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La Bible illustrée par Marc Chagall - Université Paris-Sorbonne

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l’échelle et un autre se trouve auprès de Jacob. Flottant dans l’espace sans ailes, il touche<br />

d’une main la tête de Jacob et tend son autre bras vers le haut dans la direction de l’échelle.<br />

Cette figure est très curieuse car elle ne ressemble pas aux autres anges de la scène : sans<br />

ailes, elle est vêtue d’une longue tunique noire et elle a en plus de la barbe. Son ap<strong>par</strong>ence<br />

ressemble plutôt à celle de Jacob. Est-elle un autre soi ap<strong>par</strong>u dans le sommeil ? Ou bien<br />

n’est-elle qu’un observateur ? Cette fois-ci encore, son identité reste une énigme, mais son<br />

geste est au moins évident à comprendre : dans le rêve, en désignant l’échelle et les anges,<br />

ce personnage attire l’attention de Jacob pour lui montrer ce qui se passe sur l’échelle. En<br />

outre, l’espace autour de celle-ci est illuminé comme si on avait projeté de la lumière dans<br />

l’obscurité. Et tout en haut, le nom de Dieu est écrit en hébreu. Tout cela semble indiquer<br />

que Dieu est là, présent, pour s’adresser à Jacob. Alors que le message de l’enlumineur de<br />

la Haggadah est plus ou moins ambigu avec l’ange au-dessus de l’échelle, <strong>Chagall</strong>, en<br />

indiquant le nom de Dieu, transmet très clairement ce que raconte cet épisode.<br />

2. 2. Le Tétragramme, une représentation puriste propre à <strong>Chagall</strong><br />

Tout en gardant l’ange en tant qu’identifiant de Dieu, <strong>Chagall</strong> a utilisé un autre<br />

moyen de représenter indirectement la présence divine : il écrit le nom de Dieu en hébreu.<br />

Il y a en effet plusieurs noms 431 de Dieu dans la tradition juive, mais ה ו ה י (yod-hé-vav-hé)<br />

est peut-être le plus connu pour les non Juifs et c’est ce nom que <strong>Chagall</strong> a toujours utilisé<br />

pour désigner Dieu dans ses planches de la <strong>Bible</strong>. Ce Tétragramme ה ו ה י se compose de<br />

quatre consonnes sans voyelles : yod-hé-vav-hé ; imprononçable donc indicible. Aussi,<br />

lorsque le Tétragramme ה ו ה י ap<strong>par</strong>aît dans un texte, il se lit hachem qui veut dire « le<br />

Nom », ou Adonaï, c’est-à-dire « Mon Seigneur ». Ce nom, imprononçable, est donc<br />

désigné comme le « Nom qui est fait pour être caché » 432 , le nom donné pour être<br />

seulement vu, non entendu.<br />

<strong>Chagall</strong> a utilisé le Tétragramme à plusieurs reprises. Les planches telles que <strong>La</strong><br />

Création d’Adam (pl. I), Le rêve de Jacob (pl. XIV), Le Buisson Ardent (pl. XXVII),<br />

Moïse répandant les Ténèbres (pl. XXXI), Le peuple d’Israël sortant de l’Égypte (pl.<br />

XXXIII), Élie ressuscitant le fils de la veuve de Sarepta (pl. LXXXIV), Le Pardon de Dieu<br />

431 <strong>La</strong> tradition kabbaliste révèle dix noms de Dieu tels Yhvh, Adny, Yah, El, Eloha, Elohim, Ehyeh, Chaddaï,<br />

El Chaddaï, Tsevaot. Certains sont plus usités et plus connus que d’autres. Yhvh ap<strong>par</strong>aît dans un contexte où<br />

Dieu se manifeste avec l’attribut de générosité ou de compassion.<br />

432 <strong>Marc</strong>-Alain Ouaknin, Mystères de la kabbale, op. cit., pp. 376-386.<br />

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