79 - Vaincre et Convaincre

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26.06.2013 Views

que suivre la trace d'un mouvement et organiser autour d'elle les différents éléments qui nous ont semblé déterminants dans la constitution de l’ordre à partir duquel un tel discours était devenu possible et significatif. «Dans toute société, disait à juste titre Michel Foucault, la production du discours est à la fois contrôlée, sélectionnée, organisée et redistribuée par un certain nombre de procédures qui ont pour rôle d'en conjurer les pouvoirs et les dangers, d'en maîtriser l'événement aléatoire, d'en esquiver la lourde, la redoutable matérialité»(3). Le discours qui fait l'objet de notre travail sur l'idéologie arabe contemporaine, et la méthode d'écrire l'histoire de la pensée arabe moderne, n'a rien de commun avec l'idéologie produite par les intellectuels arabes de la «Nahda» (renaissance) arabe; c'est plutôt le discours «sauvage» d'un hors-la-loi connu dans la région de Zahlé - dans la Béqâ' un hors-la-loi maronite qui surgit jusqu'à maintenant dans les contes populaires où se mêle le mythe avec la réalité et s'enchevêtrent les actes d'héroïsme et de bravoure avec la constitution d'un pouvoir catholique familial au niveau de la ville de Zahlé sous l'égide et en contradiction avec le pouvoir central Ottoman à l'époque transitoire de la première guerre mondiale. C'est dans l'entreprise de centralisation menée; par le pouvoir central ottoman pour assurer la cohésion de ses différentes parties disparates que se lit en transparence l'idéologie pratique particulière d'une de ses multiples minorités, en l'occurrence une idéologie maronite pratique se constituant en marge d'un pouvoir local chrétien mais catholique pendant et après la première guerre mondiale. faisant partie de l'Empire ottoman et se définissant par différence et comme exception par rapport à la «règle» représentée par le tout ottoman. Elle en désigne le lieu et la fonction et fixe ses points d'articulation aux diverses luttes économiques, politiques et idéologiques de l'époque. Faire l'histoire de la centralisation de l'État ottoman c'est faire l'histoire du développement inégal des différents appareils d'État et du

décalage des systèmes de tensions et d'oppositions entre un pouvoir qui se veut dominant et des pouvoirs locaux se voulant autonomes. C'est aussi faire l'histoire d'un mouvement d'expansion qui ayant élargi ses frontières au maximum, s'est trouvé dans l'impossibilité de développer son offensive à partir de la seconde moitié du 16° siècle; durant cette époque l'affaiblissement de l'autorité centrale ottomane correspondait en Occident à un processus de renforcement de l'administration centrale (monarchie autoritaire) au détriment des féodalités autonomes et rivales. La montée ottomane en Orient sur les ruines de l'Empire Seldjouquide - «Le tombeau de l'Empire Seldjouquide, disait Von Hammer, devint le berceau de l'Empire Ottoman»(4) - reproduit un processus courant dans l'histoire, la ruée des tribus «barbares» de la périphérie sur les centres d'un empire hautement «civilisé» qui connaît déjà la désintégration de sa cohésion interne. C'est le phénomène des tribus ayant un «esprit de clan» açabyat- très fort lié à leur mode de vie bédouin - 'Oumrân Badawi - Ibn Khaldoun considère dans ses prolégomènes que: «Lorsqu'un esprit de clan donné a affermi sa domination sur son peuple, il cherchera naturellement à dominer les autres clans distincts du sien. S'il les vaut, les uns et les autres s'équilibrent. Dans ce cas chaque clan est maître chez soi; c'est le cas des tribus et des nations sur toute la terre. Cependant, si l'un de ces clans domine, les deux esprits de clans s'interpénètrent et le vaincu accroît la force du vainqueur lequel dresse encore plus haut son objectif de domination et de supériorité. Et ainsi de suite jusqu'à ce que le pouvoir du clan triomphant égale celui de la dynastie régnante. Alors, quand celle-ci vieillit et que nul des siens ne vient la défendre, le clan rival lui ravit le pouvoir et règne à son tour»(5). C'est principalement dans les activités guerrières que cet esprit de clan traduit la cohésion du groupe tribal; cet esprit de clan implique une forte hiérarchisation et a pour autre condition nécessaire l'action dirigeante d'un chef appuyé par la famille. S'il est vrai qu'aucune idéologie religieuse ne parvient à s'imposer sans le soutien et le fonctionnement d'un fort esprit de clan, il est tout aussi vrai qu'aucun

décalage des systèmes de tensions <strong>et</strong> d'oppositions entre un pouvoir qui<br />

se veut dominant <strong>et</strong> des pouvoirs locaux se voulant autonomes. C'est<br />

aussi faire l'histoire d'un mouvement d'expansion qui ayant élargi ses<br />

frontières au maximum, s'est trouvé dans l'impossibilité de développer<br />

son offensive à partir de la seconde moitié du 16° siècle; durant c<strong>et</strong>te<br />

époque l'affaiblissement de l'autorité centrale ottomane correspondait<br />

en Occident à un processus de renforcement de l'administration centrale<br />

(monarchie autoritaire) au détriment des féodalités autonomes <strong>et</strong><br />

rivales.<br />

La montée ottomane en Orient sur les ruines de l'Empire<br />

Seldjouquide - «Le tombeau de l'Empire Seldjouquide, disait Von<br />

Hammer, devint le berceau de l'Empire Ottoman»(4) - reproduit un<br />

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périphérie sur les centres d'un empire hautement «civilisé» qui connaît<br />

déjà la désintégration de sa cohésion interne. C'est le phénomène des<br />

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bédouin - 'Oumrân Badawi - Ibn Khaldoun considère dans ses<br />

prolégomènes que:<br />

«Lorsqu'un esprit de clan donné a affermi sa domination sur son<br />

peuple, il cherchera naturellement à dominer les autres clans<br />

distincts du sien. S'il les vaut, les uns <strong>et</strong> les autres s'équilibrent.<br />

Dans ce cas chaque clan est maître chez soi; c'est le cas des tribus <strong>et</strong><br />

des nations sur toute la terre. Cependant, si l'un de ces clans<br />

domine, les deux esprits de clans s'interpénètrent <strong>et</strong> le vaincu<br />

accroît la force du vainqueur lequel dresse encore plus haut son<br />

objectif de domination <strong>et</strong> de supériorité. Et ainsi de suite jusqu'à ce<br />

que le pouvoir du clan triomphant égale celui de la dynastie<br />

régnante. Alors, quand celle-ci vieillit <strong>et</strong> que nul des siens ne vient<br />

la défendre, le clan rival lui ravit le pouvoir <strong>et</strong> règne à son tour»(5).<br />

C'est principalement dans les activités guerrières que c<strong>et</strong> esprit de<br />

clan traduit la cohésion du groupe tribal; c<strong>et</strong> esprit de clan implique une<br />

forte hiérarchisation <strong>et</strong> a pour autre condition nécessaire l'action<br />

dirigeante d'un chef appuyé par la famille. S'il est vrai qu'aucune<br />

idéologie religieuse ne parvient à s'imposer sans le soutien <strong>et</strong> le<br />

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