La Bible illustrée par Marc Chagall - Université Paris-Sorbonne
La Bible illustrée par Marc Chagall - Université Paris-Sorbonne La Bible illustrée par Marc Chagall - Université Paris-Sorbonne
qu’il a écoutée, c’est elle seule qu’il a voulu rendre [...] » 853 . Maritain insista par la suite en ces termes : « Précisément parce qu’il n’a rien cherché ni voulu dans ce sens [dogmatique], le monde plastique de la Bible de Chagall [...] témoigne sans le savoir de la valeur figurative du grand lyrisme d’Israël » 854 . Ces commentaires, soulignant la poésie et l’universalité de la Bible de Chagall, définissent clairement cet ouvrage comme non confessionnel. Cette appréciation, répandue et partagée, devait engendrer une opinion générale sur l’artiste : Chagall, important artiste spirituel, sans être doctrinaire. Il est probable que cette évaluation concourut, avec l’ensemble des louanges dans la critique, à l’appel de l’artiste, malgré son origine juive, pour des vitraux destinés à des églises chrétiennes. Quant à la commande des fenêtres de la Cathédrale Saint-Étienne de Metz, Robert Renard, architecte en chef des Monuments Historiques, expliqua sa décision en ces termes : « Maintenant, j’arrive au choix de M. Marc Chagall, […] je pensais au merveilleux artiste qui venait de publier la Bible, et montrer autant de sens religieux qu’il avait montré de talent pendant presque un demi siècle » 855 . Enfin, si la critique unanimement favorable sur la Bible n’a pas suscité d’étude à son sujet, elle a sûrement donné un renom indéniable à l’artiste. 2. 4. Dessins pour la Bible : une Bible différente ou complémentaire En 1958 et 1959, Chagall réalisa un grand nombre de dessins sur des thèmes bibliques. À la différence de ses eaux-fortes pour la Bible qui furent publiées en livre et dans la revue Verve, ces œuvres ne furent visibles que dans la revue. En août 1960, Verve consacra spécialement ses numéros 37 et 38 aux 96 dessins inédits de Chagall reproduits avec 48 nouvelles lithographies – 24 hors-texte, plus la couverture en couleurs, et 23 en noir et blanc – que l’artiste réalisa pour cette publication. Le tirage à 6 500 exemplaires fut réalisé par l’imprimerie Draeger pour les héliogravures en noir et par Mourlot Frères pour la lithographie en couleurs. Il fut tiré en outre 50 exemplaires sur Vélin d’Arches, numérotés et signés, et 10 épreuves hors commerce. 853 e Jacques Maritain, « Eaux-fortes de Chagall pour la Bible », Cahiers d’Art, 9 année 1934, Paris, Éditions « Cahiers d’Art », 1934, p. 84. 854 Ibid. 855 Lettre de Robert Renard au Directeur Général de l’Architecture, datée du 21 août 1958. Archives, Médiathèque de l’Architecture et du Patrimoine, Paris. 240
Un style fluide et une diversité de matériaux À première vue, pour ceux qui connaissent la première Bible de Chagall, l’ensemble de ces Dessins pour la Bible peut paraître moins soigné par rapport au travail minutieux pour les eaux-fortes. Ces dessins semblent esquissés et peu élaborés à cause de leurs touches rapides et vives. Cette impression qui se dégage est pourtant due à la différence des supports. L’ouvrage est cette fois-ci composé de dessins, dont la plupart sont faits à l’encre et au fusain, accompagnés de lithographies. Par rapport à l’eau-forte, qui est une technique de gravure sur métal, le dessin et la lithographie donnent évidemment plus d’aisance et de liberté. Chagall put dessiner directement sur le papier ainsi que sur la pierre avec du crayon, ce qu’il sembla faire très librement et comme en s’amusant. Outre la lithographie, ces Dessins pour la Bible montrent l’utilisation de divers matériaux. Encre, fusain, crayon, crayons de couleurs, lavis, gouache, aquarelle et pastel furent posés sur papier simple, papier Japon et papier granulé. L’artiste dessina parfois avec seulement un ou deux outils, mais il en utilisa souvent plusieurs en essayant presque toutes les variations possibles dans leurs combinaisons. À partir de ces mélanges, Chagall avait certainement voulu jouer avec les différents effets. L’utilisation de divers papiers comme le papier Japon et le papier granulé produisit également des effets particuliers. Quant aux dessins à l’encre ou au lavis sur papier Japon, ils ressemblent beaucoup à la peinture asiatique. En réalité, pour plusieurs planches Chagall réalisa des dessins linéaires à l’encre. Les traits et les taches noirs diffusés sur le papier en fibres comme le papier Japon créent une ambiance proche de celle de l’art extrême-oriental. La planche LXXXV sur l’histoire de Job en est un bon exemple (ill. 198) 856 . L’artiste utilisa ici simplement de l’encre noir et un gros pinceau sur fond blanc tout à fait comme une peinture chinoise ou coréenne. Le fond blanc, ce vide, caractérise d’ailleurs la peinture traditionnelle de l’Extrême-Orient qui ne remplit jamais le fond. Les touches épaisses et puissantes ajoutées sur des lignes très fines rappellent également les expressions picturales de cette région. Il est étonnant de voir que certaines œuvres de Chagall semblent avoir subi l’influence de l’art asiatique, ce qui n’était pas visible jusqu’alors. Il semble qu’il avait saisi l’essentiel de cette peinture et su exploiter les caractéristiques des matériaux liés à cette technique. L’effet de l’encre noir qui se répand sur le papier ressemble à celui de l’aquarelle, mais est effectivement plus beau sur un papier comme le papier Japon. Mais c’est surtout la sobriété 856 Job (le 85 e dessin pour Dessins pour la Bible, revue Verve (éd. par Tériade, Vol. X, N os 37 et 38, Paris, Éditions de la revue Verve, 1960)), Encre de Chine, 35,7 x 26,8 cm. 241
- Page 189 and 190: montrent également la judaïté de
- Page 191 and 192: Troisième partie De la dualité ve
- Page 193 and 194: Bible, qui est désormais le thème
- Page 195 and 196: entièrement chagallien. La premiè
- Page 197 and 198: lier des relations. Elle connaissai
- Page 199 and 200: spirituelle et en Virginia la femme
- Page 201 and 202: de négocier avec lui pour la publi
- Page 203 and 204: qu’ils allaient revenir en France
- Page 205 and 206: femme venait d’échapper. Quant
- Page 207 and 208: accompagné d’une mariée vêtue
- Page 209 and 210: yeux. Cette peine atroce s’adouci
- Page 211 and 212: ici le motif principal. Chez Chagal
- Page 213 and 214: Maternité 735 . Or, l’enfant est
- Page 215 and 216: Chagall loua d’abord un apparteme
- Page 217 and 218: temps de réflexion, il préféra c
- Page 219 and 220: même si les peintures provenaient
- Page 221 and 222: l’artiste, l’idéal de compagne
- Page 223 and 224: d’amertume disparurent. Néanmoin
- Page 225 and 226: série de tableaux pour ce cycle 78
- Page 227 and 228: et la foule de l’autre. L’illus
- Page 229 and 230: poussait les nuages, en haut à gau
- Page 231 and 232: En revanche, le thème général de
- Page 233 and 234: figurés inversés dans leur positi
- Page 235 and 236: cent albums sur vélin d’Arches,
- Page 237 and 238: maisons en flamme, des pierres tomb
- Page 239: la Bible de Chagall, nous trouvons
- Page 243 and 244: pour la Bible. En ce qui concerne s
- Page 245 and 246: courageuses et justes qu’Esther.
- Page 247 and 248: Quelques méthodes d’illustration
- Page 249 and 250: verset étant « Il prospère comme
- Page 251 and 252: différents points de vue que l’a
- Page 253 and 254: Si Chagall avait trouvé une grande
- Page 255 and 256: omantique. Comme le rouge est aussi
- Page 257 and 258: Maîtres » 905 , il soulignait qu
- Page 259 and 260: éalisation du vitrail du mur occid
- Page 261 and 262: les maquettes des tableaux, Les sou
- Page 263 and 264: les poèmes de l’artiste, écrits
- Page 265 and 266: En 1970, à l’inauguration des vi
- Page 267 and 268: etenues en tant que telles dans le
- Page 269 and 270: fumantes et les figures anéanties
- Page 271 and 272: cette présence divine en l’indiq
- Page 273 and 274: midrashiques donnèrent à chaque t
- Page 275 and 276: chandelier, enroulé par un serpent
- Page 277 and 278: juive mais aussi des paroles bibliq
- Page 279 and 280: toutes les scènes dans cette fenê
- Page 281 and 282: éparties sur les trois murs, une p
- Page 283 and 284: eprésente successivement de bas en
- Page 285 and 286: eligieux et profanes de Chagall dan
- Page 287 and 288: Chapitre IV. L’union Les vitraux
- Page 289 and 290: Chagall ? Qu’est-ce qui les disti
qu’il a écoutée, c’est elle seule qu’il a voulu rendre [...] » 853 . Maritain insista <strong>par</strong> la suite en<br />
ces termes : « Précisément <strong>par</strong>ce qu’il n’a rien cherché ni voulu dans ce sens [dogmatique],<br />
le monde plastique de la <strong>Bible</strong> de <strong>Chagall</strong> [...] témoigne sans le savoir de la valeur<br />
figurative du grand lyrisme d’Israël » 854 . Ces commentaires, soulignant la poésie et<br />
l’universalité de la <strong>Bible</strong> de <strong>Chagall</strong>, définissent clairement cet ouvrage comme non<br />
confessionnel. Cette appréciation, répandue et <strong>par</strong>tagée, devait engendrer une opinion<br />
générale sur l’artiste : <strong>Chagall</strong>, important artiste spirituel, sans être doctrinaire. Il est<br />
probable que cette évaluation concourut, avec l’ensemble des louanges dans la critique, à<br />
l’appel de l’artiste, malgré son origine juive, pour des vitraux destinés à des églises<br />
chrétiennes. Quant à la commande des fenêtres de la Cathédrale Saint-Étienne de Metz,<br />
Robert Renard, architecte en chef des Monuments Historiques, expliqua sa décision en ces<br />
termes : « Maintenant, j’arrive au choix de M. <strong>Marc</strong> <strong>Chagall</strong>, […] je pensais au<br />
merveilleux artiste qui venait de publier la <strong>Bible</strong>, et montrer autant de sens religieux qu’il<br />
avait montré de talent pendant presque un demi siècle » 855 . Enfin, si la critique<br />
unanimement favorable sur la <strong>Bible</strong> n’a pas suscité d’étude à son sujet, elle a sûrement<br />
donné un renom indéniable à l’artiste.<br />
2. 4. Dessins pour la <strong>Bible</strong> : une <strong>Bible</strong> différente ou complémentaire<br />
En 1958 et 1959, <strong>Chagall</strong> réalisa un grand nombre de dessins sur des thèmes<br />
bibliques. À la différence de ses eaux-fortes pour la <strong>Bible</strong> qui furent publiées en livre et<br />
dans la revue Verve, ces œuvres ne furent visibles que dans la revue. En août 1960, Verve<br />
consacra spécialement ses numéros 37 et 38 aux 96 dessins inédits de <strong>Chagall</strong> reproduits<br />
avec 48 nouvelles lithographies – 24 hors-texte, plus la couverture en couleurs, et 23 en<br />
noir et blanc – que l’artiste réalisa pour cette publication. Le tirage à 6 500 exemplaires fut<br />
réalisé <strong>par</strong> l’imprimerie Draeger pour les héliogravures en noir et <strong>par</strong> Mourlot Frères pour<br />
la lithographie en couleurs. Il fut tiré en outre 50 exemplaires sur Vélin d’Arches,<br />
numérotés et signés, et 10 épreuves hors commerce.<br />
853 e<br />
Jacques Maritain, « Eaux-fortes de <strong>Chagall</strong> pour la <strong>Bible</strong> », Cahiers d’Art, 9 année 1934, <strong>Paris</strong>, Éditions<br />
« Cahiers d’Art », 1934, p. 84.<br />
854<br />
Ibid.<br />
855<br />
Lettre de Robert Renard au Directeur Général de l’Architecture, datée du 21 août 1958. Archives,<br />
Médiathèque de l’Architecture et du Patrimoine, <strong>Paris</strong>.<br />
240