79 - Vaincre et Convaincre

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26.06.2013 Views

l'idée. C'est l'époque qui commence avec la deuxième moitié du XVe siècle. «La royauté, s'appuyant sur les bourgeois des villes, a brisé la puissance de la noblesse féodale et créé les grandes monarchies fondées essentiellement sur la nationalité, dans le cadre desquelles se sont développées les nations européennes modernes et la société bourgeoise moderne. Dans les manuscrits sauvés de la chute de Byzance, dans les statues antiques retirées des ruines de Rome, un monde nouveau se révélait à l'Occident étonné: l'Antiquité grecque; ses formes resplendissantes dissipaient les fantômes du Moyen- Age; l'Italie naissait à un épanouissement artistique insoupçonné qui sembla un reflet de l'antiquité classique et n'a plus été retrouvé. En Italie, en France, en Allemagne, apparaissait une littérature nouvelle, la première littérature moderne; l'Angleterre et l'Espagne connurent bientôt après, leur époque littéraire classique... La dictature spirituelle de l'Église fut brisée; la majorité des peuples germaniques la rejeta directement en adoptant le protestantisme, tandis que, chez les peuples romans, une allègre libre pensée, reprise des Arabes et nourrie de la philosophie grecque fraîchement découverte, s'enracinait de plus en plus et préparait le matérialisme du XVIIIe siècle»(35). La «coupure épistémologique» althusserienne fait la loi dans le monde de la forme où domine la Science nettement en divorce avec son passé idéologique; cette «coupure épistémologique» se trouve en impasse sur le terrain de l'histoire concrète qui contredit la formalisation althusserienne et ses modèles logiques; ce qui semblait être, dans le discours althusserien de Mehdi Amel, comme une nouvelle naissance (Re-naissance) de 1a bourgeoisie européenne, différente de le bourgeoisie coloniale arabe, s'est transformé avec l'analyse historique d'Engels de la Renaissance européenne du XVe siècle en «Retour» au modèle grec et arabe, la distinction étymologique faite par Mehdi Amel entre «Nahda» et «Renaissance» s'est avérée n'être qu'un jeu de mots formel qui ne touche point à la vraie distinction existante entre la «Nahda» arabe et la Renaissance européenne. A partir de cette comparaison formelle, Mehdi Amel considère que la pensée arabe féodale, faute de «coupure», est restée dominante dans

les nouveaux rapports coloniaux de production. La bourgeoisie coloniale arabe, dans sa formation historique de classe - ce sont les anciennes classes aristocrates et féodales dominantes dans le mode de production pré capitaliste qui ont formé la nouvelle bourgeoisie - a porté avec elle l'ancienne pensée. La bourgeoisie coloniale ne s'est pas formée en contradiction antagonique avec l'ancienne classe féodale dominante dans une lutte de classes opposant deux classes antagoniques; elle s'est plutôt formée par la transformation interne des éléments de l'ancienne classe dominante pour constituer la nouvelle classe dominante. L'ancienne idéologie dominante devait donc s'adapter à cette nouvelle régulation de classe, sans que sa renaissance soit nécessairement en coupure avec ses origines; sans qu'il y ait une naissance nouvelle, c'est sur le terrain de cette régulation de classe qu'ont émergé les concepts d'authenticité et de Réforme où l'origine se reproduit et s'adapte à la nouvelle situation sans se nier et couper avec son passé. «C'est de l'échec de cette première «Nahda», et non de la répétition de cet échec dans ce qui semble être une «nouvelle Nahda», que la pensée arabe doit partir dans sa naissance scientifique nécessaire. La pensée arabe n'est pas ingrate envers les précurseurs de cette «Nahda»; elle se sert de la science pour déterminer les raisons de cet échec. Une fois qu'elle a découvert les causes de cet échec, la pensée arabe reprend la tentative précédante sur des nouvelles données, de façon à ne pas répéter le même échec»(36). C'est à partir d'une certaine formalisation historique du rapport ancien/nouveau, passé/présent, tirée de la Renaissance européenne, que l'althussérisme orthodoxe aborde l'histoire de la pensée arabe contemporaine pour en faire une généalogie qui n'est pas différente de la généalogie orientaliste, avec les mêmes cibles et les mêmes prédécesseurs. «... Pour saisir cet échec, il faut adopter un point de vue opposé, celui de la classe ouvrière révolutionnaire. C'est la pensée de cette classe qui est à même de libérer la pensée arabe de l'échec de sa «Nahda» bourgeoise. La pensée arabe se libérera par l'idéologie d'une classe qui a commencé à se constituer, dans sa pratique révolutionnaire, en classe indépendante; elle ne sera pas libérée par

les nouveaux rapports coloniaux de production. La bourgeoisie coloniale<br />

arabe, dans sa formation historique de classe - ce sont les anciennes<br />

classes aristocrates <strong>et</strong> féodales dominantes dans le mode de production<br />

pré capitaliste qui ont formé la nouvelle bourgeoisie - a porté avec elle<br />

l'ancienne pensée. La bourgeoisie coloniale ne s'est pas formée en<br />

contradiction antagonique avec l'ancienne classe féodale dominante<br />

dans une lutte de classes opposant deux classes antagoniques; elle s'est<br />

plutôt formée par la transformation interne des éléments de l'ancienne<br />

classe dominante pour constituer la nouvelle classe dominante.<br />

L'ancienne idéologie dominante devait donc s'adapter à c<strong>et</strong>te nouvelle<br />

régulation de classe, sans que sa renaissance soit nécessairement en<br />

coupure avec ses origines; sans qu'il y ait une naissance nouvelle, c'est<br />

sur le terrain de c<strong>et</strong>te régulation de classe qu'ont émergé les concepts<br />

d'authenticité <strong>et</strong> de Réforme où l'origine se reproduit <strong>et</strong> s'adapte à la<br />

nouvelle situation sans se nier <strong>et</strong> couper avec son passé.<br />

«C'est de l'échec de c<strong>et</strong>te première «Nahda», <strong>et</strong> non de la répétition<br />

de c<strong>et</strong> échec dans ce qui semble être une «nouvelle Nahda», que la<br />

pensée arabe doit partir dans sa naissance scientifique nécessaire.<br />

La pensée arabe n'est pas ingrate envers les précurseurs de c<strong>et</strong>te<br />

«Nahda»; elle se sert de la science pour déterminer les raisons de<br />

c<strong>et</strong> échec. Une fois qu'elle a découvert les causes de c<strong>et</strong> échec, la<br />

pensée arabe reprend la tentative précédante sur des nouvelles<br />

données, de façon à ne pas répéter le même échec»(36).<br />

C'est à partir d'une certaine formalisation historique du rapport<br />

ancien/nouveau, passé/présent, tirée de la Renaissance européenne, que<br />

l'althussérisme orthodoxe aborde l'histoire de la pensée arabe<br />

contemporaine pour en faire une généalogie qui n'est pas différente de<br />

la généalogie orientaliste, avec les mêmes cibles <strong>et</strong> les mêmes<br />

prédécesseurs.<br />

«... Pour saisir c<strong>et</strong> échec, il faut adopter un point de vue opposé,<br />

celui de la classe ouvrière révolutionnaire. C'est la pensée de c<strong>et</strong>te<br />

classe qui est à même de libérer la pensée arabe de l'échec de sa<br />

«Nahda» bourgeoise. La pensée arabe se libérera par l'idéologie<br />

d'une classe qui a commencé à se constituer, dans sa pratique<br />

révolutionnaire, en classe indépendante; elle ne sera pas libérée par

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