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La Bible illustrée par Marc Chagall - Université Paris-Sorbonne

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« Nous venons juste de rentrer de Hollande, où j’étais invité <strong>par</strong> la Société de l’Art<br />

néerlandais qui avait organisé ma grande exposition. À l’inauguration, le Prince<br />

Consort (le mari de l’Impératrice) est venu, et le maire d’Amsterdam a fait un discours,<br />

et il y avait une conférence, et ils ont <strong>par</strong>lé de ma judéité... Je ne savais pas si ça ne<br />

finirait pas <strong>par</strong> un pogrom... » 335 .<br />

Harshav remarqua que cette dernière phrase reflétait une croyance typiquement juive, selon<br />

laquelle si un Juif se faisait trop remarquer, cela finissait toujours en pogrom. Cette idée<br />

étant bien ancrée dans la mémoire collective juive, ainsi que dans l’esprit de <strong>Chagall</strong>, il<br />

suffit d’une mention de son identité juive <strong>par</strong> des dirigeants étrangers pour lui inspirer<br />

l’horreur des persécutions, qu’il avait réellement vécues en Russie. En mai 1933, en<br />

évoquant l’autodafé des nazis, <strong>Chagall</strong> écrivit : « En ce qui concerne le pays appelé<br />

l’Allemagne, je (comme tous les Juifs) ne peux pas y penser calmement. Ils vont<br />

probablement brûler... » 336 . Néanmoins, en 1934, dans sa lettre adressée à Dizengoff, le<br />

maire de Tel Aviv, <strong>Chagall</strong> dit :<br />

« <strong>La</strong> confusion de la politique, les persécutions des Hitlériens, peuvent presser notre<br />

corps (nous en avons l’habitude), mais notre esprit est vivace et impénétrable, comme il<br />

l’a été et comme il le sera toujours. Cependant, nous ne sommes pas encore compris. Et<br />

il me semble que plus ils nous humilient, plus nous possédons « la seule vérité », et<br />

que, avec le temps, d’autres gens vont peut-être la toucher » 337 .<br />

Fier de sa judéité, <strong>Chagall</strong> manifesta ainsi fortement sa résistance à la barbarie de l’époque,<br />

qui visait son peuple.<br />

En 1935, <strong>Chagall</strong> visita Vilna en Pologne à l’occasion de la conférence du 10 ème<br />

anniversaire du YIVO (Institut Scientifique Yiddish), célébrant les accomplissements<br />

scientifiques de l’institut. <strong>Chagall</strong> y inaugura le nouveau Musée pour l’Art Juif, dont le<br />

projet de construction lui revenait. Il exprima sa joie sur le fait que « les Juifs aient<br />

finalement un musée » 338 . Il y exposa les 116 gravures qu’il avait faites pour les Âmes<br />

Documentary Narrative, op. cit., p. 387.<br />

335 Lettre de <strong>Chagall</strong> à Yosef Opatoshu en avril 1932 ; Ibid., p. 388. Nous traduisons.<br />

336 Lettre de <strong>Chagall</strong> à Yosef Opatoshu en mai 1933 ; Ibid., p. 390.<br />

337 Lettre de <strong>Chagall</strong> à Meir Dizengoff en 1934 ; Ibid., p. 436. Nous traduisons.<br />

338 Lettre écrite en mars 1936 à Otto Schneid, à qui le YIVO avait proposé de devenir directeur de ce musée.<br />

<strong>Chagall</strong> émit tout de même un doute : « malheureusement notre peuple est pauvre et il ne vit pas dans l’esprit<br />

de l’art. Il nous manque non seulement des « leaders » pour la vie, mais des gens jeunes, nouveaux, modernes<br />

pour l’art ». Ibid., p. 448.<br />

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