79 - Vaincre et Convaincre

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26.06.2013 Views

nation, État, plusieurs États, mais ils finissent toujours par dégager, par l'analyse, quelques rapports généraux abstraits déterminants, tels que la division du travail, l'argent, la valeur, etc. Dès que ces facteurs isolés ont été plus ou moins fixés et abstraits, les systèmes économiques ont commencé, qui portent des notions simples telles que travail, division du travail, besoin, valeur d'échange, pour s'élever jusqu'à l'État, les échanges entre nations et le marché mondial»(3). Mais cette critique de la méthode empirique/inductive n'est pas faite par Marx pour réhabiliter un certain rationalisme «théoriciste», comme voulait nous faire croire Althusser qui a insisté sur ce texte méthodologique de 1857; Marx s'emploie plutôt, après avoir décrit le premier mouvement s'élevant du concret à l'abstrait, et du spécifique au général, à l'insérer dans le mouvement opposé allant de la théorie générale et du concept vers le réel concret, dans l'intersection de ces deux mouvements, il essaie de résoudre un problème très ancien dans l'histoire de la pensée: «Cette dernière méthode est manifestement la méthode scientifique correcte. Le concret est concret parce qu'il est la synthèse de multiples déterminations, donc unité de la diversité. C'est pourquoi il apparaît dans la pensée comme point de départ, bien qu'il soit le véritable point de départ, et par suite également le point de départ de la vue immédiate et de la représentation. La première démarche a réduit la plénitude de la représentation à une détermination abstraite, avec la seconde, les déterminations abstraites conduisent à la reproduction du concret par la voie de la pensée. C'est pourquoi Hegel est tombé dans l'illusion de concevoir le réel comme le résultat de la pensée, qui se concentre en elle-même, s'approfondit en elle-même, se meut par elle-même, alors que la méthode qui consiste à s'élever de l'abstrait au concret n'est pour la pensée que la manière de s'approprier le concret, et de le reproduire sous la forme d'un concret pensé. Mais ce n'est nullement là le procès de la genèse du concret lui-même»(4). Il semble donc, à partir de cette problématique méthodologique, que nous sommes en présence d'une optique différente du débat opposant le général au spécifique, cette optique fait la synthèse entre l'empirique et le rationnel de façon telle que chacun des deux points de

vue précédents - déductif et inductif - est critiqué dans ses limites, et la théorie générale n'est que le concret reproduit au niveau de la pensée. Mais si, par cette ruse épistémologique, la façon de poser le problème du rapport général/spécifique, marxisme/Islam avait changé, cela ne veut pas dire que le problème est pour autant résolu, nous ne sommes pas des adeptes des solutions purement épistémologiques et formelles, surtout dans le cas qui nous préoccupe. En effet, dans les analyses courantes dites «marxistes», traitant de l'empire ottoman en général ou de la société arabe moderne en particulier, nous constatons que la période allant du XIXe siècle jusqu'à la première guerre mondiale, occupe une place privilégiée; le début de cette période coïncidant, selon ces analyses, avec la pénétration du capitalisme occidental dans les pays arabes dits «sous-développés», nous imposerait l'examen de la relation existante entre deux ordres de faits culturels dont l'un - l'occident - a prouvé sa suprématie historique sur l'autre - l'Orient - comme on 1'a déjà vu à un autre niveau au chapitre premier; on aboutit ainsi, d'après cette démarche «marxiste» déductive, à la conclusion logique selon laquelle l'occident capitaliste est à même de considérer les formes «sous-développées» caractérisant le monde arabe actuel, comme des étapes inférieures menant nécessairement à son propre degré d'évolution, ou bien on livre au savoir son titre d'appartenance à la «civilisation» la plus «avancée», quitte à se dérober par la suite derrière des «conseils épistémologiques» insistant sur la spécificité des sociétés «en retard», par leur privation du savoir occidental; ces pays se trouveraient dépourvus des instruments théoriques nécessaires pour analyser leurs propres problèmes. Dominique chevallier l'a bien explicité: «La science historique est un produit de la civilisation de l'Europe occidentale; son élaboration a d'abord répondu au besoin d'expliquer cette civilisation, son développement, son expansion. Ce n'est donc pas sans une large réflexion épistémologique que ses méthodes peuvent être appliquées à d'autres civilisations, à celles qui n'ont inventé, ni ce type de pensée historique, ni le nouveau

vue précédents - déductif <strong>et</strong> inductif - est critiqué dans ses limites, <strong>et</strong> la<br />

théorie générale n'est que le concr<strong>et</strong> reproduit au niveau de la pensée.<br />

Mais si, par c<strong>et</strong>te ruse épistémologique, la façon de poser le<br />

problème du rapport général/spécifique, marxisme/Islam avait changé,<br />

cela ne veut pas dire que le problème est pour autant résolu, nous ne<br />

sommes pas des adeptes des solutions purement épistémologiques <strong>et</strong><br />

formelles, surtout dans le cas qui nous préoccupe.<br />

En eff<strong>et</strong>, dans les analyses courantes dites «marxistes», traitant de<br />

l'empire ottoman en général ou de la société arabe moderne en<br />

particulier, nous constatons que la période allant du XIXe siècle jusqu'à<br />

la première guerre mondiale, occupe une place privilégiée; le début de<br />

c<strong>et</strong>te période coïncidant, selon ces analyses, avec la pénétration du<br />

capitalisme occidental dans les pays arabes dits «sous-développés»,<br />

nous imposerait l'examen de la relation existante entre deux ordres de<br />

faits culturels dont l'un - l'occident - a prouvé sa suprématie historique<br />

sur l'autre - l'Orient - comme on 1'a déjà vu à un autre niveau au<br />

chapitre premier; on aboutit ainsi, d'après c<strong>et</strong>te démarche «marxiste»<br />

déductive, à la conclusion logique selon laquelle l'occident capitaliste est<br />

à même de considérer les formes «sous-développées» caractérisant le<br />

monde arabe actuel, comme des étapes inférieures menant<br />

nécessairement à son propre degré d'évolution, ou bien on livre au<br />

savoir son titre d'appartenance à la «civilisation» la plus «avancée»,<br />

quitte à se dérober par la suite derrière des «conseils épistémologiques»<br />

insistant sur la spécificité des sociétés «en r<strong>et</strong>ard», par leur privation du<br />

savoir occidental; ces pays se trouveraient dépourvus des instruments<br />

théoriques nécessaires pour analyser leurs propres problèmes.<br />

Dominique chevallier l'a bien explicité:<br />

«La science historique est un produit de la civilisation de l'Europe<br />

occidentale; son élaboration a d'abord répondu au besoin<br />

d'expliquer c<strong>et</strong>te civilisation, son développement, son expansion. Ce<br />

n'est donc pas sans une large réflexion épistémologique que ses<br />

méthodes peuvent être appliquées à d'autres civilisations, à celles<br />

qui n'ont inventé, ni ce type de pensée historique, ni le nouveau

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