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LIVRE 2005 - page rieuse - Free

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« Depuis une dizaine d'années, des<br />

"experts en sécurité", souvent d'anciens<br />

policiers, ont monté leurs<br />

propres entreprises [… de] diagnostics<br />

vendus clé en main aux municipalités,<br />

contre plusieurs dizaines de<br />

milliers d'euros, dans le cadre notamment<br />

des contrats locaux de sécurité,<br />

mis en place depuis 1997. Un lobbying<br />

aussi efficace […] qu'inquiétant.<br />

Non seulement ces "experts"<br />

influents font du modèle anglo-saxon<br />

(caméras de vidéosurveillance, police<br />

municipale, tolérance zéro, etc.) l'alpha<br />

et l'oméga de toute politique en<br />

matière de sécurité, mais, de plus, ils<br />

s'appliquent, dans une véritable<br />

logique marchande, à nourrir de<br />

leurs propos alarmistes cette situation<br />

sur laquelle ils prospèrent... » [1]<br />

C’est pourquoi depuis « le retour de la<br />

gauche au pouvoir en 1997, une poignée<br />

de ces experts multiplient les interventions<br />

médiatiques ». [2]<br />

Une « quinzaine d’années après le "tournant<br />

libéral" de 1983 en matière économique,<br />

le "tournant sécuritaire" du P.S.<br />

était en voie d’être consommé. D’où les<br />

lénifiants propos de campagne de Lionel<br />

Jospin sur le fait que le problème de l’in-<br />

Sécurisons un peu 234<br />

sécurité méritait d’être traité en dehors<br />

des clivages partisans. » [3] [Voir « Jospin<br />

dans la gueule », p. 224]<br />

Les experts « diffusent, pour des raisons<br />

professionnelles, une idéologie sécuritaire<br />

résolument ignorante de la sociologie<br />

et tournent par là le dos à toute la tradition<br />

de la criminologie française depuis<br />

Tarde et Lacassagne [4]. » [3]<br />

« L’"expert" balaye les causes et propose<br />

une approche gestionnaire des effets : à la<br />

question de la situation économique et<br />

sociale des quartiers populaires, il substitue<br />

celle de la "lutte contre la violence urbaine"<br />

». [2] Il dissimule le fait que la "tolérance<br />

zéro", qu’il réclame, signifie "itolérance<br />

infinie". Par exemple, si on prétend minimiser<br />

le risque de voir un coupable en<br />

liberté, on maximise évidemment le risque<br />

de voir des innocents jetés en prison.<br />

Dans le style (performatif) de la "prophétie<br />

auto-accomplissante" [5], le discours<br />

ultra-sécuritaire permet de faire advenir<br />

ce qu'il annonce et à quoi il prétend<br />

s’opposer. Il justifie en l’accompagnant<br />

le mouvement d’aggravation de la situation<br />

sociale ("Il faut arrêter de faire dans<br />

le social. On n'est pas là pour faire de la<br />

prévention, ça ne marche pas la prévention…").<br />

Il obtient donc vite l’explosion<br />

de violence qu’il annonce, pour ensuite<br />

répondre policièrement aux dégâts créés<br />

dans le tissu social. Et dans la logique de<br />

ce renversement des conséquences en<br />

causes, les protestations contre une<br />

répression qui "bave" deviennent évidemment<br />

"rébellion et outrage à agent"<br />

justifiant de nouvelles répressions musclées.<br />

La logique de la répression préventive<br />

est ici à l'œuvre, qui participe<br />

grandement à faire advenir ce qu'elle<br />

prétend résoudre. Ce traitement policier<br />

du social est facilité par la dissémination<br />

de jugements de valeur qui, il y a peu,<br />

étaient dits d'extrême-droite [6].

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