LIVRE 2005 - page rieuse - Free

de plus, elle libérait un peu Chirac des
otanistes de droite.
On connaît d’ailleurs le « réalisme »
socio-démocrate : Barre socialiste à tribord
toute. « Moyennant une propagande
médiatique intense, ils arrivent à
accréditer chez les salariés l’illusion qu’ils
sont les auteurs bienveillants d’une politique
sociale humaniste (voir socialeouvriériste),
généreuse, soucieuse de
justice et de dignité, alors qu’en fait tout
leur talent, acquis dans les écoles du
pouvoir, est de gérer au mieux des intérêts
dominants l’indispensable redistribution
sans laquelle des millions de salariés
frustrés et excédés risqueraient de se
mobiliser contre le système. » [3]
« Et Jospin [avant les élections] de mettre
en garde les hiérarques socialistes :
“Pendant cinq ans, nous avons réussi à
ne pas nous laisser entraîner par l’extrême
gauche. Continuez sur cette voie. Si
le PS cède aux tentations gauchistes, ça
lui coûtera cher !” » [4] Dont acte.
A contrario, Arlette Laguiller, avant le
premier tour, alors qu’on la crédite de
votes accrus, estime que « les électeurs
réagissent ainsi au refus de Jospin de
dépénaliser l’usage du cannabis, à la
situation des sans-papiers et à la trop
grande place accordée, dans cette campagne
au discours sur la sécurité. » [5]
Alors, Jospin ratissait encore plus loin à
droite en promouvant l’incarcération
d’enfants délinquants [Voir « Jospin de
sucre », p. 299].
« Ainsi, en 2002, au moment de l’élection
présidentielle française, l’accent mis
sur le thème de l’insécurité a conduit à
minorer la présentation d’autres actualités,
économiques, sociales ou internationales.
» [6] [Voir « Les français ont exigé
plus de sécurité », p. 259]
« Durant la campagne des présidentielles,
[...] le R.P.R., bientôt rejoint par le
P.S., s’est efforcé de récupérer le senti-
ment diffus, mais prégnant, de vulnérabilité
qu’a suscité [...] la généralisation
de l’insécurité sociale générale par vingt
ans de politique libérale : la précarisation
de l’emploi et [...], dans l’entreprise, [...]
l’accroissement de la flexibilité et l’intensification
du travail, ont rendu vulnérables
des couches salariales de plus en
plus nombreuses – jusque dans la fonction
publique [7].
Parce qu’aucune politique nationalement
visible n’a [...] su énoncer cette
insécurité sociale et se mobiliser contre
elle, et parce qu’une telle insécurité s’inscrit
quasi physiquement dans les corps
[...], sous forme de “tensions”, d’anticipations
négatives, d’appréhension de
vagues dangers, la perception de ces
menaces s’est déplacée et a pris la forme
d’un sentiment d’insécurité physique.
Dans le même temps, l’extension de la
vulnérabilité sociale a bien sûr favorisé la
montée de la petite délinquance qui a
“donné corps” à ce sentiment d’insécurité
physique et l’a en quelque sorte
“confirmé”. Alors, les partis qui s’étaient
faits les promoteurs de l’insécurité sociale,
vingt ans durant, ont entrepris de
récupérer le sentiment d’insécurité physique
ainsi suscité. » [8] Rien ne se perd.
[1] : (Cité in « Soupe à la grimace », Le Canard enchaîné,
14/2/2001, p. 2)
[2] : (Martine Valo, « La Fédération anarchiste juge que la
dissolution “n'est qu'un épiphénomène de la vie politique”
», Le Monde, 21/5/1997)
[3] : (Alain Accardo, « De notre servitude involontaire.
Lettre à mes camarades de gauche », Agone, 2001, p. 36)
[4] : (« Jospin s’angoisse », Le Canard enchaîné,
16/10/2002, p. 2)
[5] : (Arlette Laguiller, rapporté par Marianne, 18/3/2002,
p. 22)
[6] : (« Gilles Balbastre, « Un certain effet de brouillage... »,
Le Monde diplomatique, 12/2004, p. 15,
http://www.monde-diplomatique.fr/2004/12/BAL-
BASTRE/11720)
[7] : (Voir Robert Castel, « les métamorphoses de la question
sociale. Une chronique du salariat », Fayard, 1995)
[8] : (Philippe Chailan, « La loi Perben. La guerre au pauvre
vue des beaux quartiers », Ecologie Sociale, n° 1, 10-
11/2002, p. 19)
321 Sécurisons un peu