209837 T 2.pdf

— — 482
Je suis aecablé chaque soir de présents en fusils, cous-
coussou, motutons, vaches, volailles, etc., etc., qu'il me
faut absolument payer bien au delà de leur valeur et que
je ne puis cependant refuser. Abraham ben Chimol qui a
fait onze missions et M. Delaporte qui a assisté à trois autres,
n'ont rien vu de comparable à ces assommantes prévenan
ces,
ni au nombre des troupes. Plusieurs de ces chefs nous
parlent de nos opérations récentes dans la province d'Oran
et il est évident que nos succès sont la cause des honneurs
dont on m'entoure.
Du camp de Foyarah, le 22.
Ma lettre n'ayant pu partir hier, je l'ai interrompue et
je me décide à expédier moi-même aujourd'hui un courrier
à Tanger parce que j'ai hâte d'informer V. E. du parti que
j'ai cru devoir prendre à la suite des désordres sans pareils
qui se sont renouvelés aujourd'hui et qui ont failli tout
compromettre.
Nous avons été 10 heures à cheval par une chaleur ex
trême pour faire 5 lieues au milieu de populations en armes
que je ne saurais évaluer à moins de 25.000 hommes, com
posées surtout d'infanterie indisciplinée. Le pacha de la pro
vince était venu à ma rencontre et me tenait à ses côtés.
Malgré cela,
cette foule se ruait à chaque moment et dans
tous les sens sur nous. La confusion est devenue si effroya
ble que le pacha a fait charger son escorte. Les balles sif
flaient dans toutes les directions. Le pacha lui-même a reçu
une bourre de fusil dans la figure. Il a mis le sabre à la
main et a blessé plusieurs hommes devant moi.
Après leur avoir prouvé pendant trois jours que leur
tapage et leurs coups de fusil ne m'intimidaient pas, j'ai
pris le parti de signifier au caïd de mon escorte et à l'envoyé
de l'empereur que je me refusais à continuer ma route, s'ils
ne prenaient l'engagement formel de m'épargner des dé
monstrations qui pouvaient avoir les résultats les plus com
promettants pour les deux gouvernements et que j'allais
écrire à l'empereur pour lui en rendre compte.