79 - Vaincre et Convaincre

79 - Vaincre et Convaincre 79 - Vaincre et Convaincre

pages.infinit.net
from pages.infinit.net More from this publisher
26.06.2013 Views

L'ancien débat culturaliste opposant le «modernisme» au courant de «l'authenticité», prend ainsi une nouvelle forme accentuée par la conjoncture politique du monde arabe qui a toujours joué, dans sa complexité, le rôle de démystificateur des théories simplistes ne tenant pas le coup devant la complexité et la richesse de la réalité arabe concrète. Nous pouvons schématiquement retrouver les origines de ces deux points de vue dans une double méthode opposant, le premier (déductif) au second (inductif). 1 - déductif - son point de départ se trouve dans les principes et les concepts généraux du marxisme, qu'il s'emploie à appliquer à la réalité spécifique du monde arabe. 2 - inductif - qui refuse tout a priori théorique venant du «dehors» de la réalité spécifique, la spécificité est à analyser à partir de la production théorique locale trouvant ses fondements chez Ibn Khaldoun. Cette schématisation ne résume pas tout à fait les deux points de vue en question, elle ne fait que tracer la ligne de démarcation méthodique qui les sépare, et les situe dans le cadre de l'histoire de la philosophie: le premier point de vue se rattacherait alors à la tendance rationaliste sans pour autant s'y identifier, et le second point de vue se rapporterait à la tendance empiriste sans s'y assimiler, étant donné qu'elle remplace l'a priori théorique marxiste par un autre a priori théorique: celui d'Ibn Khaldoun ou autre. Ces deux courants de pensée sont aussi anciens, du point de vue méthodologique, que l'histoire de la philosophie, ils se rattachent à la lutte opposant le rationalisme à l'empirisme, laquelle a trouvé un début d'issue dans la théorie marxiste de la connaissance, qui formule la synthèse du rapport rationnel/empirique, général/spécifique, sur un terrain différent:

«Quand nous concidérons un pays donné au point de vue de l'économie politique, nous commençons par étudier sa population, la division de celle-ci en classes, sa répartition dans les villes, à la compagne, au bord de la mer, les différentes branches de production, l'exportation et l'importation, la production et la consommation annuelles, les prix des marchandises, etc.»(1) Marx retrace donc la démarche classique de l'économie politique qui prend l'empirique, le spécifique, le concret, comme point de départ méthodologique. Il s'emploie par la suite à critiquer cette démarche empirique coïncidant avec ce que nous avons appelé la méthode inductive/empirique: «Il semble que ce soit la bonne méthode de commencer par le réel et le concret, qui constituent la condition préalable effective, donc en économie politique, par exemple, la population qui est la base et le sujet de l'acte social de production tout entier. Cependant, à y regarder de plus près, on s'aperçoit que c'est là une erreur. La population est une abstraction si l'on néglige par exemple les classes dont elle se compose. Ces classes sont à leur tour un mot creux si l'on ignore les éléments sur lesquels elles reposent, par exemple le travail salarié, le capital, etc. Ceux-ci supposent l'échange, la division du travail, les prix, etc. Le capital, par exemple, n'est rien sans le travail salarié, sans la valeur, l'argent, le prix, etc. Si donc on commençait ainsi par la population, on aurait une représentation chaotique du tout et, par une détermination plus précise, par l'analyse, on aboutirait à des concepts de plus en plus simples, du concret figuré on passerait à des abstractions de plus en plus minces, jusqu'à ce que l'on soit arrivé aux déterminations les plus simples»(2) Cette description minutieuse de la méthode empirique et inductive montre ses limites et son unilatéralité, car: «Partant de 1à, il faudrait refaire le chemin à rebours jusqu'à ce qu'enfin on arrive de nouveau à la population, mais celle-ci ne serait pas, cette fois, la représentation chaotique d'un tout, mais une riche totalité de déterminations et de rapports nombreux. La première voie est celle qu'a prise très historiquement l'économie politique à sa naissance. Les économistes du XVIIe siècle, par exemple, commencent toujours par une totalité vivante: population,

«Quand nous concidérons un pays donné au point de vue de<br />

l'économie politique, nous commençons par étudier sa population, la<br />

division de celle-ci en classes, sa répartition dans les villes, à la<br />

compagne, au bord de la mer, les différentes branches de<br />

production, l'exportation <strong>et</strong> l'importation, la production <strong>et</strong> la<br />

consommation annuelles, les prix des marchandises, <strong>et</strong>c.»(1)<br />

Marx r<strong>et</strong>race donc la démarche classique de l'économie politique<br />

qui prend l'empirique, le spécifique, le concr<strong>et</strong>, comme point de départ<br />

méthodologique. Il s'emploie par la suite à critiquer c<strong>et</strong>te démarche<br />

empirique coïncidant avec ce que nous avons appelé la méthode<br />

inductive/empirique:<br />

«Il semble que ce soit la bonne méthode de commencer par le réel<br />

<strong>et</strong> le concr<strong>et</strong>, qui constituent la condition préalable effective, donc<br />

en économie politique, par exemple, la population qui est la base <strong>et</strong><br />

le suj<strong>et</strong> de l'acte social de production tout entier. Cependant, à y<br />

regarder de plus près, on s'aperçoit que c'est là une erreur. La<br />

population est une abstraction si l'on néglige par exemple les<br />

classes dont elle se compose. Ces classes sont à leur tour un mot<br />

creux si l'on ignore les éléments sur lesquels elles reposent, par<br />

exemple le travail salarié, le capital, <strong>et</strong>c. Ceux-ci supposent<br />

l'échange, la division du travail, les prix, <strong>et</strong>c. Le capital, par<br />

exemple, n'est rien sans le travail salarié, sans la valeur, l'argent, le<br />

prix, <strong>et</strong>c. Si donc on commençait ainsi par la population, on aurait<br />

une représentation chaotique du tout <strong>et</strong>, par une détermination<br />

plus précise, par l'analyse, on aboutirait à des concepts de plus en<br />

plus simples, du concr<strong>et</strong> figuré on passerait à des abstractions de<br />

plus en plus minces, jusqu'à ce que l'on soit arrivé aux<br />

déterminations les plus simples»(2)<br />

C<strong>et</strong>te description minutieuse de la méthode empirique <strong>et</strong> inductive<br />

montre ses limites <strong>et</strong> son unilatéralité, car:<br />

«Partant de 1à, il faudrait refaire le chemin à rebours jusqu'à ce<br />

qu'enfin on arrive de nouveau à la population, mais celle-ci ne<br />

serait pas, c<strong>et</strong>te fois, la représentation chaotique d'un tout, mais<br />

une riche totalité de déterminations <strong>et</strong> de rapports nombreux. La<br />

première voie est celle qu'a prise très historiquement l'économie<br />

politique à sa naissance. Les économistes du XVIIe siècle, par<br />

exemple, commencent toujours par une totalité vivante: population,

Hooray! Your file is uploaded and ready to be published.

Saved successfully!

Ooh no, something went wrong!