La Bible illustrée par Marc Chagall - Université Paris-Sorbonne
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qu’il pré<strong>par</strong>ât des gouaches à reproduire 224 . En 1927, <strong>Chagall</strong> finit les Fables en réalisant<br />
plus de cent gouaches éblouissantes. Cependant, il s’avéra évident que la couleur de<br />
<strong>Chagall</strong> était trop complexe pour le procédé d’impression envisagé au début <strong>par</strong> Vollard.<br />
L’artiste décida donc de faire lui-même ses eaux-fortes en noir et blanc. De 1928 à 1931,<br />
<strong>Chagall</strong> transcrivit chacune de ses illustrations. Il usa de taille et de contre-taille, de la<br />
pointe mais aussi du pinceau, du vernis comme de la gouache. Avec une virtuosité et aussi<br />
grâce à la collaboration de nombreux assistants placés sous la direction du taille-doucier<br />
Maurice Potin, les planches réalisées en noir et blanc semblèrent contenir de subtiles<br />
nuances en clair-obscur. Mais <strong>Chagall</strong> ne fut pas satisfait du tirage et chacune des huit<br />
mille cinq cents épreuves des exemplaires fut finalement rehaussée de sa main au pinceau,<br />
de gouache ou d’aquarelle 225 . Vollard, conquis, devint un grand défenseur 226 de l’artiste,<br />
en lui assurant désormais des revenus réguliers et lui soumit une autre commande : un<br />
ensemble de planches sur le thème du cirque 227 . <strong>La</strong> confiance était en plus réciproque.<br />
<strong>Chagall</strong> témoigna 228 de la sienne envers son éditeur, dans un entretien avec Jacques<br />
Guenne, en disant que s’il avait eu autant de plaisir à faire les gravures pour Les Âmes<br />
mortes, c’était grâce à Vollard, qui lui avait donné la possibilité de s’exprimer en toute<br />
liberté. Il ajouta que sa confiance en lui l’encouragea beaucoup et elle lui permit de finir<br />
les centaines de gouaches sur les Fables de la Fontaine.<br />
En outre, dans le dialogue avec Guenne, l’artiste conclut en disant que c’était en<br />
France qu’il était rené. Comme il le dit très justement, depuis son arrivée à <strong>Paris</strong> et tout au<br />
long de cette période de pré<strong>par</strong>ation des planches, la vie de <strong>Chagall</strong> en France fut comblée<br />
de bonheur. Son art étant reconnu, il acquit une certaine aisance matérielle. Le succès de<br />
nombreuses expositions et la pleine reconnaissance de son statut d’artiste lui permirent<br />
enfin de se consacrer en toute liberté à son travail, mais aussi à la découverte de la<br />
France 229 . Au début de l’année 1924, les <strong>Chagall</strong> qui restaient jusqu’alors dans une<br />
224<br />
Le Monde de <strong>Chagall</strong>, photographies d’Izis Bidermanas ; texte de Roy McMullen, <strong>Paris</strong>, Éditions<br />
Gallimard, 1969, p. 106.<br />
225<br />
Daniel <strong>Marc</strong>hesseau, <strong>Chagall</strong> ivre d’images, op. cit., pp. 75-78.<br />
226<br />
Face au choix d’un peintre d’origine russe pour illustrer les Fables, un texte de la littérature classique<br />
française, de violentes critiques s’élevèrent dans le pays. Vollard répondit : « Tout ce qu’il y a de<br />
spécifiquement oriental dans les sources du fabuliste [...] m’a amené à penser que, mieux que personne,<br />
pourrait en donner une transcription plastique appropriée, un artiste à qui ses origines ont rendu familier et<br />
comme naturel ce prestigieux Orient ». Cf. Franz Meyer, <strong>Marc</strong> <strong>Chagall</strong>, op. cit., pp. 163-165.<br />
227<br />
Daniel <strong>Marc</strong>hesseau, <strong>Chagall</strong> ivre d’images, op. cit., pp. 78-79. <strong>Chagall</strong> et Vollard étaient tous les deux<br />
fascinés <strong>par</strong> le cirque, ainsi ce dernier avait sa loge au Cirque d’Hiver où il invita l’artiste et sa famille.<br />
<strong>Chagall</strong> créa dix-neuf gouaches, regroupées sous le titre Cirque Vollard.<br />
228<br />
L’Art vivant, art. cit.<br />
229<br />
Elisabeth Pacoud-Rème, « À <strong>Paris</strong>, à la France », dans Voyages & rencontres de <strong>Marc</strong> <strong>Chagall</strong> 1923-1939,<br />
<strong>Paris</strong>, Éditions de la Réunion des musées nationaux, 1998, p. 48.<br />
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