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tique (baptisé “Fraijus”) qui permettra de
connaître en temps réel les sommes
encore disponibles dans les caisses de
chaque juridiction et, surtout, les montants
engagés par chaque magistrat. Un
outil de flicage [...] ? Pas du tout, un
outil de “responsabilisation”, répond le
ministère. » [17]
En attendant que les frais d’interrogatoires
soient à la charge des accusés [19]
tous les moyens sont bons pour faire
appliquer la loi à moindre coût. « Tous
les tribunaux emploient des “collaborateurs
occasionnels”, [...] chargés de procéder
à des expertises, ou [...] des missions
comme la tutelle ou la curatelle.
D’autres sont “délégués du procureur”,
lequel les charge d’exécuter [...] la
“médiation pénale” [... ou] le “rappel à la
loi” [... ou encore des] enquêtes rapides
[...]. Tout cela représente plus d’un millier
de personnes [..., mais] personne,
au ministère de la Justice, ne se risque à
fournir un chiffre précis. [...] Le gros des
troupes se recrute parmi les anciens policiers
ou gendarmes. [... On y gagne un]
chèque, mais sans fiche de paie, et pas
un sou de cotisations sociales. » [20]
Dans une « circulaire signée [...] au nom
de Perben [21] [...,] le ministère [..., en
effet,] fait un triple aveu. Primo, les
sommes versées aux collaborateurs occasionnels
[des procureurs] ne sont pas
déclarées au fisc. C’est à eux de songer à
“leurs obligations”. Si ça leur chante.
Secundo, l’affiliation à la sécu “n’a toujours
pu être mise en œuvre”. Tertio, si
l’un de ces travailleurs au noir avait un
accident pendant son travail, le ministère
propose cette petite astuce : le faire
passer pour un bénévole, afin de l’assurer.
» [20] Comme de juste.
« Pourtant, le 17 janvier 2000, Martine
Aubry, alors ministre [...], avait signé un
décret destiné à faire rentrer dans le lot
Sécurisons un peu 340
commun ces petits boulots qui, pour l’essentiel,
avaient été créés l’année précédente.
Le 21 juillet 2000 paraissait une
“circulaire d’application” qui [... n’a]
jamais été appliquée. Depuis cette date,
les délégués des procureurs continuent
à être payés au noir. [... L’extrême] difficulté
de la rédaction d’une feuille de
paie est tout de même résolue avec succès
par bon nombre d’employeurs. Et
ceux qui n’y arrivent pas sont parfois
poursuivis… par la Justice, et sur réquisition
du procureur. » [20]
Malgré de telles carences, les magistrats
devraient pouvoir aider les grands
« capitaines d’industrie ». « Quant à la
commission juridique du Medef, elle
pousse le dévouement jusqu’à préparer,
pour les parlementaires, des amendements
“clés en main”, afin qu’ils les présentent,
si possible, lors des débats à
l’Assemblée ou au Sénat. [...] Le président
de la Commission juridique du
Medef, Bernard Field, est [...] un ancien
magistrat. Voilà même quelques années,
il était même résolument à gauche, et
militait au Syndicat de la magistrature
[22]. Puis il a eu l’occasion de “pantoufler”
chez Saint-Gobain, où il a fait
une belle carrière et accompli sa révolution
culturelle. » [23] Et, de fait, la commission
juridique du Medef est efficace.
On peut par exemple prendre « la loi
Borloo [de “cohésion sociale”] telle qu’elle
a été adoptée définitivement par le
Parlement [...] : sauf sur un point du projet
– les licenciements pour compétitivité
-, le Medef a effectivement pu faire
adopter tous ses amendements, notamment
grâce à ses amis sénateurs UMP. »
[24] « Mission accomplie ! » [25]
[1] : (Christophe Paille et Thierry Godefroy, « Coûts du
crime. Une estimation monétaire des infractions en
1996 », Cesdip, Guyancourt, 1999)
[2] : (Loïc Wacquant, « Des politiques carcérales injustes et
criminogènes. Fermons les prisons ! », Le Monde diploma-