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octobre 2012 - Lycée français de Shanghai

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Tu Veux Mon Avis?<br />

Faut-il limiter la liberté <strong>de</strong> la presse ?<br />

La nouVeLLe aFFaire <strong>de</strong>s caricatures <strong>de</strong> MahoMet dans Charlie hebdo nous<br />

interroge sur Les LiMites à iMPoser, ou Pas, à La sacrosainte Liberté <strong>de</strong> La<br />

Presse. <strong>de</strong>uX aVis Pour y Voir PLus cLair.<br />

« La liberté <strong>de</strong> la presse présente <strong>de</strong>s inconvénients. Mais<br />

moins que l’absence <strong>de</strong> liberté. » François Mitterrand.<br />

Ce ne sont pas les élèves scolarisés au lycée <strong>français</strong> <strong>de</strong><br />

Jakarta qui contrediront l’ancien prési<strong>de</strong>nt, eux qui ont<br />

vu leur lycée fermé le vendredi 21 septembre – <strong>de</strong>ux<br />

jours après la publication d’une caricature <strong>de</strong> Mahomet dans<br />

Charlie hebdo – par peur <strong>de</strong> représailles, puisque l’Indonésie<br />

est le plus grand pays musulman au mon<strong>de</strong>. Quand on voit<br />

ce type <strong>de</strong> conséquences, on est en droit <strong>de</strong> s’interroger<br />

sur le bien-fondé <strong>de</strong> cette liberté <strong>de</strong> la presse inscrite<br />

dans la déclaration <strong>de</strong>s droits <strong>de</strong> l’homme et du citoyen<br />

<strong>de</strong> 1789, article 11. Cependant, malgré toutes les possibles<br />

conséquences négatives <strong>de</strong> ce droit, la liberté <strong>de</strong> la presse<br />

est à mon avis indissociable <strong>de</strong> la liberté d’expression.<br />

S’opposer à ce droit, c’est s’opposer à l’exposition <strong>de</strong> tous<br />

les points <strong>de</strong> vue et donc favoriser une opinion. Quand bien<br />

même certains propos sont considérés comme insultants<br />

ou blasphématoires pour certaines personnes, ils reflètent<br />

l’opinion d’une autre partie <strong>de</strong> la population, qui a tout autant<br />

le droit <strong>de</strong> s’exprimer. Ce dont ont peur les « censeurs »,<br />

c’est <strong>de</strong> la réaction <strong>de</strong>s personnes concernées. Ainsi, d’où<br />

vient la menace ? De la presse ? Non, mais bien <strong>de</strong>s lecteurs<br />

intégristes. Doit-on alors accuser Charlie Hebdo ou bien les<br />

semeurs <strong>de</strong> troubles qui n’acceptent pas l’expression <strong>de</strong> ces<br />

droits les plus fondamentaux. A mon avis, ceux-ci bafouent<br />

la démocratie en s’attaquant violemment aux journalistes,<br />

comme ce fut le cas lors <strong>de</strong> l’attaque au cocktail Molotov<br />

contre les locaux <strong>de</strong> Charlie Hebdo, le 2 novembre 2011, après<br />

la publication <strong>de</strong> premières caricatures.<br />

Un <strong>de</strong>s principaux arguments avancés contre cette liberté<br />

totale <strong>de</strong> la presse est que certains propos peuvent appeler à<br />

la haine, peuvent être racistes, bref, peuvent aller à l’encontre<br />

<strong>de</strong> la loi. Dans ce cas, oui, il est normal d’encadrer la liberté<br />

<strong>de</strong> la presse. Mais s’il ne dépasse pas ces limites imposées<br />

par la loi, le journal est dans son bon droit lorsqu’il publie<br />

un article, une image ou une caricature puisqu’il s’agit <strong>de</strong><br />

faire valoir la liberté d’opinion. Liberté qui est le socle <strong>de</strong><br />

la démocratie. La presse est donc libre <strong>de</strong> dire ce qu’elle<br />

pense <strong>de</strong>s évènements, <strong>de</strong> la situation actuelle, peu importe<br />

ce qu’en pensent les lecteurs. En censurant la presse, on<br />

risquerait <strong>de</strong> développer une pensée unique, puisque la<br />

presse est le seul moyen d’information fiable. Le contrôle <strong>de</strong><br />

la presse entraine ainsi le contrôle <strong>de</strong> l’opinion, le premier<br />

pas vers une dictature.<br />

François-Emmanuel Lacassagne<br />

Certes, il n’y a pas <strong>de</strong> vraie démocratie sans liberté <strong>de</strong><br />

la presse et liberté d’expression. Certes, une censure,<br />

même minime, peut en engranger une autre plus<br />

importante, suivie elle-même d’une interdiction <strong>de</strong> publier,<br />

et ce jusqu’à un contrôle total <strong>de</strong>s médias par une clique <strong>de</strong><br />

personnes influentes au pouvoir. Ce phénomène s’est vu et<br />

se verra encore.<br />

Mais il serait bien malsain <strong>de</strong> penser que cette « liberté<br />

10<br />

fondamentale » n’a pas <strong>de</strong> limites voire même <strong>de</strong><br />

conséquences. Limitée d’abord, <strong>de</strong> droit, par les lois qui la<br />

régisse. La liberté d’expression n’est jamais totale en effet<br />

puisqu’elle ne saurait être à l’origine d’une incitation à la<br />

haine ou au meurtre par exemple. La liberté d’expression est<br />

un mythe. La vraie liberté <strong>de</strong> s’exprimer n’est souvent pas là<br />

où l’on croit. Mais dans son sens le plus répandu et comme<br />

on l’entend dans le cas <strong>de</strong> la presse et <strong>de</strong>s médias, la liberté<br />

d’expression peut s’avérer être à l’origine <strong>de</strong> conséquences<br />

non souhaitées.<br />

Quelles peuvent-elles être ? La réponse est toute trouvée<br />

dans notre actualité. Les protestations anti-américaines l’ont<br />

montré dans le cas d’un film provocateur contre l’islam réalisé<br />

il y a peu (lire page 4). Mais les images nous provenant du<br />

mon<strong>de</strong> arabe à ce sujet ont éclipsé celles aussi frappantes<br />

<strong>de</strong> drapeaux tricolores brûlés, et <strong>de</strong> slogan anti-<strong>français</strong> dans<br />

les rues du Caire, <strong>de</strong> Tunis ou <strong>de</strong> Benghazi faisant suite à la<br />

caricature <strong>de</strong> Charlie Hebdo. Quelles conséquences donc à<br />

cet « excès » <strong>de</strong> liberté ? Des sièges diplomatiques <strong>français</strong><br />

surprotégés, <strong>de</strong>s alliances <strong>français</strong>es fermées, <strong>de</strong>s lycées<br />

<strong>français</strong> aussi, comme celui <strong>de</strong> Jakarta. Des exemples parmi<br />

d’autres. Ainsi, à mon avis, une caricature, un <strong>de</strong>ssin, un article<br />

ou un reportage ne saura être totalement libre d’attaquer<br />

ou <strong>de</strong> dénoncer sans prendre en compte les conséquences<br />

éventuelles. La liberté entière d’expression ne peut exister,<br />

comme dans ce cas, pour <strong>de</strong>s sujets à portée internationale.<br />

Ceci pour la raison, simple, que tous les Etats n’appliquent pas<br />

la même tolérance face à ce phénomène. Difficile <strong>de</strong> blâmer<br />

les manifestants <strong>de</strong> confession musulmane, chiites comme<br />

sunnites, qui protestent face à « l’excès » <strong>de</strong>s journalistes<br />

<strong>français</strong>. En effet, ceux qui condamnent cette caricature ne<br />

sont pas habitués à cette « liberté d’expression ». Ce sont là<br />

<strong>de</strong>ux conceptions radicalement différentes qui s’affrontent.<br />

Et qui ne se comprennent pas.<br />

Ainsi, ceux qui n’ont jamais ou presque connu le droit <strong>de</strong><br />

s’exprimer n’ont pas la possibilité <strong>de</strong> penser comme certains<br />

Occi<strong>de</strong>ntaux le feraient à propos <strong>de</strong>s <strong>de</strong>ssinateurs en se<br />

disant : « ce ne sont que <strong>de</strong>s journalistes qui souhaitent faire<br />

bondir les ventes ». Si la liberté d’expression ne connait plus<br />

<strong>de</strong> limite au sein <strong>de</strong>s « vraies » démocraties, elle a encore du<br />

chemin à parcourir pour gagner tous les coins <strong>de</strong> ce mon<strong>de</strong>.<br />

François Chardin

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