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La Bible illustrée par Marc Chagall - Université Paris-Sorbonne

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presque indistinct. Donc, l’artiste s’est concentré sur la visibilité des éléments principaux<br />

au détriment de la logique rationnelle, afin d’assurer une transmission efficace du message.<br />

1. 2. Le temps relatif : figuration anachronique et simultanée<br />

<strong>La</strong> fresque de Doura Europos que nous venons de citer mérite d’être rediscutée.<br />

Elle présente, en réalité, la noyade des Égyptiens avant la traversée de la mer <strong>par</strong> les<br />

Hébreux, en faisant ainsi « une entorse flagrante à l’ordre chronologique du<br />

récit » 592 . Cette composition montre que l’artiste avait une souplesse aussi large dans sa<br />

représentation du temps que dans son utilisation de l’espace. Disposer de la notion du<br />

temps relatif, c’est-à-dire se servir de la figuration anachronique et simultanée, est<br />

effectivement une des caractéristiques de l’art médiéval, et de <strong>Chagall</strong>.<br />

Dans une autre fresque de Doura Europos à laquelle nous avons recouru pour <strong>par</strong>ler<br />

de la taille importante de Samuel qui oint Daivd, ce dernier est le seul à porter une toge<br />

pourpre, comme s’il était roi (ill. 125) 593 . Or, cette représentation est anachronique, car<br />

lorsque David reçut l’onction de Samuel devant ses frères, il n’était encore qu’un berger<br />

qui gardait les moutons. Nous trouvons un exemple similaire chez <strong>Chagall</strong> : dans la<br />

planche LXII qui représente David tuant un lion <strong>par</strong>ce qu’il menace son troupeau, ce jeune<br />

berger est étrangement couronné (ill. 126) 594 . De même, dans la planche LXVI, David, qui<br />

chante un cantique funèbre sur Saül et Jonathan, est représenté comme un vrai roi, alors<br />

qu’il ne l’est pas encore. Avec la couronne, symbole de la royauté qui va bientôt<br />

caractériser David, <strong>Chagall</strong> a voulu rendre l’identité du personnage plus évidente, en<br />

anticipant sur son histoire.<br />

L’artiste développe d’ailleurs dans ses représentations de Moïse et d’Aaron ce<br />

procédé de déterminer un personnage <strong>par</strong> un attribut sans prendre en considération la<br />

592<br />

Gabrielle Sed-Rajna, L’art juif Orient et Occident, op. cit., p. 75. L’auteur cherche le motif de cette<br />

inversion dans deux possibilités. L’une est liée à la condition de la fresque : la composition monumentale<br />

ayant exigé une structure symétrique, la scène de la noyade où les lignes horizontales prédominent doit se<br />

trouver ainsi encadrée <strong>par</strong> les deux représentations de l’armée israélite aux lignes surtout verticales. L’autre<br />

résulte des considérations didactiques : on voulait terminer le panneau en montrant le triomphe des Israélites.<br />

593<br />

Samuel oignant Daivd, Peinture murale de la Synagogue de Doura Europos, 245 après J.-C., Mur ouest,<br />

registre inférieur.<br />

594<br />

David tue un lion qui menaçait son troupeau (pl. LXII), 1952-1956, Eau-forte, 32, 8 x 25, 3 cm, Nice,<br />

Musée National Message Biblique <strong>Marc</strong> <strong>Chagall</strong>.<br />

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