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La Bible illustrée par Marc Chagall - Université Paris-Sorbonne

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lui soumit comme proposition d’organiser une école artistique à Vitebsk. En acceptant ce<br />

projet, Lunacharsky nomma <strong>Chagall</strong> Commissaire des Beaux-Arts pour Vitebsk en<br />

septembre 1918. Sa mission – organiser des écoles artistiques, des musées, des expositions,<br />

des conférences, des leçons sur l’art et toutes autres initiatives artistiques – s’étendit sur<br />

toute la province de Vitebsk. C’est ainsi que <strong>Chagall</strong> fut chargé de sa première et unique<br />

fonction publique, qu’il assuma intensément pendant un an et demi.<br />

<strong>Chagall</strong> bénéficia du nouveau statut donné aux Juifs depuis la Révolution, qui les<br />

avait libérés de l’exclusion et de la citoyenneté de seconde classe imposées <strong>par</strong> l’empire<br />

russe. Les jeunes Juifs pouvaient désormais <strong>par</strong>ticiper à la construction du nouveau régime,<br />

au même titre que n’importe quel citoyen. <strong>La</strong> religion ayant été abolie, ils la rejetèrent pour<br />

ne plus rester coincés dans la catégorie « Juifs », mais pour devenir désormais<br />

« Russes » 157 . <strong>Chagall</strong> <strong>par</strong>tageait cette sensation. Il s’éloignait également délibérément de<br />

la tradition juive. Il était activement engagé dans sa fonction, allant jusqu’à négliger sa<br />

propre peinture. Mais malgré son dévouement pour sa mission, <strong>Chagall</strong> perdit bientôt de<br />

son enthousiasme, qui se transforma en frustration. En effet, <strong>Chagall</strong> avait invité de<br />

nombreux artistes renommés à enseigner à l’école, comme entre autres Pougny,<br />

Dobuzhinsky, Romm, Pen et Lissitzky. Ce dernier insista pour que Malevitch fût appelé<br />

comme professeur. Malevitch les rejoignit à l’automne 1919, et devint aussitôt le principal<br />

« ennemi » de <strong>Chagall</strong>. Malevitch organisa dans l’école une nouvelle <strong>par</strong>tie, « UNOVIS<br />

(les Affirmatifs du Nouvel Art) », qui exigeait la création collective et présentait le<br />

Suprématisme comme la seule méthode correcte pour faire l’art. <strong>Chagall</strong> 158 ayant une<br />

conception de l’art très différente de Malevitch, l’école fut divisée <strong>par</strong> les <strong>par</strong>tisans du côté<br />

de <strong>Chagall</strong> et du suprématiste, qui y gagna finalement la prééminence. <strong>Chagall</strong> fut obligé<br />

de démissionner et <strong>par</strong>tit définitivement de sa ville natale, en mai 1920, après avoir accepté<br />

l’invitation de Granovsky et d’Efros à venir travailler à Moscou pour l’inauguration du<br />

nouveau théâtre juif. Plus tard, dans son autobiographie, <strong>Chagall</strong> se souviendra de cette<br />

expérience avec regrets :<br />

« Je ne serai pas surpris, si après une longue absence, ma ville efface mes traces et ne<br />

se rappelle plus celui qui, abandonnant ses propres pinceaux, se tourmentait, souffrait<br />

et se donnait la peine d’y implanter l’Art, qui rêvait de transformer les maisons<br />

157 Benjamin Harshav, <strong>Marc</strong> <strong>Chagall</strong> and His Times – A Documentary Narrative, op. cit., p. 241.<br />

158 « Un triangle, affirma-t-il, n’était pas moins un objet qu’une chaise ; seuls d’autres moyens pouvaient<br />

donner à l’art l’espace psychique dont il avait besoin ». Franz Meyer, <strong>Marc</strong> <strong>Chagall</strong>, op. cit., p. 127.<br />

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