LIVRE 2005 - page rieuse - Free

ande d'alcool au cours de la prohibition.
Il a conservé ses avoirs en retirant
ses placements au bon moment avant le
krach boursier de 1929. » [5]
« Les effets pervers d’une interdiction
absolue ne tardent pas […,] des décès
dus à l’alcool frelaté apparaissent, les
débits clandestins se multiplient, la grande
criminalité progresse et bénéficie de
revenus considérables grâce auxquels
elle peut corrompre juges et policiers.
Enfin et surtout les citoyens en viennent
à ne plus croire en la loi, et à douter – ce
qui est plus grave – de leur propre
Constitution [6]. » [7]
Comme d’habitude, le combat policier
de l’Etat ne s’en prend (presque ?)
qu’aux victimes des maffieux. Et « cette
guerre aux drogues s'est traduite surtout
par une aggravation de la situation,
que cela concerne la santé des
usagers (alors que c'est pour leur santé,
paraît-il […]), ou leurs conditions
sociales. Paradoxalement, la consommation
explose. C'est un peu l'histoire du
pompier pyromane.
De plus, la criminalisation de l'usage et,
par voie de conséquence, de la détention,
de l'achat et de la vente, a poussé
à des conduites délinquantes. Elle a
appris à des centaines de milliers de personnes
(en France) les lois de la clandestinité,
voire à se comporter en "vrai" criminel
! Loin de protéger l'ordre public, la
prohibition est incontestablement facteur
d'insécurité, bien plus que les
drogues elles-mêmes. Même le patron
d'Interpol le reconnaît. » [8] Mais elle est
pourtant jugée douce, la prohibition des
drogues ! Car, les économistes le savent,
« c'est bien la prohibition qui crée le
risque et assure les profits du trafic, soit
les trois quart du chiffre d'affaire ». [9]
« Dès l’après-guerre, la drogue conclut
un pacte avec la politique. [...] Lucky
Luciano est sous les verrous, et le syndicat
du crime s’en trouve considérablement
affaibli. C’est dans d’étranges
circonstances que le truand sort de prison,
pendant les hostilités. » [10]
« Lucky Luciano, le mythique successeur
d'Al Capone, le parrain des parrains
de la Mafia, l'homme de Cosa
Nostra, [… détiendra] après guerre le
monopole mondial de la drogue au
prix d'un accord tacite avec l'OSS, qui
deviendra la CIA : offrir son réseau
mondial de truands pour renseigner le
service secret, en échange d'être laissé
tranquille sur "la blanche" [...]. Ecroué
à vie aux USA à l'aube de la seconde
Guerre mondiale, le truand légendaire
a négocié sa libération avec l'OSS pour
filer en Sicile préparer le débarquement
américain. » [11]
L’affaire progressera dès lors. Un ancien
de la DEA, l’organisme US de lutte
contre la drogue, raconte : « nos services
comprennent progressivement que la
CIA ne se contente pas de protéger des
narcotrafiquants qui, en réalité, travaillent
pour son compte : elle organise
aussi, sur les vols réguliers de lignes
aériennes qu’elle détient (comme Air
America), l’acheminement de la drogue
depuis les quatre coins de l’Asie du Sud-
Est – officiellement pour soutenir nos
"alliés" dans ces pays. Elle utilise encore
ses comptes bancaires pour blanchir l’argent
généré par ce gigantesque trafic.
Bref, la CIA s’est lancée dans le commerce
de la drogue. Et elle apprend vite
[…], aux quatre coins de la planète, la
CIA et le Département d’Etat protègent
un nombre croissant de narcotrafiquants
dont le rôle politique est loin d’être
mineur : les moudjahidine d’Afghanistan,
les cartels de la cocaïne en Bolivie,
les plus hauts dignitaires de l’Etat mexicain,
les magnats panaméens passés
145 Franc du Collier