26.06.2013 Views

Sanduk Comores - Cerise

Sanduk Comores - Cerise

Sanduk Comores - Cerise

SHOW MORE
SHOW LESS

Create successful ePaper yourself

Turn your PDF publications into a flip-book with our unique Google optimized e-Paper software.

RAPPORT DE RECHERCHE<br />

Union Régionale des <strong>Sanduk</strong> d’Anjouan<br />

COMORES<br />

Performances sociales,<br />

analyse de la clientèle et<br />

impact<br />

Carine REBOUL, CERISE<br />

Septembre 2006


• iram Paris (siège social)<br />

49, rue de la Glacière 75013 Paris France<br />

Tél. : 33 (0)1 44 08 67 67 • Fax : 33 (0)1 43 31 66 31<br />

iram@iram-fr.org • www.iram-fr.org<br />

• iram Montpellier<br />

Parc scientifique Agropolis Bâtiment 3 •<br />

34980 Montferrier le Lez France<br />

Tél. : 33 (0)4 99 23 24 67 • Fax : 33 (0)4 99 23 24 68<br />

iram34@iram-fr.org


Sommaire<br />

SOMMAIRE 3<br />

INTRODUCTION 5<br />

1. CONTEXTE ET HISTORIQUE DES SANDUK 7<br />

1.1. Le contexte comorien et anjouannais 7<br />

1.1.1. Historique et évolution de l’archipel des <strong>Comores</strong> 7<br />

1.1.2. Organisation sociale 8<br />

1.1.3. Economie 8<br />

1.2. Le réseau <strong>Sanduk</strong> 10<br />

1.2.1. Historique du projet 10<br />

1.2.2. L’Union Régionale des <strong>Sanduk</strong> d’Anjouan, aujourd’hui 11<br />

1.2.3. La place des <strong>Sanduk</strong> dans l’économie anjouannaise 14<br />

2. ANALYSE DE LA STRATEGIE ET DES PERFORMANCES SOCIALES<br />

DES SANDUK 15<br />

2.1. Objectifs et méthode de l’étude SPI-CERISE 16<br />

2.2. Les résultats de l’étude SPI-CERISE 16<br />

2.3. Conclusion sur la stratégie sociale des <strong>Sanduk</strong> 20<br />

3. OBJECTIFS ET METHODES DE L’ETUDE SUR LES CLIENTS 22<br />

3.1. Objectifs de l’étude 22<br />

3.2. Hypothèses de l’étude 23<br />

3.3. La méthode d’échantillonnage 24<br />

4. L’ANALYSE DE LA CLIENTELE ET DE L’IMPACT DU CREDIT 26<br />

4.1. Le profil des membres de l’IMF 26<br />

4.1.1. Classe d’âge : 26<br />

4.1.2. Niveau scolaire 27<br />

4.1.3. Niveau de pauvreté de la clientèle 28<br />

3


4.1.4. Activités des clients 30<br />

4.1.5. Autres sources de financement des activités 31<br />

4.2. L’utilisation du crédit 32<br />

4.2.1. Activités financées 32<br />

4.2.2. La part du crédit dans l’investissement total 42<br />

4.2.3. Trajectoires de crédit 44<br />

4.3. Analyse des remboursements 48<br />

4.3.1. Les problèmes de remboursement 48<br />

4.3.2. Sources de remboursement 52<br />

4.3.3. Clients inactifs 54<br />

4.4. Impact 57<br />

4.4.1. Impact positif 58<br />

4.4.2. Impact négatif 64<br />

4.4.3. Satisfaction des produits 66<br />

4.4.4. Degré de connaissance des clients 67<br />

CONCLUSION SUR LES PERFORMANCES SOCIALES ET L’IMPACT DES<br />

SANDUK 69<br />

4


Introduction<br />

Au cours de ses douze années d’existence le réseau des sanduk d’Anjouan a connu des<br />

mutations profondes tant d’un point de vue interne, dans son organisation, qu’externe, dans<br />

l’adaptation de ses services aux changements de son environnement. Petit territoire insulaire,<br />

Anjouan a vu se dégrader sa situation économique et politique durant la dernière décennie, ce<br />

qui a paradoxalement favorisé le développement de cette institution de microfinance (IMF),<br />

devenue l’Union Régionale des <strong>Sanduk</strong> d’Anjouan, suite à la crise séparatiste anjouannaise.<br />

Sa pérennité institutionnelle et sa viabilité sont aujourd’hui bien établies et son autonomie<br />

financière avérée. Elle possède le réseau le plus structuré et le plus viable, avec une<br />

organisation avancée, comparée aux deux autres Unions Régionales de <strong>Sanduk</strong> de Grande-<br />

Comore et de Mohéli. Sa couverture de l’ensemble des villages de l’île, le dynamisme, le<br />

professionnalisme et la motivation de l’équipe de direction ainsi que son ancrage dans les<br />

communautés villageoises en font ses principaux atouts. L’appropriation des objectifs et du<br />

fonctionnement du réseau par ses clients et l’ensemble de la population anjouannaise est<br />

aujourd’hui indéniable. Les sanduk s’intègrent parfaitement au paysage socioculturel et<br />

économique anjouannais.<br />

Aujourd’hui l’Union des <strong>Sanduk</strong> d’Anjouan est à la veille d’une nouvelle mutation<br />

institutionnelle. Le cadre réglementaire des <strong>Comores</strong> a fortement évolué avec la parution en<br />

2004 d’un décret concernant les Institutions Financières Décentralisées 1. Les Unions<br />

Régionales des <strong>Sanduk</strong> doivent à présent se mettre en conformité avec ce nouveau cadre<br />

réglementaire et demander un agrément à la Banque Centrale des <strong>Comores</strong> (BCC). Les<br />

principales exigences de la BCC consistent en la sécurisation de l’épargne des déposants.<br />

L’Union Régionale des <strong>Sanduk</strong> d’Anjouan doit ainsi avoir une meilleure maîtrise des impayés,<br />

réduire les risques de détournement et accroître ses fonds propres en limitant ses dépenses.<br />

C’est dans ce nouveau contexte de renforcement des contraintes financières que l’Union<br />

Régionale des <strong>Sanduk</strong> d’Anjouan est en passe de créer de nouveaux partenariats afin de<br />

s’adapter à ces évolutions.<br />

Ce document présente les résultats d’une recherche socioéconomique axée sur le réseau<br />

sanduk d’Anjouan et la perception de ce réseau par ses clients.<br />

1 DECRET N°04-069/PR<br />

5


Il propose une présentation du contexte dans lequel se sont inscrites les mutations du réseau<br />

sanduk d’Anjouan, un bref aperçu de son fonctionnement et de l’état actuel du réseau, sa<br />

stratégie et enfin, une étude sur ses clients.<br />

La stratégie sociale est évaluée à travers un questionnaire destiné à savoir si l’IMF se<br />

donne les moyens d’atteindre ses objectifs sociaux. Le questionnaire SPI-CERISE (Social<br />

Performance Indicators 2 ), basé sur le fonctionnement interne de l’IMF, permet d’identifier ses<br />

stratégies et les moyens mis en place pour parvenir à un impact social positif sur les clients et<br />

leur environnement.<br />

En parallèle à l’évaluation des stratégies, l’étude sur les clients met en évidence leurs<br />

différentes caractéristiques et détermine l’impact de l’IMF sur les emprunteurs et leur famille.<br />

Elle cherche à déterminer le profil de la clientèle des sanduk (les clients sont-ils<br />

particulièrement pauvres ou exclus ? Quels types d’activités exercent-ils ?) et quelles dépenses<br />

sont effectuées à l’aide des crédits ainsi que les difficultés rencontrées. Ceci afin d’obtenir une<br />

vue d’ensemble des différents comportements des clients et faire en sorte que les produits et<br />

services offerts évoluent de façon adaptée aux contraintes et aux besoins des clients.<br />

L’analyse de l’impact permet de définir dans quelle mesure les crédits des sanduk participent<br />

à l’amélioration des conditions de vie des clients et de leur entourage.<br />

Les résultats sur le processus mis en œuvre pour atteindre des performances sociales<br />

et les résultats de l’étude d’impact peuvent ainsi être combinés pour comprendre les liens<br />

entre la stratégie et les effets de l’IMF sur ses clients.<br />

2 Voir le site de CERISE : http://www.cerise-microfinance.org<br />

6


1.1. Le contexte comorien et anjouannais<br />

1.1.1. Historique et évolution de l’archipel des <strong>Comores</strong><br />

1. Contexte et historique des<br />

<strong>Sanduk</strong><br />

La République Fédérale des <strong>Comores</strong> est située dans le canal du Mozambique, entre les côtes<br />

nord de Madagascar et du Mozambique. Les <strong>Comores</strong> constituent un archipel composé de<br />

trois îles ; Grande <strong>Comores</strong> (Ngazidja), Mohéli (Mwali) et Anjouan (Nzouani). Mayotte étant<br />

restée rattachée à la France après l’indépendance.<br />

La population est estimée aujourd’hui à 590 000 habitants 3 , pour une superficie inférieure à<br />

2 000 Km². Sous occupation française depuis plus d’un siècle, les <strong>Comores</strong> ont proclamé leur<br />

indépendance de façon unilatérale en 1975. Les <strong>Comores</strong> sont des îles volcaniques 4 aux terres<br />

fertiles, mais soumises à une pression foncière et démographique importante, la densité de<br />

population étant de 326 habitants au km² pour l’ensemble des <strong>Comores</strong>, et plus de 445<br />

habitants au Km² pour Anjouan 5 .<br />

Depuis l’indépendance, les <strong>Comores</strong> ont connu une succession de régimes et de coups d’état<br />

qui ont renforcé et concentré les pouvoirs en Grande-Comore. Ce qui aboutit en 1997, à une<br />

importante crise politique et institutionnelle. Des mouvements séparatistes se développent<br />

sur l’île d’Anjouan et déclarent unilatéralement l’indépendance d’Anjouan vis-à-vis du<br />

pouvoir de la Grande-Comore.<br />

Face à cette crise, l’Organisation de l’Unité Africaine (OUA) proclame un embargo sur l’île<br />

d’Anjouan, en février 2000. Cet embargo suspend toutes les liaisons maritimes et aériennes,<br />

ainsi que les communications téléphoniques et les transferts bancaires. Les bailleurs de fonds<br />

quittent alors l’île. Cet embargo a d’importantes retombées économiques sur les habitants<br />

d’Anjouan, l’économie dépendant des importations, essentiellement alimentaires et de<br />

carburant, et des exportations de matières premières, telles que la vanille, l’ylang-ylang et le<br />

3 Données du recensement général de la population et de l’habitat de 2003 (Direction statistique des <strong>Comores</strong>)<br />

4 Volcans éteints à Anjouan et à Mohéli, mais toujours en activité en Grande <strong>Comores</strong> (Khartala)<br />

5 Recensement général de la population, 2003<br />

7


girofle. Les conséquences sanitaires ont aussi été désastreuses. On a constaté une importante<br />

recrudescence des épidémies de choléra durant cette période.<br />

L’embargo est levé en juillet 2001 et un nouvel accord est signé entre les trois îles, prévoyant<br />

la création d’une nouvelle entité comorienne. Chaque île conserve une certaine autonomie<br />

financière et administrative. Puis une nouvelle constitution instaure une présidence tournante<br />

entre les trois îles.<br />

La crise politique et institutionnelle persiste toujours aujourd’hui et a laissé des traces tant au<br />

niveau économique qu’au niveau politique. Et particulièrement à Anjouan, gravement atteinte<br />

par les conséquences de l’embargo.<br />

1.1.2. Organisation sociale<br />

La culture comorienne est le résultat de la rencontre entre les civilisations bantous et arabes<br />

qui se sont succédées dans l’archipel, et qui ont donné une forte identité à l’organisation<br />

sociale et aux coutumes comoriennes, chaque île gardant tout de même ses spécificités. Les<br />

traces des Arabes se remarquent surtout par l’importance de la religion musulmane, qui est<br />

pratiquée par la quasi-totalité de la population comorienne.<br />

En Grande-Comore, les normes sociales sont plus rigides que dans les deux autres îles. Elles<br />

se caractérisent par un accès au statut de noble par des rituels spécifiques à l’île. Le rang de<br />

notable s’acquière par la réalisation du « Grand Mariage », très coûteux, donnant un droit de<br />

parole à la mosquée et sur la place publique.<br />

Cette structuration sociale n’existe pas à Anjouan. Le rang de notable ne s’acquière pas par<br />

des cérémonies coutumières tel que le « Grand Mariage », mais davantage par le niveau de<br />

richesses économiques et le niveau d’instruction de l’individu. Les politiciens, fonctionnaires,<br />

religieux et intellectuels sont également considérés comme des notables et bénéficient d’une<br />

grande influence sur la population.<br />

1.1.3. Economie<br />

Avec un PIB par habitant de 620$ en 2004, les <strong>Comores</strong> font partie des Pays les Moins<br />

Avancés (PMA). Le pays est fortement dépendant de l’agriculture qui occupe plus de 80% de<br />

sa population active et contribue à plus de 40% du PIB, générant la quasi-totalité des recettes<br />

d’exportation (98%). Ces dernières sont constituées essentiellement de trois produits bruts et<br />

semi-finis ; la vanille, le girofle et les huiles essentielles d’ylang-ylang, sujettes à des<br />

fluctuations importantes des cours mondiaux. Malgré des eaux riches en produits marins, le<br />

secteur de la pêche représente une faible part du PIB du pays. La pêche artisanale ne parvient<br />

pas à subvenir aux besoins de la population.<br />

8


L’île d’Anjouan importe la quasi-totalité des produits de base, de la boîte d’allumettes au riz,<br />

aliment principal des Comoriens, des ustensiles de cuisine et tissus provenant principalement<br />

de Dubaï et d’Arabie Saoudite, au poisson séché de Madagascar. Anjouan est donc fortement<br />

dépendant de ses importations. Les importations sont plus de quatre fois supérieures en<br />

valeur aux exportations.<br />

Le développement de l’économie comorienne se heurte également à la faible taille du marché<br />

domestique. Le secteur privé est largement dominé par le commerce de produits importés, ce<br />

qui constitue une contrainte forte au développement de ce secteur auxquelles s’ajoutent le<br />

manque d’infrastructures et de qualification de la main d’œuvre. Si le nombre de diplômés<br />

universitaires est relativement élevé par rapport à la population, ce n’est pas le cas pour le<br />

personnel technique de niveau intermédiaire, insuffisant voire inexistant. Ce qui engendre un<br />

manque de culture entrepreunarial et un effet de mimétisme conduisant à se lancer dans des<br />

créneaux déjà occupés et saturant le marché.<br />

Ce manque de diversification et l’insuffisante productivité de l’économie anjouannaise<br />

constituent un obstacle non seulement pour le développement du pays, mais aussi accroît la<br />

difficulté du développement de services financiers, tels que les sanduk.<br />

Le système économique comorien fonctionne grâce à trois leviers : les exportations de<br />

produits agricoles de rente, l’aide internationale et les transferts de fonds privés issus de la<br />

diaspora comorienne principalement de France métropolitaine et des migrants anjouannais<br />

de Mayotte. Ces transferts représentent presque autant que les recettes de l’Etat. Ils sont<br />

estimés en 1998 à 30 milliards de FKM (Matisse 6). Ils contribuent de façon significative à la<br />

formation des revenus des ménages et sont à l’origine de divers investissements à caractère<br />

social et à des financements communautaires. Il y aurait 53 000 comoriens des trois îles à<br />

Mayotte, en 2002, sur une population mahoraise de 250 000 habitants. Séparée d’environ 70<br />

km de mer de Mayotte, les habitants d’Anjouan sont incités à risquer leur vie pour avoir un<br />

meilleur niveau de vie. Ce qui d’une part est déstabilisant pour l’économie anjouannaise qui<br />

voit partir une main d’œuvre jeune et masculine, mais qui permet l’envoie de transferts pour<br />

les familles de migrants et ouvre des opportunités de commerce entre les îles.<br />

Ces vingt dernières années, les <strong>Comores</strong> ont enregistré des taux de croissance négatifs,<br />

aggravant le niveau de vie de la population, d’autant qu’on a pu constater une diminution de<br />

l’aide publique internationale. La population comorienne est très jeune : plus de la moitié a<br />

moins de 20 ans en 2001. Le rapport de dépendance globale se situe à 93%, c'est-à-dire que<br />

chaque personne active aux <strong>Comores</strong> a à sa charge en moyenne neuf autres personnes soit<br />

très jeunes, soit très âgées. D’où les défis conséquents pour le pays, notamment en matière<br />

6 Perspective de développement aux <strong>Comores</strong><br />

9


d'éducation, de santé, de nutrition, d'emploi, compte tenu de la faiblesse du taux d'activité<br />

estimé à 45% 7.<br />

C’est dans ce contexte difficile de crise économique et institutionnelle continuelle, d’absence<br />

de l’Etat et d’infrastructures adéquates que le projet <strong>Sanduk</strong> s’est mis en place.<br />

1.2. Le réseau <strong>Sanduk</strong> 8<br />

Le projet sanduk, premier programme de microfinance à avoir été mis en place aux <strong>Comores</strong><br />

est né du constat de l’absence de services financiers adaptés à la population comorienne. Des<br />

banques commerciales étaient destinées à la couche de la population la plus aisée et n’étaient<br />

pas accessibles au citoyen comorien moyen, trop pauvre pour pouvoir prétendre à des<br />

services d’épargne ou de crédit. Le réseau a plus de dix ans, il a connu une croissance et des<br />

changements importants depuis sa création. L’Union Régionale des <strong>Sanduk</strong> d’Anjouan (UR),<br />

séparée depuis 1999 de l’Union Nationale, mais restant sous sa tutelle jusqu’en 2003, est<br />

particulièrement performante.<br />

Son fonctionnement est bien adapté aux réalités locales. L’appropriation par ses bénéficiaires<br />

est largement atteinte, notamment depuis la période de l’embargo durant laquelle les sanduk<br />

n’ont cessé de fonctionner, ce qui a constitué un important soutien à l’activité économique de<br />

l’île et donc à la population.<br />

L’offre de crédit très flexible, le fonctionnement décentralisé et les valeurs de « démocratie<br />

participative » que les sanduk véhiculent, contribuent à l’appropriation du projet par les<br />

habitants d’Anjouan.<br />

1.2.1. Historique du projet<br />

Le projet <strong>Sanduk</strong> a débuté en 1991 à l’initiative du Gouvernement comorien et de l’Agence<br />

Française du Développement (AFD). L’objectif était de créer un système financier<br />

décentralisé (SFD), et de donner ainsi à la population exclue, pour la très grande majorité, du<br />

système bancaire formel, un moyen de financer ses activités. L’AFD demande à l’Institut de<br />

Recherche et d’Applications des Méthodes de développement (IRAM), au Groupe de<br />

Recherche et d’Echanges Technologiques (GRET) et à des cadres comoriens, de mener une<br />

étude pour identifier les besoins de la population en petits crédits. Cette étude révèle une<br />

forte culture associative au sein des villages, par ailleurs faiblement organisés. Une institution<br />

7 Rapport Nationale sur les Objectifs du Millénaire pour le Développement, PNUD, 2003<br />

8 <strong>Sanduk</strong> signifie caisse ou coffre en comorien<br />

10


de microfinance sous forme d’association villageoise de crédit et d’épargne autogérée<br />

au niveau des villages est créée.<br />

Les premières caisses sont créées en Grande-Comore, en 1993. Début 1994, les premières<br />

caisses anjouannaises sont mises en place, puis celles de Mohéli.<br />

L’objectif est de créer une institution financière décentralisée, devant atteindre rapidement<br />

une pérennité financière ; « L’Union Régionale des <strong>Sanduk</strong> d'Anjouan (UR) a pour objet<br />

de mettre en œuvre une institution financière spécifique à vocation permanente, ouverte aux<br />

différentes catégories de la population, en priorité aux plus démunis 9»<br />

Les principes d’autogestion et d’indépendance des caisses, nés de l’étude de terrain préalable,<br />

doivent assurer la pérennité du réseau, en établissant une responsabilité locale des opérations<br />

des caisses, les biens matériels et mobiliers devenant la propriété de la caisse et donc de la<br />

communauté villageoise.<br />

L’accent sera mis au départ sur les opérations de crédit plus que sur l’épargne. La collecte de<br />

l’épargne ne débutera que deux ans après. Il fallait gagner la confiance des épargnants<br />

potentiels en prouvant qu’il est possible de faire des crédits et d’obtenir des remboursements.<br />

Il fallait d’autre part éviter, dans un premier temps, les couches de la population les plus<br />

aisées, qui pourraient détourner l’outil à leur profit.<br />

La progressivité des montants de crédit est mise en place dés le début du projet. Cette<br />

stratégie vise à cibler les populations les plus démunies et à limiter les risques d’impayés.<br />

L’octroi des crédits est conditionné par l’obligation de financer des activités productives<br />

génératrices de revenus, par un système de garantie physique d’une valeur équivalente au<br />

montant du crédit et par une « caution solidaire » d’un membre de la famille 10.<br />

Depuis début 2004, l’Union fonctionne de façon autonome, tant d’un point de vue<br />

organisationnel que financier.<br />

1.2.2. L’Union Régionale des <strong>Sanduk</strong> d’Anjouan, aujourd’hui<br />

L’Union Régionale compte aujourd’hui 36 sanduk, elle est composée d’une équipe d’environ<br />

70 salariés et de 300 responsables locaux, représentants des villageois et gérants des caisses 11.<br />

Elle représente plus de 26 000 clients, dont plus de 16 000 épargnants et environ 3 800<br />

emprunteurs 12. Elle a connu une croissance très forte de son encours d’épargne (4 millions<br />

9 Statuts de l’Union Régionale des <strong>Sanduk</strong> d’Anjouan, 1999, article 2<br />

10 Les garanties peuvent être des parcelles cultivables ou constructibles, des animaux, des biens mobiliers, appartenant<br />

souvent à l’ensemble de la famille. C’est pourquoi un membre de la famille doit être présent lors de l’octroi du crédit, afin de<br />

vérifier que la famille à bien été mise au courant de la mise en garantie de ses biens.<br />

11 Voir en annexe le fonctionnement des sanduk (Annexe 1)<br />

12 Assemblée Générale de l’Union Régionale des <strong>Sanduk</strong> d’Anjouan, août 2005<br />

11


d’euros 13) et de son encours de crédit (plus de 2 millions d’euros 14). Cependant elle connaît<br />

depuis quelques temps une forte dégradation de la qualité de ses remboursements, passant<br />

d’un taux de remboursement à 3 mois de 98,5% en 1999, à 94,5% en 2004, risque important<br />

pour le bon fonctionnement de l’institution.<br />

25000<br />

20000<br />

15000<br />

10000<br />

5000<br />

Les produits offerts :<br />

0<br />

Evolution du nombre d'emprunteurs, d'usagers et d'épargnants<br />

2001-2004<br />

2001 2002 2003 2004<br />

emprunteurs actifs usagers épargnants<br />

Les sanduk proposent différents produits de crédits et d’épargne. Deux produits de crédits<br />

sont destinés à des activités génératrices de revenus de particuliers et le troisième est destiné à<br />

des projets partenaires du réseau. Deux produits d’épargne sont offerts par les sanduk.<br />

Le « crédit de base » ou « crédit sanduk », est le premier crédit créé lors de la mise en place du<br />

réseau. Il représente la majorité de l’activité crédit des sanduk. C’est un crédit à vocation<br />

productive, d’un montant compris entre 25 000fc (50€) et 750 000fc (1 500 €). Il offre une<br />

grande possibilité d’utilisation et une grande flexibilité de durée (4 à 20 mois, avec un différé<br />

de remboursement de 30 à 90 jours) et de mode de remboursement (fréquence de<br />

13 soit 2 milliards de francs comoriens au 1er juillet 2005<br />

14 soit 1 milliard de francs comoriens, au 1er juillet 2005<br />

99<br />

98<br />

97<br />

96<br />

95<br />

94<br />

93<br />

92<br />

91<br />

90<br />

89<br />

Evolution du taux des remboursement<br />

1999 2000 2001 2002 2003 2004<br />

12


emboursement mensuelle ou par tranches de 2 à 6 mois). Le taux d’intérêt est de 2% par<br />

mois sur le capital restant dû.<br />

Le « crédit déplafonné » se différencie du crédit de base par son montant allant de 750 000FC<br />

(1 500€) à 2 000 000FC (4000€). Créé pour éviter la pratique des prête-noms 15 et en raison<br />

de la multiplication des adhésions de catégories de personnes relativement riches par rapport<br />

à la clientèle ciblée, ce crédit est plus risqué pour le réseau que les crédits à plus faible<br />

montant.<br />

Enfin le « crédit pilote », démarré en 2002 est géré directement par l’UR. Il se fait<br />

essentiellement avec des projets partenaires du réseau. Les montants ne dépassent pas 2<br />

millions de FC (4000€). Les taux d’intérêt sont de 1 à 2% par mois selon le type de projet, et<br />

sa durée de remboursement ne dépasse pas 24 mois. Les deux principaux crédits pilotes sont<br />

des crédits financés par l’AIEB 16 destinés essentiellement au financement des activités de<br />

pêche et les crédits DECVAS 17, financés par à 90% par le projet DECVAS et 10% par le<br />

projet AMIE destinés à financer les cultures vivrières, principalement de bananes.<br />

Il existe deux produits d’épargne : le dépôt à vue (DAV) et le dépôt à terme (DAT) ouverts à<br />

tous les habitants du village, membres et non membres. L’épargne n’est pas obligatoire, et ne<br />

constitue pas une condition préalable à l’octroi de crédit. Le DAV était jusqu’à fin 2004,<br />

rémunéré de 2% à 3% selon les caisses. Il n’est plus rémunéré aujourd’hui, en raison de la<br />

création du DAT, qui a pour objectif de stabiliser l’épargne et de limiter son coût. Les dépôts<br />

sont bloqués sur le compte d’épargne pendant une durée de 6 mois (rémunéré à hauteur de<br />

1,5% du montant épargné) ou 12 mois (rémunéré à hauteur de 4% du montant épargné).<br />

ENCOURS AU<br />

31/12/2004<br />

(EN FRANCS<br />

COMORIENS)<br />

ENCOURS AU<br />

31/12/2004<br />

(EN EUROS)<br />

PART DANS<br />

L’ENCOURS DE<br />

CREDIT<br />

Crédit de base 900 000 000 1 800 000 90%<br />

Crédit déplafonné 43 285 000 86 570 4,3%<br />

Crédit pilote 1 000 769 792 2 001 540 5,7%<br />

Epargne à vue<br />

(dépôts de la clientèle)<br />

1 727 642 965 3 455 286<br />

Les sanduk proposent une gamme de produits flexible. Le client est libre de faire le choix de<br />

son mode de remboursement, appuyé par les conseils du caissier avant l’octroi de son crédit.<br />

15 Personne utilisant le nom d’un tiers pour prendre un crédit, sans forcément que le titulaire en soit informé, souvent pour<br />

pouvoir bénéficier de montants plus importants que ceux que proposent les sanduk. Cette pratique est néanmoins<br />

irrégulière.<br />

16 Appui aux Initiatives Economiques de Base (FIDA)<br />

17 Développement des cultures vivrières et appui semencier, financé par l’Union Européenne dans le cadre du 7e FED<br />

(Fonds européen de développement)<br />

13


1.2.3. La place des <strong>Sanduk</strong> dans l’économie anjouannaise<br />

Les activités des Anjouannais étant majoritairement familiales, les crédits contractés par les<br />

clients sont utilisés par l’ensemble du ménage. Plus de 26 000 personnes adhérent aux<br />

<strong>Sanduk</strong> et peuvent ainsi bénéficier des crédits. Si l’on considère que chaque crédit représente<br />

un ménage, le taux de pénétration est de 60,5% 18 des ménages. Par rapport à la population de<br />

plus de 20 ans (PNUD, 2003), les sanduk ont un taux de pénétration de 17% sur l’ensemble<br />

de la population.<br />

Aujourd’hui fonctionnent 36 caisses villageoises, dont 18 inter villageoises regroupent entre 2<br />

et 4 villages. Les sanduk desservent plus de 60 villages anjouannais, sur un total de 90 villages<br />

sur tout le territoire, ce qui représente une couverture du territoire de 67%.<br />

Le crédit sanduk constitue l’une des principales sources de financement des activités. Les<br />

autres institutions financières décentralisées (IFD) ne répondent pas aussi bien aux besoins<br />

de financement de la population ciblée par les sanduk. Les conditions de crédits demandant<br />

le plus souvent une épargne préalable obligatoire et des garanties plus importantes, la<br />

majorité des clients du sanduk n’ont pas accès aux services des autres IFD.<br />

Les crédits octroyés par des particuliers sont rares et les systèmes de tontines perdent de leur<br />

ampleur, en raison d’un affaiblissement de la confiance entre les individus.<br />

En 2000, les sanduk représentaient environ « 9% du marché du crédit et d’épargne 19 » à<br />

Anjouan, avec un encours de crédit de 690 456 FKM et d’épargne de 1 268 907FKM. Cette<br />

part de marché est élevée par rapport au faible niveau de vie des clients du sanduk.<br />

18 Il y a à Anjouan 42 938 ménages (Recensement Général de la Population et de l’Habitat, 2003, PNUD) et 26 000<br />

adhérents qui prennent des crédits ou susceptibles d’en demander un.<br />

19 Document de la stratégie de croissance et de réduction de la pauvreté, Union des <strong>Comores</strong> services de la Présidence<br />

de la République / Commissariat général au plan, chap.3 p21<br />

14


2. Analyse de la stratégie et<br />

des performances sociales<br />

des <strong>Sanduk</strong><br />

Tout comme un mouvement général se dessine dans le monde des entreprises pour les<br />

«responsabiliser » sur leur impact social et environnemental et suivre leurs performances dans<br />

ces domaines 20 , le monde de la microfinance commence à élargir le cadre d’analyse des<br />

performances de ses institutions. Il s’agit non seulement de pouvoir approfondir et valoriser<br />

dans le pilotage quotidien les analyses d’impact menées auprès des clients, mais aussi de<br />

pouvoir développer et utiliser toute une nouvelle gamme d’outil de mesure, d’évaluation et<br />

d’audit des performances sociales basés sur les informations internes à l’IMF.<br />

L’étude des performances sociales des IMF a pour but de mettre à la disposition de ces<br />

dernières un outil de pilotage interne permettant d’atteindre les objectifs sociaux qu’elles se<br />

sont fixées. Elle permet également d’évaluer les moyens mis en œuvre par l’IMF pour<br />

répondre à ses objectifs sociaux.<br />

Cette étude se justifie, d’une part, par le besoin d’une IMF de s’interroger sur la population<br />

effectivement ciblée, l’adaptation de ses services et produits à la clientèle cible, sa<br />

participation à l’amélioration du capital social de ses clients et sa responsabilité sociale. Ce qui<br />

permet de déterminer dans quelle mesure elle participe aux objectifs de lutte contre la<br />

pauvreté.<br />

D’autre part, elle se justifie par une intuition grandissante des IMF qu’améliorer leurs<br />

performances sociales contribue à l’amélioration de leurs performances financières sur le<br />

long terme et donc de leur pérennité. Ces liens entre performances financières et sociales<br />

s’illustrent par les avantages que peuvent apporter la mise en valeur des performances<br />

sociales du point de vue de la réduction des coûts de transaction, la capacité d’innovations<br />

qu’elles sont susceptibles d’apporter et les bénéfices non seulement économiques mais aussi<br />

sociaux pour leurs clients.<br />

Le travail auprès du réseau des <strong>Sanduk</strong> a permis en premier lieu d’analyser les performances<br />

sociales de l’IMF à partir de l’outil SPI-CERISE et de répondre à la question de la stratégie<br />

sociale et des moyens mis en œuvre pour atteindre ses objectifs sociaux. L’étude SPI-<br />

CERISE a été complétée ensuite par une étude sur la satisfaction et la perception de l’impact<br />

20 Voir par exemple le site de la Global Reporting Initiative (http://www.globalreporting.org)<br />

15


par les clients. Cette combinaison d’approche (SPI et impact) offre alors une image complète<br />

de la stratégie sociale de l’IMF.<br />

2.1. Objectifs et méthode de l’étude SPI-CERISE<br />

Le questionnaire SPI-CERISE (2005) mesure les performances sociales des IMF à travers<br />

quatre dimensions : (1) Ciblage des pauvres et des exclus, (2) Adaptation des services et des<br />

produits aux clients cibles, (3) Amélioration du capital social et politique des clients et (4)<br />

Responsabilité sociale de l’institution.<br />

Cette étude évalue à chaque étape du processus (intention-action-résultats) la mise en relation<br />

des principes de base et des actions engagées. La mesure des performances sociales s’attarde<br />

sur l’analyse des objectifs sociaux et leurs liens avec les actions et les mesures correctives<br />

mises en place par l’IMF pour atteindre ces objectifs. Elle utilise essentiellement des<br />

informations internes à l’IMF (principes et textes fondateurs, mode d’action et plans<br />

d’affaires, système d’information et de gestion, etc.).<br />

L’application de ce questionnaire aux <strong>Sanduk</strong> a fait l’objet d’un entretien approfondi avec Ali<br />

Ahamadi, directeur exécutif de l’Union Régionale des <strong>Sanduk</strong> d’Anjouan.<br />

2.2. Les résultats de l’étude SPI-CERISE<br />

Rappel de la mission des <strong>Sanduk</strong>:<br />

« L’Union Régionale des <strong>Sanduk</strong> d'Anjouan a pour objet de mettre en œuvre une institution<br />

financière spécifique à vocation permanente, ouverte aux différentes catégories de la<br />

population, en priorité aux plus démunis 21 »<br />

Valeurs :<br />

L’objectif initial du projet <strong>Sanduk</strong> est de répondre de façon pérenne aux besoins de<br />

financement de la population exclue du système bancaire traditionnel. Les objectifs sociaux et<br />

la viabilité financière sont deux valeurs prédominantes, mises sur un pied d’égalité.<br />

Dimension 1 : Ciblage des pauvres et des exclus<br />

Stratégie de ciblage : Les <strong>Sanduk</strong> ont pour objectif de toucher l’ensemble de la population<br />

non « bancable » et la totalité des villages de l’île d’Anjouan et n’ont pas de stratégie de<br />

ciblage individuelle définie.<br />

21 Statuts de l’Union Régionale des <strong>Sanduk</strong> d’Anjouan, article 2 (Août 1999)<br />

16


Au niveau du ciblage géographique, l’UR n’a pas de stratégie spécifique, le territoire étant<br />

relativement restreint, leur objectif de ciblage est davantage basé sur une couverture totale de<br />

l’île. Ce qui révèle une bonne performance au niveau du ciblage géographique.<br />

Les caisses villageoises sont créées à la demande de la communauté villageoise et les critères<br />

d’acceptation du dossier sont davantage la motivation des villageois pour créer leur sanduk<br />

que le niveau de pauvreté du village.<br />

Les <strong>Sanduk</strong> sont accessibles à l’ensemble des villageois, qui n’ont pas accès au système<br />

bancaire pour une grande majorité d’entre eux 22 . La faible superficie de l’île et sa population<br />

peu nombreuse font que le contexte est peu favorable à une stratégie de ciblage des<br />

populations les plus pauvres.<br />

Après avoir instauré un système de groupe solidaire, l’UR décide de le remplacer rapidement<br />

par un système de garantie physique à valeur équivalente au crédit demandé, même si la<br />

valeur de cette garantie est très rarement vérifiée par les instances de la caisse.<br />

Les <strong>Sanduk</strong> sont présents dans des zones reculées, faiblement dotées en infrastructure<br />

(routière, électricité…). 90% des caisses sont implantés en zone rurale où prédomine<br />

l’agriculture vivrière. Les femmes ne représentent que 37% des emprunteurs.<br />

Dimension 2 : Adaptation des services et des produits aux clients cibles<br />

Les produits offerts par l’IMF ne sont pas des produits spécifiques. Mais ils offrent une<br />

grande possibilité d’utilisation et une grande flexibilité, à la fois au niveau des montants, de la<br />

durée et du mode de remboursement.<br />

Les <strong>Sanduk</strong> proposent trois produits de crédits. Au-delà de ces trois produits, ils proposent<br />

une grande flexibilité de remboursement. Il n’existe donc pas de crédits sociaux spécifiques,<br />

mais l’octroi de crédit d’urgence est possible, si le client a une opportunité d’investissement<br />

qui nécessite un crédit rapidement.<br />

Il n’y a pour le moment, aucun produit d’épargne spécifique, les produits d’épargne, DAT<br />

et DAV sont volontaires. Une réflexion s’est ouverte au sein de l’équipe technique sur la<br />

création de nouveaux produits, notamment concernant l’épargne, pour le mariage,<br />

l’éducation et le logement.<br />

Au niveau de la décentralisation, l’IMF est performante. Les caisses étant présentes dans<br />

plus de 60% des villages de l’île, elles sont très accessibles à l’ensemble de la communauté<br />

villageoise.<br />

22 99% des Anjouannais d’après le Directeur de l’UR<br />

17


Les réunions d’étude des demandes de crédit ont lieu une fois par mois dans chaque caisse.<br />

Des cas urgents peuvent faire l’objet d’une étude lors de réunions extraordinaires et le crédit<br />

peut alors être octroyé rapidement.<br />

Chaque client reçoit une fiche, en comorien, lors de l’octroi de son crédit sur laquelle sont<br />

inscrits les dates de remboursement, le montant des intérêts et du capital. L’équipe technique<br />

de l’IMF est très soucieuse de la transparence de l’information envers ses clients.<br />

L’IMF a une politique spécifique dans chaque village afin d’adapter les services aux<br />

besoins des clients. Les horaires et jours d’ouverture de la caisse sont décidés par le village.<br />

Les demandes urgentes nécessitent parfois l’ouverture de la caisse un jour où celle-ci est<br />

fermée, le caissier se rend alors disponible et ouvre la caisse pour ces cas particuliers. Les<br />

coûts d’opportunité sont ainsi réduits pour le client.<br />

L’IMF n’a pas encore mis en place une étude de marché formelle pour améliorer la<br />

qualité des services. L’objet du crédit fait l’objet d’une discussion avec le comité de gestion<br />

qui étudie, de façon superficielle, la rentabilité de l’activité financée. De nombreuses<br />

discussions informelles entre le client et le caissier, ainsi qu’avec le comité de gestion de la<br />

caisse du village, permettent de vérifier l’adaptation des services aux besoins des clients.<br />

La plupart des départs de clients, ou plutôt de l’inactivité des clients, est due aux<br />

importantes migrations de la population d’Anjouan, notamment vers Mayotte. L’IMF ne<br />

considère pas avoir à faire à de réelles démissions.<br />

L’IMF ne met plus à disposition de ses clients de services non financiers. En 2004, l’IMF a<br />

mis en place un service d’alphabétisation fonctionnelle, financé sur fonds propres, destiné<br />

principalement aux femmes, avec la collaboration d’une association locale d’alphabétiseurs.<br />

Mais ce projet a pris fin en raison de financements insuffisants et la recherche de bailleurs<br />

pour financer ce projet n’a pas été un objectif prioritaire de l’IMF.<br />

Dimension 3 : Amélioration du capital social et politique des clients<br />

Par son fonctionnement démocratique et la grande participation communautaire l’IMF<br />

participe à l’amélioration du capital social et politique de ses clients. Les instances élues par la<br />

population du village bénéficient de formations et leur rôle favorise le poids de ses membres<br />

dans la communauté. Par ailleurs l’implantation d’un sanduk dans un village attire d’autres<br />

projets et le bon fonctionnement de la caisse constitue un élément déterminant dans la mise<br />

en place de nouveaux projets de développement au sein du village. Les clients ont accès à<br />

l’ensemble des informations financières de l’institution, notamment aux bilans financiers du<br />

<strong>Sanduk</strong> de leur village et de l’UR, lors des assemblées générales annuelles.<br />

L’un des rôles du comité de gestion est le règlement des conflits, mais le conseiller de crédit,<br />

le caissier et la direction sont aussi disponibles et peuvent être sollicités en cas de conflit.<br />

Mais il n’existe pas d’instance spécifique de règlement des conflits.<br />

18


Les femmes ne représentent que 37% des clients et sont sous-représentées au niveau des<br />

instances de décision (20% des élus des instances des caisses et seulement 6% des<br />

représentants au niveau de l’Union Régionale).<br />

La caisse du village participe au financement de projet en faveur de la communauté<br />

villageoise, tel que des projets d’adduction d’eau, la rénovation d’écoles, de mosquées ou de<br />

dispensaires. Cette participation est un objectif indispensable pour l’appropriation des clients<br />

au projet <strong>Sanduk</strong>.<br />

Les instances ont l’opportunité, grâce à leur fonction au sein des <strong>Sanduk</strong>, de rencontrer les<br />

pouvoirs publics et peuvent ainsi influencer la prise de décision dans leur région. Les<br />

autorités locales n’hésitent pas à consulter la direction des <strong>Sanduk</strong> et réciproquement pour es<br />

grandes décisions et les orientations pouvant affecter l’avenir du réseau.<br />

Dimension 4 : responsabilité sociale de l’institution<br />

L’IMF est particulièrement bien adaptée aux réalités et à la culture locale, étant gérée en<br />

grande partie par la population villageoise. Elle fait donc l’objet d’une grande appropriation<br />

de la part de la population. Elle participe à des projets de développement communautaire, ce<br />

qui favorise son intégration dans le paysage villageois. Les instances élues de chaque caisse<br />

ont pour rôle d’adapter, avec l’appui de l’équipe technique, les services offerts aux besoins<br />

réels de la population.<br />

Sa politique de ressources humaines ne répond pas à un plan d’action explicite et formel.<br />

Etant donné le manque de formation généralisé dans toute l’île, il lui est difficile de trouver<br />

du personnel compétent et fortement investi dans ses activités.<br />

Aucun plan de formation n’est formalisé. Chaque employé, par type de poste, reçoit une<br />

formation continue mais de façon irrégulière. 10% des employés (8) ont quitté l’équipe des<br />

<strong>Sanduk</strong>, depuis deux ans, une seule de ces personnes a quitté les <strong>Sanduk</strong> par choix personnel,<br />

les sept autres ont été licenciés pour détournement.<br />

Les <strong>Sanduk</strong> fonctionnent sur un système participatif à la fois au niveau des clients, mais aussi<br />

au niveau des employés. Les agents de crédits ont un rôle d’appui-conseil à la prise de<br />

décision auprès des instances élues des caisses.<br />

Les activités des caisses font l’objet de discussions et de réunions régulières avec les villageois<br />

et leurs représentants, ce qui permet une évolution en harmonie avec la culture locale.<br />

19


Responsabilité sociale**<br />

13<br />

Performances sociales par dimension<br />

Ciblage des pauvres et des<br />

exclus*<br />

18<br />

Amélioration du capital social et<br />

politique**<br />

17<br />

Adaptation des produits et<br />

services***<br />

13<br />

Performances sociales par sous-dimensions<br />

Ciblage géographique<br />

Responsabilité sociale envers la<br />

communaut é<br />

Ciblage individuel<br />

Responsabilité sociale envers les<br />

clients<br />

Méthode de ciblage<br />

Politique de ressources humaines<br />

Empowerment<br />

10<br />

8<br />

6<br />

4<br />

2<br />

0<br />

Représentat ion des clients<br />

Services Plus<br />

Confiance et partage de l'inf ormation<br />

Axes définis par l'UR comme:<br />

***objectif majeur<br />

** objectif important<br />

* objectif mineur<br />

Diversité des services<br />

Qualité de services<br />

2.3. Conclusion sur la stratégie sociale des <strong>Sanduk</strong><br />

D’un point de vue général, l’IMF est performante dans l’amélioration du capital social et<br />

politique de ses clients et dans sa stratégie de ciblage des pauvres et des exclus. Son<br />

fonctionnement démocratique et le principe de caisses locales autogérées par la population<br />

villageoise, en font son point fort. La responsabilité sociale de l’IMF constitue son point<br />

faible, l’absence d’organisation de plan de formation formel et d’étude spécifique sur les<br />

clients lui font défaut.<br />

La stratégie de ciblage individuel n’étant pas un objectif principal de l’IMF, qui compte<br />

toucher l’ensemble de la population anjouannaise relativement pauvre par rapport aux autres<br />

îles, a pour conséquence une note élevée pour la première dimension. Cet objectif de<br />

couverture totale de l’île et la faible superficie de ce territoire lui confèrent un haut niveau de<br />

performances en matière de ciblage.<br />

20


L’absence de produits spécifiques d’épargne et de crédits, malgré la grande flexibilité des<br />

modalités du crédit, conjuguée au manque de stratégie de ciblage individuel envers les plus<br />

pauvres, ne l’avantage pas pour l’adaptation des services et produits aux populations cibles.<br />

Mais on s’aperçoit que les performances de l’IMF, dans chacune des dimensions inégales.<br />

Dans la première dimension, la méthodologie de ciblage et le ciblage individuel font défaut,<br />

alors que l’IMF est particulièrement performante dans le ciblage géographique. Par rapport<br />

aux deux autres îles, Anjouan est particulièrement pauvre. Dans la dimension 2, la diversité<br />

des services est l’un de ses points forts, conséquence de la grande flexibilité des modes de<br />

remboursement, qui permet de proposer aux clients une grande diversité de produits de<br />

crédit. Pour la dimension 3, pour laquelle l’IMF est la plus performante, son atout majeur est<br />

principalement le système de représentation des clients dans les instances de décisions de<br />

l’institution. La dernière dimension, point faible de l’institution, montre tout de même un<br />

certain niveau de performance du point de vue de la responsabilité sociale de l’IMF envers la<br />

communauté, grâce à sa participation, certes irrégulière, à des initiatives locales de<br />

développement.<br />

21


3.1. Objectifs de l’étude<br />

3. Objectifs et méthodes de<br />

l’étude sur les clients<br />

L’objectif général de cette partie est de mieux comprendre le comportement des clients et<br />

l’impact positif ou négatif qu’engendre leur participation au réseau <strong>Sanduk</strong>.<br />

L’étude consiste à faire un état des lieux de la situation des clients emprunteurs des <strong>Sanduk</strong>.<br />

Elle cherche à déterminer les stratégies des différents types de clients ainsi que l’impact du<br />

crédit sur les individus, leur famille et leurs activités. Elle se justifie à différents niveaux.<br />

Les crédits octroyés par les <strong>Sanduk</strong> ne font l’objet d’aucune vérification formelle de leur<br />

utilisation. Lors de l’étude de la demande de crédit, l’objet du crédit est étudié, mais une fois<br />

que le crédit est octroyé, l’emprunteur peut l’utiliser à sa guise. Les informations recueillies<br />

par les responsables du réseau, tant au niveau régional que local, malgré la proximité des<br />

représentants locaux élus, sont très limitées.<br />

Pour la pérennité du programme et afin de mieux adapter les services et produits offerts, il<br />

s’avère nécessaire d’étudier de façon approfondie l’utilisation du crédit et de mieux connaître<br />

la situation des clients.<br />

De plus, une institution de microfinance (IMF) ayant pour objectif affiché de toucher les<br />

populations « non-bancables» et pauvres, a besoin de savoir si elle touche bien le public cible<br />

et les changements et conséquences qu’elle engendre sur ses clients. Il est important pour son<br />

fonctionnement et sa pérennité de savoir dans quelle mesure ses clients tirent des bénéfices<br />

de leur participation au réseau.<br />

Par ailleurs, la satisfaction de la clientèle par rapport aux produits offerts et au mode de<br />

fonctionnement n’a pas fait l’objet d’une étude formelle récente. Mesurer le degré de<br />

satisfaction et inciter les clients à faire des suggestions d’amélioration des produits offerts,<br />

permettra à l’IMF d’adapter son fonctionnement et ses services aux réalités et aux besoins de<br />

la population.<br />

Enfin, les départs de clients sont très difficiles à déterminer. Les adhérents du <strong>Sanduk</strong>, même<br />

lorsqu’ils ne prennent plus de crédit, ne démissionnent pas. Ils ne sont ni identifiés ni<br />

comptabilisés ni enregistrés dans le Système d’Information et de Gestion (SIG). Connaître les<br />

causes du non renouvellement des demandes de crédits permettrait de mieux identifier les<br />

22


dysfonctionnements et les failles du système, dans le cas où elles sont inhérentes au<br />

fonctionnement du <strong>Sanduk</strong>, et permettrait ainsi d’y remédier. Cela permettrait également de<br />

mieux connaître l’environnement socio-économique dans le cas où les causes de l’inactivité<br />

sont externes au <strong>Sanduk</strong>.<br />

3.2. Hypothèses de l’étude<br />

Le questionnaire contient six parties principales, chacune comprenant les éléments suivants :<br />

La partie introductive cherche à déterminer les caractéristiques générales du client enquêté<br />

(sexe, âge, niveau d’études, activités principales et secondaires, situation matrimoniale). Cette<br />

partie permet d’identifier le client suivant les critères définis par l’échantillonnage et de<br />

connaître les modalités de ses activités (activités familiales, séparation du budget familial et de<br />

l’activité).<br />

La première partie concerne les utilisations et les difficultés de remboursement des<br />

crédits (secteurs d’activité, produits ou prestations acquis par les deux derniers crédits,<br />

utilisateurs, part de l’investissement total que représente le crédit, difficultés de<br />

remboursement et leurs sources, sources de remboursement du crédit). Elle s’attarde<br />

particulièrement sur les deux derniers crédits.<br />

Des questions plus générales concernent les crédits précédents afin de déterminer les causes<br />

des difficultés de remboursement, les sources de remboursement et la proportion de<br />

personnes ayant été contraintes à la décapitalisation pour rembourser leur crédit.<br />

La deuxième partie de l’enquête cherche à déterminer les autres sources de financement<br />

utilisées par les clients en complément du crédit pour le financement de leurs activités.<br />

La troisième partie du questionnaire est relative à la question de l’impact du crédit sur les<br />

clients et leur environnement. Elle commence par une question d’appréciation générale du<br />

client ; « le crédit vous a-t-il aidé ? ». La réponse positive ou négative se rapporte chacune à la<br />

section « impact positif » ou « impact négatif ».<br />

Nous cherchons à déterminer à quel niveau l’impact du crédit a été positif ou négatif pour le<br />

client (revenu, bien-être du ménage, conditions d’habitat, activités).<br />

La quatrième partie concerne la satisfaction des clients par rapport aux produits et<br />

services offerts par les <strong>Sanduk</strong>, ainsi que leur degré d’information sur le fonctionnement du<br />

<strong>Sanduk</strong>.<br />

La cinquième partie cherche à déterminer le niveau de vie des clients, à travers la structure<br />

familiale des ménages, le niveau de d’alimentation, la possession d’actifs (terre, bétail,<br />

23


véhicule, électroménager…), le type de logement et l’accès aux infrastructures électriques et<br />

hydrauliques.<br />

Enfin, la sixième partie concerne uniquement les clients « inactifs », n’ayant pas pris de<br />

crédit depuis plus d’un an. On cherche, dans un premier temps, à déterminer les raisons de<br />

cette inactivité, et particulièrement si ces raisons son endogènes ou exogènes au <strong>Sanduk</strong>.<br />

Dans un deuxième temps on veut connaître l’évolution des activités du client depuis son<br />

départ et ses intentions vis-à-vis du <strong>Sanduk</strong>.<br />

3.3. La méthode d’échantillonnage<br />

Les enquêtes ont porté sur un nombre total de 151 clients. L’échantillonnage s’est fait selon<br />

trois critères : sexe, zone (urbaine/rurale) et caractéristique de clients :<br />

• Emprunteurs sélectionnés de façon aléatoire (« clientèle »)<br />

• Clients ayant pris de nombreux crédits, entre 6 et 10, selon l’ancienneté du sanduk<br />

(« clients ayant pris de nombreux crédits »)<br />

• Clients ayant pris peu de crédit et n’ayant pas pris de crédits depuis plus d’un an<br />

(« clients inactifs »)<br />

N’ayant pas de données fiables sur les activités exercées par les clients, il n’a pas été possible<br />

de prendre ces caractéristiques pour sélectionner l’échantillon.<br />

Les seules informations fiables que nous ayons à notre disposition sont le pourcentage de<br />

femmes pour l’ensemble du réseau (37%) et le pourcentage de <strong>Sanduk</strong> urbains (4 sur 35, soit<br />

11%). 11 <strong>Sanduk</strong> ont été sélectionnés, 2 urbains 23 et 9 ruraux 24.<br />

La répartition des échantillons par sexe :<br />

Les données sur la répartition par sexe dans chacun des échantillons ne sont pas disponibles<br />

dans le SIG. La proportion de femmes dans chaque échantillon a été augmentée afin d’avoir<br />

un nombre de femmes enquêtées représentatif et supérieur à 20 enquêtées.<br />

23 Domi et Habomo (sanduk créé par des femmes, les hommes ayant accès au crédit que depuis 1996, et ne participant que<br />

très peu à l’activité de la caisse<br />

24 Koni Ngani, Moya, Ongojou, Chandra, Mramani, Mremani, Bambao Matsanga, Adda et Bazimini<br />

24


« CLIENTELE »<br />

« CLIENTS AYANT PRIS DE<br />

NOMBREUX CREDITS »<br />

« CLIENTS<br />

INACTIFS »<br />

TOTAL<br />

hommes Effectif 31 31 21 83<br />

Part de l’effectif 61% 55% 48% 55%<br />

femmes Effectif 20 25 23 68<br />

Part de l’effectif 39% 45% 52% 45%<br />

Total Effectif 51 56 44 151<br />

Part de l’effectif 100% 100% 100% 100%<br />

L’échantillon « clientèle » est représentatif de la répartition par sexe de l’ensemble des clients,<br />

alors que les échantillons « clients ayant pris de nombreux crédits » et « clients inactifs » ne<br />

conservent pas les proportions réelles. Ces disproportions sont dues principalement, pour<br />

l’échantillon « clients ayant pris de nombreux crédits », aux difficultés de trouver les hommes<br />

dans leur village en pleine journée, souvent partis au champ ou chauffeurs de taxi. Pour<br />

l’échantillon « clients inactifs », les difficultés sont d’une autre sorte. De nombreux clients<br />

inactifs et principalement les hommes, ne prennent plus de crédit pour des raisons de<br />

migration, principalement vers Mayotte, mais aussi vers la Grande-Comore.<br />

Pour analyser les comportements de la clientèle des sanduk nous prendrons comme<br />

échantillon représentatif l’échantillon « clientèle », sélectionné de façon aléatoire et<br />

conservant les proportions entre hommes et femmes.<br />

25


4. L’analyse de la clientèle et<br />

de l’impact du crédit<br />

Le questionnaire a nécessité une préparation d’environ 1mois, hors terrain. Cette première<br />

étape a consisté à prendre connaissance des éléments de fonctionnement et d’évolution des<br />

sanduk depuis leur création et à définir une partie des objectifs et du contenu du<br />

questionnaire d’enquête.<br />

La formation des interprètes aux techniques d’enquête et à la démarche de l’étude, ainsi que<br />

l’adaptation du questionnaire avec l’appui du directeur exécutif de l’UR ont duré 3 semaines.<br />

Les entretiens ont demandé 30 minutes à chaque client interrogé et ont nécessité 37 jours<br />

d’enquête de terrain, environ 3 jours par sanduk de village.<br />

4.1. Le profil des membres de l’IMF<br />

4.1.1. Classe d’âge :<br />

La moyenne d’âge de la clientèle est de 39 ans. La classe d’âge la plus représentée est celle des<br />

25/35 ans (35%), suivie de celle des 35/45 ans (29%), représentant à elles deux plus de 60%<br />

de la clientèle totale.<br />

La classe d’âge 18/25ans est moins représentée (10%) alors qu’elle représente plus de 12% de<br />

la population générale d’Anjouan (RGPH, 2003). Cette différence s’explique principalement<br />

par l’importance du phénomène de migration des populations jeunes vers Mayotte, pour<br />

vendre leur force de travail et envoyer des transferts d’argent à leur famille.<br />

26


4.1.2. Niveau scolaire<br />

45 55 ans<br />

18%<br />

Classe d'âge de l'échantillon 1<br />

35 45 ans<br />

29%<br />

55 et +<br />

8%<br />

18 25 ans<br />

10%<br />

25 35 ans<br />

35%<br />

L’Union des <strong>Sanduk</strong> d’Anjouan touche une population peu instruite dans l’absolu, mais plus<br />

instruite que la moyenne nationale.<br />

Si 43% des clients n’ont jamais été scolarisés, la part des diplômés du supérieur est<br />

relativement importante (20%), constitué principalement d’hommes et de fonctionnaires.<br />

Niveau de scolarisation de la clientèle<br />

études<br />

supérieurs<br />

20%<br />

niveau bac<br />

12%<br />

7 à 12 ans<br />

8%<br />

1 à 6 ans<br />

18%<br />

aucune<br />

scolarisation<br />

43%<br />

Le niveau plus élevé de scolarisation des clients se confirme par la comparaison avec les<br />

données issues de l’Enquête Budget-consommation des ménages de 1995. Alors que la majorité de la<br />

population générale (56%) n’a jamais été scolarisée, moins de un client sur deux n’a jamais<br />

27


été à l’école (43%). De plus les clients sont 39% à avoir atteint un niveau secondaire ou<br />

supérieur, contre seulement 23% de la population anjouannaise.<br />

Les différences de niveaux scolaires entre les sexes sont importantes. 60% de la clientèle<br />

féminine n’a jamais été scolarisées, contre seulement 32% de la clientèle masculine. 10% des<br />

femmes ont un niveau secondaire ou supérieur, contre 58% des hommes clients des sanduk.<br />

Ces chiffres montrent bien les inégalités d’accès à l’éducation entre les hommes et les<br />

femmes. L’Union des <strong>Sanduk</strong> touche donc davantage les femmes que les hommes exclus du<br />

système scolaire.<br />

Nous constatons que les hommes clients des sanduk sont plus instruits que la moyenne<br />

nationale, alors que les données pour les femmes en sont plus proches 25.<br />

Si la proportion de femmes clientes ayant un niveau secondaire et supérieur est faible (10%),<br />

elle est plus importante pour celles ayant suivi un cursus primaire (30% contre 18% en<br />

moyenne). Les femmes n’ayant jamais été scolarisées représentent 60% chez les clientes des<br />

sanduk, contre 66% en moyenne au niveau national.<br />

4.1.3. Niveau de pauvreté de la clientèle<br />

Les ménages clients des sanduk sont moins pauvres que la moyenne des ménages de l’île,<br />

selon les critères présentés dans le tableau suivant. 59% des clients bénéficient de l’électricité<br />

du réseau, contre 21% des ménages d’Anjouan.<br />

58% des clients ont une installation d’eau à domicile contre seulement 39% des ménages<br />

anjouannais. Parmi les 42% restant, la proportion de clients des sanduk à aller chercher de<br />

l’eau à la rivière est plus de deux fois plus importante que celle de la moyenne des ménages.<br />

Le pourcentage de ménages possédant des biens de « confort », tels qu’une télévision, une<br />

voiture, un réfrigérateur ou une radio, est plus important chez les clients du sanduk par<br />

rapport à la moyenne des ménages anjouannais.<br />

10% des clients possédant une télévision et un tiers des clients possédant un réfrigérateur<br />

considèrent que ces acquisitions ont pu se faire, directement ou indirectement, grâce au<br />

crédit.<br />

La proportion de ménages ne possédant aucun de ces biens est néanmoins plus importante<br />

chez les clients des sanduk par rapport à l’ensemble des ménages anjouannais. Ceci met en<br />

évidence un écart important de richesses parmi les clients des sanduk. Les clients des sanduk<br />

sont en moyenne plus riches que la population anjouannaise, mais il y a une plus forte<br />

25 Voir annexe 3, tableau 1<br />

28


proportion de très pauvres chez les clients par rapport à la moyenne de la population<br />

générale.<br />

Les conditions d’habitation sont meilleures pour les clients des sanduk par rapport aux<br />

ménages d’Anjouan. 65% des clients habitent dans des maisons avec un toit en « dur » et<br />

70% avec des murs en béton contre 40% et 53% des ménages anjouannais.<br />

Mode d’éclairage<br />

CLIENTELE DES SANDUK MOYENNE ANJOUAN<br />

Urbain Rural Total Urbain Rural Total<br />

Electricité du réseau 100% 52% 59% - - 21%*<br />

Générateur électrique 0% 11% 10% - - 2,2%*<br />

Lampe à pétrole 0% 36% 31% - - 69,1%*<br />

Accès à l’eau<br />

Domicile 100% 52% 58% - - 39,2%*<br />

Chez le voisin 0 27% 24% - - 20,5%*<br />

Fontaine publique 0 11% 10% - - 28,7%*<br />

Rivière 0 9% 8% - - 3,25%*<br />

Possession d’actifs<br />

Bovins 17% 45% 42% - -<br />

Moutons/chèvres 17% 34% 32% - -<br />

Voiture 33% 5% 8% - - 4%**<br />

Moto 0 7% 6% - -<br />

Télévision 67% 43% 46% - - 12%**<br />

Réfrigérateur 57% 41% 41% - - 9%**<br />

Radio 43% 52% 51% - - 43%**<br />

Aucun des 5 éléments précédents 29% 40% 39% - - 36,5%**<br />

Habitat<br />

Nature du toit<br />

- béton 100% 60% 65% - - 40%**<br />

- tôle 0 24% 21% - - 37%**<br />

- paille/ feuilles de cocotiers 0 16% 14% - - 15%**<br />

Nature des murs<br />

- béton 100% 65% 70% - - 53%**<br />

- tôle 0 19% 16% - - 4%**<br />

- feuilles de cocotiers 0 16% 14% - - 36%**<br />

*PNUD, Recensement général de la population et de l’habitat, 2003<br />

** Direction Générale du Plan, Enquête à indicateurs multiples, 2000<br />

Afin d’affiner l’analyse et d’identifier différents comportements selon le niveau de richesse<br />

des clients, nous élaborons un indice de pauvreté à partir de sept indicateurs : possession<br />

d’actifs, taille du ménage, accès à l’eau, niveau d’éducation du chef de ménage, niveau<br />

d’alimentation, mode d’éclairage et scolarisation des enfants à l’école privée. Cet indice<br />

permet de classer la clientèle des sanduk en trois catégories de richesse : les « pauvres », les<br />

29


« moyennement pauvres », les « riches », chacune représentant un tiers des clients<br />

interrogés 26 .<br />

CLIENTELE DES CLIENTS AYANT PRIS CLIENTS<br />

SANDUK<br />

BEAUCOUP DE CREDITS INACTIFS TOTAL<br />

pauvres 29% 30% 34% 31%<br />

Moyennement pauvres 35% 34% 27% 32%<br />

Riches 35% 36% 39% 36%<br />

Total 100% 100% 100% 100%<br />

Le niveau de pauvreté par sexe met en évidence une disparité des profils masculins et<br />

féminins. Le niveau moyen de pauvreté est davantage représenté chez les femmes, avec 40%<br />

d’entre elles, alors que chez les hommes il y a une plus forte proportion de « riches » (41%).<br />

45%<br />

40%<br />

35%<br />

30%<br />

25%<br />

20%<br />

15%<br />

10%<br />

5%<br />

0%<br />

4.1.4. Activités des clients<br />

33%<br />

Niveau de pauvreté par sexe<br />

27%<br />

41%<br />

29%<br />

40%<br />

hommes femmes<br />

Il est difficile d’identifier le secteur d’activité des clients, étant donnée la pluriactivité de la<br />

plupart d’entre eux. Seulement 43% des clients n’ont qu’une seule activité, 57% ont deux<br />

voire trois activités. Une grande partie des clients cumule des activités agricoles et de petit<br />

commerce. La grande majorité des fonctionnaires, qui ne touchent leur salaire que tous les<br />

trois mois en moyenne et accumulent les arriérés de salaire, augmentent leur revenu par une<br />

seconde activité, principalement commerciale.<br />

Ainsi 29% des clients déclarent comme activité principale l’agriculture, 27% le commerce,<br />

20% l’artisanat, 12% sont fonctionnaires et 6% sans activité.<br />

En faisant un croisement des données concernant les activités principales et secondaires des<br />

clients, on trouve que 47% des clients sont agriculteurs, 49% sont commerçants, 27%<br />

artisans et 18% fonctionnaires.<br />

26 Voir annexe 2 pour le détail de la construction de l’indice<br />

31%<br />

pauvres<br />

moyens<br />

riches<br />

30


Les commerçants et les agriculteurs représentent une part importante des clients des sanduk.<br />

Moins d’un tiers des clients sont artisans et les fonctionnaires représentent une part non<br />

négligeable de la clientèle.<br />

4.1.5. Autres sources de financement des activités<br />

Autres crédits<br />

La grande majorité des clients interrogés (81%) n’a pas d’autre source de crédit pour financer<br />

leurs activités que le crédit sanduk. 29 clients, soit 19% des clients interrogés utilisent une<br />

autre source.<br />

Seulement 4 crédits proviennent d’une autre institution de microfinance, 2 des MECK et 2<br />

du projet AMIE, ce qui représentent 2% des clients interrogés. Ces 4 clients font partie de<br />

l’échantillon des inactifs et ne prennent donc plus de crédit au sanduk depuis plus d’un an. Il<br />

existe donc un effet de substitution des produits offerts par d’autres IMF au crédit sanduk,<br />

mais ce phénomène reste marginal.<br />

Les 25 autres crédits, soit 17% des clients, proviennent de la famille du client qui ne demande<br />

pas d’intérêt.<br />

Tontines<br />

Plus d’un tiers des clients interrogés participent à une tontine (37%). 36% d’entre eux<br />

utilisent l’argent de ces tontines pour les activités financées par le crédit et autant pour les<br />

dépenses familiales courantes. 4% des clients disent utiliser la tontine pour rembourser le<br />

crédit au sanduk.<br />

Transferts de migrants<br />

50%<br />

40%<br />

30%<br />

20%<br />

10%<br />

0%<br />

dépenses familiales<br />

36% 36%<br />

activté financée par l...<br />

Utilisations des tontines<br />

autre activité<br />

4% 7% 4%<br />

autre<br />

remboursement du crédit<br />

Près de la moitié des clients interrogés (47%) reçoivent des transferts d’argent de migrants.<br />

Ces transferts sont principalement utilisés pour les dépenses familiales courantes (84%).<br />

Seulement 14% des clients recevant des transferts disent en utiliser une partie pour financer<br />

maison<br />

25%<br />

éducation<br />

11%<br />

31


leurs activités. Ces chiffres doivent être nuancés étant donnée le mélange des trésoreries du<br />

ménage et des activités et la fongibilité qui en découle.<br />

90%<br />

80%<br />

70%<br />

60%<br />

50%<br />

40%<br />

30%<br />

20%<br />

10%<br />

0%<br />

84%<br />

dépenses<br />

familiales<br />

Utilisations des transferts de migrants<br />

10%<br />

épargne du<br />

migrant<br />

14%<br />

1% 1%<br />

activités autre éducation<br />

Plus de la moitié des transferts proviennent de Mayotte (65%), ce qui illustre bien<br />

l’importance des migrations anjouannaises vers Mayotte pour l’ensemble de l’économie<br />

d’Anjouan et le maintien du niveau de vie de la population.<br />

La clientèle des sanduk est surtout masculine, les femmes ne représentent que 37% des clients. Les sanduk ne<br />

touchent pas une population particulièrement jeune, la grande majorité ayant plus de 25 ans, avec un niveau<br />

d’éducation supérieur à la moyenne nationale. Ils touchent une population plus aisée que la moyenne,<br />

possédant un nombre de bien plus important et bénéficiant davantage d’installations sanitaires et électriques.<br />

Les clients, majoritairement pluriactifs, sont essentiellement des commerçants-agriculteurs, avec une partie<br />

d’entre eux qui sont fonctionnaires (18%). Ils n’utilisent que très peu d’autres sources de financement pour<br />

leurs activités. Les rares sources de financement extérieures aux crédits sont constituées de transferts de<br />

migrants, principalement en provenance de Mayotte et de France métropolitaine, ou de tontines, système de<br />

moins en moins utilisé. L’utilisation de crédits hors sanduk n’est que marginale, les crédits sanduk sont donc<br />

une source essentielle de financement des activités des clients.<br />

L’analyse du profil des clients met en évidence une disparité entre les sexes. Les clientes, sont moins instruites<br />

et relativement plus pauvres par rapport aux hommes. Les sanduk touchent plus une population féminine<br />

davantage exclue que la clientèle masculine. La pratique du crédit nécessite des capacités de gestion, qui se<br />

caractérisent chez les hommes par des pré requis scolaires, et chez les femmes par la gestion quotidienne de la<br />

vie domestique. Cependant leur faible niveau scolaire reste un frein au crédit.<br />

4.2. L’utilisation du crédit<br />

4.2.1. Activités financées<br />

L’analyse de l’utilisation des crédits se base sur le dernier et l’avant dernier crédit octroyés aux<br />

clients. Elle s’effectue à différents niveaux : la conformité de l’utilisation du crédit, l’objet du<br />

32


crédit (secteur d’activité, activité précise, type d’investissement effectué) et la part du crédit<br />

dans l’investissement total.<br />

L’allocation d’un même crédit à différentes fins accroît la difficulté de l’analyse de l’utilisation<br />

des crédits. Il existe également un biais important lié à la non séparation par les clients de la<br />

trésorerie familiale et de celle de leurs activités, accentuant la fongibilité du crédit. Il est<br />

probable qu’une partie des crédits soit utilisée à des fins de consommation courante des<br />

ménages sans que cela n’apparaisse dans les résultats de l’étude.<br />

Cependant, il est possible que l’utilisation directe du crédit à des fins de consommation,<br />

dissimule le fait que le crédit ait permis au client d’utiliser ses ressources personnelles pour<br />

des activités génératrices de revenus.<br />

La conformité de l’utilisation du crédit :<br />

Une utilisation conforme du crédit se définit par l’allocation du crédit dans des activités<br />

génératrices de revenu. L’utilisation non conforme regroupe toutes les utilisations qui<br />

concernent la consommation des ménages.<br />

Si l’on prend l’ensemble des utilisations du crédit par client, utilisation principale et<br />

secondaire (ce qui nous donne un total de 193 utilisations pour 151 crédits), nous constatons<br />

que 14% de l’allocation des crédits sont destinés à la consommation 27.<br />

Nous observons que 92% des clients utilisent le crédit principalement pour des activités<br />

génératrices de revenu. Ce n’est donc qu’une partie résiduelle du crédit qui est utilisée<br />

directement à des fins de consommation. Ce résultat signifie que 8% des crédits de<br />

l’ensemble de la clientèle sont utilisés entièrement pour de la consommation. 6% des crédits<br />

sont utilisés pour partie seulement à des fins de consommation 28. L’objet du crédit n’est donc<br />

que très peu détourné.<br />

27 Voir annexe 3.<br />

28 ce qui explique l’écart entre les deux taux, le premier prenant en compte les utilisations principales et secondaires, alors<br />

que le second ne comprend que les crédits qui ont entièrement été utilisés dans la consommation, soit 8%.<br />

33


Conformité de l'utilisation principale du<br />

crédit Utilisation<br />

nonconforme<br />

8%<br />

Utilisation<br />

conforme<br />

92%<br />

Ces résultats doivent tout de même être nuancés. Même si les crédits sont utilisés<br />

directement dans la consommation, il est tout à fait probable que ce crédit dégage une partie<br />

du revenu familiale permettant d’investir dans des activités génératrices de revenu.<br />

L’objet du crédit : prédominance du commerce et faiblesse de l’agriculture<br />

Le crédit est majoritairement utilisé dans des activités commerciales (61% de l’utilisation<br />

principale déclarée). En deuxième position de l’utilisation principale du crédit, viennent les<br />

autres activités, qui regroupent principalement les artisans (couturiers, ébénistes, distillateurs<br />

d’ylang-ylang,…), et dans une moindre mesure les chauffeurs de taxi. Cette catégorie<br />

représente 20% de l’utilisation des crédits.<br />

L’agriculture ne représente que 12% des crédits, ce qui est relativement faible par rapport à la<br />

proportion d’agriculteurs dans l’échantillonnage (45%) 29. Or la plupart des agriculteurs ont<br />

une seconde activité (56%), voire une troisième.<br />

Il apparaît que les agriculteurs ayant plusieurs activités choisissent d’investir leur crédit dans<br />

des activités autres que l’agriculture. Ce qui sous-entend d’une part qu’il est moins avantageux<br />

d’investir dans des activités agricoles que commerciales. D’autre part il semblerait que les<br />

produits offerts par les sanduk soient mieux adaptés au secteur commercial qu’agricole.<br />

Après analyse de nouveaux éléments, nous développerons et confirmerons cette hypothèse.<br />

29 Il apparaît que les allocations du dernier et de l’avant dernier crédit divergent peu (15% pour l’agriculture, 7% pour la<br />

consommation, 17% pour les autres activités, et 61% pour le commerce. C’est pourquoi nous ne mentionnerons que le<br />

dernier crédit dans cette partie.<br />

34


Secteur d'utilisation principale du dernier crédit<br />

Construction<br />

4%<br />

Consommation<br />

4%<br />

Commerce<br />

61%<br />

Agriculture<br />

12%<br />

Autres activités<br />

20%<br />

En prenant en compte l’utilisation principale et l’utilisation secondaire du crédit, on constate<br />

que 63% de la clientèle déclarent avoir utilisé une partie de ses crédits dans des activités<br />

commerciales. La consommation a été l’une des allocations du crédit pour 18%, l’agriculture<br />

18% et l’artisanat et autres activités 22%.<br />

Les clients aux nombreux crédits sont plus nombreux à utiliser une partie de leur crédit dans<br />

la consommation (27%) et dans le commerce (66%) alors que l’agriculture et les autres<br />

activités ont une place moindre dans l’allocation des crédits.<br />

Cette forme d’analyse démontre toujours la prédominance du commerce et la place<br />

minoritaire de l’agriculture dans l’utilisation du crédit pour des activités génératrices de<br />

revenu. Elle met particulièrement en évidence la place de la consommation dans l’utilisation<br />

des crédits.<br />

100%<br />

90%<br />

80%<br />

70%<br />

60%<br />

50%<br />

40%<br />

30%<br />

20%<br />

10%<br />

0%<br />

Part de chaque secteur dans l'allocation du<br />

crédit<br />

(clientèle générale)<br />

18%<br />

63%<br />

22% 18%<br />

agriculture commerce autre activité consommation<br />

100%<br />

90%<br />

80%<br />

70%<br />

60%<br />

50%<br />

40%<br />

30%<br />

20%<br />

10%<br />

0%<br />

Part de chaque secteur dans<br />

l'allocation du crédit<br />

(clients ayant pris de no mbreux crédits)<br />

14 %<br />

66%<br />

11%<br />

27%<br />

agriculture commerce aut re activit é consommat ion<br />

100%<br />

90%<br />

80%<br />

70%<br />

60%<br />

50%<br />

40%<br />

30%<br />

20%<br />

10%<br />

0%<br />

Part de chaque secteur dans<br />

l'allocation du crédit<br />

(clients inactifs)<br />

16 %<br />

61%<br />

11%<br />

23%<br />

agriculture commerce autre activité consommation<br />

La place prédominante du commerce dans l’allocation du crédit peut s’expliquer en partie par<br />

des produits offerts plus adaptés à des activités commerciales qu’à l’agriculture. La moyenne<br />

de la durée du crédit, est pour l’ensemble des clients interrogés de 12,13 mois, avec un différé<br />

moyen de 59 jours. Or ces délais ne semblent pas correspondre aux besoins des agriculteurs<br />

qui ont besoin de plus de temps pour rentabiliser leurs investissements.<br />

35


M. A, 53 ans, ancien enseignant licencié durant la période de Plan d’Ajustement Structurel, a créé une<br />

pépinière après son licenciement. Il est adhérent au sanduk de son village depuis 2001. Le sanduk lui a<br />

octroyé deux crédits. Il a utilisé son premier crédit de 75 000 FKM pour acheter une parcelle pour<br />

cultiver. Avec son second crédit de 200 000FKM il a acheté des pots, des plantes et des insecticides<br />

pour son exploitation. La durée de son dernier crédit était de 12 mois avec un différé de 60 jours,<br />

durée insuffisante qui a engendré des retards de remboursement. Sa pépinière demandant 5 mois<br />

avant de produire des bénéfices, 5 mois de différé de remboursement lui auraient été nécessaires.<br />

L’allocation du crédit dans les différents secteurs d’activité diverge selon le niveau de<br />

pauvreté des clients. Les plus pauvres allouent davantage leurs crédits dans l’agriculture (21%<br />

des allocations du dernier crédit) et la consommation (34%) que la catégorie la plus riche<br />

(respectivement 9% et 13% des allocations du dernier crédit). L’utilisation du crédit dans la<br />

consommation et dans l’agriculture est décroissante par rapport au niveau de richesse,<br />

contrairement à l’allocation dans le secteur commercial. Autrement dit, plus le client est riche,<br />

plus il utilise ses crédits dans le commerce et moins il l’utilise dans la consommation et<br />

l’agriculture.<br />

80%<br />

70%<br />

60%<br />

50%<br />

40%<br />

30%<br />

20%<br />

10%<br />

0%<br />

80%<br />

70%<br />

60%<br />

50%<br />

40%<br />

30%<br />

20%<br />

10%<br />

0%<br />

Utilisation du dernier crédit dans<br />

l'agriculture<br />

21% 18%<br />

9%<br />

Pauvres Moyens Riches<br />

Utilisation du dernier crédit dans le<br />

commerce<br />

51%<br />

61%<br />

76%<br />

Pauvres Moyens Riches<br />

Utilisation du crédit dans l’agriculture<br />

80%<br />

70%<br />

60%<br />

50%<br />

40%<br />

30%<br />

20%<br />

10%<br />

0%<br />

80%<br />

70%<br />

60%<br />

50%<br />

40%<br />

30%<br />

20%<br />

10%<br />

0%<br />

Utilisation du dernier crédit dans<br />

l'artisanat<br />

13%<br />

20%<br />

11%<br />

Pauvres Moyens Riches<br />

Utilisation du dernier crédit dans la<br />

consommation<br />

34%<br />

22%<br />

13%<br />

Pauvres Moyens Riches<br />

L’agriculture vivrière représente 70% des investissements dans le secteur agricole. La pêche<br />

et l’élevage représentent chacun 10% des investissements agricoles, alors que les cultures de<br />

36


ente (principalement ylang-ylang, vanille et girofle) ne représentent que 5%. 5% des<br />

investissements dans le secteur agricole concernent l’agriculture familiale<br />

d’autoconsommation.<br />

La prédominance des cultures vivrières accentue d’autant plus le problème d’interprétation<br />

du à la fongibilité du crédit. Une part de la production servant à l’autoconsommation, il est<br />

très difficile de connaître précisément cette proportion.<br />

Un tiers des utilisations du crédit dans le secteur agricole concerne l’achat de nouvelle<br />

parcelle, soit 29%. 33% sont utilisés pour l’achat d’engrais, 14% pour l’achat d’équipement,<br />

ainsi que pour l’achat de semences et 10% pour l’achat d’animaux. Le crédit participe donc à<br />

la modernisation du mode de production agricole à travers l’achat d’engrais et d’équipement.<br />

Les pêcheurs semblent avoir une stratégie spécifique vis-à-vis du crédit. Les crédits investis<br />

dans le secteur de la pêche sont utilisés principalement pour l’achat de moteur. La moitié des<br />

clients interrogés ayant utilisé leur crédit dans ce secteur sont des femmes prenant des crédits<br />

pour leur mari pêcheur, qui prennent eux-mêmes des crédits pour le même investissement. Il<br />

semble donc que les pêcheurs utilisent plusieurs crédits afin d’obtenir des montants plus<br />

importants.<br />

Utilisations du crédit dans le secteur commercial<br />

Il n’existe à Anjouan que quatre types de commerces différents, principalement de produits<br />

importés 30. 42% des crédits utilisés dans le commerce sont destinés au commerce alimentaire<br />

de petites épiceries. 37% sont utilisés pour le commerce de produits importés non<br />

alimentaires. Ces deux formes de commerce représentent la majorité des formes de<br />

commerce de l’île.<br />

Une faible part (12%) des crédits utilisés dans le commerce est destinée aux produits locaux.<br />

Le commerce de produits agricoles d’exportation s’avère de moins en moins rentables en<br />

raison de la baisse des cours mondiaux. Nombre de commerçants, de girofle en particulier,<br />

nous ont dit avoir revendu leurs marchandises à perte aux grossistes exportateurs, ce qui leur<br />

a posé des difficultés pour rembourser leur crédit.<br />

30 Voir typologie des activités en annexe (4)<br />

37


Utilisation du crédit dans le secteur commercial<br />

Produits locaux<br />

12%<br />

Produits<br />

importés<br />

alimentaires<br />

42%<br />

Produits<br />

agricoles<br />

7%<br />

autre<br />

commerce<br />

2%<br />

Produits<br />

importés non<br />

alimentaires<br />

37%<br />

La grande majorité, soit 94%, des clients ayant utilisé leur crédit dans le domaine commercial,<br />

ont acheté des produits ou des inputs, contre seulement 6% qui ont investi leur crédit dans<br />

des biens d’équipement ou du matériel.<br />

Les crédits du sanduk ne semblent pas répondre à des besoins d’investissement en matériel et<br />

équipement. La durée moyenne du crédit et le différé de remboursement paraissent trop<br />

courts pour correspondre à des investissements amortissables sur le moyen terme.<br />

Les crédits du sanduk répondent à d’importants besoins de trésorerie des clients. Seuls 45%<br />

des commerçants séparent le budget familial de celui de leurs activités. Les bénéfices des<br />

activités sont donc directement utilisés dans les dépenses courantes du ménage, ce qui accroît<br />

la fongibilité du crédit.<br />

Utilisation du crédit dans la consommation<br />

Un tiers des crédits utilisés à des fins de consommation (31%) sont destinés à la construction<br />

de l’habitat des clients, 19% à des dépenses de santé, 14% pour des frais de scolarité et 14%<br />

pour des dépenses de cérémonies. 11% sont utilisés pour des dépenses courantes en<br />

alimentation et 8% pour l’achat de biens durables, tels qu’une voiture ou de l’électroménager.<br />

38


Utilisation du crédit dans la consommation<br />

construction<br />

31%<br />

alimentation<br />

11%<br />

autre<br />

consommation<br />

3% santé<br />

19%<br />

cérémonie<br />

14%<br />

biens durables<br />

8%<br />

éducation<br />

14%<br />

Mme B., 50ans, sans activité et cultivant ses terres pour nourrir sa famille, n’a contracté qu’un seul<br />

crédit de 25 000 FKM en 1999. Avant de stopper toute activité, elle vendait du poisson sec importé<br />

de Madagascar. Elle a utilisé la majeure partie de son crédit pour payer les obsèques de son mari et a<br />

utilisé l’autre partie pour acheter du poisson sec dont la vente lui a permis de rembourser son crédit.<br />

Elle vit aujourd’hui avec ses neuf enfants, ses deux petits fils et ses deux beaux fils qui travaillent et<br />

permettent de nourrir la famille. Elle pense reprendre un crédit si la situation économique lui permet<br />

de retrouver son activité de commerce de poison sec.<br />

L’utilisation du crédit dans la consommation ne peut être considérée comme un<br />

investissement non productif. Il permet aux ménages de dégager une partie de leur revenu à<br />

des fins directement productives et de répondre à des besoins urgents, leur permettant ainsi<br />

de surmonter des périodes creuses, telles que l’attente de rendements d’un champ ou du<br />

paiement des crédits de leurs clients dans les cas des crédits-boutique.<br />

Utilisation du crédit des autres activités<br />

Les autres activités rassemblent l’ensemble des activités n’appartenant ni au secteur agricole,<br />

ni au commerce. Elles regroupent essentiellement les activités des artisans (43%), des<br />

chauffeurs de taxi (29%) et des distillateurs d’ylang-ylang (19%). Cette catégorie ne regroupe<br />

qu’un nombre limité de clients interrogés (22), ce qui limite la rigueur et la représentativité de<br />

l’analyse.<br />

39


Utilisation du crédit par secteur d'acivités non<br />

agricoles et non commerciales<br />

autre; 10%<br />

artisan<br />

43%<br />

chauffeur<br />

19%<br />

distillateur<br />

d'ylang<br />

29%<br />

Cette catégorie utilise principalement le crédit pour des achats d’inputs (68%). Ces inputs<br />

correspondent essentiellement à l’achat de bobines et de tissus pour les couturiers et à l’achat<br />

de fleur d’ylang-ylang et de fagots pour les distillateurs.<br />

Le second poste d’allocation du crédit est l’achat de matériel et d’équipement (23%)<br />

correspondant à des investissements dans des machines à coudre pour les couturiers, à des<br />

alambics pour les distillateurs et à des voitures ou des pièces de voitures pour les chauffeurs<br />

de taxi.<br />

Utilisation des crédits dans les activités non<br />

agricoles et non commerciales<br />

achat de<br />

matériel/<br />

d'équipement<br />

5<br />

23%<br />

dédouanement<br />

de matériel<br />

importé<br />

2<br />

9%<br />

Stabilité de l’allocation des différents crédits<br />

achat s d'input s<br />

15<br />

68%<br />

40


En comparant l’utilisation des deux derniers crédits, on observe que la majorité des clients<br />

utilise deux crédits successifs dans le même secteur. Les clients ayant pris beaucoup de<br />

crédits ont un comportement spécifique, seulement 57% d’entre eux utilisent les deux<br />

derniers crédits pour une même activité, contre 68% de la clientèle.<br />

80%<br />

60%<br />

40%<br />

20%<br />

0%<br />

Mêmes activités financées par le<br />

dernier et l'avant dernier crédit<br />

68%<br />

57%<br />

clientèle clients ayant<br />

pris beaucoup<br />

de crédits<br />

71%<br />

clients inactifs<br />

Les clients ayant pris beaucoup de crédits et ayant donc une plus grande expérience du crédit,<br />

ont plus tendance à saisir les opportunités économiques du moment que la moyenne des<br />

clients.<br />

M. R., 39 ans, marié, est salarié d’une ONG et exerce d’autres activités qui peuvent changer d’une<br />

année sur l’autre. Il est adhérent au sanduk depuis 1998 et a contracté sept crédits. En 2003, il a utilisé<br />

son crédit de 2 000 000 FKM, dans l’achat de matériel de construction et de riz en gros, tout deux<br />

pour commercer. En 2004, il a obtenu un crédit de 750 000 FKM, qu’il a utilisé dans l’achat de<br />

matériel et de matières premières pour la distillation d’ylang-ylang, nouvelle activité qu’il a créée grâce<br />

au crédit.<br />

Utilisateur du crédit<br />

En croisant les informations du dernier et de l’avant dernier crédit, on observe que 92% de<br />

l’ensemble des clients utilisent eux-mêmes leurs crédits. Or ce taux diminue fortement (84%)<br />

pour les clients qui ont pris beaucoup de crédits.<br />

Dans l’ensemble de la clientèle, la quasi-totalité des hommes utilisent eux-mêmes leurs<br />

crédits, alors que 15% des femmes servent de prête-nom pour une autre personne qui<br />

s’avère être un homme dans la grande majorité des cas. Les femmes représentent certes 37%<br />

des adhérents des sanduk, mais certainement un peu moins des utilisateurs des crédits.<br />

41


100%<br />

90%<br />

80%<br />

70%<br />

60%<br />

50%<br />

Emprunteur utilisant lui-même son crédit<br />

(échantillon 1)<br />

97%<br />

85%<br />

hommes f emmes<br />

100%<br />

90%<br />

80%<br />

70%<br />

60%<br />

50%<br />

Emprunteur utilisant lui-même son crédit<br />

(échantillon 2)<br />

94%<br />

72%<br />

hommes femmes<br />

100%<br />

90%<br />

80%<br />

70%<br />

60%<br />

50%<br />

Emprunteur utilisant lui-même son crédit<br />

(échantillon 3)<br />

86%<br />

91%<br />

hommes f emmes<br />

La proportion de femmes ayant beaucoup de crédits à leur actif et n’utilisant pas elles-mêmes<br />

leurs crédits est plus importante que dans les autres échantillons. Or il s’avère qu’une<br />

proportion plus importante de cette catégorie de clients a des personnes de sa famille<br />

membres également du sanduk (77% contre seulement 65% de la clientèle). Pour les clients<br />

inactifs, il y a également une forte proportion de clients qui ont des membres de leur famille<br />

membres du sanduk (75%).<br />

Les clients ayant pris beaucoup de crédits et les clients inactifs ont davantage une stratégie<br />

familiale vis-à-vis du crédit que la plupart des clients. D’autant plus que, 70% des clients<br />

ayant pris beaucoup de crédits et 77% des clients inactifs, ayant des personnes dans leur<br />

famille membres du sanduk, ont utilisé leurs crédits dans la même activité que l’une des<br />

personnes de leur famille.<br />

80%<br />

60%<br />

40%<br />

20%<br />

0%<br />

Clients ayant au moins un membre de sa<br />

famille adhérent aux sanduk<br />

66% 77% 75%<br />

clientèle clients ayant<br />

pris beaucoup<br />

de crédits<br />

clients inactifs<br />

4.2.2. La part du crédit dans l’investissement total<br />

80%<br />

60%<br />

40%<br />

20%<br />

0%<br />

Utilisation du crédit dans la même activité que<br />

l'un des membres de la famille adhérent aux<br />

sanduk<br />

64% 70% 77%<br />

clientèle clients ayant pris<br />

beaucoup de<br />

crédits<br />

clients inactifs<br />

Plus de la moitié des crédits constituent la totalité de l’investissement effectué (54%), il est<br />

donc la seule source de financement utilisée pour plus d’un client sur deux. Un quart des<br />

crédits (24%) représentent plus de la moitié de l’investissement et seulement 11% des crédits<br />

ne représentent qu’un supplément de ressource, soit moins de 25% de l’investissement total.<br />

42


totalité de<br />

l'investissement<br />

54%<br />

Part du crédit dns l'investissement total<br />

moins de 25%<br />

11%<br />

de 25% à 50%<br />

11%<br />

plus de 75%<br />

4%<br />

de 50% à 75%<br />

20%<br />

La majorité des crédits investis dans le secteur agricole constituent la totalité de la dépense<br />

effectuée. La totalité de ces crédits représente plus de 50% de l’investissement. Le crédit est<br />

donc une source importante de financement pour les activités agricoles.<br />

Seulement 38% des crédits utilisés pour la construction constituent la totalité de<br />

l’investissement, alors 50% des crédits représentent moins de la moitié de l’investissement.<br />

Les investissements faits avec le crédit pour la construction de l’habitat ne sont qu’un<br />

supplément d’un apport initial contrairement aux investissements dans le domaine agricole.<br />

Le crédit représente la totalité de la dépense totale dans 57% des crédits utilisés dans des<br />

activités commerciales et 41% des emprunteurs commerçants ont donc besoin d’un<br />

complément pour financer leur activité.<br />

100%<br />

90%<br />

80%<br />

70%<br />

60%<br />

50%<br />

40%<br />

30%<br />

20%<br />

10%<br />

0%<br />

Agriculture<br />

Part du crédit dans l'investissement total par secteur<br />

d'allocation du crédit<br />

69%<br />

0%<br />

31%<br />

0%<br />

Autres activités<br />

38%<br />

5%<br />

33%<br />

5%<br />

19%<br />

Commerce<br />

57%<br />

50%<br />

3% 17%<br />

17%<br />

8%<br />

13% 17%<br />

11% 8%<br />

Consommation<br />

Construction<br />

38%<br />

0%<br />

13%<br />

25%<br />

25%<br />

100%<br />

plus de 75%<br />

de 50% à 75%<br />

de 25 à 50%<br />

moins de 25%<br />

Le crédit constitue donc une part importante des dépenses effectuées et répond à<br />

d’importants besoins de financement. Le secteur agricole est le secteur où le crédit représente<br />

la plus grande proportion de l’investissement. Il représente plus de la moitié de<br />

43


l’investissement effectué dans la majorité des cas, toutes activités confondues. Toute fois,<br />

plus le client est riche moins le crédit constitue une part importante de l’investissement.<br />

100%<br />

4.2.3. Trajectoires de crédit<br />

80%<br />

60%<br />

40%<br />

20%<br />

0%<br />

Part du crédit dans l'investissement total<br />

par niveau de pauvreté<br />

57%<br />

26%<br />

65%<br />

16%<br />

17% 19%<br />

40%<br />

29%<br />

31%<br />

pauvres moyens riches<br />

Il existe différents comportements des clients par rapport au crédit. Nous pouvons en<br />

distinguer quatre principaux.<br />

Les clients « réguliers » :<br />

La première catégorie regroupe les clients qui reprennent un crédit immédiatement après<br />

avoir fini le remboursement du précédent. Le crédit constitue pour eux une source de<br />

financement permanente pour leurs activités. Depuis leur adhésion au sanduk, ces clients ont<br />

pris en moyenne plus d’un crédit par an. Ils utilisent le crédit avec une grande fréquence<br />

(catégorie « G »). Ces clients sont riches (36%) et pauvres (36%), le niveau de pauvreté<br />

moyen ne représente que 26%.<br />

Ce type de clients investit principalement dans le secteur commercial (72%) et très peu dans<br />

l’agriculture (6%). La part de la consommation y est très faible et concerne essentiellement la<br />

construction de l’habitat (6%). L’utilisation du crédit est stable, les deux derniers crédits ayant<br />

été investis pour 64% d’entre eux dans la même activité. Un tiers des derniers crédits de cette<br />

catégorie représentait moins de la moitié de l’investissement total. Ce type de clients utilise<br />

d’autres sources de financement que le crédit par rapport aux autres catégories. Près d’un<br />

client sur deux n’a utilisé que le crédit pour l’investissement effectué (48%). Le crédit est une<br />

source de financement importante pour ce type de client, il est complété par d’autres moyens<br />

de financement.<br />

Les clients « opportunistes » :<br />

La seconde catégorie correspond aux clients dont deux crédits successifs sont espacés de 12 à<br />

18 mois en moyenne, depuis leur adhésion. Ce sont des clients dont les activités ne<br />

nécessitent pas un financement extérieur en continu, mais régulier. Cette catégorie a donc<br />

100%<br />

>50%<br />


une fréquence de crédit Moyenne (catégorie « M »). Ces clients ont un niveau de richesse plus<br />

élevé que la moyenne, avec 42% de « riches ».<br />

Dans cette catégorie, un client sur deux utilise le crédit pour le commerce (47%). La<br />

proportion de crédits utilisés dans le domaine agricole est plus importante pour cette<br />

catégorie (19%) que pour les deux autres. La part de la consommation dans l’utilisation du<br />

crédit est très forte par rapport aux autres catégories de clients (17% de consommation et 3%<br />

dans la construction de l’habitat). Il existe une forte stabilité de l’utilisation des crédits chez<br />

ces clients, 64% ont utilisé leurs deux derniers crédits pour une même activité. Pour plus de<br />

la moitié de ces clients, le crédit est la seule source de financement utilisée pour<br />

l’investissement effectué (59%) et pour seulement 11% d’entre eux, le crédit n’a été qu’une<br />

part marginale de l’investissement.<br />

Les clients « occasionnels » :<br />

La troisième catégorie de clients regroupe ceux qui ne prennent des crédits que de façon<br />

occasionnelle (catégorie « O »). L’intervalle entre deux crédits est supérieur à 18 mois (30,6<br />

mois en moyenne entre deux crédits). Ces clients ont un niveau de pauvreté moyen par<br />

rapport aux autres catégories, (40%). La catégorie des riches ne représente qu’un quart de<br />

l’ensemble (26%).<br />

60% d’entre eux ont utilisé leur dernier crédit dans le secteur commercial. Une forte<br />

proportion utilise le crédit directement dans la consommation (6% dans la consommation et<br />

6% dans la construction de l’habitat). L’agriculture y est peu représentée (11%). L’objet du<br />

crédit est instable : moins d’un client sur deux a investi les deux derniers crédits dans la<br />

même activité (49%). Le crédit représente la totalité de l’investissement effectué pour<br />

seulement 52% d’entre eux, et moins de la moitié de l’investissement pour 19%.<br />

Les clients « inactifs » :<br />

La dernière catégorie de clients, analysée en partie précédemment est celle des clients inactifs,<br />

n’ayant pas pris de crédit depuis plus d’un an (catégorie « I »). Près de la moitié (47%) de ces<br />

clients appartiennent à la catégorie des « pauvres », alors que 40% d’entre eux font partie des<br />

« riches ». Cette catégorie regroupe deux niveaux de richesse opposés, des pauvres et des<br />

riches. Ces clients ne renouvellent pas leur demande de crédit, soit parce qu’il n’en ont plus<br />

besoin, soit parce qu’ils considèrent que reprendre un crédit représente un risque trop<br />

important relativement à leur niveau de richesse.<br />

Seulement 49% d’entre eux utilisent le crédit pour des activités commerciales et 16% pour<br />

l’agriculture. La consommation représente une part importante de l’allocation du crédit (9%<br />

consommation et 9% construction de l’habitat). L’objet de leurs crédits est instable,<br />

seulement 47% d’entre eux ont utilisé leurs deux derniers crédits pour une même activité. Le<br />

crédit reste pour cette catégorie de clients une source importante de financement de leurs<br />

investissements passés. 62% de leur dernier crédit a constitué la totalité de l’investissement<br />

45


effectué et seulement 19% des crédits étaient une source de financement supplémentaire<br />

marginale par rapport à l’investissement total.<br />

EFFECTIF % DE L’EFFECTIF<br />

Clients « réguliers » 33 22%<br />

Clients « opportunistes » 36 24%<br />

Clients « occasionnels » 35 24%<br />

Clients « inactifs » 43 29%<br />

100%<br />

90%<br />

80%<br />

70%<br />

60%<br />

50%<br />

40%<br />

30%<br />

20%<br />

10%<br />

0%<br />

Trajectoire de crédit par niveau de pauvreté<br />

36%<br />

27%<br />

42%<br />

22%<br />

26%<br />

36% 36% 34%<br />

40%<br />

40% 14%<br />

47%<br />

G M O I<br />

100%<br />

90%<br />

80%<br />

70%<br />

60%<br />

50%<br />

40%<br />

30%<br />

20%<br />

10%<br />

0%<br />

riches<br />

moyens<br />

pauvres<br />

100%<br />

90%<br />

80%<br />

70%<br />

60%<br />

50%<br />

40%<br />

30%<br />

20%<br />

10%<br />

0%<br />

Utilisation principale du crédit par fréquence<br />

d'octroi de crédits<br />

72%<br />

6%<br />

0%<br />

16%<br />

6%<br />

47%<br />

3%<br />

17%<br />

14%<br />

19%<br />

Part du crédit dans l'investissement total<br />

par fréquence d'octroi de crédits<br />

48%<br />

19%<br />

33%<br />

59%<br />

30%<br />

11%<br />

52%<br />

30%<br />

19% 19%<br />

60%<br />

6%<br />

6%<br />

17%<br />

11%<br />

49%<br />

9%<br />

9%<br />

16%<br />

16%<br />

G M O I<br />

62%<br />

19%<br />

G M O I<br />

commerce<br />

construction<br />

consommation<br />

autres activités<br />

agriculture<br />

Les crédits des sanduk sont plus adaptés aux activités commerciales qu’agricoles. Les agriculteurs exerçant<br />

une activité commerciale préfèrent investir leur crédit dans le commerce plutôt que dans leur production agricole.<br />

Les crédits répondent également à des opportunités économiques ponctuelles. Une part importante des clients<br />

utilise la période du différé de remboursement comme une période de réflexion leur permettant de saisir une<br />

100%<br />

>50%<br />


onne occasion de faire fructifier l’argent du crédit. Ils ne savent donc pas, lors de l’octroi du crédit, quelle en<br />

sera l’utilisation.<br />

Dans le domaine agricole, le crédit sert majoritairement à l’acquisition de nouvelles parcelles. Il est un élément<br />

important de l’accès à de nouvelles terres cultivables et permet d’alléger le poids de la forte pression foncière<br />

présente à Anjouan. Il joue également un rôle de modernisation du mode de production agricole, à travers<br />

l’achat d’engrais et d’équipements plus modernes.<br />

Les commerçants utilisent principalement leurs crédits pour l’achat de stock. Les crédits répondent à des<br />

besoins réels de trésorerie et non à des besoins en véritables investissements qui n’apparaissent pas comme une<br />

priorité pour les commerçants.<br />

Par ailleurs, les artisans utilisent davantage leur crédit dans des investissements en matériel (machine à<br />

coudre, alambics,…), même si la majorité des crédits sont utilisés, comme dans le commerce, à l’achat<br />

d’intrants (fleurs d’ylang-ylang, tissus,…).<br />

La consommation représente une part minoritaire des crédits. La construction de l’habitat, signe de prospérité<br />

à Anjouan, constitue une part importante de la consommation des ménages. L’utilisation du crédit dans la<br />

consommation permet à certains clients de dégager une part de leur revenu pour des activités génératrices de<br />

revenu, mais également de faire face à des situations difficiles (problèmes de santé) ou à des dépenses ponctuelles<br />

de grande ampleur (cérémonies, frais de scolarité,..).<br />

Les utilisations du crédit divergent selon le niveau de pauvreté des clients. Les pauvres ont plus tendance à<br />

utiliser leurs crédits dans l’agriculture et dans la consommation que les riches. L’agriculture pouvant servir<br />

directement pour la consommation alimentaire du ménage, le crédit représente pour cette catégorie une source de<br />

dépenses sociales essentielle.<br />

L’analyse des utilisateurs du crédit minimise la place des femmes dans la clientèle des sanduk. Si elles<br />

représentent 37% de la clientèle, une partie d’entre elles n’utilise pas directement ses crédits, mais en laisse la<br />

gestion à un homme de sa famille. On voit également se dessiner des stratégies familiales de crédits. La<br />

majorité des clients a une personne de sa famille membre également d’un sanduk et prenant des crédits pour<br />

financer les mêmes activités, ce qui permet d’obtenir des montants plus importants. Cette stratégie est<br />

particulièrement présente chez les clients ayant pris de nombreux crédits.<br />

Enfin, les crédits constituent une part essentielle des investissements effectués. La majorité des clients n’ont<br />

pas d’autres sources de financement et l’apport personnel dans l’investissement total reste minoritaire.<br />

47


4.3. Analyse des remboursements<br />

4.3.1. Les problèmes de remboursement<br />

Les difficultés de remboursement telles qu’on l’entend dans cette partie de l’étude, ne se<br />

manifestent pas forcément par d’importants retards de paiement. Un grand nombre de<br />

clients estimant avoir eu des difficultés n’ont eu que quelques semaines, quelques jours, voire<br />

aucun retard. Dans cette partie, on s’attache davantage à la perception du client. Certains<br />

clients ayant eu des retards de remboursement n’ont pas eu l’impression d’avoir eu de<br />

problèmes. Contrairement à d’autres qui n’ont pas eu de retard, mais pensent avoir eu des<br />

problèmes pour rembourser leur crédit. La difficulté émane du fait qu’ils ont utilisé une<br />

source de remboursement non prévue, sous contrainte des échéances de<br />

remboursement.<br />

Part des clients ayant eu des difficultés de remboursement<br />

Dernier et avant dernier crédits :<br />

Sur l’ensemble des clients des sanduk, 30% estiment avoir eu des difficultés de<br />

remboursement de leur dernier crédit. Ils représentent 43% chez les clients ayant pris de<br />

nombreux crédits. Les clients inactifs sont une majorité à avoir connu des problèmes pour<br />

rembourser leur dernier crédit (57%), ce qui explique en grande partie leur inactivité.<br />

60%<br />

50%<br />

40%<br />

30%<br />

20%<br />

10 %<br />

0%<br />

Difficultés de remboursement<br />

30%<br />

43%<br />

clientèle clients ayant<br />

pris beaucoup<br />

de crédits<br />

57%<br />

clients inactifs<br />

Le montant des crédits des clients ayant pris de nombreux crédits est plus élevé que la<br />

moyenne (411 500 contre 394 900 pour la moyenne de la clientèle), étant donnée la<br />

progressivité du montant du crédit. La durée de remboursement ne varie pas d’un échantillon<br />

à l’autre. Faute d’information, les clients choisissent toujours les mêmes modalités de<br />

remboursement (durée, différé,…) quelque soit le montant du crédit.<br />

48


Les femmes ont moins de difficultés pour rembourser leur crédit par rapport aux hommes.<br />

Elles ne sont que 20% à estimer avoir eu des difficultés pour rembourser leur dernier crédit,<br />

contre 37% des hommes.<br />

Plus d’un client pauvre sur deux estime avoir eu des difficultés pour rembourser ses crédits.<br />

Plus le client est pauvre, plus le remboursement du crédit est un poids important.<br />

Que les clients prennent des crédits régulièrement ou non, les difficultés de remboursement<br />

sont stables. Ainsi 38% des clients, qu’ils soient des clients réguliers ou occasionnels, ont eu<br />

des difficultés pour rembourser leur dernier crédit.<br />

60%<br />

50%<br />

40%<br />

30%<br />

20%<br />

10%<br />

0%<br />

Difficultés de remboursement par niveau de<br />

pauvreté<br />

51%<br />

39% 37%<br />

pauvres moyens riches<br />

70%<br />

60%<br />

50%<br />

40%<br />

30%<br />

20%<br />

10%<br />

0%<br />

Difficultés de remboursement par fréquence de<br />

crédit<br />

38% 38% 38%<br />

58%<br />

G M O I<br />

Les difficultés de remboursement sur les deux derniers crédits concernent 36% de l’ensemble<br />

des clients interrogés. L’évolution dans le temps des difficultés de remboursement montre<br />

que les difficultés durant la période 1994/ 1999 étaient plus grandes (57%) que sur la période<br />

1999/2005.<br />

60%<br />

50%<br />

40%<br />

30%<br />

20%<br />

10%<br />

0%<br />

Difficultés de remboursement selon la date d'octroi du<br />

crédit<br />

57%<br />

36% 33% 34% 36%<br />

1994/1999 2000/2001 2002/2003 2004/2005 Total<br />

La diminution des difficultés de remboursement entre la période 1994/1999 et la période<br />

actuelle s’explique en partie par la plus forte appropriation du projet par les clients,<br />

particulièrement après l’embargo. Durant cette période, Anjouan étant totalement isolée du<br />

monde extérieur, les sanduk constituaient la seule source de financement des Anjouannais.<br />

De plus, une place plus importante a été donnée au secteur de la formation et de l’animation<br />

des sanduk, afin de mieux sensibiliser les clients aux enjeux que représentent le<br />

remboursement des crédits pour le bon fonctionnement et la pérennité des sanduk.<br />

49


Avec l’expérience accumulée depuis le début du programme, le partage des expériences de<br />

chacun a permis une meilleure gestion des crédits, alors que la situation économique<br />

d’Anjouan n’a pas connu d’amélioration flagrante.<br />

L’utilisation du crédit dans le secteur agricole apparaît comme l’allocation la moins rentable<br />

comparée aux autres secteurs. En effet 55% des clients ayant utilisé le crédit dans le secteur<br />

agricole ont eu des difficultés pour le remboursement, contre seulement 39% des crédits<br />

investis dans le commerce.<br />

60%<br />

50%<br />

40%<br />

30%<br />

20%<br />

10%<br />

0%<br />

Difficultés de remboursement du dernier crédit selon le secteur<br />

d'allocation<br />

55%<br />

43% 39%<br />

45% 44%<br />

Agriculture Autres activités Commerce Consommation Construction<br />

Les difficultés de remboursement dans le domaine agricole s’expliquent en partie par des<br />

produits financiers plus adaptés au secteur commercial qu’agricole. Le différé de<br />

remboursement moyen, de 60 jours pour les crédits alloués à l’agriculture et la durée<br />

moyenne de remboursement de 10 mois, paraissent insuffisants pour des agriculteurs qui ont<br />

besoin de plus de temps pour dégager les bénéfices de leur récolte.<br />

Concernant l’ensemble des crédits précédents, qui ne concernent que les clients ayant<br />

bénéficié de plus de deux crédits, les clients ne sont que 25% à avoir eu des difficultés de<br />

remboursement. Les crédits à montant élevé ne bénéficiant pas d’aménagement de la durée<br />

de remboursement, les clients ayant pris un grand nombre de crédits sont<br />

proportionnellement plus nombreux à avoir eu des difficultés (36%).<br />

Les clients prenant des crédits avec une grande fréquence se sont davantage heurtés à des<br />

difficultés pour rembourser leurs crédits (32%) par rapport à la moyenne. 45% des clients<br />

« occasionnels » estiment avoir eu des problèmes pour rembourser leurs crédits. Ce qui peut<br />

expliquer en partie qu’ils ne prennent qu’irrégulièrement des crédits.<br />

50


50%<br />

40%<br />

30%<br />

20%<br />

10 %<br />

0%<br />

Difficultés de remboursement<br />

(crédits précédents)<br />

25%<br />

36%<br />

clientèle clients ayant<br />

pris beaucoup<br />

de crédits<br />

21%<br />

clients inactifs<br />

Nature des difficultés de remboursement<br />

Deux derniers crédits :<br />

50%<br />

40%<br />

30%<br />

20%<br />

10%<br />

0%<br />

Difficultés de remboursement par<br />

fréquence de crédit<br />

(crédits précédents)<br />

32%<br />

25%<br />

45%<br />

G M O<br />

Les difficultés principales de remboursement sont dues à des problèmes de rentabilité de<br />

l’activité financée par le crédit (59%). Les problèmes de santé viennent en seconde position<br />

et représentent 25% des réponses des clients. 8% d’entre eux estiment que les difficultés de<br />

remboursement proviennent de problèmes de rentabilité d’une autre activité ou du non<br />

versement des salaires pour les fonctionnaires.<br />

Natures des difficultés de remboursement<br />

Problème de santé ou<br />

raisons personnelles<br />

25%<br />

Baisse des prix<br />

3%<br />

pb de rentatibilité<br />

d'une autre activité<br />

8%<br />

Cérémonie<br />

2%<br />

Investissement non<br />

productif<br />

3%<br />

Problème de<br />

rentabilité de l'activité<br />

financée par le crédit<br />

59%<br />

51


Difficultés dues à l'activité financée par le crédit<br />

Vente à crédit<br />

35%<br />

Concurrence<br />

14%<br />

Pb de rentabilité de<br />

l'activité financée<br />

5%<br />

Demande<br />

insuffisante<br />

46%<br />

46% des clients ayant utilisé le crédit dans des activités qui ne produisent pas la rentabilité<br />

escomptée, estiment que ces difficultés proviennent d’une insuffisance de débouchés. 35%<br />

pensent que ces difficultés proviennent de la vente à crédit. Cette pratique est très répandue<br />

dans les boutiques d’Anjouan et pénalise la rentabilité des activités commerciales. 14%<br />

identifient la trop grande concurrence comme origine de la non rentabilité de leurs activités.<br />

Ces difficultés sont inhérentes au système économique d’Anjouan. Le pouvoir d’achat des<br />

ménages est limité par un revenu très faible et la demande intérieure est restreinte par la<br />

petite taille et l’insularité du marché domestique. Afin de palier cette limite, les commerçants<br />

vendent leurs produits à crédit, mais le règlement est souvent tardif, ce qui accroît les<br />

difficultés de remboursement des crédits qui doivent répondre à des échéances fixes. S’ajoute<br />

à cela un système d’économie de subsistance qui incite les individus à la pluriactivité afin<br />

d’obtenir un revenu supplémentaire. Ce phénomène accentue la concurrence et freine la<br />

rentabilité des activités.<br />

4.3.2. Sources de remboursement<br />

La première source de remboursement du crédit avancée par les clients interrogés, est<br />

l’activité financée par ce crédit (56% des clients). 28% d’entre eux ont comme première<br />

source de remboursement une autre activité, cela concerne en particulier le salaire des<br />

fonctionnaires. 15% disent avoir remboursé principalement avec une aide familiale. La<br />

décapitalisation représente 2 clients sur l’ensemble des clients interrogés sur leur dernier<br />

crédit. Ce taux de décapitalisation est très faible pour une IMF. Ce qui montre, malgré les<br />

difficultés de remboursement, que le système sanduk est efficace et que les crédits ne<br />

représentent pas un poids lourd pour les clients.<br />

52


Sources de remboursement du crédit<br />

autre activité<br />

28%<br />

décapitalisation<br />

aide familiale<br />

1%<br />

15%<br />

activité financée<br />

par le crédit<br />

56%<br />

Si l’on regroupe l’ensemble des sources de remboursement, mises sur un même niveau, 67%<br />

des clients interrogés disent avoir remboursé le crédit en ayant utilisé les bénéfices de<br />

l’activité financée. Cela signifie que 33% des clients ne les ont pas utilisés. Or étant donné le<br />

mélange des revenus des ménages avec la trésorerie des activités, il semble nécessaire de<br />

nuancer ce résultat.<br />

80%<br />

70%<br />

60%<br />

50%<br />

40%<br />

30%<br />

20%<br />

10%<br />

0%<br />

67%<br />

activité financée par le<br />

crédit<br />

33%<br />

19%<br />

autre activité aide familiale<br />

En prenant en compte l’ensemble des crédits, il apparaît que 10% des clients aient déjà eu<br />

recours à la vente de biens personnels (biens ou animaux) pour rembourser leurs crédits. Le<br />

phénomène de décapitalisation est relativement peu important pour les clients des sanduk.<br />

Ce taux est plus faible pour les clients ayant pris beaucoup de crédits (7%) et pour les clients<br />

inactifs (7%). Il semblerait que la crainte d’une éventuelle décapitalisation freine la demande<br />

de nouveau crédit pour une partie importante des clients inactifs et pour les clients<br />

occasionnels qui sont 11% à avoir vendu des biens pour rembourser leurs crédits. Plus les<br />

clients prennent des crédits fréquemment, moins ils sont obligés de vendre leurs biens pour<br />

rembourser le crédit (6%). Ne pas avoir eu besoin de décapitaliser incite à la poursuite du<br />

crédit. La décapitalisation touche presque autant les pauvres et les riches (respectivement<br />

10% et 9%).<br />

53


15%<br />

10%<br />

5%<br />

0%<br />

Taux de décapitalisation sur l'ensemble<br />

des crédits<br />

10%<br />

4.3.3. Clients inactifs<br />

clientèle clients ayant<br />

pris beaucoup<br />

de crédits<br />

7% 7%<br />

15%<br />

10%<br />

5%<br />

0%<br />

clients inactifs<br />

15%<br />

10%<br />

5%<br />

0%<br />

Taux de décapitalisation sur l'ensemble<br />

des crédits<br />

(fréquence du crédit)<br />

6%<br />

Taux de décapitalisation sur l'ensemble<br />

des crédits<br />

(niveau de pauvreté)<br />

10%<br />

3%<br />

11%<br />

9%<br />

G M O<br />

9%<br />

pauvres moyens riches<br />

La majorité des clients inactifs n’utilise plus le crédit sanduk en raison de la non rentabilité de<br />

leurs activités (77%). Soit parce qu’ils ne pratiquent plus l’activité pour laquelle ils prenaient<br />

des crédits (20%), soit ils continuent cette activité mais ils considèrent que les bénéfices ne<br />

sont pas suffisants pour rembourser le crédit (57%). Ils ont ainsi diminué leurs activités<br />

depuis qu’ils ne prennent plus de crédit ; 37% des clients inactifs ont diminué leurs activités<br />

et 25% ont totalement stoppé l’activité que le crédit leur permettait de financer.<br />

Une partie non négligeable des clients inactifs (13%) ne prennent plus de crédit au sanduk car<br />

les fonds de roulement de leurs activités sont suffisants. Le financement de leurs activités ne<br />

nécessite donc plus de financement extérieur. La moitié de ces clients ont bénéficié de plus<br />

de trois crédits. Les crédits sanduk leur ont permis d’améliorer la rentabilité de leurs activités.<br />

Seulement 2% des clients inactifs ont cessé d’utiliser le crédit en raison de montants offerts<br />

insuffisants. Or, ces clients n’ont pris que un ou deux crédits au total, ce qui explique la<br />

faiblesse des montants octroyés.<br />

Une petite minorité de clients (4%) ne prennent plus de crédit en raison de problèmes ou<br />

conflits avec le sanduk. Il a été mentionné des recouvrements et vente de biens des clients<br />

qui ne s’étaient pas déroulés de façon courtoise par les instances du sanduk et le système<br />

54


d’affichage des mauvais payeurs qui déplait fortement à certaines. Ces faits les ont donc<br />

encouragés à ne plus renouveler leur crédit.<br />

arrêt total de<br />

l'activité financée<br />

par le crédit<br />

20%<br />

Causes de l'inactivité des clients<br />

maladie<br />

3%<br />

montant du crédit<br />

insuffisant<br />

2%<br />

activité pas assez<br />

rentable pour<br />

rembourser un<br />

crédit<br />

57%<br />

problèmes ou conflits<br />

avec le sanduk<br />

4%<br />

meilleurs conditions<br />

ailleurs<br />

1%<br />

fonds de roulement<br />

suffisant<br />

13 %<br />

Seul un client interrogé ne prend plus de crédit au sanduk car il pense avoir trouvé de<br />

meilleures conditions de crédit auprès du projet AMIE. Les clients inactifs utilisent de façon<br />

générale leurs fonds de roulement pour financer leurs activités. Les tontines sont utilisées par<br />

11% de ces clients, ce qui est peu relativement à la moyenne des clients. Les prêts familiaux<br />

ne sont pas utilisés et ceux auprès d’autres institutions sont très peu présents.<br />

Ainsi près des deux tiers des clients inactifs déclarent avoir des problèmes pour le<br />

financement de leurs activités. D’après les clients interrogés, ces difficultés sont<br />

principalement liées à une demande insuffisante de leur clientèle (63% des problèmes de<br />

financement) et au manque de rentabilité lié à la forte concurrence sur le marché (24%). Le<br />

manque de moyens pour investir, les problèmes de santé et le système de vente à crédit ont<br />

également été mentionnés par les clients, mais dans une moindre mesure.<br />

Une grande part des clients inactifs pense reprendre un crédit au sanduk (81%). Parmi eux<br />

66% reprendront un crédit si leurs activités reprennent, si la demande augmente, ce qui leurs<br />

permettra de rembourser leur nouveau crédit. 9% d’entre eux reprendront un crédit si la<br />

durée du crédit augmente. La totalité de ces clients ont investi leurs crédits antérieurs dans<br />

l’agriculture, ce qui confirme l’hypothèse précédemment évoquée. Les durées de<br />

remboursement et de différé proposées par les sanduk ne semblent pas correspondre aux<br />

besoins de financement de l’agriculture. 8% des clients susceptibles de reprendre à nouveau<br />

un crédit, l’utiliseront en cas de problèmes dans leurs activités. Le crédit est pour eux une<br />

sorte de soupape de sécurité, qu’ils utilisent pour surmonter des périodes difficiles. Seulement<br />

6% des clients susceptibles de reprendre un nouveau crédit, le feront si le montant du crédit<br />

augmente.<br />

55


si la durée du<br />

crédit<br />

augmente<br />

9%<br />

Pour quelle raison reprendriez-vous un crédit?<br />

en cas de<br />

problèmes<br />

dans les<br />

activités<br />

8%<br />

si le montant<br />

du crédit<br />

augmente<br />

6%<br />

ne sait pas<br />

11%<br />

si les activités<br />

reprennent<br />

66%<br />

Les 7% de clients qui pensent ne pas reprendre de crédit au sanduk, resteront inactifs vis-àvis<br />

du sanduk pour des raisons de santé qui les empêchent d’avoir une activité rentable et<br />

pérenne. La seconde moitié pense ne pas avoir eu une bonne expérience avec les crédits du<br />

sanduk et ne désirent pas prendre le risque de ne pas pouvoir rembourser un nouveau crédit.<br />

Les causes de l’inactivité des clients sont tout à fait comparables avec les difficultés de<br />

remboursement qu’ils rencontrent. Pour la majorité d’entre eux, ils ne reprennent pas de<br />

crédits pour des raisons extérieures aux conditions de crédit, mais davantage pour des raisons<br />

inhérentes au système économique d’Anjouan. Ce qui illustre le mieux ce phénomène chez<br />

les clients inactifs, est la proportion très élevée (près de 90%) qui pense reprendre un crédit<br />

dans l’avenir.<br />

Concernant les difficultés de remboursement, seulement un tiers des clients considèrent avoir eu des difficultés.<br />

Elles sont dues principalement aux spécificités de l’économie anjouannaise caractérisée par un faible pouvoir<br />

d’achat de la population, à la faible diversification et à une demande réduite par la petite taille du marché<br />

domestique. A ces contraintes économiques s’ajoute une pratique généralisée de la vente à crédit dans tous types<br />

de commerces qui accentue les difficultés de remboursement des commerçants emprunteurs aux sanduk.<br />

Les difficultés de remboursement touchent particulièrement les clients utilisant leur crédit dans le secteur<br />

agricole (plus de un client sur deux). Ceci s’explique en grande partie par des produits offerts peu adaptés à<br />

l’agriculture. Les crédits ont une durée de remboursement et un différé inférieurs aux besoins agricoles. De plus<br />

la forte pression foncière d’Anjouan freine l’investissement agricole. Les nouvelles terres cultivables sont rares et<br />

les exploitations agricoles familiales sont caractérisées par un sous-emploi des travailleurs agricoles, limitant la<br />

rentabilité des exploitations et la modernisation des modes de production.<br />

Il apparaît que les difficultés de remboursement diminuent avec le temps. Durant la période 1994/1999,<br />

plus de la moitié des clients estiment avoir eu des problèmes pour rembourser leur crédit. Les efforts de<br />

formation et d’information mis en œuvre par l’UR semblent porter leurs fruits. Malgré une crise économique<br />

persistante, les clients appréhendent de plus en plus les obstacles à la rentabilité de leur crédit et les risques<br />

qu’il induit.<br />

56


Point commun avec l’ensemble des programmes de microfinance, les clientes des sanduk ont moins de difficultés<br />

de remboursement que les hommes. Ce qui s’explique d’une part par une meilleure gestion des crédits, d’autre<br />

part par une prise de risque moindre due à la petite taille des activités qu’elles financent et au montant de<br />

crédit plus petit que ceux des hommes.<br />

La majorité des crédits sont remboursés grâce à l’activité qu’ils financent. Une part d’entre eux est remboursée<br />

grâce à une autre activité, particulièrement chez les fonctionnaires qui attendent le versement de leur salaire<br />

pour rembourser leur crédit. Leur salaire étant versé de façon très irrégulière, cela constitue souvent une source<br />

de difficulté pour rembourser le crédit et de conflits avec les membres du sanduk.<br />

Le taux de décapitalisation de 10%, pour l’ensemble des crédits des clients interrogés, est très faible pour un<br />

programme de plus de dix ans. Ce taux signifie que 90% des clients n’ont jamais eu besoin de vendre des<br />

biens personnels pour rembourser leurs crédits. Les clients prenant des crédits très régulièrement ont un taux de<br />

décapitalisation plus faible que la moyenne. Le fait de ne pas avoir eu recours à la décapitalisation incite les<br />

clients à renouveler leur crédit. Alors que la crainte de la décapitalisation constitue un véritable frein de<br />

renouvellement de demande de crédit.<br />

4.4. Impact<br />

Les clients des sanduk perçoivent l’impact du crédit comme positif dans 88% des cas. Pour<br />

4% des clients, le crédit n’a pas eu d’effet et 8% ont répondu que le crédit ne les avait pas<br />

aidés ou leur avait posé problème. Plus les clients ont pris des crédits et plus ils estiment que<br />

le crédit leurs est bénéfique. 80% des clients inactifs ont perçu l’impact comme positif, ils ont<br />

donc arrêté de prendre des crédits pour des raisons extérieures au crédit et à son impact.<br />

57


100%<br />

90%<br />

80%<br />

70%<br />

60%<br />

50%<br />

40%<br />

30%<br />

20%<br />

10%<br />

0%<br />

4.4.1. Impact positif<br />

Effet du crédit sur le revenu<br />

8%<br />

4%<br />

88%<br />

Impact du crédit<br />

4%<br />

96%<br />

clientèle clients<br />

ayant<br />

beaucoup<br />

de crédits<br />

16%<br />

5%<br />

80%<br />

clients<br />

inactifs<br />

m'a posé des<br />

problèmes<br />

n'a pas eu d'effet<br />

m'a aidé<br />

Parmi les clients sur lesquels l’impact du crédit est positif, 91% estiment que le crédit leur a<br />

permis d’augmenter leur revenu (dont 21% ont perçu une forte augmentation, et 72% une<br />

augmentation faible). 7% des clients n’ont pas ressenti de changement de leur revenu après<br />

avoir bénéficié du crédit.<br />

Les clients ayant pris de nombreux crédits sont moins nombreux à estimer que le crédit leur<br />

a permis d’augmenter leur revenu (85%), mais cette part n’est pas négligeable. Cela signifie<br />

que l’enrichissement des clients n’est pas proportionnel au nombre de crédits obtenus.<br />

La proportion de clients ayant perçu une augmentation de leur revenu grâce aux crédits est<br />

plus faible chez les clients inactifs (71%) que dans l’ensemble de la clientèle. 26% d’entre eux<br />

ont conservé un revenu identique, ce qui explique en partie qu’ils n’aient pas été incités à<br />

reprendre de nouveaux crédits.<br />

58


100%<br />

80%<br />

60%<br />

40%<br />

20%<br />

0%<br />

Origine de l’augmentation du revenu<br />

Le crédit vous a-t-il permis d'augmenter vos<br />

revenus?<br />

9% 15%<br />

91% 85%<br />

clientèle clients ayant<br />

beaucoup de<br />

crédits<br />

6%<br />

31%<br />

63%<br />

clients inactifs<br />

ne sait pas<br />

L’augmentation du revenu des clients provient en grande partie du développement de leurs<br />

activités (66%), mais aussi de la création de nouvelles activités (32%). La majorité de ces<br />

clients (80%) disent avoir changé d’activité grâce aux crédits.<br />

Pour 72% des clients ayant pris de nombreux crédits, l’augmentation de leur revenu provient<br />

du développement de leurs activités et pour 26% d’entre eux de la création d’une nouvelle<br />

activité.<br />

Impact du crédit sur les dépenses familiales<br />

Dans l’ensemble de la clientèle, 75% des clients considèrent que le crédit a aidé leur famille,<br />

91% chez les clients ayant de nombreux crédits et 75% des clients inactifs. L’impact positif<br />

du crédit sur la famille de l’emprunteur est donc croissant avec le nombre de crédits obtenus.<br />

100%<br />

80%<br />

60%<br />

40%<br />

20%<br />

0%<br />

12%<br />

14%<br />

75%<br />

Le crédit a-t-il aidé votre famille?<br />

4%<br />

5%<br />

91%<br />

clientèle clients ayant<br />

beaucoup de<br />

crédits<br />

20%<br />

5%<br />

75%<br />

clients<br />

inactifs<br />

NON<br />

OUI<br />

impact négatif ou neutre<br />

NON<br />

OUI<br />

Il est difficile de déterminer si le crédit a directement été utilisé dans des dépenses familiales,<br />

ou si ce sont les bénéfices issus du crédit qui ont permis de faire ces dépenses. D’autant que<br />

la majorité des clients ne sépare pas les budgets familiaux et celui de leurs activités. Ces<br />

questions sont posées pour recueillir la perception du client, sans tenir compte de l’utilisation<br />

directe ou indirecte du crédit dans ces dépenses sociales.<br />

59


Le poste de dépenses pour lequel le crédit a le plus aidé la famille est l’alimentation (71%).<br />

53% des clients pensent que le crédit les a aidé pour l’éducation de leurs enfants, 51% pour<br />

des dépenses de santé et 18% pour l’achat de vêtements pour les enfants.<br />

100%<br />

80%<br />

60%<br />

40%<br />

20%<br />

0%<br />

Le crédit a-t-il aidé votre famille pour les dépenses<br />

suivantes?<br />

(clientèle)<br />

71%<br />

53% 51%<br />

18%<br />

alimentation éducation santé vêtements<br />

Les clients ayant pris beaucoup de crédits sont plus nombreux relativement à l’ensemble de la<br />

clientèle à penser que le crédit les a aidé pour des dépenses d’éducation (64%), de santé<br />

(52%) et de vêtements (39%). Plus les clients prennent de crédits et plus ils estiment que le<br />

bénéfice est important pour leur famille.<br />

100%<br />

80%<br />

60%<br />

40%<br />

20%<br />

0%<br />

100%<br />

80%<br />

60%<br />

40%<br />

20%<br />

0%<br />

Le crédit a-t-il aidé votre famille pour les dépenses<br />

suivantes?<br />

(clients ayant beaucoup de crédits)<br />

71%<br />

64%<br />

52%<br />

39%<br />

alimentation éducation santé vêtements<br />

Le crédit a-t-il aidé votre famille pour les dépenses<br />

suivantes?<br />

(clients inactifs)<br />

64% 61%<br />

48%<br />

20%<br />

alimentation éducation santé vêtements<br />

Nous avons considéré comme dépenses importantes, les dépenses dues à des problèmes de<br />

santé (dépenses directes de frais médicaux et indirectes dues à la diminution du revenu du fait<br />

d’un arrêt de travail), de cérémonie, et celles liées à des catastrophes naturelles (incendie,<br />

cyclone…). Les catastrophes naturelles ne sont pas apparues dans les réponses des clients.<br />

Par contre le crédit les a aidés pour des dépenses de cérémonie, pour 12% de l’ensemble des<br />

clients et en cas de maladie, pour 20%. Les dépenses de cérémonie participent d’une tradition<br />

qui veut que la reconnaissance sociale soit proportionnelle à la dépense effectuée.<br />

60


La part des clients aidés par le crédit pour des dépenses de cérémonie, dans l’échantillon des<br />

clients aux nombreux crédits, est plus importante par rapport à l’ensemble de la clientèle<br />

(18%).<br />

100%<br />

80%<br />

60%<br />

40%<br />

20%<br />

0%<br />

Dépenses pour l’habitat<br />

Le crédit vous a-t-il aidé pour faire une dépense importante?<br />

69% 66% 67%<br />

12% 18% 12%<br />

20% 16% 21%<br />

clientèle clients ayant<br />

beaucoup de<br />

crédits<br />

clients inactifs<br />

le crédit ne pas aidé pour<br />

une dépense importante<br />

cérémonie<br />

Parmi les dépenses sociales permises par le crédit, l’habitat a fait l’objet d’une question<br />

distincte. Pour un tiers des clients percevant l’impact comme positif (31%), le crédit a<br />

permis d’effectuer des améliorations de leur habitat, de façon directe ou indirecte.<br />

Les clients ayant pris de nombreux crédits sont encore une fois proportionnellement plus<br />

nombreux à avoir pu faire des améliorations de leur habitat grâce au crédit, soit 35% d’entre<br />

eux.<br />

100%<br />

80%<br />

60%<br />

40%<br />

20%<br />

0%<br />

maladie<br />

Le crédit vous a-t-il aidé pour faire des améliorations dans votre<br />

maison?<br />

69% 65% 69%<br />

31% 35% 31%<br />

clientèle clients ayant<br />

beaucoup de crédits<br />

clients inactifs<br />

Parmi les améliorations faites grâce aux crédits, 51% des clients ont réalisé une nouvelle<br />

construction, 28% ont effectué des réparations et 19% ont agrandi leur habitat.<br />

Près de deux tiers des clients (62,5%) ayant réalisé des changements de leur habitat grâce au<br />

crédit déclarent qu’ils n’auraient pas pu faire ces dépenses sans le crédit.<br />

non<br />

oui<br />

61


Impact sur les activités<br />

Auriez-vous pu faire ces dépenses sans le crédit?<br />

n'aurait pas pu<br />

faire ces<br />

dépenses;<br />

62,5%<br />

aurait pu faire<br />

ces dépense;<br />

37,5%<br />

L’objectif des questions concernant l’évolution des activités des clients est de déterminer<br />

dans quelle mesure le crédit leur a permis de créer une nouvelle activité générant un<br />

supplément de revenu.<br />

Plus d’un tiers de l’ensemble de la clientèle déclare avoir changé d’activité depuis son premier<br />

crédit (33%). 36% des clients ayant pris de nombreux crédits ont changé d’activité, contre<br />

seulement 20% des clients inactifs. 93% des clients estiment que c’est grâce au crédit qu’ils<br />

ont pu changer d’activité.<br />

10 0 %<br />

80%<br />

60%<br />

40%<br />

20%<br />

0%<br />

Avez-vous changé d'activité depuis votre<br />

premier crédit?<br />

67% 64%<br />

33%<br />

36%<br />

clientèle clients ayant<br />

beaucoup de<br />

crédits<br />

80%<br />

20%<br />

clients<br />

inactifs<br />

pas de<br />

changement<br />

d'activité<br />

changement<br />

d'activité<br />

M. F., 41 ans, marié, un enfant, diplômé en marketing, niveau bac+2, attend un poste de<br />

fonctionnaire, il a créé sa propre activité de fabrication et de vente de sorbet pendant la saison chaude<br />

et vend des produits alimentaires locaux au marché de la ville pendant la saison froide. Il a obtenu<br />

trois crédits au sanduk. Son premier crédit de 75 000 FKM, lui a permis de démarrer son activité de<br />

fabrication de sorbets en achetant un réfrigérateur. Sans le crédit il n’aurait pas pu trouver les fonds<br />

nécessaires pour créer cette activité. Avec une partie de ses deux derniers crédits, de 150 000 FKM et<br />

100 000 FKM, il a pu acheter des marchandises pour revendre au marché. Il a utilisé 50 000FKM du<br />

second et du troisième crédit pour acheter des médicaments pour soigner sa femme.<br />

62


Pour 88% des clients ayant changé d’activité, ces nouvelles activités génèrent davantage de<br />

revenu que leurs activités précédentes. Pour les clients ayant pris de nombreux crédits, 95%<br />

d’entre eux ont un revenu plus élevé grâce à leurs nouvelles activités.<br />

100%<br />

80%<br />

60%<br />

40%<br />

20%<br />

0%<br />

Ces activités vous procurent-elles plus de<br />

revenus?<br />

12%<br />

88%<br />

5%<br />

95%<br />

clientèle clients ayant<br />

beaucoup de<br />

crédits<br />

25%<br />

75%<br />

clients inactifs<br />

Les activités créées sont principalement des activités commerciales. Etant essentiellement du<br />

commerce de produits importés ces activités pourraient être davantage créatrices de<br />

richesses, si le marché était plus diversifié. La diversification du marché par la mise en valeur<br />

de la production locale dynamiserait l’économie d’Anjouan.<br />

Dépenses sans crédit<br />

Plus des deux tiers de la clientèle (65%) n’auraient pas pu faire les mêmes dépenses s’ils<br />

n’avaient pas eu accès au crédit, alors que 16% auraient pu les faire.<br />

Parmi les clients ayant pris de nombreux crédits, 70% d’entre eux n’auraient pas pu faire les<br />

mêmes dépenses sans le crédit. La différence de cinq points entre la clientèle générale et cette<br />

catégorie de clients s’explique par les montants plus importants des crédits des anciens clients<br />

(montant du crédit progressif suivant le nombre de crédits déjà octroyés).<br />

100%<br />

80%<br />

60%<br />

40%<br />

20%<br />

0%<br />

Auriez-vous pu faire les mêmes dépenses<br />

sans le crédit?<br />

20%<br />

65%<br />

13%<br />

70%<br />

30%<br />

48%<br />

16% 18% 23%<br />

clientèle clients ayant<br />

beaucoup de<br />

crédits<br />

clients inactifs<br />

non<br />

oui<br />

ne sait pas<br />

non<br />

oui<br />

63


4.4.2. Impact négatif<br />

Seulement 13 clients, sur 151 interrogés, ont estimé que le crédit avait eu sur eux un impact<br />

négatif, soit 8,6% de l’ensemble des clients interrogés. Plus de la moitié de ces clients (7) font<br />

parti des clients inactifs, 4 de l’échantillon représentatif de la clientèle et seulement 2 de<br />

l’échantillon des clients ayant pris beaucoup de crédits. Tous ont perçu une diminution de<br />

leur revenu.<br />

La raison principale de la diminution du revenu de ces clients est la concurrence accrue qui<br />

limite les bénéfices des activités. Viennent ensuite la perte d’emploi et les problèmes de santé<br />

qui ont empêché le client d’exercer convenablement ses activités. Parmi ces 13 individus, 8<br />

ont changé d’activité depuis leur premier crédit, mais n’en ont pas dégagé de revenu<br />

supplémentaire et 9 d’entre eux affirment qu’ils ont diminué leurs activités.<br />

Parmi les 13 clients ayant perçu un impact négatif du crédit, 9 estiment que le niveau<br />

d’alimentation de leur famille s’est dégradé, moins de la moitié de ces clients pensent que le<br />

crédit a eu un effet négatif sur la quantité de biens possédés, la santé et l’éducation de la<br />

famille.<br />

16<br />

12<br />

8<br />

4<br />

0<br />

Dégradation du bien-être des ménages<br />

9<br />

alimentation biens<br />

possédés<br />

4<br />

6 5<br />

santé éducation<br />

9 clients parmi les 13 à considérer que l’impact du crédit a été négatif, ont eu des difficultés<br />

pour rembourser leurs crédits. La totalité de ces clients ayant eu des difficultés de<br />

remboursement ont été contraints à la décapitalisation.<br />

L’impact du crédit sur les ménages clients des sanduk est largement positif. Neuf clients sur dix considèrent<br />

que le crédit les a aidé.<br />

90% d’entre eux ont perçu une augmentation de leur revenu grâce au crédit essentiellement par le<br />

développement de leur(s) activité(s) initiale(s). Grâce au crédit un commerçant aura pu acheter davantage de<br />

marchandises pour sa boutique, un agriculteur de l’engrais pour son champ ou agrandir la surface de son<br />

exploitation et un artisan aura pu acheter du matériel. Le crédit leurs permet ainsi d’augmenter leurs<br />

bénéfices.<br />

Le crédit a également permis pour un quart des clients de créer une nouvelle activité qui leurs rapporte un<br />

revenu supplémentaire. Les activités créées sont essentiellement des petits commerces de produits importés. Ces<br />

64


nouvelles activités sont certes de nouvelles sources de revenus pour les clients, mais ne permettent pas une<br />

diversification de l’économie d’Anjouan, déjà saturée sur ce type de marché.<br />

Une grande majorité des clients (75%) estime que le crédit leur a permis de faire davantage de dépenses<br />

sociales pour leur famille. Le crédit les a aidé dans des dépenses d’alimentation, d’éducation, de santé, pour<br />

plus de la moitié d’entre eux. Il s’avère que plus les clients prennent de crédits, plus ils peuvent faire de<br />

dépenses pour leur famille.<br />

L’impact positif sur les dépenses familiales est plus important chez les couches de clients pauvres. Ils estiment<br />

pour 92% d’entre eux que le crédit leur a permis d’améliorer la situation de leur famille par des dépenses<br />

d’alimentation, de santé et d’éducation.<br />

Le crédit participe non seulement à l’amélioration des conditions de vie des ménages à travers les dépenses<br />

familiales courantes, mais aussi à travers des dépenses d’amélioration de l’habitat. Un tiers des clients ont<br />

utilisé directement le crédit, ou indirectement par les bénéfices dégagés, dans leur habitation. Le crédit leur a<br />

permis de faire de nouvelles constructions, des améliorations (sanitaire ou réparation) ou un agrandissement de<br />

la surface habitable.<br />

Seule une petite minorité de clients pensent qu’ils auraient pu effectuer les mêmes dépenses s’ils n’avaient pas<br />

eu accès au crédit. Sans le crédit des sanduk il est impossible, selon une majorité de clients, de trouver une telle<br />

source de financement à Anjouan pour les ménages.<br />

L’impact négatif du crédit ne concerne qu’une petite minorité de client, moins de un client sur dix. Ces clients<br />

ont perçu une dégradation du bien-être de leur ménage, principalement au niveau de leur alimentation. Ils ont<br />

été contraints pour la majorité d’entre eux à vendre des biens personnels pour rembourser le crédit. Le crédit a<br />

accentué les difficultés économiques telles que la concurrence et la faible taille du marché intérieur limitant les<br />

bénéfices. La plupart d’entre eux ont été contraints de diminuer leurs activités, ne pouvant compter que sur<br />

leurs seules ressources.<br />

Les sanduk ont non seulement un impact positif au niveau individuel pour les clients et leur famille, mais<br />

également sur la communauté villageoise toute entière. Les crédits permettent de créer de nouvelles activités<br />

économiques dans les villages créant des richesses supplémentaires. Sa participation ponctuelle à des<br />

financements de projet en faveur de la communauté villageoise, tels que des projets d’adduction d’eau, la<br />

rénovation d’écoles, de mosquées ou de dispensaires, contribue à l’amélioration des conditions de vie de la<br />

communauté. Les sanduk sont également un lieu d’expression de la démocratie au sein des villages.<br />

L’ensemble de la communauté villageoise élit leurs propres représentants dirigeant le sanduk de leur village et<br />

les représentant au niveau régional. Enfin l’implantation d’un sanduk dans un village attire d’autres projets<br />

de développement. Il est un facteur décisif et incontournable dans la création de nouveaux projets dans les<br />

villages anjouannais.<br />

65


4.4.3. Satisfaction des produits<br />

Les résultats généraux de l’enquête de satisfaction des clients dévoilent un bon niveau de<br />

satisfaction des services et produits offerts par les sanduk. Les conditions du crédit sont<br />

particulièrement bien appréciées des clients. Ils sont satisfaits à plus de 90% par la durée du<br />

crédit, la fréquence de remboursement, le différé de remboursement et par l’épargne.<br />

Un grand nombre de clients ont ajouté durant les entretiens qu’ils appréciaient<br />

surtout le choix et la flexibilité que le sanduk leur offre dans les modalités de<br />

remboursement du crédit.<br />

L’épargne déposée au sanduk leurs apparaît comme un bon moyen de sécuriser leurs<br />

économies et de limiter les risques de vol et d’incendie.<br />

Le différé de remboursement n’est pas perçu comme une période permettant de rentabiliser<br />

l’investissement effectué avant de commencer le remboursement. Il est considéré comme<br />

une période de réflexion pour déterminer quel usage sera fait du crédit. Une grande partie des<br />

clients ne savent pas précisément à quoi ils alloueront leur crédit lors de l’octroi. C’est<br />

pourquoi nous avons trouvé d’importantes divergences entre l’objet déclaré sur les fiches de<br />

crédits des clients et l’utilisation effective à posteriori du crédit. Le crédit permet de profiter<br />

d’opportunités économiques ponctuelles.<br />

Le montant des crédits n’est pas suffisant pour 27% des clients interrogés. La proportion de<br />

clients non satisfaits par montants proposés par le sanduk est plus importante chez les clients<br />

« occasionnels » et « inactifs ». Ces deux catégories de clients sont ceux qui ont bénéficiés<br />

d’un petit nombre de crédits, ce qui explique en partie leur insatisfaction.<br />

Un tiers des clients (32%) trouve le taux d’intérêt trop élevé. Chez les clients pauvres, ils ne<br />

sont que 24%. Le coût du crédit n’est pas un obstacle pour une majorité de clients et ne<br />

semble pas être un frein à la rentabilité des investissements.<br />

Seulement 68% pensent avoir suffisamment d’informations sur leur crédit et connaissent la<br />

différence entre le montant du capital et des intérêts dans le remboursement. Un tiers des<br />

clients estiment qu’ils n’ont pas suffisamment d’informations sur leurs crédits.<br />

Une grande partie des clients interrogés ne connaissaient pas avant l’entretien le<br />

fonctionnement de l’assurance. Après leurs avoir expliqué, 92% apprécient ce système.<br />

Les informations fournies par les sanduk, lors de l’assemblée générale de chaque caisse ou<br />

par l’intermédiaire des instances et des employés des caisses, ne suffisent pas à bien faire<br />

comprendre le fonctionnement des sanduk. Ainsi 49% des clients interrogés souhaiteraient<br />

avoir davantage d’informations sur le fonctionnement des caisses.<br />

66


Les frais de dossier ayant été mis en place récemment, n’ont concerné que 57% des clients<br />

interrogés, qui sont 78% à être satisfaits. Ces frais supplémentaires ne sont pas considérés<br />

comme un frein au crédit et aux bénéfices qu’ils dégagent.<br />

100%<br />

75%<br />

50%<br />

25%<br />

0%<br />

montant du crédit<br />

73%<br />

taux d'intérêt<br />

68%<br />

durée du crédit<br />

96%<br />

Satisfaction des clients<br />

90%<br />

épargne<br />

information sur le cédit<br />

4.4.4. Degré de connaissance des clients<br />

68%<br />

informations sur le sanduk<br />

51%<br />

fréquence de remboursement<br />

95% 92%<br />

assurance<br />

frais de dossier<br />

78%<br />

différé de remboursement<br />

La circulation de l’information est un élément essentiel pour une bonne compréhension du<br />

système par les clients. 78% des clients considèrent avoir suffisamment d’informations sur le<br />

fonctionnement des pénalités de retard et connaissent le montant journalier de l’amende en<br />

cas de retard de remboursement.<br />

Un tiers des clients ne comprennent pas à quoi servent les intérêts qu’ils versent au sanduk.<br />

Le paiement d’intérêts pour la pérennité financière du programme ne semble pas être évident<br />

pour un tiers des clients.<br />

Les informations concernant l’assurance n’ont pas été comprises par une grande partie des<br />

clients interrogés. 42% d’entre eux ne connaissent pas son fonctionnement, parmi ces 42%,<br />

les clients ont souvent répondu qu’ils ne connaissaient pas son existence.<br />

Le degré de satisfaction des services et produits offerts est très élevé. Les crédits des sanduk sont<br />

particulièrement bien adaptés aux besoins de la clientèle qui apprécie tout particulièrement la flexibilité et les<br />

choix proposés. La catégorie des plus pauvres est celle qui apprécie le plus les conditions de crédits, tant au<br />

niveau des montants que des intérêts.<br />

La duré du différé de remboursement est perçue comme une période de réflexion permettant de saisir des<br />

opportunités d’investissement. Les crédits des sanduk répondent plus à des dépenses productives ponctuelles<br />

qu’à un plan d’investissement défini sur le long ou moyen terme.<br />

98%<br />

67


Malgré les efforts de communication et d’information de l’UR et des instances locales, une partie de<br />

l’information sur le fonctionnement de l’institution et des services tels que l’assurance, échappe encore à une<br />

partie des clients. Il semble nécessaire d’accentuer la communication et la formation sur les modalités de<br />

fonctionnement et l’objet de certains produits afin d’améliorer la compréhension du système, son appropriation<br />

par les clients et sa pérennité.<br />

68


De la stratégie sociale à l’impact<br />

Conclusion sur les<br />

performances sociales et<br />

l’impact des <strong>Sanduk</strong><br />

L’objectif des <strong>Sanduk</strong> est de mettre en œuvre une institution financière spécifique à vocation<br />

permanente, ouverte aux différentes catégories de la population, en priorité aux plus<br />

démunis.<br />

L’analyse de la stratégie sociale et des actions menées par les <strong>Sanduk</strong> à travers l’outil SPI-<br />

CERISE montre que le réseau présente des performances sociales élevées.<br />

Performances sociales par sous-dimensions<br />

Ciblage géographique<br />

Responsabilité sociale envers la<br />

communauté<br />

Responsabilité sociale envers les<br />

clients<br />

10<br />

8<br />

6<br />

Ciblage individuel<br />

Méthode de ciblage<br />

Politique de ressources humaines<br />

Empowerment<br />

Représentation des clients<br />

Services Plus<br />

Confiance et partage de l'inf ormation<br />

4<br />

2<br />

0<br />

Diversité des services<br />

Qualité de services<br />

- Ciblage des pauvres et des exclus : Les <strong>Sanduk</strong> sont accessibles à l’ensemble de la<br />

population, sans ciblage spécifique ; cette stratégie se justifie, du fait de la faible superficie et<br />

population de l’île. Dans la pratique, la stratégie géographique fait que les <strong>Sanduk</strong> sont à 90%<br />

présentes en milieu rural, et couvrent aussi des zones reculées, faiblement dotées en<br />

infrastructures.<br />

- Adaptation des services et des produits aux clients cibles : l’étude note que les produits de<br />

crédit, simples, offrent une grande possibilité d’utilisation et une grande flexibilité, à la fois au<br />

69


niveau des montants, de la durée et du mode de remboursement. Néanmoins, peu d’études<br />

de marché ont été conduites.<br />

- Amélioration du capital social et politique des clients : l’action des <strong>Sanduk</strong> pour les clients<br />

est positif : formation d’élus, participation aux prises de décision du réseau, rôle d’attraction<br />

de nouveaux programmes de développement…Par les <strong>Sanduk</strong>, les représentants des villages<br />

peuvent aussi accroître leur poids dans la prise de décision au niveau de l’île, en rencontrant<br />

les autorités anjouannaises.<br />

- Responsabilité sociale de l’IMF : Sur ce point, l’étude pointe des faiblesses - l’absence<br />

d’organisation de plan de formation formel et d’étude spécifique sur les clients ; et reconnaît<br />

en revanche un effort réel d’intégration des caisses dans les communautés villageoises en<br />

particulier par la participation à des projets collectifs.<br />

Ainsi, le fonctionnement démocratique du réseau, à travers le système de caisses locales<br />

autogérées par la communauté villageoise, la flexibilité d’utilisation des produits offerts et le<br />

ciblage de l’ensemble de la population anjouannaise particulièrement pauvre constituent ses<br />

principaux atouts. Les objectifs sociaux de l’IMF sont continuellement présents dans toutes<br />

prises de décision de l’UR.<br />

Comment cette stratégie sociale et ses actions se traduisent-ils en termes d’impact ? Les<br />

résultats de l’étude auprès des clients démontrent que le réseau des <strong>Sanduk</strong> d’Anjouan fait<br />

preuve d’une efficacité incontestable en termes d’impact. Dans ce contexte économique<br />

difficile, son implantation dans la quasi-totalité des villages anjouannais fait de ce réseau un<br />

facteur essentiel de soutien de l’activité économique et du niveau de vie de la population.<br />

La disparité entre les clients des <strong>Sanduk</strong> est importante. Ils touchent une population très<br />

contrastée en terme de niveau de richesses, du fait de leur forte pénétration. Majoritairement<br />

pluriactifs, les clients à la fois commerçants et agriculteurs représentent une part importante<br />

de la clientèle, ces deux activités étant les plus exercées dans l’île.<br />

Le crédit est principalement utilisé dans des activités commerciales et permet un allègement<br />

des contraintes de trésorerie. Il répond davantage à des besoins de trésorerie qu’à des besoins<br />

en investissements de moyen et long terme. Il constitue néanmoins une source de<br />

financement essentielle pour les commerçants. Dans le domaine agricole, le crédit permet de<br />

faciliter l’accès à de nouvelles terres cultivables et allège ainsi le poids de la forte pression<br />

foncière présente à Anjouan. Il joue également un rôle de modernisation du mode de<br />

production agricole, à travers l’achat d’engrais et d’équipements plus modernes. Sans le crédit<br />

<strong>Sanduk</strong>, la majorité des clients n’aurait pu trouver de tels montants pour financer leurs<br />

activités. Le crédit apparaît comme une source de financement nécessaire pour l’ensemble de<br />

la clientèle.<br />

Le crédit a produit d’importants changements sur ses clients. L’impact du crédit sur les<br />

activités des clients et leur niveau de vie est hautement positif. Neuf clients enquêtés sur dix<br />

70


considèrent que le crédit les a aidés pour développer leurs activités et améliorer le niveau de<br />

vie de leur famille. Une grande majorité de clients ont perçu une augmentation de leurs<br />

revenus grâce au crédit. Cette augmentation de revenu est due principalement au<br />

développement de leurs activités initiales, mais aussi, pour un quart d’entre eux, à la création<br />

de nouvelles activités. L’amélioration du niveau de vie des ménages grâce au crédit est<br />

amplement reconnue par les clients. Non seulement le crédit a permis d’augmenter leur<br />

revenu, mais il a également permis d’accroître les dépenses sociales d’alimentation, de santé,<br />

d’éducation et de conditions d’habitation, directement ou indirectement.<br />

Au-delà de l’impact positif sur les clients et leur famille, les <strong>Sanduk</strong> produisent des<br />

changements pour l’ensemble de la communauté villageoise où ils sont présents. Ces<br />

changements sont d’une part économiques, par le développement et la création d’activités<br />

génératrices de richesses, et d’autre part sociales, par le lieu d’expression et de démocratie<br />

qu’ils constituent, les investissements sociaux villageois auxquels ils participent et la notoriété<br />

qu’ils confèrent aux villages dans lesquels ils sont implantés qui favorise la venue de<br />

nouveaux projets de développement.<br />

En tant que dispositif au service du financement des activités économiques des anjouannais<br />

et de l’amélioration des conditions de vie de la population, le réseau des <strong>Sanduk</strong> est<br />

incontestablement une réussite. Il est un acteur essentiel et nécessaire au développement<br />

économique d’Anjouan.<br />

De l’impact à la stratégie : « feed-back » des résultats sur les clients<br />

Les conclusions de l’étude d’impact peuvent être enfin, en retour, confrontés aux résultats de<br />

l’analyse SPI-CERISE et à la stratégie sociale définie par le réseau.<br />

En termes de ciblage, les réalisations des <strong>Sanduk</strong> sont en accord avec la stratégie de ciblage<br />

définie par l’Union Régionale : ciblage géographique large (dans 60% des villages,<br />

essentiellement rural) mais pas de ciblage individuel, d’où la représentation large de la<br />

population. Le ciblage géographique est déterminant sur une île dont le niveau de vie général<br />

est faible.<br />

En termes d’adaptation des services, les <strong>Sanduk</strong> offrent une gamme de services assez souples<br />

qui satisfait les clients. Les prêts sont principalement adaptés au commerce. L’IMF doit<br />

encore intégrer des outils d’études de marché / de clientèle régulières. Un effort de<br />

diversification des produits d’épargne, encore assez standardisés, est également en cours, et<br />

paraît nécessaire.<br />

En termes de renforcement du capital social, la place et le rôle des 300 élus sont<br />

particulièrement importants et reconnus ; la place des femmes reste minoritaire, d’autant plus<br />

que l’étude sur les clients montre que 15% d’entre elles sont des prête-noms. Quelle pourra<br />

être leur place dans un futur proche ?<br />

71


Enfin, en termes de responsabilité sociale vis-à-vis des clients et de la communauté, les<br />

<strong>Sanduk</strong> ne se sont pas penchés sur les risques de surendettement et les problèmes de<br />

remboursement ; l’étude sur les clients confirme que cela ne constitue pas un problème<br />

majeur pour les clients à l’heure actuelle, en particulier, peu de décapitalisation ou de recours<br />

à d’autres prêts ont été observés, mais les enquêtes ont souligné les risques sur la faible<br />

rentabilité de certaines activités ou des modalités peu adaptées (utilisations agricoles). Le<br />

réseau pourra alors s’interroger sur les risques de saturation des marchés, sur les modalités<br />

des prêts ou sur les trajectoires des clients (concentration foncière lorsque les prêts sont<br />

utilisés pour l’achat de terres ? quelle éventuelle réorganisation des réseaux commerciaux<br />

lorsque de nombreux clients se lancent dans de nouvelles activités commerciales ? etc.)<br />

Les <strong>Sanduk</strong> montrent en bilan une stratégie sociale et un impact en bonne cohérence ce qui<br />

conduit à une forte satisfaction des membres et une relation de confiance constructive pour<br />

l’avenir du réseau.<br />

72

Hooray! Your file is uploaded and ready to be published.

Saved successfully!

Ooh no, something went wrong!