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La Bible illustrée par Marc Chagall - Université Paris-Sorbonne

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yeux. Cette peine atroce s’adoucit avec la fin de la guerre, l’artiste ainsi que le Christ<br />

peuvent se consoler. Dans ce contexte, nous pouvons penser que la <strong>par</strong>tie gauche de <strong>La</strong><br />

Résurrection au bord du fleuve est inspirée <strong>par</strong> des éléments autobiographiques de la vie de<br />

l’artiste. Vers la fin de la guerre, <strong>Chagall</strong> a rencontré la jeune Virginia et l’année suivante il<br />

a eu un fils avec elle. Alors que la guerre et la mort de Bella ne sont pas encore totalement<br />

effacées de sa mémoire, l’artiste est entré dans une autre phase de sa vie : il a un nouvel<br />

amour et un nouvel enfant. Comme s’il était lui-même ressuscité de la mort, il peint de<br />

nouveau et chante la vie comme dans le tableau.<br />

Une lithographie 718 des années 1950 associe également le thème de la crucifixion<br />

à la douceur de la vie. Dans cette planche, nous voyons le Christ sur la croix, une chèvre<br />

qui monte vers lui grâce à une échelle, une mère qui porte son enfant, et une femme qui<br />

tend un grand bouquet de fleurs (ill. 161). Le rayon de lumière qui descend du ciel illumine<br />

la scène, en faisant <strong>par</strong>aître plus nettement la jeune fille au bouquet. L’ap<strong>par</strong>ition d’un<br />

bouquet de fleurs dans la scène de la crucifixion a une importance symbolique. Les fleurs<br />

font en effet <strong>par</strong>ti des motifs picturaux chagalliens ayant un sens <strong>par</strong>ticulier. Les bouquets<br />

de fleurs commencèrent à ap<strong>par</strong>aître dans l’œuvre de <strong>Chagall</strong> suite à sa rencontre avec<br />

Bella. C’est elle qui lui avait ouvert les yeux sur les couleurs lumineuses des fleurs en lui<br />

en apportant pour la première fois de sa vie. À <strong>par</strong>tir de ce moment-là, l’artiste introduisit<br />

l’image du bouquet de fleurs dans son œuvre. Ainsi, ses toutes premières peintures 719<br />

montrent des fleurs dans un vase. Ensuite, en 1923 lorsque <strong>Chagall</strong> s’installa<br />

définitivement à <strong>Paris</strong> après avoir passé des années tumultueuses en Russie, et qu’il<br />

commença à profiter de la douceur de la vie, les fleurs réap<strong>par</strong>urent pour occuper une place<br />

de plus en plus importante dans sa peinture. Mais ce fut surtout dans le sud de la France<br />

que l’artiste découvrit vraiment l’éclat des fleurs : « Là, dans le Midi, pour la première fois<br />

de ma vie, je voyais une verdure généreuse en fleurs comme je n’en avais vu de <strong>par</strong>eille<br />

dans ma ville natale » 720 . Enfin, pour <strong>Chagall</strong>, les fleurs en bouquet sont associées à<br />

l’amour que Bella lui apportait, et à la lumière que son nouveau pays lui offrait. Mais les<br />

fleurs étaient pour lui comme la vie elle-même, vives, brillantes mais aussi fragiles.<br />

Comme Bella Meyer le fit remarquer, il faut noter que « les fleurs dans la peinture de<br />

718<br />

<strong>La</strong> crucifixion, vers 1950-1953, Lithographie originale, 42, 3 x 33, 5 cm, Mourlot n° 76 ; cf. Ibid., cat. ill.<br />

845.<br />

719<br />

<strong>La</strong> fenêtre, vers 1908-1909, Huile sur toile, 66 x 58 cm, Saint-Pétersbourg, Collection Zinaïda Gordééva<br />

(cf. Ibid., cat. ill. 21) ; Le couple à table, 1909, Huile sur toile, 62 x 81 cm (cf. Ibid., cat. ill. 22).<br />

720<br />

<strong>Marc</strong> <strong>Chagall</strong>, « Quelques impressions sur la peinture française », art. cit., p. 52.<br />

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