LIVRE 2005 - page rieuse - Free

ge encore de cette mesure et [la] perte
financière qui en découlera sera dans
maints cas compensée, du côté des
ados, par une recrudescence des petits
délits. » [10] Mais que veut-on réellement
faire ? « Eteindre le feu ou souffler
sur les braises ? » [11]
« Dès la fin des années quatre-vingt, des
voix se sont élevées, y compris parmi les
vétérans de la “guerre à la drogue”, pour
[... souligner] que les lois antidrogues
étaient plus nocives que les substances
elles-mêmes et qu’elles mettaient en péril
les libertés publiques, que la prohibition
contribuait à dynamiser l’économie souterraine,
ou bien encore qu’elle était
contre-productive en matière de soins.
[...] En France, [...] le Conseil national du
sida [s’est prononcé] en faveur d’une
décriminalisation totale de la consommation
[... En] 1995 déjà, une commission
d’experts nommée par le gouvernement
avait préconisé, en vain, de dépénaliser
l’usage et la possession de cannabis.
» [12] [Voir « Pour la drogue donc
contre », p. 144]
« Si l’on veut rendre compte des délinquances
des jeunes, il faut [13] [...] réfléchir
non pas seulement en terme de
mécanismes inhibiteurs ou de morale
intériorisée, mais s’interroger sur les raisons
des jeunes de jouer le jeu social
dans les règles. Dans cette optique, on
passe d’une compréhension de la délinquance
comme insuffisance des ressources
ou des capacités adaptatives de
la part de jeunes à une situation où les
acteurs considèrent que, pour eux, le
jeu est verrouillé, qu’il n’ont pas ou trop
peu de possibilités d’action dans le respect
des règles et que, par conséquent,
il faut sortir du cadre imposé. » [14] Et
rentrer alors dans un nouveau cadre : les
« normo-marginaux » [Voir « La tenaille
dont vous êtes une mâchoire », p. 296].
Pourquoi en est-on arrivé là ? « Si l’enfant
Sécurisons un peu 304
est la première victime de la société marchande,
c’est qu’il porte en lui la promesse
d’une vie dont la loi du profit
brise l’essor. N’être pas rentable est son
crime, le devenir rapidement, sa seule
façon de l’expier. Emancipé – en Europe
tout au moins – de la famille patriarcale
où il n’était qu’un objet soumis à un pouvoir
paternel arbitraire et presque absolu,
le voici, dès le berceau, sommer de
consommer l’inutilité rentable, en attendant
l’âge où il aura le devoir de la produire.
» [15]
Et heureusement, en effet, que les
marques [Voir Liquidation Totale n° 2] lui
permettent de s’évader. Comment ça se
passe ? Le « magazine de la chaîne
McDonald's intitulé "ça se passe comme
ça" [16] vante les mérites du jeu Gran
Theft Auto : "Sous les traits d'un braqueur
de banque évadé, vous devez écumer les
rues [...] vous disposerez d'une dizaine
d'armes [...]. Libre à vous [...] d'agresser
ouvertement les passants dans la
rue." » [17] Mais, en jouant chez McDo,
on pourra s’énerver avec du café « équitable
», alors l’honneur « citoyen » sera
sauf. En effet, dès 2003, « c'est un café
acheté selon les règles du commerce équitable,
certifié Max Havelaar, que les clients
des 140 restaurants McDo de Suisse vont
déguster, pour un prix un peu plus élevé.
Une opération marketing de taille » [18].
Et si on calmait tous ces « sauvageons »