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La Bible illustrée par Marc Chagall - Université Paris-Sorbonne

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Néanmoins, ce n’est jamais au détriment du vrai sens de l’objet. Ces anges sont représentés<br />

dans les scènes où le roi supplie le <strong>par</strong>don divin (pl. LXXIX) et où sont évoqués le<br />

rétablissement et la délivrance de Jérusalem promis <strong>par</strong> Dieu (pl. XCV). <strong>La</strong> sonnerie du<br />

chofar ayant fonction de ramener sur le droit chemin ceux qui se sont égarés, la présence<br />

de l’ange jouant de cet instrument dans le premier exemple est justifiée comme une autre<br />

forme de prière du roi. Au deuxième exemple, l’ange de <strong>Chagall</strong> semble livrer au peuple le<br />

message d’espérance et la promesse divine, car le son du chofar doit également évoquer au<br />

peuple juif son histoire entière et son destin choisi <strong>par</strong> l’Éternel 1093 . Enfin, si tous ces<br />

objets sont d’importance pour les Juifs, c’est aussi <strong>par</strong>ce que ce sont des symboles de la<br />

judaïté et les moyens <strong>par</strong> lesquels ils maintiennent leur identité. C’est sans doute dans cet<br />

état d’esprit que <strong>Chagall</strong> représente à plusieurs reprises l’étoile de David. Or, l’emploi de<br />

ce motif comme emblème royal dans l’Ancien Testament est en réalité anachronique, car<br />

cette étoile n’est devenue que récemment le symbole du peuple juif 1094 . En outre, <strong>Chagall</strong> a<br />

laissé <strong>par</strong>aître plusieurs inscriptions en hébreu, telles que le Tétragramme, les dix<br />

commandements sur les tables de la Loi (pl. XXXVII), les noms des douze tribus d’Israël<br />

sur l’éphod d’Aaron (pl. XL) et l’hymne de David à l’Éternel (pl. LXXIV). L’écriture<br />

hébraïque étant un signe propre aux Juifs, ces inscriptions donnent à lire indubitablement<br />

l’identité du peuple. En ce qui concerne la question de la judéité, ancrée profondément<br />

dans cette <strong>Bible</strong>, elle peut mieux se comprendre si on considère les conditions dans<br />

lesquelles l’artiste se trouvait au moment de son travail. En pré<strong>par</strong>ant ces illustrations,<br />

<strong>Chagall</strong> a eu l’occasion de voyager en Palestine et de visiter les importants sites et<br />

monuments historiques d’Israël. Ce voyage n’a pas été effectué dans un but documentaire,<br />

pourtant il lui a permis de « vérifier certains sentiments » 1095 . <strong>Chagall</strong> y est allé en tant que<br />

Juif et il a insisté sur ce fait. Au retour, en <strong>par</strong>allèle du travail sur la <strong>Bible</strong>, il a réalisé 34<br />

dessins illustrant les poèmes de Lyesin, publiés en 1938 sous le titre de Chants et Poèmes.<br />

Ces poèmes décrivent essentiellement le monde juif, sa religion et son histoire ; ils ont dû<br />

également inspirer l’artiste. Les images, qui se trouvent dans ces deux illustrations,<br />

réalisées simultanément et ayant un sujet similaire, <strong>par</strong>ce qu’elles sont presque identiques<br />

révèlent d’elles-mêmes une auto-influence. De plus, l’antisémitisme qui se manifestait de<br />

plus en plus fort en Europe depuis le début des années 1930 devait influer l’artiste. Ses<br />

inquiétudes prennent la forme de Juifs mélancoliques dans ses illustrations.<br />

1093 Ibid., p. 11.<br />

1094 <strong>Marc</strong>-Alain Ouaknin, Symboles du Judaïsme, op. cit., p. 126.<br />

1095 Charles Sorlier, <strong>Marc</strong> <strong>Chagall</strong> et Ambroise Vollard, op. cit., p. 18.<br />

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