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La Bible illustrée par Marc Chagall - Université Paris-Sorbonne

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Le cas de la planche XX est encore plus frappant. Cette planche illustre un homme qui est<br />

profondément affligé, c’est Jacob croyant son fils Joseph mort. Prenant la tunique de celui-<br />

ci teintée de sang, il ferme les yeux en s’appuyant la tête sur la main. Autour de lui se<br />

trouvent quelques hommes, sans doute ses fils. L’un d’entre eux pose la main sur le dos de<br />

son père comme pour le consoler. Or, la taille des fils et celle de Jacob s’opposent d’une<br />

façon impressionnante (ill. 120) 582 . Relativement aux fils qui sont peints en proportions<br />

normales, Jacob est gigantesque avec surtout une tête et un dos surdimensionnés. Les<br />

formes arrondies commencées à <strong>par</strong>tir de la tête et liées jusqu’à son dos nous donnent<br />

l’impression qu’il est comme un rocher. Cette disproportion de taille est sans doute fort<br />

exagérée mais son immensité semble refléter l’importance de sa douleur et de sa tristesse.<br />

Dans l’iconographie biblique juive ancienne, nous pouvons trouver également ce<br />

type de représentation à dimension exagérée. Une miniature du XIII e siècle du recueil de<br />

Londres présente Aaron revêtu des vêtements sacerdotaux (ill. 121) 583 . Sans faire attention<br />

aux détails, un simple regard suffit pour remarquer qu’ici Aaron est majestueusement<br />

habillé et présenté au centre de la scène comme un grand prêtre. Il est flanqué de deux<br />

hommes qui fléchissent les genoux. Même si nous prenons en considération leur pose, ils<br />

ne font que la moitié de la taille du prêtre. Le même manuscrit nous offre un autre<br />

exemple : il s’agit d’une image représentant le Jugement du roi Salomon (ill. 122) 584 . Il est<br />

assis sur le trône, placé au centre de la scène ; les deux femmes sont regroupées à sa droite,<br />

l’officier brandissant l’épée et l’enfant les contrebalancent à sa gauche. Ces personnages<br />

semblent minuscules <strong>par</strong> rapport au roi, immense et imposant. Comme le remarque<br />

Gabrielle Sed-Rajna 585 , nous reconnaissons qu’ici le peintre du manuscrit met pleinement<br />

en valeur le personnage du roi, <strong>par</strong> sa taille et sa situation centrale, qui domine la scène. En<br />

outre, des exemples de figuration similaire se trouvent également dans les fresques de<br />

Doura Europos. Dans la peinture représentant Samuel qui oint David, nous remarquons que<br />

Samuel seul est nettement plus grand que les sept fils de Jessé présents dans la scène. De<br />

même pour Moïse, la peinture de Doura Europos lui attribue des dimensions héroïques :<br />

dans la scène d’Exode il est presque trois fois plus grand que les autres personnages.<br />

582 Jacob, ayant reconnu la tunique de Joseph que ses fils lui ont rapportée teintée de sang, le croit mort et<br />

s’abandonne à sa douleur (pl. XX), 1931-1934, Eau-forte, 30, 7 x 25 cm, Nice, Musée National Message<br />

Biblique <strong>Marc</strong> <strong>Chagall</strong>.<br />

583 Londres, British Library, Add. Ms. 11639, folio 523 r.<br />

584 Londres, British Library, Add. Ms. 11639, folio 518 r.<br />

585 Gabrielle Sed-Rajna, <strong>La</strong> <strong>Bible</strong> hébraïque, op. cit., p. 126.<br />

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