s’avérer difficile<br />

de surpasser leurs résultats. L’autre groupe se compose de<br />

sociétés appartenant à l’ancien modèle, qui se concentrent<br />

sur une stratégie unique et limitent les actifs qu’elles ont à<br />

gérer. C’est une tendance cyclique: parfois, les investisseurs<br />

préfèrent les sociétés plus petites, parfois ils veulent la sécurité<br />

de structures plus grandes. Aujourd’hui, en termes de<br />

private equity, nous observons en général une demande<br />

beaucoup plus forte en faveur des fonds plus petits qui se<br />

focalisent sur des transactions plus modestes.<br />

Troisième point, les conditions s’améliorent pour les<br />

investisseurs, même si ce n’est pas de manière spectaculaire.<br />

Il s’agit certainement là d’un des résultats positifs de 2008,<br />

les gérants offrant des conditions beaucoup plus souples<br />

à leurs clients. Peut-être le changement le plus important<br />

réside-t-il dans la transparence, bien plus grande qu’il y a<br />

quelques années.<br />

6 introduction<br />

Enfin, s’agissant des rendements au sein du secteur, compte<br />

tenu du niveau actuel des taux d’intérêt, nos attentes<br />

devraient être plus modérées tant que ces taux et l’inflation<br />

n’augmenteront pas. Mais en investissant dans les hedge<br />

funds et le private equity, nous ne cherchons pas obtenir<br />

les rendements d’indices ou de benchmarks: nous inve-<br />

stissons dans des gérants de fortune individuels. Et lorsque<br />

nous examinons la performance des fonds, il est difficile<br />

d’identifier un schéma clair.<br />

S’agissant des hedge funds, certains sont euphoriques,<br />

tandis que d’autres sont à la peine dans l’environnement<br />

actuel, mais il n’existe pas de tendance discernable associant<br />

des gérants spécifiques à une performance de haut niveau. Il<br />

en va de même du private equity, bien qu’il existe certains<br />

moyens de générer des rendements très attrayants dans<br />

la conjoncture actuelle, en dépit des incertitudes. La très<br />

récente sortie de BC Partners après six ans d’investissement<br />

pictet report | décembre 2010<br />

investissements alternatifs


volume deS oPérationS de Private equity en miaS d'uSd<br />

USD mia<br />

1,400<br />

1,200<br />

1,000<br />

800<br />

600<br />

400<br />

200<br />

0<br />

Acquisitions<br />

Sorties<br />

2000 2001 2002 2003 2004 2005 2006 2007 2008 2009 2010<br />

Source: Dealogic, données au 31.08.2010<br />

Remarque: investissements dans des sociétés de portefeuille<br />

existantes hors volume des opérations de private equity<br />

rendement deS fondS de buyout américainS (tri net)<br />

Par année d’inveStiSSement<br />

dans un prestataire de soins de santé du nom de Centro<br />

Medico Teknon constitue un exemple de succès: elle s’est<br />

faite en juillet 2010 à un multiple de 5,4 fois le capital investi,<br />

avec un taux de rendement interne brut (TRI) de 31%.<br />

Les investissements alternatifs<br />

demeurent un moyen attractif<br />

d’accéder aux marchés des capitaux<br />

L’autre défi empêchant une performance de haut niveau<br />

est celui, classique, de la taille trop importante. Pourtant,<br />

il existe un certain nombre de gérants de très grande taille<br />

qui surperforment – le plus patent étant Paulson & Co, qui<br />

a généré des rendements phénoménaux avec un énorme<br />

volume d’actifs. Se demander si de tels gérants continu-<br />

eront de générer des rendements supérieurs à la moyenne<br />

est une bonne question à laquelle il n’est pas facile de ré-<br />

pondre. Mais elle met en évidence l’importance qu’il y a à<br />

sélectionner le bon gérant.<br />

Pour conclure, j’espère que cette présentation a démontré<br />

que les investissements alternatifs demeuraient un<br />

moyen très intéressant d’accéder aux marchés financiers<br />

et qu’ils devraient constituer une composante des portefeuilles<br />

d’investissement.<br />

Fonds 130/30<br />

Au début des années 2000, la libéralisation de la<br />

réglementation en matière de fonds communs<br />

de placement, tout d’abord aux Etats-Unis,<br />

puis au Royaume-Uni, au Luxembourg et sur<br />

le reste du continent européen, a permis aux<br />

fonds «long extension» de se développer. Cette<br />

créature hybride permet au gérant du fonds<br />

de prendre des paris long supplémentaires,<br />

tout en limitant l’exposition nette au marché<br />

à 100% des actifs nets en détenant des paris<br />

short d’un montant équivalent. Le pourcentage<br />

d’«extension» typique est de 30%, d’où le terme<br />

de 130/30.<br />

Rendement absolu<br />

C’est un rendement positif, à la différence d’un<br />

rendement relatif (exprimé en valeur relative par<br />

rapport à un indice de référence). Les gérants de<br />

hedge funds recherchent des rendements absolus,<br />

tandis que les gérants conventionnels aspirent<br />

à des rendements relatifs pouvant être négatifs,<br />

mais néanmoins considérés comme satisfaisants<br />

s’ils sont supérieurs à ceux du marché.<br />

EBITDA<br />

Bénéfice avant intérêts, impôts, dépréciations et<br />

amortissements (earnings before interest, tax,<br />

depreciation and amortisation), l’EBITDA est<br />

supposé être la mesure la plus pure du rendement<br />

économique d’une entreprise, la moins distordue<br />

par les techniques comptables ou des facteurs<br />

spécifiques à la fiscalité locale.<br />

Long only<br />

Un portefeuille, un fonds ou une stratégie qui<br />

n’emprunte pas pour investir ou prendre un pari<br />

à la baisse (c.-à-d. en vendant des titres empruntés).<br />

Long-short<br />

Une stratégie d’investissement désormais banale<br />

consistant à combiner des positions en actions<br />

long et short au sein d’un même portefeuille.<br />

Les gérants de portefeuille affirment qu’un<br />

portefeuille long only limite la capacité du<br />

gérant à exploiter son talent. C’est certes vrai,<br />

mais la discipline, voire la mentalité nécessaire<br />

pour gérer avec succès des positions short, sont<br />

sensiblement différentes de celles requises pour<br />

des positions long. Par-dessus tout, une position<br />

short qui «part en vrille» accroît l’exposition au<br />

titre – précisément le contraire d’une position<br />

longue défaillante.<br />

Ratio de Sharpe<br />

Une mesure du rendement ajusté du risque<br />

pour les fonds à rendement absolu. Il est<br />

habituellement calculé en divisant le rendement<br />

annuel total d’un portefeuille diminué du<br />

taux d’intérêt sans risque sur la période<br />

correspondante par son écart type (une mesure<br />

de la volatilité). Le ratio qui en résulte peut être<br />

décrit comme le rendement par unité de risque.<br />

pictet report | décembre 2010<br />

investissements alternatifs 7<br />

introduction


PReMiÈRe PARTie:<br />

iNVeSTiSSeMeNT diSTReSSed<br />

Une période<br />

rêvée pour<br />

investir dans<br />

les sociétés en<br />

difficulté<br />

Dans le contexte actuel,<br />

la dette de sociétés de<br />

taille moyenne offre des<br />

opportunités sans précédent<br />

8<br />

MARc LASRY<br />

COFONDATEUR, PRÉSIDENT<br />

ET DIRECTEUR EXÉCUTIF<br />

AVENUE CAPITAL GROUP<br />

première partie:<br />

investissement distressed<br />

Quelles sont les opportunités qui se présentent<br />

actuellement? Est-il possible de générer<br />

des rendements supérieurs à la moyenne? En<br />

bref, la période actuelle est rêvée pour investir<br />

dans des sociétés en difficulté en raison de ce<br />

qui se passe aux Etats-Unis.<br />

L’année dernière, les opportunités<br />

d’investissement dans les grandes capitalisations<br />

décotées se sont évanouies.<br />

Désormais, il faut donc se tourner vers<br />

les entreprises moyennes. Explication:<br />

les banques ne prêtent pas parce qu’elles<br />

y sont peu incitées. Elles gagnent bien<br />

plus en investissant dans des bons du<br />

Trésor. Par conséquent, on trouve des<br />

structures de capital à 8-10 fois l’EBITDA,<br />

alors que les entreprises ne peuvent se<br />

refinancer qu’à 4-5 fois l’EBITDA. Les<br />

sociétés surendettées en mal de financement<br />

constituent une opportunité pour<br />

les investisseurs tournés vers les entreprises<br />

en difficulté (distressed).<br />

Par exemple, nous nous sommes<br />

intéressés à Six Flags, société améri-<br />

caine de parcs de loisirs lestée d’environ<br />

1 milliard de dollars d’emprunts<br />

bancaires, 400 millions d’obligations<br />

de premier rang et 800 millions de<br />

dette subordonnée. Financée à environ<br />

dix fois l’EBITDA, elle n’avait pas été en<br />

mesure de refinancer sa dette et était<br />

en faillite. Au cours de ce processus,<br />

nous avons pu prendre le contrôle de la<br />

société, essentiellement parce que nous<br />

avions racheté les emprunts bancaires<br />

autour de 60 à 65 cents pour un dollar<br />

et les obligations de premier rang entre<br />

40 et 50 cents. Il était clair que la dette<br />

bancaire serait payée et que les obligations<br />

deviendraient le nouveau capital.<br />

En effet, la législation américaine sur<br />

les faillites prévoit qu’à moins d’avoir<br />

été remboursé au pair, vous récupérez<br />

le capital de la société.<br />

Le tableau ci-contre illustre notre<br />

approche: une structure de capital<br />

simple d’un milliard de dollars avec<br />

un EBITDA de 100 millions de dollars<br />

par an – soit un multiple de dix fois.<br />

pictet report | décembre 2010<br />

investissements alternatifs


Pour acheter les 500 millions de dette<br />

bancaire à 60 cents par dollar, nous<br />

devons débourser 300 millions de<br />

dollars, c’est-à-dire un multiple de trois<br />

fois. Si nous achetons les 300 millions<br />

d’obligations à 40 cents, cela nous<br />

coûte 120 millions, mais nous devons<br />

rembourser les 500 millions de dette<br />

bancaire pour prendre le contrôle.<br />

Donc, la prise de contrôle de la société<br />

nous revient à 620 millions de dollars,<br />

ou 6,2 fois l’EBITDA. Si nous achetons<br />

la dette subordonnée à 20 cents pour<br />

un dollar, nous devons rembourser<br />

la dette plus les obligations, ce qui<br />

aboutit à un coût de 840 millions, soit<br />

un multiple de 8,4 fois.<br />

Ce que nous essayons de faire est<br />

de créer des sociétés à un multiple de<br />

cash-flow le plus bas possible par un<br />

rachat dans le haut de la structure du<br />

capital. Ensuite, s’il y a des problèmes,<br />

nous disposons d’une certaine marge<br />

de manœuvre: si l’EBITDA est divisé<br />

par deux parce que l’économie plonge,<br />

le multiple à la création n’aura jamais<br />

été que de six fois. En payant un prix<br />

d’entrée bas, vous pouvez générer des<br />

rendements assez élevés. En revanche,<br />

si cela se passe mal, l’inconvénient est<br />

que vous êtes remboursé au pair.<br />

Les sociétés<br />

surendettées en mal de<br />

financement constituent<br />

une opportunité<br />

Nous anticipons une croissance nulle<br />

ou de 1% par an de l’économie améri-<br />

caine sur les trois prochaines années. Au<br />

cours de cette période, 1000 milliards<br />

de dette arriveront à échéance, soit un<br />

montant suffisant pour nous permettre<br />

de continuer à en racheter à 60 cents<br />

pour un dollar. C’est pourquoi nous<br />

sommes convaincus que nous vivons<br />

une période phénoménale pour investir<br />

dans des sociétés en difficulté. Il en sera<br />

ainsi tant que les banques n’auront pas<br />

recommencé à prêter aux entreprises<br />

moyennes. Et même si l’EBITDA diminue<br />

de 50%, nous serons toujours en mesure<br />

exemPle d'une Structure de caPital<br />

Structure du capital Dette à rembourser<br />

(en millions USD)<br />

de créer une société à un multiple de six<br />

fois en rachetant de la dette.<br />

Nous trouvons la sécurité<br />

en entrant dans le haut<br />

de la structure du capital<br />

Cette opportunité unique s’explique<br />

par le faible prix de la dette décotée. Au<br />

lieu de payer 80 cents pour un dollar,<br />

vous pouvez ne payer que 60 cents<br />

parce qu’il y a moins de concurrence.<br />

Les banques d’investissement améri-<br />

caines ferment leurs opérations pour<br />

compte propre et les hedge funds se<br />

concentrent essentiellement sur les<br />

instruments très liquides. Les inve-<br />

stisseurs en quête de rendement pourraient<br />

obtenir 20% par an s’ils ache-<br />

taient des obligations avec un coupon<br />

de 10% à 50 cents pour un dollar. Mais<br />

ils ont peur que les obligations s’avèrent<br />

un mauvais investissement du fait de la<br />

croissance anémique aux Etats-Unis: ils<br />

préfèrent la sécurité au rendement.<br />

Nous trouvons la sécurité en<br />

entrant dans le haut de la structure du<br />

capital. Si la situation se dégrade, nous<br />

avons créé une société pouvant être<br />

refinancée à sa valeur d’acquisition,<br />

ce qui nous laisse le capital. Ensuite,<br />

si les choses tournent mal, nous en<br />

sortons au pair. Sur dix investissements<br />

effectués par an, nous prenons<br />

le contrôle de seulement une ou deux<br />

sociétés. Avec celles dont nous prenons<br />

le contrôle, nous réaliserons de très<br />

bons résultats si le marché des sociétés<br />

de taille moyenne se redresse dans les<br />

deux ans qui suivent. Mais même si<br />

l’économie ralentit, nous ne nous en<br />

sortirons pas trop mal.<br />

Prix en USD<br />

pour 1 USD<br />

Aux Etats-Unis et en Europe, il<br />

existe aussi des opportunités dans le<br />

domaine des actions, mais nous en<br />

voyons beaucoup plus du côté de la<br />

dette. L’intérêt est que vous achetez à<br />

des vendeurs qui ont besoin de vendre<br />

pour des raisons non économiques<br />

plutôt qu’à ceux qui vendent pour<br />

des raisons économiques. Les banques<br />

américaines vendent d’énormes mon-<br />

tants à des fins non économiques parce<br />

qu’elles ont besoin de capital. Elles<br />

ont déjà constitué des réserves sur la<br />

dette en difficulté à 50, 60 ou 70 cents<br />

pour un dollar et sont prêtes à vendre<br />

à ce prix pour éviter le risque d’avoir<br />

à augmenter leurs réserves si le titre<br />

baisse. Aucune banque ne veut admettre<br />

vis-à-vis du marché qu’elle n’a<br />

pas assez de réserves, même les plus<br />

grandes banques mondiales.<br />

Dans un environnement où tout le<br />

monde a emprunté à 8-10 fois et où tout<br />

ce que vous pouvez emprunter maintenant<br />

est à 4-5 fois, la disponibilité de<br />

la dette de sociétés de taille moyenne<br />

avec une énorme décote constitue une<br />

opportunité. Et elle est unique parce<br />

qu’elle s’accompagne d’une certaine<br />

sécurité: vous savez que votre prix<br />

d’entrée est couvert par les profits, que<br />

votre risque de perte est minimal et<br />

qu’il existe un potentiel de hausse si<br />

l’économie redémarre.<br />

Marc Lasry est président et directeur exécutif<br />

d’Avenue Capital Group, qu’il a contribué à fonder<br />

en 1995. Auparavant, il avait été le cofondateur<br />

d’Amroc Investments, LLC en 1989, société<br />

d’investissement en dette distressed organisée en<br />

association avec Robert Bass Group, Inc. Depuis<br />

février 2009, Marc Lasry assume la responsabilité<br />

de l’investissement au jour le jour pour les fonds<br />

américains d’Avenue Capital Group. Sa carrière<br />

est axée sur l’investissement distressed depuis<br />

plus de 24 ans.<br />

pictet report | décembre 2010<br />

investissements alternatifs 9<br />

première partie:<br />

investissement distressed<br />

Multiple<br />

EBITDA=USD 100 mios Dette bancaire 500 0.60 3.0x<br />

Obligations 300 0.40 6.2x<br />

Dette subordonnée 200 0.20 8.4x<br />

Capital total 1000<br />

Source: Avenue Capital Group


10<br />

Opportunités<br />

distressed<br />

Nager à<br />

contre-courant<br />

ou la clé du<br />

succès<br />

D’éminents investisseurs<br />

en actifs dépréciés débattent<br />

de l’environnement<br />

d’investissement actuel<br />

MOdÉRATeUR<br />

heNNY SeNdeR<br />

CORRESPONDANTE EN CHEF<br />

FINANCE INTERNATIONALE<br />

FINANCIAL TIMES<br />

dANieL J. ARbeSS<br />

ASSOCIÉ ET GÉRANT DE<br />

PORTEFEUILLE, PERELLA WEINBERG<br />

PARTNERS (XERION)<br />

dAVid MATLiN<br />

COFONDATEUR ET DIRECTEUR<br />

EXÉCUTIF, MATLIN PATTERSON<br />

GLOBAL ADVISERS<br />

MARc LASRY<br />

COFONDATEUR, PRÉSIDENT<br />

ET DIRECTEUR EXÉCUTIF<br />

AVENUE CAPITAL GROUP<br />

JeFFReY A.ALTMAN<br />

ASSOCIÉ GÉRANT ET<br />

GÉRANT DE PORTEFEUILLE<br />

OWL CREEk ASSET MANAGEMENT<br />

première partie:<br />

investissement distressed<br />

Après le rallye amorcé en 2009 par les<br />

marchés du crédit, les prix des actifs ont<br />

rebondi, rétablissant l’accès au financement<br />

d’urgence pour les entreprises en difficulté.<br />

Durant cette partie de la conférence, le panel<br />

s’est intéressé à la dynamique du cycle de<br />

crédit en cours, aux défis du refinancement et<br />

aux opportunités d’investissement actuelles.<br />

Henny Sender a lancé le débat en<br />

demandant à Daniel Arbess ce qui<br />

l’avait conduit à écrire que les inve-<br />

stisseurs s’interrogeaient désormais sur<br />

la pérennité de la reprise des marchés.<br />

«Les marchés financiers ont été relancés<br />

par le biais de mesures exceptionnelles<br />

coordonnées de la part des gouvernements,<br />

dans un effort visant à éviter une<br />

récession mondiale aux effets poten-<br />

tiellement catastrophiques», a expliqué<br />

Daniel Arbess.<br />

«Ces mesures se sont révélées très<br />

efficaces, mais aux alentours d’avril<br />

2010, le consensus s’est progressivement<br />

rassemblé autour de l’idée que<br />

le rallye n’était soutenu que par les<br />

liquidités injectées par les Etats, et que<br />

ceux-ci ne pourraient indéfiniment<br />

recourir à la planche à billets pour<br />

stimuler les marchés financiers.»<br />

«Les problèmes causés par la<br />

crise grecque en Europe ont créé un<br />

nouveau cadre d’investissement, dans<br />

lequel nous allons opérer pendant<br />

plusieurs années. Les consommateurs<br />

et les gouvernements occidentaux<br />

ont atteint les limites de leur<br />

capacité d’endettement et devront<br />

réduire leurs bilans. Parallèlement,<br />

les excédents de capacités industrielles<br />

et de main-d’œuvre en Occident<br />

devront absolument être résorbés par<br />

l’économie mondiale avant que nous<br />

puissions retrouver une trajectoire<br />

de croissance.»<br />

Les quatre membres du panel sont<br />

tombés d’accord pour estimer que<br />

le rallye arrivait à son terme, malgré<br />

des avis divergents sur la rapidité du<br />

revirement. Interrogé sur les facteurs<br />

susceptibles d’entraîner un repli de<br />

la finance high yield, Jeffrey Altman<br />

a répondu que les problèmes de dette<br />

souveraine tels que la crise grecque<br />

pourraient susciter des craintes de<br />

difficultés du même type, plus impor-<br />

pictet report | décembre 2010<br />

investissements alternatifs


tantes encore au sein des économies de<br />

premier plan. «Si la Grèce finit par se<br />

restructurer, comme nous le pensons,<br />

tout le monde se demandera qui sera le<br />

prochain sur la liste.»<br />

L’une des questions évidentes sera<br />

l’avenir du triple A de la dette des Etats-<br />

Unis, a-t-il ajouté, dont la dégradation<br />

aurait un impact sur le refinancement<br />

de bons du Trésor représentant un<br />

montant de 5000 milliards de dollars,<br />

arrivant à échéance au cours des<br />

cinq prochaines années. Selon toute<br />

vraisemblance, si les taux d’intérêt<br />

devaient être relevés pour vendre les<br />

nouveaux emprunts, les rendements de<br />

la dette high yield devraient eux aussi<br />

s’inscrire en hausse, de manière à maintenir<br />

le différentiel par rapport aux<br />

titres du Trésor. L’augmentation des<br />

coûts du crédit et la diminution de la<br />

liquidité de la dette high yield consti-<br />

tueraient un «catalyseur d’un environnement<br />

distressed plus classique».<br />

David Matlin a déclaré<br />

que sa société se réservait<br />

pour le moment où<br />

les entreprises pourraient<br />

se refinancer<br />

A ce stade, toutefois, le panel estimait<br />

que les opportunités d’investissement<br />

classique dans des société en détresse<br />

étaient peu nombreuses. David<br />

Matlin a déclaré que sa société limi-<br />

terait ses engagements jusqu’à ce que<br />

les entreprises puissent se refinancer.<br />

«Nous nous efforçons de construire<br />

notre portefeuille avec des entreprises<br />

que nous souhaitons posséder – des<br />

constructeurs et des développeurs –, et<br />

achetons des biens immobiliers isolés<br />

qui n’attirent pas les investisseurs ou<br />

les banques qui voient grand. Ne sa-<br />

chant pas si la construction de logements<br />

reprendra dans deux ou dans<br />

huit ans, nous avons profité du contexte<br />

de taux d’intérêt bas pour refinancer<br />

des dettes et prévoir une piste d’envol<br />

aussi longue que possible.»<br />

Les défis du<br />

refinancement<br />

Les opportunités distressed classiques<br />

apparaissent lorsqu’une société surendettée<br />

est incapable de refinancer une<br />

dette arrivant à échéance. L’investisseur<br />

en actifs dépréciés peut acheter une<br />

partie de la dette avec une décote par<br />

rapport à sa valeur intrinsèque et la<br />

convertir en actions pour prendre le<br />

contrôle de l’entreprise concernée.<br />

Daniel Arbess a expliqué qu’avec<br />

l’assouplissement des conditions de<br />

crédit, le flot attendu de sociétés endettées<br />

connaissant un passage à vide ne<br />

s’était pas concrétisé; les investisseurs<br />

en quête de rendement ont donc acheté<br />

des emprunts d’entreprise.<br />

Selon lui, un autre type<br />

d’opportunité distressed en matière<br />

de crédit existe toutefois: c’est ce qu’il<br />

appelle les «recapitalisations préventives».<br />

Il s’agit d’acheter des obligations<br />

sous pression en anticipation<br />

d’une transaction appelée à améliorer<br />

la structure du capital et à prolonger<br />

la piste d’envol, évitant la menace<br />

d’insolvabilité. «L’an dernier, nous<br />

avons acheté des obligations à 40-50<br />

cents pour 1 dollar dans une société qui<br />

bénéficiait d’un prêt à terme très peu<br />

Credit default swap (CDS/swap sur défaillance de crédit)<br />

Un CDS est utilisé pour vendre/acheter une<br />

protection contre le défaut de paiement d’une<br />

obligation donnée, ou pour tirer parti d’un<br />

creusement/resserrement du différentiel de<br />

crédit (lorsque l’obligation sous-jacente n’est<br />

pas détenue). La faillite d’AIG à la fin de l’année<br />

2008 a été la conséquence directe de la vente<br />

d’énormes volumes de CDS émis par une filiale<br />

du groupe à Londres.<br />

Allocation d’actifs<br />

Théorie et pratique relatives à la diversification<br />

des investissements d’un portefeuille entre<br />

différentes classes d’actifs, à savoir actions,<br />

obligations, liquidités ou placements alternatifs.<br />

Ecart de rendement (spread)<br />

Généralement, la différence, à une échéance<br />

donnée, entre le rendement des emprunts<br />

d’Etat et celui d’un instrument de crédit dans<br />

la même devise (par exemple, un emprunt<br />

d’entreprise en euros noté BB, certaines dettes<br />

des pays émergents, etc.). Un différentiel élevé<br />

est appliqué aux sociétés plus risquées, tandis<br />

qu’un écart plus faible ou resserré est attribué<br />

aux entreprises de qualité supérieure.<br />

UCITS<br />

«Organismes de placement collectif en valeurs<br />

mobilières» ou OPCVM (en anglais : Undertakings<br />

for Collective Investments in Transferable<br />

Securities ou UCITS) est le terme communément<br />

employé pour décrire les fonds de placement<br />

répondant aux critères régissant la distribution<br />

de véhicules de ce type au sein de l’UE. En 2007,<br />

une directive de l’UE intitulée «UCITS III» a été<br />

émise, autorisant les gérants à développer pour<br />

les investisseurs individuels des fonds régulés<br />

(appelés de manière informelles les «Newcits»)<br />

employant une gamme limitée de stratégies<br />

de hedge funds: fonds de fonds, dérivés, ventes<br />

à découvert, effet de levier et utilisation de<br />

produits alternatifs.<br />

pictet report | décembre 2010<br />

investissements alternatifs 11<br />

première partie:<br />

investissement distressed


flexible arrivant à échéance, d’où un<br />

excédent de titres très important sur<br />

le marché, les engagements contractuels<br />

étant sur le point d’être violés. La<br />

société a pu refinancer le prêt à terme<br />

via l’émission d’un emprunt senior<br />

garanti beaucoup plus souple, et nous<br />

avons vendu nos titres après qu’ils<br />

aient gagné 23 points.»<br />

Pour Marc Lasry, le seul fait que le<br />

taux de défaut au niveau des activités<br />

de leveraged finance soit très faible ne<br />

signifie pas qu’il n’y a rien à faire. «Les<br />

possibilités ne manquent pas, car tout<br />

est affaire de restructuration. Tout le<br />

monde essaie de prolonger des crédits,<br />

et pour ce faire, les firmes de private<br />

equity ont besoin du consentement des<br />

détenteurs d’obligations.<br />

«Le seul fait que le taux<br />

de défaut au niveau des<br />

activités de leveraged finance<br />

soit très faible ne signifie<br />

pas qu’il n’y a rien à faire»<br />

C’est pour cela que les investisseurs<br />

peuvent acheter de la dette à 20, 30 ou 40<br />

cents pour 1 dollar et l’échanger ensuite à<br />

12<br />

première partie:<br />

investissement distressed<br />

70 cents. Pour les propriétaires, la priorité<br />

consiste à ne pas de perdre leurs capitaux<br />

propres, quitte à ne pas gagner beaucoup<br />

d’argent. Au cours des prochaines<br />

années, les restructurations seront très<br />

nombreuses, et nous serons impliqués.»<br />

Où se situent aujourd’hui<br />

les opportunités distressed?<br />

Pour Daniel Arbess, la sphère classique<br />

des restructurations recèle encore de<br />

véritables opportunités – dans des<br />

secteurs où les gens ont peur. Il cite<br />

l’exemple d’AbitibiBowater, la plus<br />

grande société du secteur du papier<br />

journal aux Etats-Unis, dans lequel lui<br />

et Marc Lasry ont investi.<br />

«Tout le monde déteste le papier<br />

journal, parce que tout le monde pense<br />

que d’ici à 50 ans, les journaux auront<br />

disparu. Vous pouvez acheter des obligations<br />

d’AbitibiBowater, offertes à des<br />

cours très bas récemment, pour 3,6x<br />

l’EBITDA sur les 12 derniers mois. Sur la<br />

base des hausses de prix que le groupe<br />

a pu réaliser récemment, vous achetez<br />

à 2,7x, avec un rendement de cash-flow<br />

libre de 31%. Très intéressant dans le<br />

domaine du papier journal.<br />

«Nombre de bonnes<br />

sociétés américaines ont<br />

disparu du fait des décisions<br />

prises à Washington»<br />

«Si vous achetez la société, en plus des<br />

activités de papier journal, vous faites<br />

gratuitement l’acquisition non négli-<br />

geable d’actifs de production<br />

d’électricité, d’activités de papier<br />

couché et de pâte à papier, ainsi que<br />

d’actifs forestiers. Si les investisseurs<br />

ne se ruent pas sur AbitibiBowater,<br />

c’est parce qu’ils pensent que le papier<br />

journal n’est pas un domaine porteur.»<br />

Jeffrey Altman a proposé un exemple<br />

européen de credit default swaps<br />

(CDS) sur des dettes émises par des<br />

Etats périphériques de la zone euro<br />

tels que la Belgique. «Nous avons<br />

acheté des CDS belges à des différentiels<br />

compris entre 90 et 100 points<br />

de base (pb), alors que les spreads sur<br />

la dette grecque étaient de 700 pb. Si<br />

la Grèce se restructure, tous les pays<br />

seront observés de manière à déceler<br />

qui sera le prochain sur la liste – le<br />

risque à ce prix-là est très bon marché.<br />

Aujourd’hui, ce titre se traite à 140-145<br />

points de base.»<br />

Selon David Matlin, la santé est<br />

un secteur qui effraie les investisseurs<br />

après la réforme du système de santé<br />

mise en place par le président Obama.<br />

«Nombre de bonnes sociétés améri-<br />

caines ont disparu du fait des décisions<br />

prises à Washington et de la volatilité<br />

créée par le train de réformes. Mais<br />

la population des Etats-Unis est une<br />

population vieillissante qui va requérir<br />

des soins.»<br />

Par ailleurs, si les constructeurs<br />

de logements ont été très affectés par<br />

la crise financière, d’autres types de<br />

promoteurs immobiliers ont également<br />

été touchés, a-t-il ajouté. «Les gens<br />

n’ont pas su saisir les opportunités dans<br />

le secteur foncier et, dans une moindre<br />

mesure, dans l’hôtellerie.»<br />

pictet report | décembre 2010<br />

investissements alternatifs


Comment investir<br />

dans des actifs dépréciés?<br />

Lorsqu’il leur a été demandé ce qui<br />

faisait un bon investisseur en actifs<br />

dépréciés, les membres du panel ont<br />

répondu de concert que le succès rési-<br />

dait dans une analyse précise des opportunités<br />

et dans la volonté de remettre en<br />

question la sagesse des marchés.<br />

Daniel Arbess a souligné<br />

que la nécessité de faire preuve<br />

d’indépendance et de prendre le<br />

contre-pied – investir dans le papier<br />

journal ou le secteur foncier quand<br />

les investisseurs se détournent de tels<br />

secteurs par exemple – avait souvent<br />

été évoquée au cours des discussions.<br />

«L’opportunité d’investissement<br />

idéale est un actif qui offre une valeur<br />

durable et dont personne ne veut. C’est<br />

l’essence même de l’investissement en<br />

actifs dépréciés.»<br />

«Lorsque nous<br />

entendons le terme «non<br />

investissable», nous savons<br />

que 98% de la communauté<br />

des investisseurs se<br />

détournent du secteur<br />

ou de l’actif concerné»<br />

Jeffrey Altman a confié qu’il se plaisait<br />

à entendre les investisseurs institutionnels<br />

qualifier un secteur de «non<br />

investissable» (à l’instar de la santé).<br />

«Lorsque nous entendons ce mot, nous<br />

savons que 98% de la communauté des<br />

investisseurs se détournent du secteur<br />

ou de l’actif concerné, d’où une baisse<br />

des valorisations dont nous pouvons<br />

tirer parti.»<br />

«Ce sont d’ailleurs les mêmes<br />

investisseurs qui nous rachèteront le<br />

titre – pour le double du prix auquel<br />

il se traite aujourd’hui – lorsqu’ils<br />

auront décidé qu’il est à nouveau<br />

«investissable», autrement dit lorsque<br />

l’incertitude aura été levée ou qu’ils<br />

auront fini par le comprendre.»<br />

Pour Marc Lasry, les opportunités<br />

distressed sont créées par la réticence<br />

des investisseurs à acheter des titres<br />

avec une décote. Ils préfèrent acheter au<br />

pair. «La nature humaine est ainsi faite.<br />

Si j’achète un titre au pair, c’est bien. Si<br />

je l’achète à 50 cents pour 1 dollar, c’est<br />

le signe qu’il y a un problème.»<br />

Le marché high yield américain<br />

valait 1000 milliards de dollars, a-t-il<br />

précisé, parce que les investisseurs<br />

recherchaient un rendement de 9%,<br />

alors qu’ils auraient pu engranger un<br />

rendement de 30% en achetant de la<br />

dette avec une décote. «Nous vendons<br />

constamment à des investisseurs high<br />

yield, qui se satisfont d’un rendement<br />

de 9 ou 10%, peu importe le nombre de<br />

fois où ils ont perdu de l’argent. C’est<br />

vraiment dur d’être le seul à acheter de<br />

la dette distressed. Vraiment. Etre celui<br />

qui achète alors que tout le monde vous<br />

dit que ce que vous achetez n’a pas de<br />

valeur peut être très difficile.»<br />

Jeffrey Altman partage cet avis.<br />

«C’est ce qui distingue fondamentalement<br />

le secteur des hedge funds des<br />

investisseurs institutionnels long only.<br />

Nous comprenons l’activité en profondeur,<br />

alors que les investisseurs institutionnels<br />

laissent tomber en disant qu’ils<br />

ne comprennent pas. Et lorsqu’ils ne<br />

comprennent pas, ils vendent.»<br />

WaMu: une opportunité<br />

d’investissement de type distressed<br />

Jeffrey Altman relate à titre d’exemple<br />

l’investissement à contre-courant d’Owl Creek<br />

dans Washington Mutual à la fin de l’année<br />

2008, au plus fort de la crise bancaire.<br />

WaMu était une holding bancaire dont les<br />

opérations bancaires avaient été fortement<br />

touchées par une vague massive de retraits de<br />

la part des déposants, fermées par les autorités<br />

américaines (Federal Deposit Insurance<br />

Corporation) et immédiatement vendues à<br />

JP Morgan Chase pour 1,9 milliard de dollars.<br />

«A ce moment, la holding avait pour plus de<br />

7 milliards de dollars de dettes et nous n’avions<br />

reçu qu’1,9 milliard de dollars; l’idée était<br />

donc que la société de holding devait valoir<br />

10 milliards de dollars.»<br />

«Nous avons passé la nuit au bureau à étudier les<br />

chiffres de la société sur son propre site Internet.<br />

Nous avons trouvé des documents portant sur<br />

une succursale qui montraient que la société<br />

possédait potentiellement beaucoup d’actifs,<br />

y compris plus de 4,5 milliards de dollars de<br />

liquidités provenant du sponsor de buyout<br />

précédent qui n’avaient jamais été concrètement<br />

investis dans la banque. Nous avons donc pu<br />

acheter des titres au prix de quelques cents pour<br />

1 dollar, conscients qu’il y avait des liquidités<br />

derrière. Par la suite, nous avons réalisé que des<br />

remboursements d’impôts devaient également<br />

revenir au sein de la holding.»<br />

«Aujourd’hui, nous pensons qu’au final les<br />

actifs de la société de holding se situent aux<br />

alentours de 6-7 milliards de dollars.»<br />

pictet report | décembre 2010<br />

investissements alternatifs 13<br />

première partie:<br />

investissement distressed


14<br />

pictet report | décembre 2010<br />

investissements alternatifs


pictet report | décembre 2010<br />

investissements alternatifs 15


16<br />

deuxième partie:<br />

idées de placement<br />

pictet report | décembre 2010<br />

investissements alternatifs


DEUXIÈME PARTIE:<br />

IDÉES DE PLACEMENT<br />

Le nouveau<br />

rapport de<br />

force entre<br />

marchés<br />

développés et<br />

émergents<br />

Cinq investisseurs de<br />

premier plan présentent des<br />

opportunités de placement<br />

permettant d’exploiter les<br />

nouveaux rapports de force<br />

de l’économie mondiale<br />

GeRALdiNe SUNdSTROM<br />

ASSOCIEE & STRATEGY MANAGER<br />

BREVAN HOWARD EMERGING<br />

MARkETS STRATEGY, BREVAN HOWARD<br />

ASSET MANAGEMENT<br />

FeRNANdO bORGeS<br />

DIRECTEUR DE LA RÉGION<br />

AMERIQUE DU SUD BUYOUT GROUP<br />

THE CARLYLE GROUP<br />

AdAM J.LeViNSON<br />

CO-CHIEF INVESTMENT OFFICER<br />

FORTRESS MACRO FUND & DRAWBRIDGE<br />

GLOBAL MACRO FUND<br />

FORTRESS INVESTMENT GROUP<br />

NichOLAS bLOY<br />

COFONDATEUR & ASSOCIÉ<br />

NAVIS CAPITAL PARTNERS<br />

GUiLLAUMe FONKeNeLL<br />

FONDATEUR & CHIEF INVESTMENT<br />

OFFICER, PHARO MANAGEMENT<br />

Les perspectives des marchés émergents<br />

Les risques liés aux investissements sur les<br />

marchés développés<br />

GeRALdiNe SUNdSTROM<br />

ASSOCIÉE & STRATEGY MANAGER<br />

BREVAN HOWARD EMERGING MARkETS STRATEGY<br />

BREVAN HOWARD ASSET MANAGEMENT<br />

Brevan Howard estime que les marchés émergents<br />

offrent les perspectives les plus attrayantes<br />

des dix à vingt ans à venir, non en raison de leur<br />

croissance mirobolante, mais d’un avenir qui<br />

s’annonce plus rose que celui des marchés déve-<br />

loppés. Ces derniers pourraient d’ailleurs être<br />

qualifiés de «marchés plongeants».<br />

Les économies les plus avancées sont<br />

en effet confrontées à une dure réa-<br />

lité: les bilans des entreprises sont<br />

déjà surchargés, avec des passifs éventuels<br />

liés à la retraite et à la santé,<br />

alors que la génération du baby boom<br />

s’apprête à quitter le monde du travail.<br />

La croissance sera réfrénée par une<br />

règlementation excessive, une hausse<br />

des impôts destinée à honorer ces<br />

futurs engagements et des mesures<br />

d’intervention gouvernementale, ce<br />

qui exigera un ajustement budgétaire<br />

drastique susceptible d’engendrer des<br />

politiques non orthodoxes.<br />

Selon le FMI, le taux d’endettement<br />

des pays développés (en pourcen-<br />

tage du produit intérieur brut) risque<br />

PayS du g20 – ratio dette Publique/ Pib en %<br />

de flamber d’ici 2014. A l’inverse, les<br />

marchés émergents présentent une<br />

évolution plutôt stable et leur dette<br />

devrait se résorber très progressivement.<br />

Si l’on ajuste la dette nette par<br />

les réserves de change, les niveaux de<br />

dette nette sur les marchés émergents<br />

du G20 représentent désormais moins<br />

d’un quart de ceux des économies<br />

avancées du G20.<br />

L’endettement croissant des pays<br />

développés d’ici 2014 n’est qu’un<br />

début. Les ratios de dépendance démographique<br />

devraient en effet grimper<br />

à des niveaux qui paralyseront la<br />

croissance de ces marchés: la proportion<br />

des habitants qui ne sont pas ou<br />

plus en âge de travailler par rapport<br />

à celle des 15-64 ans devrait passer de<br />

moins de 50% en 2010 à plus de 70%<br />

en 2050. Dans les pays émergents, ce<br />

ratio, qui était également inférieur à<br />

50%, augmentera aussi mais dans une<br />

mesure bien moindre, puisqu’il devrait<br />

rester juste en deçà de 55%.<br />

Si l’on additionne le coût du<br />

pictet report | décembre 2010<br />

investissements alternatifs 17<br />

deuxième partie:<br />

idées de placement


vieillissement de la population et<br />

des déficits structurels futurs aux<br />

niveaux d’endettement actuels, la<br />

dette nette de nombreux pays déve-<br />

loppés excèdera leur PIB de dix fois,<br />

voire davantage pour certaines économies<br />

européennes confrontées aux<br />

passifs éventuels particulièrement élevés<br />

en ce qui concerne les retraites. Pour<br />

faire face à cette explosion de la dette,<br />

les gouvernements des pays développés<br />

devront amputer les acquis sociaux, ce<br />

qui entraînera une baisse de la consommation,<br />

une hausse de l’épargne et un<br />

ralentissement de la croissance. Les<br />

droits à la propriété seront confisqués,<br />

non pas de la manière brutale pratiquée<br />

dans certains pays émergents, mais à<br />

travers la régulation et la taxation.<br />

Cette politique d’austérité durera<br />

au moins deux décennies, le temps<br />

que les baby boomers soient partis. En<br />

conséquence, les placements risqués<br />

18<br />

deuxième partie:<br />

idées de placement<br />

se situent désormais dans les pays<br />

développés et non sur les marchés<br />

émergents. L’investissement dans les<br />

marchés émergents a souvent ressemblé<br />

à un tour de montagnes russes,<br />

avec des ascensions fulgurantes<br />

et des descentes en piqué. Mais le<br />

FMI commence à jouer son rôle de<br />

gendarme et la volatilité est en recul<br />

sur ces marchés.<br />

«Les placements risqués<br />

se situent dans les pays<br />

développés, et non sur les<br />

marchés émergents»<br />

Ce sont les catégories d’actifs des<br />

marchés émergents qui génèrent les<br />

rendements les plus élevés. A l’heure<br />

actuelle, ma stratégie consiste à investir<br />

dans la dette souveraine et d’entreprise<br />

des pays émergents par le biais<br />

d’instruments locaux ou libellés dans<br />

une devise forte. Je suis en revanche<br />

réservée face aux actions des marchés<br />

émergents, car elles sont souvent<br />

émises par des entreprises vendant des<br />

produits qui se banalisent à des économies<br />

développées dont la croissance<br />

médiocre tire ces titres vers le bas.<br />

Les marchés développés seront<br />

confrontés aux problèmes les plus<br />

importants à l’avenir, et leurs taux<br />

de croissance économique ne renou-<br />

eront pas avec les niveaux antérieurs.<br />

Je n’aime pas le terme de découplage,<br />

car l’économie mondiale s’enfonce et<br />

entraîne tout le monde avec elle. Les<br />

marchés émergents sont en meilleure<br />

posture car le crédit et l’investissement<br />

jouent toujours un rôle essentiel dans ces<br />

pays, qui présentent encore un potentiel<br />

de croissance sur le plan domestique.<br />

pictet report | décembre 2010<br />

investissements alternatifs


L’opportunité brésilienne<br />

La plus vaste économie d’Amérique latine connaît<br />

une expansion rapide de sa classe moyenne, avec de<br />

l’argent à dépenser pour les biens de consommation<br />

et les services à la personne<br />

FeRNANdO bORGeS<br />

DIRECTEUR DE LA RÉGION AMERIQUE DU SUD BUYOUT GROUP<br />

THE CARLYLE GROUP<br />

Le Brésil est la huitième économie mondiale,<br />

avec un produit intérieur brut de USD 1600<br />

milliards en 2009 et une vaste population,<br />

essentiellement jeune et urbaine. Plus des<br />

deux tiers des 192 millions d’habitants ont<br />

moins de 40 ans et 85% vivent en ville.<br />

Le pays est l’un des plus gros marchés<br />

de consommation au monde: il occupe<br />

par exemple la troisième place dans<br />

le secteur des cosmétiques, ou encore<br />

dans celui des téléphones mobiles.<br />

Mais il reste encore sous-pénétré dans<br />

d’autres domaines tels que la santé,<br />

l’enseignement post-secondaire et<br />

les voyages. A propos de cette der-<br />

nière catégorie, seuls 12% des Brésiliens<br />

qui voyagent optent pour des voyages<br />

organisés, contre 60% au Royaume-Uni<br />

et 65% en Allemagne.<br />

Le marché de masse affiche<br />

une croissance rapide car les revenus<br />

augmentent et de plus en plus<br />

d’habitants accèdent à la classe<br />

moyenne. Au cours des cinq dernières<br />

années, 35 millions de personnes ont<br />

ainsi rejoint cette classe avec l’achat de<br />

leur première voiture, de leur premier<br />

voyage et de leur première assurance<br />

santé. Leur nombre devrait encore<br />

grossir de 30 à 40 millions dans les cinq<br />

prochaines années.<br />

La croissance brésilienne tient<br />

également au fait que la population<br />

a davantage accès au crédit, ce qui<br />

n’empêche pas la dette des ménages et<br />

venteS netteS de cvc – tour-oPérateur & bateaux de croiSiÈre incluS<br />

(en mioS de réalS)<br />

Ventes nettes EBITDA<br />

2,500<br />

2,250<br />

2,000<br />

1,750<br />

1,500<br />

1,250<br />

1,000<br />

750<br />

500<br />

250<br />

0<br />

Ventes nettes<br />

EBITDA<br />

2000 2001 2002 2003 2004 2005 2006 2007 2008 2009<br />

4.3 4.1 4.4 6.2 5.4 4.0 4.9 5.7 5.7 5.4<br />

Marge EBITDA %<br />

Source: The Carlyle Group 09.2010<br />

des entreprises d’être inférieure à celle<br />

des autres marchés émergents, avec 62%<br />

du PIB. Ces dernières années, le Brésil a<br />

créé plus de deux millions d’emplois<br />

par an et en est déjà à 2,2 millions pour<br />

2010. Ces nouveaux travailleurs ont de<br />

l’argent à dépenser, ce qui devrait se<br />

refléter dans la croissance soutenue de<br />

certains secteurs de la consommation,<br />

qui représentera plusieurs fois celle du<br />

PIB entre aujourd’hui et 2014. Nous<br />

tablons notamment sur une hausse de<br />

45% pour les dépenses de cosmétiques<br />

et produits de soin entre 2008 et 2014,<br />

de 77% pour le nombre de voyageurs<br />

en avion, de 68% pour le marché de<br />

l’habillement et de la chaussure et de<br />

79% pour les médicaments.<br />

Le groupe Carlyle a consacré USD<br />

1,4 milliard à trois acquisitions au Brésil<br />

l’année dernière, dont CVC, qui est la<br />

première agence de voyage en Amérique<br />

latine et la dixième au monde.<br />

«Ces dernières années, le<br />

Brésil a créé plus de deux<br />

millions d’emplois par an»<br />

CVC constitue un bon exemple de la<br />

stratégie adoptée: le tour-opérateur<br />

possède 65% des parts du marché bré-<br />

silien du voyage et sert 2,5 millions de<br />

clients à travers 500 agences exclusives,<br />

8000 agences de voyage indépendantes<br />

et le réseau Internet. CVC vend des<br />

voyages organisés à bas prix aux Bré-<br />

siliens de la classe moyenne désireux de<br />

voyager dans leur pays. Cette entreprise<br />

low-cost ne possède pas de compagnies<br />

aériennes, de bateaux ou d’hôtels. Elle<br />

ne fait que les gérer. Propriétaire d’une<br />

ligne de croisière avec 33% de parts de<br />

marché, elle a affrété quatre bateaux de<br />

croisière transportant 1 mio de passa-<br />

gers au large des côtes brésiliennes<br />

durant la saison 2009-10.<br />

Très rentable, la société connaît<br />

aussi une croissance fulgurante de<br />

25% par an depuis 10 ans. Ce succès<br />

s’explique par le fait que CVC attire<br />

ceux qui voyagent pour la première<br />

fois, puisqu’ils représentent 35%<br />

pictet report | décembre 2010<br />

investissements alternatifs 19<br />

deuxième partie:<br />

idées de placement<br />

160<br />

140<br />

120<br />

100<br />

80<br />

60<br />

40<br />

20<br />

0


des passagers qu’elle transporte.<br />

L’entreprise peut offrir des voyages<br />

à très bas prix car elle est la première<br />

cliente des compagnies aériennes et<br />

des établissements hôteliers du Brésil:<br />

ce qui était un luxe il y a encore cinq<br />

ans devient ainsi accessible à la classe<br />

moyenne.<br />

«Comme le marché<br />

brésilien du leveraged<br />

buy-out est sous-pénétré,<br />

il est toujours possible<br />

d’acheter à des prix<br />

raisonnables»<br />

L’entreprise a enregistré un EBITDA<br />

d’environ USD 80 millions l’année<br />

dernière et espère atteindre USD 150<br />

millions cette année. Et comme le<br />

marché brésilien du leveraged buy-out<br />

est sous-pénétré, il est toujours possible<br />

d’acheter à des prix raisonnables<br />

puisque nous avons payé quatre fois<br />

l’EBITDA 2010. C’est là un bon exemple<br />

des opportunités que nous avons identifiées<br />

au Brésil pour l’achat d’entreprises<br />

familiales dynamiques avec une part de<br />

marché conséquente et un potentiel de<br />

création de valeur significatif.<br />

20<br />

deuxième partie:<br />

idées de placement<br />

L’économie américaine<br />

Le consommateur américain perd son leadership<br />

AdAM J.LeViNSON<br />

CO-CHIEF INVESTMENT OFFICER<br />

FORTRESS MACRO FUND & DRAWBRIDGE GLOBAL MACRO FUND<br />

FORTRESS INVESTMENT GROUP<br />

Le fonds Fortress Macro se concentre essentiellement<br />

sur les marchés émergents, mais<br />

la stratégie dont je souhaite parler ce matin<br />

concerne les Etats-Unis et reflète notre<br />

opinion sur le redressement économique<br />

de l’année 2009. Nous avons tout d’abord<br />

cru à une véritable reprise, mais estimons<br />

qu’il s’agissait en réalité d’un réappro-<br />

visionnement classique des stocks sans le<br />

cycle d’investissement du secteur privé, caractérisé<br />

par un marché du travail anémique.<br />

Néanmoins, en dépit de la contraction<br />

des revenus, la consommation US a<br />

enregistré une excellente performance<br />

l’année dernière grâce aux chèques<br />

de l’Etat. Le marché boursier intè-<br />

gre toutefois de nouvelles hausses<br />

des dépenses de consommation, avec<br />

des pics au niveau des revenus et des<br />

marges au quatrième trimestre de<br />

l’année 2011.<br />

Ce scénario est-il plausible? Le<br />

graphique montre que les allocations<br />

versées aux ménages par le<br />

gouvernement excèdent aujourd’hui<br />

les impôts payés par ces mêmes<br />

ménages, une situation qui ne saurait<br />

perdurer. Les élections de mi-mandat<br />

de novembre seront probablement<br />

suivies d’une consolidation<br />

budgétaire qui soulèvera des questions<br />

sur l’ampleur et la durée de ces versements.<br />

Des hausses d’impôt pèseraient<br />

pictet report | décembre 2010<br />

investissements alternatifs


sur les dépenses futures et risqueraient<br />

de faire grimper le taux d’épargne.<br />

Il ne faut pas non plus compter sur<br />

l’extraction hypothécaire, qui a<br />

soutenu les dépenses de consommation<br />

au cours de la dernière décennie,<br />

car il n’y a plus de liquidités à extraire<br />

du patrimoine immobilier garanti par<br />

des prêts hypothécaires.<br />

Pour 2011, le marché boursier intègre<br />

pourtant des taux de croissance<br />

des ratios chiffres d’affaires/cash-flows<br />

situés à des plus hauts historiques,<br />

et supérieurs à ceux du milieu de la<br />

dernière décennie. Les marges mé-<br />

dianes sur les résultats avant intérêts et<br />

impôts devraient également atteindre<br />

un pic significatif l’année prochaine, là<br />

encore supérieurs à ceux du milieu de<br />

la dernière décennie. Mais ce scénario<br />

semble hautement improbable.<br />

Comme l’ont montré les cycles postrécession<br />

antérieurs, c’est en effet le<br />

cas durant la période des huit premiers<br />

mois où les secteurs de la consommation<br />

enregistrent une surperformance,<br />

mais le terrain gagné est généralement<br />

reperdu l’année suivante.<br />

La stratégie consiste donc à vendre<br />

à découvert les actions d’entreprises<br />

de détail traditionnelles américaines<br />

contre l’indice S&P 500. Parmi ces<br />

entreprises, nous nous sommes défaits<br />

d’une poignée de détaillants qui se<br />

distinguaient soit par une croissance<br />

très dynamique de leurs ventes à<br />

l’étranger, soit par des réussites dans<br />

le domaine des F&A. Nous avons agi<br />

14<br />

12<br />

10<br />

8<br />

6<br />

4<br />

2<br />

0<br />

de même pour des détaillants Internet<br />

qui présentaient des modèles d’activité<br />

remarquables et une croissance réelle,<br />

prenant des parts de marché en phase<br />

de baisse et surperformant le bêta du<br />

marché en phase de hausse.<br />

«La stratégie consiste à<br />

vendre à découvert des<br />

actions d’entreprises de<br />

détail traditionnelles US<br />

contre l’indice S&P 500»<br />

Mentionnons une anecdote très révélatrice<br />

du dernier communiqué de Wal-<br />

Mart, qui représente 13% des ventes de<br />

détail aux Etats-Unis. Le groupe a fait<br />

part d’une augmentation de son activité<br />

après minuit le premier jour de chaque<br />

mois, ce qui coïncide avec le moment<br />

où les chèques du gouvernement US<br />

sont virés sur le compte des ménages.<br />

Cela montre à quel point la situation<br />

des Américains est difficile, puisque<br />

leur budget est tellement serré qu’ils se<br />

précipitent au magasin dès qu’ils ont<br />

reçu leur virement.<br />

imPÔt deS ménageS uS et allocationS gouvernementaleS 1955–2010<br />

(% du Pib réel)<br />

En % du PIB<br />

Impôts versés par les ménages<br />

Allocations reçues par les ménages<br />

Allocations reçues supérieures<br />

aux impôts versés<br />

1955 1960 1965 1970 1975 1980 1985 1990 1995 2000 2005 2010<br />

Source: BEA Personal Income and Disposition Report, Fortress Analysis<br />

pictet report | décembre 2010<br />

investissements alternatifs 21<br />

deuxième partie:<br />

idées de placement


Navis Capital Partners a été fondée en 1998<br />

dans le but de réaliser des investissements de<br />

private equity dans des opérations de rachat,<br />

de recapitalisation et de restructuration<br />

financière en Asie, et plus particulièrement<br />

dans les 10 pays de l’ASEAN. Ce groupe, qui<br />

englobe la Thaïlande, la Malaisie, Singapour,<br />

le Vietnam, l’Indonésie et les Phili-<br />

ppines, est négligé par les investisseurs<br />

malgré son importance géographique et le<br />

dynamisme de sa croissance: il offre pourtant<br />

des opportunités attrayantes sur les marchés<br />

de la consommation.<br />

Plusieurs facteurs contribuent à cet<br />

attrait. Le premier est la taille du<br />

marché ASEAN: son produit intérieur<br />

brut cumulé avoisine USD 1,8 billion,<br />

un niveau supérieur à celui de l’Inde<br />

et équivalent à celui de la dixième<br />

économie mondiale. Le PIB a doublé<br />

au cours des cinq dernières années,<br />

faisant grimper le revenu par habitant<br />

à près de USD 3000 par an. D’ici 2015,<br />

le groupe ASEAN figurera probablement<br />

parmi les six premières économies<br />

mondiales.<br />

22<br />

Le consommateur asiatique<br />

Les 10 pays de l’ASEAN offrent des<br />

opportunités aussi attrayantes que négligées<br />

deuxième partie:<br />

idées de placement<br />

NichOLAS bLOY<br />

COFONDATEUR & ASSOCIÉ<br />

NAVIS CAPITAL PARTNERS<br />

Le deuxième facteur est la démographie:<br />

plus de la moitié de la population<br />

asiatique a moins de 30 ans. Actuellement<br />

de 600 millions d’habitants, elle<br />

devrait passer à 710 millions d’ici 2030 et<br />

excéder celle de l’Europe dans les deux<br />

prochaines décennies. Son urbanisation<br />

est rapide avec 7,7 millions de personnes<br />

qui s’installent en ville chaque année.<br />

A ce rythme, plus de 50% de la population<br />

sera urbaine d’ici cinq ans. La région<br />

compte déjà 15 métropoles de plus d’un<br />

million d’habitants et 16 de plus de<br />

500 000 habitants.<br />

Troisièmement, la croissance<br />

économique se traduit par une expansion<br />

très rapide de la classe moyenne,<br />

dans le sillage de la hausse du revenu<br />

disponible, ce qui dope la demande<br />

de produits et de services. Comme<br />

le montre le graphique, la courbe de<br />

répartition des revenus se déplaçant<br />

vers la droite génère une forte augmentation<br />

des ventes dans les secteurs<br />

tels que les produits alimentaires<br />

de marque, l’enseignement privé,<br />

l’assurance-vie et même les articles de<br />

luxe (montres, vins fins, etc.).<br />

«La région compte déjà 15<br />

métropoles de plus d’un<br />

million d’habitants et 16 de<br />

plus de 500 000 habitants»<br />

Enfin, les investissements en private<br />

equity réalisés dans le groupe ASEAN ne<br />

sont pas à la hauteur de son importance<br />

économique, car la plupart des fonds<br />

investis en Asie le sont en Chine et en<br />

Inde. Ceci peut se comprendre, la Chine<br />

et l’Inde étant deux économies distinctes<br />

sur lesquelles il est facile d’obtenir<br />

des données. Toutefois, l’Accord de<br />

leS revenuS de l’aSean augmentent et déveloPPent la conSommation<br />

haut de gamme<br />

Population<br />

Produits<br />

alimentaires<br />

de marque<br />

Distribution<br />

moderne<br />

Revenu par jour<br />

Enseignement<br />

privé<br />

Assurancevie<br />

Résidences<br />

urbaines de<br />

standing Santé<br />

Centres de<br />

fitness<br />

Voitures<br />

de luxe<br />

Montres<br />

de luxe<br />

Vins<br />

fins<br />

Source: Navis Capital Partners 16.09.2010<br />

pictet report | décembre 2010<br />

investissements alternatifs


libre-échange interne de l’ASEAN<br />

ouvre la voie au développement d’un<br />

marché unique où 90% des transactions<br />

commerciales intra-ASEAN dans<br />

les domaines des biens et des services<br />

ne sont plus soumises aux barrières<br />

douanières depuis le début de l’année<br />

2010. Cet accord favorisera une consolidation<br />

transfrontalière de l’industrie, à<br />

l’image de ce qui s’est produit en Europe<br />

après la création du marché unique.<br />

Dans ce contexte, l’afflux relativement<br />

faible de capitaux de private<br />

equity pourrait donc être interprété<br />

comme étant à l’origine d’une<br />

erreur d’évaluation fondamentale des<br />

opportunités offertes par la région<br />

dans ce domaine. L’une de ces oppor-<br />

tunités est Alliance Cosmetics Group,<br />

que Navis a achetée en janvier 2010.<br />

Première entreprise de produits de<br />

maquillage grand public en Malaisie,<br />

elle est en concurrence avec L’Oréal.<br />

Evaluée à environ 20% de moins que<br />

Maybelline, sa marque Silkygirl est<br />

bien positionnée dans les produits<br />

de maquillage d’entrée de gamme<br />

destinés aux adolescentes et aux jeunes<br />

femmes. Avec 26 millions d’habitants,<br />

la Malaisie recouvre un marché de<br />

USD 700 millions pour Alliance. Silkygirl<br />

peut être étendue à d’autres caté-<br />

gories de cosmétiques telles que les<br />

soins pour la peau, mais les produits<br />

colorants qu’elle propose actuellement<br />

conviennent également aux carnations<br />

des 574 millions d’habitants des autres<br />

pays ASEAN. D’après notre analyse, il<br />

s’agit d’une entreprise non cyclique,<br />

génératrice de liquidités et présentant<br />

des taux de croissance deux à trois fois<br />

supérieurs à ceux du PIB.<br />

Nous avons pris une participation<br />

de 60% dans cette société dont la valeur<br />

à l’entrée était inférieure à USD 60<br />

millions. Le prix était bon marché: un<br />

multiple d’entrée équivalent d’EBITDA<br />

de 5,7 dans un secteur où les multiples<br />

sont proches de 10 à l’échelle internationale.<br />

Avec un chiffre d’affaires<br />

d’environ USD 40 millions par an et<br />

des marges élevées avoisinant les 30%,<br />

Alliance n’aura pas grand mal à offrir<br />

un bon retour sur investissement dans<br />

les années à venir.<br />

Obligations des marchés émergents<br />

Les warrants argentins sur le PIB offrent<br />

une opportunité négligée<br />

GUiLLAUMe FONKeNeLL<br />

FONDATEUR & CHIEF INVESTMENT OFFICER<br />

PHARO MANAGEMENT<br />

Chez Pharo, nous croyons fermement au<br />

découplage: par ce terme, nous désignons la<br />

surperformance des marchés émergents à<br />

moyen et long terme dans les deux catégories<br />

croissance et actifs financiers. Le différentiel<br />

au niveau de la croissance est bien connu et<br />

nous pensons qu’il se maintiendra. En ce qui<br />

concerne les actifs financiers, la tendance est<br />

un peu plus volatile, mais si nous opérons<br />

un retour en arrière de quelques années, nous<br />

constatons que les actifs des marchés émergents<br />

tendent à s’apprécier par rapport à<br />

ceux des économies développées.<br />

Ce phénomène est dû à des facteurs<br />

structurels dont deux jouent un rôle<br />

de premier plan. Le premier est la politique<br />

économique prudente menée<br />

depuis la crise asiatique de 1997 par<br />

un grand nombre de ces pays, qui ont<br />

accumulé des réserves substantielles<br />

et maintenu des taux d’intérêt élevés<br />

ainsi que des balances budgétaires<br />

conservatrices. Le deuxième est la<br />

locomotive chinoise, dont les taux de<br />

croissance de 8 à 10% par an devraient<br />

pouvoir se maintenir.<br />

Par contraste, l’Ancien monde est<br />

confronté à des déficits budgétaires<br />

abyssaux et à une croissance exponentielle<br />

du ratio dette/PIB, ce qui risque<br />

de déclencher une nouvelle crise financière.<br />

Pour nous, la question est de<br />

savoir ce qui pèsera le plus lourd dans<br />

l’économie mondiale: les forces déflationnistes<br />

des économies développées<br />

ou l’effet de croissance puissant de la<br />

Chine et des autres marchés émergents.<br />

Une autre tendance doit être<br />

soulignée: il y a encore deux ans, la<br />

pictet report | décembre 2010<br />

investissements alternatifs 23<br />

deuxième partie:<br />

idées de placement


plupart des marchés obligataires des<br />

pays émergents évoluaient en phase<br />

avec leurs devises et les investisseurs<br />

risquaient donc de perdre sur les deux<br />

tableaux; depuis la crise, une corrélation<br />

négative s’est instaurée entre les<br />

marchés obligataires et les devises.<br />

Cette tendance devrait perdurer car<br />

les banques centrales de ces pays ont<br />

désormais suffisamment de réserves<br />

pour mener des politiques monétaires<br />

contre-cycliques: lorsque les devises<br />

se déprécient, elles peuvent assouplir<br />

les taux d’intérêt plutôt que les resserrer.<br />

Cela signifie que nous pouvons<br />

prendre des positions longues sur les<br />

devises et les obligations des marchés<br />

émergents car elles se compensent<br />

mutuellement, de sorte que les obligations<br />

se négocient davantage comme<br />

des bons du Trésor US.<br />

J’en viens à mon idée<br />

d’investissement, à savoir les warrants<br />

argentins sur le PIB. Ces instruments<br />

faisaient en quelque sorte office de<br />

lot de consolation avec les obligations<br />

émises en 2005 dans le cadre de la<br />

restructuration de la dette argentine.<br />

Ils n’ont intéressé personne à l’époque,<br />

mais représentent bel et bien une<br />

ScénarioS de rembourSement Pour<br />

leS WarrantS argentinS Sur le Pib<br />

Année Croissance du<br />

PIB en %<br />

Versement<br />

en USD<br />

Versements<br />

depuis le lancement<br />

2005 9.2 0.62<br />

2006 8.5 1.32<br />

2007 8.6 2.28<br />

2008 6.8 3.14<br />

2009<br />

Scénario du consensus<br />

0.9 Pas de versement<br />

2010 8.25 4.9<br />

2011 4.65 5.9<br />

2012 4.50 7.2<br />

2013<br />

Scénario baissier<br />

4.50 8.0<br />

2010 8.0 4.8<br />

2011 3.5 5.6<br />

2012 0 Pas de versement<br />

2013<br />

Scénario haussier<br />

-3.0 Pas de versement<br />

2010 9.0 5.0<br />

2011 7.0 6.8<br />

2012 6.0 8.7<br />

2013 5.0 9.7<br />

Source: Pharo Management, Bloomberg<br />

24<br />

deuxième partie:<br />

idées de placement<br />

option d’achat sur la croissance réelle<br />

du PIB argentin jusqu’en 2034: ils<br />

génèrent un rendement chaque année<br />

si l’option est dans la monnaie. Pour<br />

cela, deux critères doivent être remplis:<br />

premièrement, la croissance cumulée<br />

du PIB doit être d’environ 3% par an<br />

sur toute leur durée; deuxièmement, la<br />

croissance du PIB doit être supérieure<br />

au taux spécifié pour chaque année.<br />

Les warrants argentins<br />

sur le PIB constituent<br />

une option d’achat sur la<br />

croissance réelle du PIB<br />

jusqu’en 2034<br />

En réalité, l’Argentine a dépassé ces<br />

attentes durant les quatre premières<br />

années et le rendement (qui reflète<br />

le PIB cumulé) a augmenté d’année<br />

en année. En 2009, la croissance n’a<br />

pas atteint le niveau annuel visé et il<br />

n’y a pas eu de versement pour cette<br />

année-là. Mais la croissance du PIB<br />

argentin a régulièrement donné lieu<br />

à de bonnes surprises et les chiffres<br />

du consensus pour 2010 et 2011 lai-<br />

ssent entrevoir un rendement global<br />

d’environ USD 10,88 pour les deux<br />

ans, ce qui équivaut au prix actuel du<br />

marché (10 septembre 2010).<br />

Comme ils n’ont pas<br />

leur place dans les<br />

portefeuilles traditionnels,<br />

leur évaluation est<br />

complètement faussée<br />

Selon les prévisions du consensus, nous<br />

récupérerons notre mise dans deux ans<br />

et obtiendrons encore davantage jusqu’à<br />

ce que le rendement total atteigne un<br />

plafond dont il est encore loin. Comme<br />

il s’agit d’investissements inhabituels<br />

qui n’ont pas leur place dans les portefeuilles<br />

traditionnels, leur évaluation<br />

est complètement faussée.<br />

Alpha<br />

Le «rendement excédentaire» d’un fonds ou<br />

d’un titre par rapport à un indice de référence<br />

prédéfini. Dans le cas d’un fonds à rendement<br />

absolu, le benchmark serait un indice du<br />

marché monétaire à court terme. L’alpha<br />

est généralement utilisé comme un critère<br />

permettant d’évaluer le savoir-faire d’un gérant<br />

de fonds. Il est difficile à évaluer avec certitude,<br />

sauf sur le très long terme.<br />

Bêta<br />

Généralement utilisé en référence à la partie<br />

du rendement d’un portefeuille ou d’un<br />

fonds due au marché, i.e. indépendante de<br />

l’intervention du gérant. Ainsi, un fonds<br />

indiciel «génère un bêta», tandis que les fonds<br />

à rendement absolu dégagent un «alpha pur»<br />

en cas de performance positive.<br />

Associé commanditaire/Associé gérant<br />

Le limited partner, ou associé commanditaire,<br />

est en règle générale un investisseur passif dans<br />

un fonds en private equity. Il a les mêmes intérêts<br />

économiques que ceux du general partner<br />

(associé gérant), mais sa responsabilité est limitée<br />

et il ne perçoit pas de commission de gestion.<br />

Transaction; transaction asymétrique<br />

Lorsque les gérants de hedge funds parlent<br />

d’une transaction, ils ne désignent pas l’achat<br />

ou la vente d’un titre mais la structure d’un<br />

investissement important et souvent complexe,<br />

englobant des positions longues et à découvert<br />

qui leur permettent de cibler la sur- ou sousévaluation<br />

qu’ils ont identifiée. Une telle<br />

transaction peut être menée dans une optique<br />

de 3 à 12 mois. Il est essentiel que ce type<br />

d’opération soit asymétrique, en d’autres termes,<br />

que son potentiel de gain soit bien supérieur au<br />

risque de perte maximum.<br />

pictet report | décembre 2010<br />

investissements alternatifs


pictet report | décembre 2010<br />

investissements alternatifs 25<br />

deuxième partie:<br />

idées de placement


26<br />

troisième partie:<br />

du placement alternatif au placement grand public?<br />

pictet report | décembre 2010<br />

investissements alternatifs


TROiSiÈMe PARTie:<br />

dU PLAceMeNT ALTeRNATiF AU PLAceMeNT GRANd PUbLic?<br />

Private equity: un modèle<br />

de placement qui fonctionne<br />

Pour avoir survécu à la crise, le private equity n’est<br />

plus considéré comme un placement alternatif<br />

Aux Etats-Unis, le private equity (capital-investissement) regroupe<br />

de nombreux types de prises de participation privées dans des entreprises,<br />

incluant les rachats, le capital-risque, l’investissement dans<br />

des infrastructures et l’investissement immobilier. Il a d’abord pris<br />

la forme du capital-risque dans les années 50 et 60, puis s’est orienté<br />

vers les rachats financés par l’endettement dans les années 70 et<br />

80, avant de s’étendre en Europe et en Asie et de prendre le nom de<br />

private equity. Malgré des revers à la fin des années 80 et lors de la<br />

bulle technologique, il a continué à se développer jusqu'à atteindre<br />

son âge d’or entre 2002 et 2007.<br />

Trois raisons expliquent pourquoi le secteur a connu<br />

un essor si important au cours des 40 dernières années.<br />

Premièrement, les taux de rendement se sont avérés<br />

supérieurs à presque tout ce que l’on pouvait faire d’autre<br />

avec son argent. Que ce soit sur un, trois, cinq ou même dix<br />

ans, les taux de rendement du private equity étaient généralement<br />

deux à trois fois plus élevés que ceux des marchés<br />

publics sur des périodes comparables. C’était bien, mais pas<br />

obligatoirement suffisant pour inciter des investisseurs à<br />

conclure des partenariats non liquides pouvant durer 10<br />

ans. L’élément déclencheur a plutôt été le fait que les entreprises<br />

du quartile supérieur affichaient régulièrement<br />

des performances sept à neuf fois supérieures à celles des<br />

marchés ouverts au public.<br />

Second facteur à l’origine de la croissance du secteur,<br />

l’état de sous-financement des fonds de pension publics<br />

en Europe et aux Etats-Unis. Ces derniers avaient été<br />

mandatés par les pouvoirs publics pour verser un mon-<br />

tant déterminé de prestations, mais ne disposaient pas de<br />

suffisamment de capitaux pour les financer. Les gérants<br />

de fonds commencèrent alors à étudier des moyens de<br />

combler les 10-20% d’actifs manquants en recherchant de<br />

l’alpha dans leurs placements, afin d’obtenir de meilleurs<br />

taux de rendement que les indices des marchés ouverts au<br />

dAVid M.RUbeNSTeiN<br />

COFONDATEUR & DIRECTEUR GÉNÉRAL<br />

THE CARLYLE GROUP<br />

public. Ils se tournèrent vers le private equity et les hedge<br />

funds, qui leur offraient des rendements beaucoup plus<br />

élevés. Aujourd’hui, 10 à 15% des actifs des fonds de pension<br />

américains sont engagés dans ce type de placement.<br />

Troisième élément, la part des bénéfices de 20%<br />

régulièrement générés par les sociétés de private equity.<br />

Réaliser des parts de bénéfices de l’ordre de 20% avec le capital<br />

des autres signifie beaucoup d’argent à la clé, à condition<br />

d’exceller dans son domaine. Les meilleurs talents issus<br />

des écoles de médecine ou de droit ont alors voulu se lancer<br />

dans le private equity ou les hedge funds.<br />

Lorsque la bulle spéculative a éclaté en 2007, le secteur<br />

affichait plus de USD 1000 milliards d’actifs sous gestion<br />

et incarnait alors - dans une certaine mesure - le capi-<br />

talisme. Entre 2003 et 2007, le private equity a distribué à<br />

ses investisseurs au moins USD 15 milliards par trimestre.<br />

Lorsque la bulle a éclaté, nombreux jouaient les Cassandre,<br />

prédisant la chute, voire la disparition, du private<br />

equity. Selon eux, au cours des quatre années précédentes,<br />

le private equity avait acquis des entreprises à des prix trop<br />

élevés, les avaient surendettées et avaient conclu des tran-<br />

sactions qui n’avaient pas lieu d’être. Pour ces oiseaux de<br />

mauvais augure, le scénario allait être le suivant: nombre<br />

de ces entreprises allaient faire faillite, les grandes sociétés<br />

de private equity disparaîtraient du marché, les limited<br />

partners n’honoreraient plus leurs appels de fonds et le<br />

gouvernement devrait intervenir pour mettre un terme aux<br />

activités du secteur.<br />

En réalité, alors que de nombreuses erreurs ont été<br />

commises sur le pricing et l’endettement, aucune des 25<br />

plus grandes opérations de rachat effectuées durant la bulle<br />

n’a échoué. Si certaines ne délivrent pas les rendements<br />

attendus, les sociétés de private equity ont remonté leurs<br />

manches et mis la main à la pâte – soit en payant la dette au<br />

rabais par des injections supplémentaires de capitaux, soit<br />

pictet report | décembre 2010<br />

investissements alternatifs 27<br />

troisième partie:<br />

du placement alternatif au placement grand public?


en aidant la direction à améliorer la marche de ses affaires.<br />

Aucune société de private equity n’a ainsi cessé ses acti-<br />

vités, même si une ou deux – et pas les plus importantes –<br />

connaissent des difficultés et ne lèvent plus d’autres fonds.<br />

Dans l’ensemble, 95% ou plus des sociétés de private equity<br />

poursuivront leurs activités.<br />

«Lorsque la bulle a éclaté, nombreux<br />

jouaient les Cassandre, prédisant la chute,<br />

voire la disparition, du private equity»<br />

Aucun grand limited partner n’a refusé les levées de fonds.<br />

Pour ceux qui le souhaitaient, il était possible de s’y sou-<br />

straire en vendant sur le marché secondaire, mais pas né-<br />

cessairement aux prix souhaités. Mais aucun grand fonds<br />

de pension ne pouvait se permettre de se dérober, sous peine<br />

de semer la crainte de ne plus être en mesure d’honorer<br />

ses engagements de retraite. Lorsque nécessaire, des inve-<br />

stissements liquides ont été vendus pour pouvoir faire face<br />

aux demandes de remboursement. Pendant ce temps, le<br />

gouvernement américain a conclu que ni le private equity<br />

ni les hedge funds n’étaient à l’origine du risque systémique<br />

qui, selon lui, devait être imputé à l’attitude irresponsable<br />

des banques en matière de prêt. Les 2300 pages de textes de<br />

loi adoptés depuis la crise ne concernent d’ailleurs pas le<br />

private equity, à l’exclusion d’une obligation<br />

d’enregistrement à laquelle le secteur était déjà soumis.<br />

Le private equity a connu une phase de baisse: les tran-<br />

sactions ont diminué, les rendements ont diminué et les<br />

distributions aux investisseurs ont diminué à USD 2 milliards<br />

par trimestre. Le secteur a fait son grand retour lorsque<br />

28<br />

troisième partie:<br />

du placement alternatif au placement grand public?<br />

des entreprises ont transformé en réussite des transactions<br />

au prix exorbitant et que les investisseurs ont constaté<br />

qu’ils obtiendraient de bons rendements en achetant des<br />

actifs en 2008-2009. En fait, la plupart des transactions réalisées<br />

à cette période ont doublé de valeur.<br />

Mais le secteur a changé et en a tiré de nombreux enseignements.<br />

Nous ne verrons plus de fonds à USD 20 milliards,<br />

mais des fonds de taille plus modeste limités à USD 5-10 mil-<br />

liards maximum. Les transactions seront moins importantes:<br />

finies les opérations à USD 30-50 milliards, la moyenne<br />

devrait plutôt se situer à USD 3-5 milliards. Les investisseurs<br />

obtiendront de bien meilleures conditions dans la mesure où<br />

les associés commanditaires disposent d’un levier bien plus<br />

grand et que les frais de gestion diminueront. Il y aura également<br />

plus de coinvestissement (placements dans des tran-<br />

sactions spécifiques sans frais ni portage).<br />

«Le gouvernement américain a<br />

conclu que ni le private equity ni les<br />

hedge funds n’étaient à l’origine du<br />

risque systémique»<br />

Il y aura davantage de prises de participation minori-<br />

taires dans la mesure où le levier de crédit est plus difficile<br />

à obtenir. Avant que la bulle n’éclate, ce type de transactions<br />

ne représentait que 3% de l’ensemble, mais devrait<br />

bientôt atteindre 20%. Les sociétés de private equity ne<br />

prendront pas le contrôle, mais auront un siège au conseil<br />

d’administration et seront impliquées dans la direction des<br />

affaires. Davantage de capitaux iront sur les marchés émergents<br />

tels que la Chine, l’Inde ou le Brésil, dans la mesure où<br />

ces pays n’ont pas connu la crise, que le levier nécessaire y est<br />

moindre et que les taux de croissance de ces nations vont être<br />

bien supérieurs à ceux des Etats-Unis et de l’Europe occidentale,<br />

surnommés par certains les «marchés submergés».<br />

Nous assisterons également à une scission du secteur,<br />

avec six à huit sociétés de private equity mondiales qui<br />

seront presque certainement des sociétés cotées offrant<br />

une vaste gamme de produits de private equity et de placements<br />

alternatifs. Le reste sera composé de fonds spécialisés<br />

proposant un seul produit ou service. Les sociétés internationales<br />

seront toutes américaines – aux noms réputés tels<br />

que Carlyle, Blackstone, kkR ou TPG – mais des sociétés de<br />

private equity internationales verront également le jour en<br />

Europe, en Asie, au Moyen-Orient et au Brésil.<br />

Tournés vers l’avenir, les investisseurs ont donc conclu<br />

que le private equity avait plus ou moins survécu à la crise<br />

et que, même si les rendements pourraient ne pas être aussi<br />

élevés que pendant la bulle, ils resteraient tout de même<br />

attrayants. Je pense que nous verrons de plus en plus de capitaux<br />

affluer vers le private equity, qui est en passe devenir<br />

grand public. Historiquement, le private equity faisait partie<br />

pictet report | décembre 2010<br />

investissements alternatifs


de la catégorie des placements alternatifs, au même titre<br />

que les hedge funds, le bois de construction et l’immobilier,<br />

attirant au total 5% des actifs, le reste étant placé dans des<br />

titres à revenu fixe ou des actions. Aujourd’hui, la taille du<br />

secteur, son importance au sein des services financiers et les<br />

rendements qu’il génère ne le rangent plus parmi les placements<br />

alternatifs. Par conséquent, les investisseurs vont y<br />

augmenter leur exposition.<br />

Ces investisseurs souhaiteront sélectionner des fonds de<br />

private equity dans le quartile supérieur des performances,<br />

ce choix laissant entrevoir un rendement net élevé proche<br />

des 20%. Le rendement diminuera suite à la baisse des<br />

rendements des actions cotées, mais l’écart entre les rendements<br />

des actions cotées et ceux du private equity du quartile<br />

supérieur demeurera significatif et attrayant.<br />

Le modèle d’activité du private equity testé sur plus de<br />

40 ans fonctionne: donner au gérant une part importante<br />

de la société, encourager la société de private equity, opérer<br />

dans un environnement privé, prendre trois à cinq ans pour<br />

accroître l’efficacité de l’entreprise, et ne pas surpayer ni se<br />

surendetter. Ma seule préoccupation concernant l’avenir<br />

serait que les gouvernements interviennent, à l’image des<br />

inquiétudes soulevées au sein de l’Union européenne au<br />

sujet du private equity. Mais si les gouvernements ne s’en<br />

mêlent pas, le modèle d’activité du private equity fon-<br />

ctionnera et gagnera ses lettres de noblesse dans le monde<br />

de l’investissement grand public.<br />

Choisir un fonds de private equity dans le quartile supérieur<br />

• Le track record (historique de performance) est très important<br />

dans le private equity.<br />

• Le personnel ultraperformant est-il toujours là?<br />

• Ses objectifs d’investissement sont-ils toujours pertinents?<br />

• Quelle est la part des fonds propres des gérants au sein du fonds?<br />

Plus il y en a, mieux c’est.<br />

• Les autres investisseurs au sein du fonds sont-ils crédibles?<br />

• Les rendements sont-ils distribués à travers toute l’entreprise afin<br />

de retenir les jeunes talents?<br />

• Les modalités garantissent-elles que l’entreprise gagne de l’argent<br />

sur la performance, et non sur les frais?<br />

David M. Rubenstein est directeur général de The Carlyle Group, qu’il<br />

a cofondé en 1987. Il a démarré sa carrière en tant qu’avocat à New York et<br />

occupé le poste de chief counsel au sein du sous-comité sur les amendements<br />

constitutionnels du comité judiciaire du Sénat américain. De 1977 à 1981, il a<br />

été deputy assistant du Président Carter en matière de politique intérieure.<br />

Après ses années de service à la Maison blanche et avant de cofonder Carlyle,<br />

il a exercé dans le domaine juridique à Washington.<br />

pictet report | décembre 2010<br />

investissements alternatifs 29<br />

troisième partie:<br />

du placement alternatif au placement grand public?


dU PLAceMeNT ALTeRNATiF<br />

AU PLAceMeNT GRANd PUbLic?<br />

Convergence<br />

entre<br />

investisseurs,<br />

mais<br />

persistance<br />

d’une certaine<br />

défiance<br />

Les grands noms des placements<br />

alternatifs s’expriment<br />

sur les tendances du secteur<br />

– et sur ce qui les inquiète<br />

30<br />

MOdÉRATeUR<br />

ROLF bANz<br />

CHIEF INVESTMENT ARCHITECT<br />

PICTET ASSET MANAGEMENT<br />

dAVid M.RUbeNSTeiN<br />

COFONDATEUR ET DIRECTEUR<br />

GÉNÉRAL, THE CARLYLE GROUP<br />

PAUL MARShALL<br />

PRÉSIDENT DU CONSEIL<br />

D’ADMINISTRATION ET CHIEF<br />

INVESTMENT OFFICER, MARSHALL WACE<br />

MichAeL PLATT<br />

PRÉSIDENT DU CONSEIL<br />

D’ADMINISTRATION,<br />

CHIEF INVESTMENT OFFICER<br />

ET HEAD OF TRADING<br />

BLUECREST CAPITAL MANAGEMENT<br />

ReNAUd de PLANTA<br />

ASSOCIÉ-GÉRANT<br />

PICTET & CIE<br />

troisième partie:<br />

du placement alternatif au placement grand public?<br />

Certains aspects de l’évolution du secteur des<br />

placements alternatifs abordés par David<br />

Rubenstein dans son exposé ont été explorés<br />

plus en profondeur lors d’une table ronde qui<br />

a réuni des gérants reconnus pour avoir élevé<br />

leurs sociétés au rang de leaders de marchés<br />

innovants.<br />

Rolf Banz a ouvert les débats en<br />

demandant si le secteur des placements<br />

alternatifs serait touché par une nouvelle<br />

vague de réglementations suite à<br />

la crise financière. Pour Michael Platt,<br />

une grande partie du ressentiment<br />

politique et social a été dirigée contre<br />

les hedge funds qui, étrangement, ont<br />

été considérés comme les responsables<br />

de l’effondrement du système financier<br />

à la fin 2008. «Nous allons devoir faire<br />

face à une série de nouvelles règles dont<br />

le but essentiel sera de réduire le levier<br />

d’endettement et de limiter la capacité<br />

des hedge funds à commercialiser leurs<br />

produits sur le marché européen. Nous<br />

avons pris des mesures afin d’éviter<br />

l’impact de cette réglementation qui, à<br />

notre avis, ne devrait pas s’avérer trop<br />

pénible dans l’ensemble.»<br />

Les mesures prises par BlueCrest<br />

ont inclus son transfert à Genève, en<br />

dehors de l’Union européenne, même<br />

si l’entreprise ne voit pas les mesures de<br />

distribution affecter l’essentiel de son<br />

activité. Il serait relativement simple<br />

de satisfaire aux nouvelles règles con-<br />

cernant la vente de produits de hedge<br />

funds au sein de l’UE dans des pays<br />

représentant l’essentiel des placements.<br />

Quant à la réglementation<br />

bancaire, il a estimé que les directives<br />

contraignant les banques à cesser<br />

leurs activités de négoce pour compte<br />

propre pourraient avoir des retombées<br />

positives pour les hedge funds. «Cela<br />

rendra les marchés moins liquides,<br />

mais génèrera de meilleurs ratios de<br />

Sharpe et augmentera les opportunités<br />

d’arbitrage. Et les hedge funds<br />

s’approprieront la place laissée vacante<br />

par les banques en matière de négoce<br />

pour compte propre - c’est une formidable<br />

opportunité de croissance.»<br />

pictet report | décembre 2010<br />

investissements alternatifs


L’évolution<br />

du secteur<br />

Alors que le secteur des placements alternatifs<br />

devient grand public, dans quelle mesure<br />

ressemble-t-il davantage aux placements<br />

institutionnels long only classiques? Cette<br />

question a été soulevée plusieurs fois au cours<br />

de la table ronde, et dans des contextes variés.<br />

Interrogé sur la longévité des hedge<br />

funds, Paul Marshall a été le premier à<br />

aborder le sujet. Les gérants de hedge<br />

funds évoluent dans une culture de<br />

«chasseurs» où l’on mange ce que l’on<br />

attrape, a suggéré Rolf Banz, mais<br />

ont-ils besoin des compétences d’un<br />

«fermier», qui partage et préserve les<br />

semences pour les prochaines récoltes?<br />

Paul Marshall a décrit la première<br />

phase de l’histoire des hedge funds<br />

comme une «ère héroïque» ca-<br />

ractérisée par un petit nombre de<br />

très grands prédateurs. Depuis 1998,<br />

le secteur s’est développé, attirant<br />

beaucoup de nouveaux venus avec<br />

peu de compétences, autrement dit<br />

un grand nombre d’«aspirants chasseurs».<br />

Leur réussite durant l’âge d’or<br />

entre 2004 et 2007 reposait en fait sur<br />

des «rendements très bas – des chiffres<br />

élevés, mais basés sur le bêta, des<br />

paris importants sur les marchés émergents,<br />

le levier et la liquidité». Lorsque<br />

cette belle époque a pris fin en 2008,<br />

leurs positions ont explosé, mettant<br />

des investisseurs en grande difficulté,<br />

notamment les Européens, qui étaient<br />

arrivés dans les hedge funds beaucoup<br />

trop tard.<br />

«Nous entrons aujourd’hui dans la<br />

phase trois, caractérisée par un rétrécissement<br />

du secteur et une orientation<br />

plus forte vers la qualité des<br />

rendements. C’est là que les fermiers<br />

entrent en scène afin de développer des<br />

processus cohérents visant à créer cette<br />

qualité dans les entreprises et parmi<br />

les bailleurs de fonds capables de lire<br />

entre les lignes.»<br />

«Des clients anciennement<br />

long only demandent plus<br />

de fonds total return»<br />

Le président de la table ronde s’est<br />

ensuite tourné vers Renaud de Planta,<br />

en charge du développement des<br />

activités de hedge funds de <strong>Pictet</strong>.<br />

«Comment concilier la culture des<br />

hedge funds avec la culture plus courtoise<br />

d’une banque privée suisse?»<br />

a-t-il demandé.<br />

Renaud de Planta a répondu qu’il<br />

voyait des signes de convergence entre<br />

les gérants d’actifs traditionnels et les<br />

hedge funds. Les gérants long only<br />

couvrent des positions de change<br />

depuis un certain temps, par exemple,<br />

et depuis plus récemment, gèrent le<br />

risque par le biais de swaps de taux et de<br />

swaps de défaut de crédit. Aujourd’hui,<br />

les stratégies 130/30 sont mieux acceptées<br />

par les investisseurs institutionnels<br />

et les consultants. «Je vois également les<br />

besoins des clients converger, beaucoup<br />

de nos clients anciennement long only<br />

demandent aujourd’hui davantage de<br />

fonds total return.»<br />

Autre manifestation de convergence<br />

discutée plus tard par la table<br />

ronde, l’apparition des OPCVM<br />

présentant des caractéristiques de<br />

placements alternatifs. Paul Marshall a<br />

estimé que cette forme de distribution<br />

ne convenait qu’à certaines stratégies<br />

alternatives, produisant des rendements<br />

sous-optimaux en raison du<br />

besoin de liquidité, des restrictions<br />

au niveau du levier et des exigences<br />

accrues de reporting.<br />

Michael Platt a indiqué que les<br />

coûts additionnels réduiraient le<br />

rendement d’un produit OPCVM de<br />

200 points par an par rapport à un<br />

placement direct en hedge funds.<br />

«Personne n’a encore mis<br />

au point un modèle de<br />

fonds croisés idéal»<br />

Le problème, selon David Rubenstein,<br />

est que les investisseurs recherchent<br />

un fonds idéal qui combinerait liqui-<br />

dité et rendement des hedge funds avec<br />

des composantes du private equity.<br />

«Jusqu’à présent, personne n’a encore<br />

mis au point ce modèle idéal. Les fonds<br />

dits croisés en ont déçu plus d’un car<br />

lorsque les investisseurs veulent de la<br />

liquidité, leurs placements liquides<br />

ne peuvent être liquidés. En vérité,<br />

les personnes ayant des compétences<br />

en private equity sont souvent incompétentes<br />

dans le domaine des hedge<br />

funds, et vice-versa. Je pense que la<br />

tendance sera plutôt aux hedge funds<br />

et fonds de private equity individuels,<br />

avec des investisseurs allouant des<br />

placements à chacun d’entre eux.»<br />

pictet report | décembre 2010<br />

investissements alternatifs 31<br />

troisième partie:<br />

du placement alternatif au placement grand public?


32<br />

Une question<br />

de confiance<br />

Autre question soulevée par le modérateur<br />

Rolf Banz, la réputation du secteur. «Lorsque<br />

j’écoute les clients, une certaine réticence à<br />

faire confiance au secteur alternatif se dégage<br />

en raison des écarts de performance entre les<br />

meilleurs gérants et les moins bons. Pensezvous<br />

que le secteur devrait en faire plus pour<br />

améliorer sa crédibilité?»<br />

David Rubenstein ne pense pas qu’il<br />

faille moins faire confiance au private<br />

equity et aux hedge funds qu’au reste<br />

de l’industrie des services financiers.<br />

«Après les deux dernières années, les<br />

banques, les banques d’affaires et tous<br />

les services financiers ont eu des pro-<br />

blèmes d’image. Mais il n’y a aucun<br />

doute sur le fait que le private equity<br />

et les hedge funds ont encore un long<br />

chemin à parcourir avant que les gens<br />

ne soient complètement satisfaits de la<br />

manière dont ils se conduisent.»<br />

«Les hedge funds passent pour<br />

mystérieux, avec leur façon de déplacer<br />

des capitaux au-delà des frontières<br />

sans que les gouvernements puissent<br />

les contrôler ou les comprendre. Le<br />

private equity est accusé de détruire des<br />

troisième partie:<br />

du placement alternatif au placement grand public?<br />

emplois ou de les délocaliser, ou encore<br />

de ne pas verser les impôts appropriés.<br />

Pour les deux secteurs, il reste encore<br />

beaucoup de chemin à parcourir avant<br />

de persuader le public que ce que nous<br />

faisons est bénéfique pour l’économie,<br />

que nous créons des emplois et<br />

augmentons les recettes fiscales.»<br />

«Nous exerçons une<br />

fonction sociale très<br />

importante, celle<br />

de prendre soin des<br />

économies des gens»<br />

Paul Marshall a indiqué que les hedge<br />

funds étaient son pire ennemi. «Ils<br />

ne prennent pas le temps de connaître<br />

leurs clients, de comprendre<br />

leurs besoins et de leur expliquer<br />

comment ils peuvent jouer un rôle<br />

dans leur portefeuille. J’estime que<br />

nous exerçons une fonction sociale<br />

très importante, celle de prendre soin<br />

des économies des gens, en les faisant<br />

prospérer et en les protégeant lors des<br />

périodes difficiles. Le secteur s’en est<br />

très bien sorti malgré quelques erreurs,<br />

mais ce n’est pas l’avis du public et<br />

nous en sommes responsables.»<br />

Pour David Rubenstein, le problème est<br />

plus aigu en Europe continentale, où il<br />

existe un fort ressentiment envers les<br />

Etats-Unis et le Royaume-Uni, consi-<br />

dérés comme les plus grands bénéficiaires<br />

du private equity et des hedge<br />

funds. «L’écrivain français Balzac a un<br />

jour dit que derrière chaque grande<br />

fortune se cachait un crime. Nous<br />

devons changer cette mentalité con-<br />

sistant à dire que les gens gagnant<br />

beaucoup d’argent font obligatoirement<br />

quelque chose de mal.»<br />

«Nous devons changer<br />

cette mentalité consistant<br />

à dire que les gens gagnant<br />

beaucoup d’argent font<br />

obligatoirement quelque<br />

chose de mal»<br />

Ce que fait le secteur des placements<br />

alternatifs est essentiel pour<br />

aider la société à bien prendre soin<br />

de son épargne, a encore énoncé Paul<br />

Marshall. «Nous devons aider les<br />

investisseurs à éviter de prendre les<br />

mauvaises décisions de placement:<br />

s’engager au sommet du cycle et sortir<br />

au plus bas.<br />

Notre secteur jouera à long terme<br />

un rôle bien plus important dans les<br />

portefeuilles des investisseurs, à condition<br />

que les gens comprennent la<br />

nature du risque et le rendement que<br />

nous pouvons leur fournir et que nous<br />

le leur expliquions correctement.»<br />

pictet report | décembre 2010<br />

investissements alternatifs


Marchés émergents ou<br />

économies développées?<br />

Un participant a demandé si, au vu des pré-<br />

visions pessimistes concernant les économies<br />

développées évoquées lors de la précédente<br />

présentation, les investisseurs devraient se<br />

diriger vers les marchés émergents – ou si la<br />

bonne vieille Europe et l’Amérique en perdition<br />

offriraient encore quelques opportunités<br />

intéressantes.<br />

Paul Marshall a répondu que le portage<br />

des marchés émergents sur une pé-<br />

riode de cinq à dix ans serait supérieur<br />

à celui de l’Europe et, dans une moindre<br />

mesure, à celui des Etats-Unis.<br />

Marshall Wace avait envisagé cette<br />

hypothèse il y a deux ans en ouvrant un<br />

bureau à Hong kong destiné à devenir<br />

la plaque tournante de la croissance.<br />

Cependant, en termes d’alpha, qui<br />

peut dégager des rendements exceptionnels,<br />

il existe toujours de formidables<br />

opportunités sur les marchés<br />

développés, à l’instar du Japon.<br />

«Les marchés émergents<br />

seront l’épicentre de la<br />

croissance pour les 10-20<br />

prochaines années»<br />

David Rubenstein estime pour sa part<br />

que les marchés émergents attirent<br />

aujourd’hui davantage de capitaux car<br />

les investisseurs considèrent qu’ils se<br />

développent très rapidement, mais avec<br />

moins de risque qu’avant. Ils représentent<br />

aujourd’hui un secteur très important<br />

de l’économie mondiale: d’ici<br />

2014, le PIB des marchés émergents<br />

devrait dépasser celui des économies<br />

développées. «Si vous n’investissez pas<br />

dans les marchés émergents, vous ne<br />

faites plus vraiment partie du monde<br />

des placements. C’est là que se situe-<br />

ront la croissance et l’alpha pour les 10<br />

à 20 prochaines années.»<br />

Mais pour Michael Platt, les pays<br />

du G7 demeurent très importants car<br />

ils abritent de nombreux produits, des<br />

marchés de capitaux très sophistiqués,<br />

de formidables opportunités d’arbitrage<br />

et une forte présence bancaire de tenue<br />

de marché (market making). «Il est<br />

tout simplement impossible d’obtenir<br />

de la liquidité pour ce genre d’activité<br />

sur la plupart des marchés émergents.<br />

Vous devez être en dollars, yens, livres<br />

sterling et en euros pour exploiter ces<br />

opportunités.»<br />

Pour Renaud de Planta, <strong>Pictet</strong> a<br />

considéré la dette des marchés émergents<br />

comme un actif sous-exploité<br />

pendant de nombreuses années et la<br />

juge toujours comme attrayante, mais<br />

très risquée. Il n’en est pas de même<br />

pour les actions émergentes. «Bien que<br />

<strong>Pictet</strong> ait été l’une des premières entreprises<br />

à se positionner dans le segment<br />

des actions des marchés émergents, nos<br />

outils d’évaluation n’indiquent pas<br />

que ces titres soient particulièrement<br />

attrayants aujourd’hui.»<br />

Quelles sont les<br />

inquiétudes des participants<br />

à la table ronde?<br />

Les principales inquiétudes de Michael Platt<br />

portent sur l’économie mondiale, à une<br />

période où la croissance des marchés déve-<br />

loppés est faible, les taux d’intérêt bas, les<br />

déficits publics élevés et où les ratios dette-<br />

PIB atteignent des niveaux insoutenables<br />

dans certains pays. «La seule solution est de<br />

faire tourner la planche à billets à très grande<br />

échelle et je pense qu’il y aura très prochainement<br />

de nouvelles mesures d’assouplissement<br />

quantitatif aux Etats-Unis.»<br />

David Rubenstein se préoccupe quant à<br />

lui surtout de l’ingérence des gouvernements.<br />

«Comme Ronald Reagan le<br />

disait, les mots les plus dangereux de<br />

la langue anglaise sont: «nous sommes<br />

du gouvernement et nous sommes<br />

là pour vous aider.» J’estime que les<br />

gouvernements surréagissent aux<br />

crises financières et que leurs interventions<br />

tendent davantage à freiner le<br />

capitalisme qu’à l’aider.»<br />

«Cependant, le pire de la vague<br />

interventionniste semble être passé<br />

en Europe», a ajouté Paul Marshall. Il<br />

a également déclaré qu’il n’était pas<br />

particulièrement inquiet au sujet de<br />

l’économie américaine, dans la mesure<br />

où la dynamique de croissance et sa<br />

démographie allaient évoluer dans le<br />

bon sens. «Mais je demeure préoccupé<br />

par l’Europe, et je pense qu’au moins<br />

un pays devra restructurer sa dette.<br />

Le problème vient des divergences<br />

massives entre les différentes économies<br />

de la zone euro.»<br />

«Il existe des tensions<br />

géopolitiques dans<br />

plusieurs régions, y compris<br />

les marchés émergents»<br />

Renaud de Planta a ajouté deux<br />

autres inquiétudes à la liste. L’une<br />

concerne ce qu’il a appelé «la dislocation<br />

macroéonomique», qui devrait<br />

déboucher sur une guerre des monnaies<br />

et encourager le protectionnisme, ce que<br />

le monde avait jusqu’ici réussi à éviter.<br />

Sa seconde source d’inquiétude<br />

provient des tensions géopolitiques<br />

croissantes qui apparaissent de plus<br />

en plus clairement dans certaines<br />

régions, y compris les marchés émergents.<br />

«Elles pourraient lancer un<br />

missile dans notre direction que nous<br />

n’attendions pas.»<br />

pictet report | décembre 2010<br />

investissements alternatifs 33<br />

troisième partie:<br />

du placement alternatif au placement grand public?


J’aimerais tout d’abord remercier tous les orateurs qui nous ont accompagnés<br />

à Zurich en septembre dernier. Chez <strong>Pictet</strong>, si nous aimons<br />

laisser les gérants gérer, nous sommes aussi heureux de les voir de temps<br />

à autre! Je voudrais également adresser mes remerciements aux clients,<br />

aux gérants et aux investisseurs venus des quatre coins du monde pour<br />

participer à notre séminaire consacré aux investissements alternatifs.<br />

Lorsque nous avons planifié cet événement, nous souhaitions<br />

que trois questions y soient abordées. Est-il judicieux<br />

ou non d’investir dans des hedge funds et/ou des placements<br />

privés? Le cas échéant, quelle devrait être la part des<br />

placements alternatifs au sein d’une allocation d’actifs? Et<br />

enfin, si nous investissons dans cette classe d’actifs, faut-il le<br />

faire de manière directe ou par le biais de fonds de fonds, et<br />

avec qui? Nous espérons que ce séminaire aura apporté des<br />

éléments de réponses à ces questions.<br />

Lors du choix d’un placement<br />

alternatif, il convient d’être attentif<br />

à la liquidité et à l’effet de levier, ainsi<br />

qu’aux compétences du gérant en<br />

matière de préservation du capital<br />

Trois facteurs détermineront si le scénario macro-<br />

économique à court terme sera celui d’un double creux,<br />

d’une simple récession ou d’une récession sévère. Le premier<br />

tient dans l’évolution de la croissance américaine au cours<br />

des 12 prochains mois – aucun consensus clair ne s’est dégagé<br />

à cet égard au cours du séminaire. Le deuxième porte sur les<br />

perspectives en matière de dette souveraine, à l’heure où les<br />

efforts de désendettement et l’austérité budgétaire provoquent<br />

un découplage des dynamiques économiques entre la<br />

Chine et les marchés émergents d’une part et les économies<br />

développées d’autre part. Le troisième concerne la régulation<br />

visant à protéger les investisseurs: Va-t-elle trop loin? Aura-telle<br />

des conséquences défavorables?<br />

34 post-scriptum<br />

POST-ScRiPTUM<br />

Les leçons tirées d’un<br />

saut en parachute<br />

Sélection des gérants: la clé du succès et de la sécurité<br />

RÉMY beST<br />

ASSOCIÉ GÉRANT<br />

PICTET & CIE<br />

Dans quelle mesure ces facteurs affecteront-ils les opportunités<br />

d’investissement? Chez <strong>Pictet</strong>, nous pensons que<br />

les hedge funds et le private equity peuvent réellement<br />

constituer une source de valeur ajoutée pour les inve-<br />

stisseurs privés et institutionnels au sein d’une allocation<br />

d’actifs. Reste qu’il convient d’être attentif à la liquidité et<br />

à l’effet de levier des instruments considérés, ainsi qu’aux<br />

compétences du gérant en matière de préservation du capital,<br />

lors du choix d’un placement alternatif. La sélection des<br />

gérants constitue un élément clé, puisqu’il s’agit non seulement<br />

d’éviter des pertes, mais aussi d’identifier les vrais<br />

gagnants de demain.<br />

Pour illustrer les implications d’une telle sélection,<br />

j’aimerais vous parler du cadeau que ma femme m’a offert<br />

récemment: un saut en parachute depuis un hélicoptère.<br />

Arrivé à 4500 mètres, j’ai sauté en tandem avec l’instructeur.<br />

Se lancer d’un hélicoptère et se lancer d’un avion volant à<br />

pleine vitesse sont deux choses différentes: l’hélicoptère fait<br />

du surplace; cela ressemble donc davantage au saut depuis<br />

une falaise. Nous avons fait une minute de chute libre avant<br />

d’ouvrir le parachute, ce qui m’a laissé suffisamment de<br />

temps pour réfléchir. En tant qu’ancien consultant, je savais<br />

qu’il me fallait relever trois points. Les voici:<br />

• J’ignorais totalement si le parachute allait s’ouvrir; c’était<br />

donc un scénario de type «jusqu’ici, tout va bien».<br />

• Ma femme avait choisi le meilleur instructeur qu’elle<br />

avait trouvé – et avec un bon instructeur, vous vous sentez<br />

en sécurité.<br />

• Lors d’un saut en tandem, vos intérêts sont totalement<br />

alignés sur ceux de votre instructeur.<br />

Parfois, en tant qu’investisseur, le «jusqu’ici tout va bien»<br />

est ce que l’on peut espérer de mieux pour le marché. Par<br />

ailleurs, dans la sphère financière, sélectionner le meilleur<br />

gérant permet indéniablement à l’investisseur de se sentir<br />

plus en sécurité. Enfin, il est important de vous assurer que<br />

vos intérêts correspondent à ceux de votre gérant!<br />

pictet report | décembre 2010<br />

investissements alternatifs


PICTET ALTERNATIVES 2010<br />

<strong>Pictet</strong> & Cie a tenu en septembre 2010 à<br />

Zurich son deuxième séminaire relatif<br />

aux investissements alternatifs.<br />

L’organisation de cet événement a<br />

été rendue possible grâce aux solides<br />

relations nouées dans le secteur par<br />

l’équipe de spécialistes de <strong>Pictet</strong> Alternative<br />

Investment (PAI) au cours des<br />

vingt années consacrées à la sélection<br />

des meilleurs gérants de hedge funds et<br />

de private equity.<br />

Les articles présentés ici constituent une<br />

retranscription des interventions et commentaires<br />

des orateurs et panélistes ayant par-<br />

ticipé au séminaire [organisé par <strong>Pictet</strong> les 16<br />

et 17 septembre derniers à Zurich]. <strong>Pictet</strong> & Cie<br />

assume l’entière responsabilité en cas d’erreurs<br />

ou d’omissions survenues dans le processus<br />

de compilation.<br />

Avertissement<br />

Le présent document est établi et distribué par <strong>Pictet</strong> & Cie,<br />

banque sise à Genève, Suisse. Ce rapport n’est pas destiné<br />

à être distribué ou utilisé par une personne ou une entité<br />

qui serait citoyenne, résidente ou vivant dans un lieu,<br />

Etat, pays ou juridiction, dans lesquels la distribution,<br />

la publication, la mise à disposition ou l’utilisation de ce<br />

document seraient contraires aux lois ou autres règlements<br />

en vigueur. Les informations et données présentées ici sont<br />

fournies à titre indicatif uniquement et ne constituent ni<br />

une offre, ni une incitation à acheter, à vendre ou à souscrire<br />

à des titres ou à tout autre instrument financier.<br />

En outre, les informations, opinions et estimations<br />

figurant dans le présent document reflètent le jugement<br />

de leurs auteurs, qui peuvent être mentionnés comme<br />

sources par des tiers, au jour de la publication. Bien qu’elles<br />

proviennent de sources que la Banque estime dignes de foi,<br />

aucune assurance ou garantie, expresse ou implicite, n’est<br />

donnée quant à leur exactitude ou à leur exhaustivité.<br />

Ces informations, opinions et estimations sont d’ailleurs<br />

susceptibles d'être modifiées sans préavis. La valeur<br />

et le rendement des titres ou instruments financiers<br />

mentionnés dans le présent document peuvent faire<br />

l’objet de fluctuations. La valeur boursière peut varier en<br />

fonction de changements d’ordre économique, financier<br />

ou politique, de la durée résiduelle, des conditions du<br />

marché, de la volatilité et de la solvabilité de l’émetteur<br />

ou de celle de l’émetteur de référence. En outre, les taux<br />

de change peuvent avoir un effet positif ou négatif sur la<br />

valeur, le prix ou le rendement des titres ou des placements<br />

y afférents mentionnés dans le présent rapport.<br />

PICTET & CIE<br />

Fondée en 1805 à Genève, <strong>Pictet</strong> & Cie<br />

est aujourd’hui l’une des principales<br />

banques privées de Suisse, avec des fonds<br />

sous gestion et en dépôt de 371 milliards<br />

de francs suisses (279 milliards d’euros)<br />

au 30 septembre 2010. Elle est en outre<br />

considérée comme l’une des plus grandes<br />

institutions indépendantes en matière de<br />

gestion de fortune en Europe.<br />

La Banque revêt la forme juridique<br />

d’une société en commandite, détenue<br />

et gérée par huit associés indéfiniment<br />

et solidairement responsables de ses<br />

engagements.<br />

Le groupe <strong>Pictet</strong>, dont le siège se<br />

trouve à Genève, emploie plus de 3000<br />

collaborateurs et dispose de bureaux<br />

dans les villes suivantes: Barcelone,<br />

Bâle, Dubaï, Florence, Francfort, Genève,<br />

Hong-kong, Lausanne, Londres, Luxembourg,<br />

Madrid, Milan, Montréal, Nassau,<br />

Paris, Rome, Singapour, Turin, Tokyo<br />

et Zurich.<br />

Les performances passées ne doivent pas être considérées<br />

comme une indication ou une garantie de la performance<br />

future. <strong>Pictet</strong> & Cie n’assume aucune responsabilité,<br />

implicite ou explicite, ni ne fournit de garantie quant<br />

aux performances futures. Les instructions du client<br />

concernant le négoce, les transactions et les contraintes<br />

d’investissement priment sur, et peuvent être différentes<br />

de, la politique d’investissement générale et des<br />

recommandations de la Banque.<br />

Destinée aux clients professionnels ou<br />

institutionnels, la présente publication a été publiée en<br />

Suisse par <strong>Pictet</strong> Asset Management S.A., société suisse<br />

enregistrée auprès de l’Autorité fédérale des marchés<br />

financiers (FINMA), et dans le reste du monde par <strong>Pictet</strong><br />

Asset Management Limited, société agréée par et placée<br />

sous la surveillance de la Financial Services Authority.<br />

Elle n’est pas destinée à être utilisée par ou distribuée aux<br />

clients privés ou à toute personne, ou entité, qui est<br />

citoyenne ou résidente dans un lieu, Etat, pays ou<br />

juridiction dans lesquels la distribution, la publication,<br />

la mise à disposition ou l’utilisation de cette publication<br />

seraient contraires aux lois ou autres règlements<br />

en vigueur.<br />

Le présent document et son contenu peuvent être<br />

cités avec indication de la source, mais la reproduction ou<br />

la distribution, partielle ou totale, de la publication ne sont<br />

pas autorisées sans l’accord préalable de <strong>Pictet</strong> & Cie.<br />

Tous droits réservés. Copyright © 2010 <strong>Pictet</strong> & Cie.


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