26.06.2013 Views

Mes souvenirs - Adélaïde Herculine Barbin - Éditions du Boucher

Mes souvenirs - Adélaïde Herculine Barbin - Éditions du Boucher

Mes souvenirs - Adélaïde Herculine Barbin - Éditions du Boucher

SHOW MORE
SHOW LESS

You also want an ePaper? Increase the reach of your titles

YUMPU automatically turns print PDFs into web optimized ePapers that Google loves.

ADÉLAÏDE HERCULINE BARBIN<br />

Heureusement les lits étaient larges. Nous pouvions y dormir<br />

parfaitement à l’aise, quoique n’en occupant qu’un tiers.<br />

Je ne dirai pas ce que fut cette nuit pour moi!!!<br />

Le jour était venu, il fallait partir.<br />

Après s’être habillé à la hâte, on mangea quelques bouchées<br />

dans le lait frais.<br />

Des provisions avaient été préparées par les bonnes religieuses<br />

et furent chargées sur des ânes mis en réquisition pour notre<br />

grand voyage.<br />

À l’entrée de la forêt, sur un monticule qui semble dominer le<br />

vaste Océan, se trouve une grande croix de pierre. Bien des générations<br />

de marins, sans doute, s’étaient agenouillées sur ses<br />

degrés moussus! Plus d’une mère y avait versé des larmes au<br />

souvenir de son fils absent!<br />

Ce fut là, à la face <strong>du</strong> ciel, que nous vînmes faire la prière <strong>du</strong><br />

matin. Sœur Marie-des-Anges, avec ce ton pénétré, cette grande<br />

foi qui dominait en elle, récita les prières. J’étais agenouillée en<br />

face d’elle et je ne puis dire quelle émotion me saisit lorsque je<br />

considérai cet angélique visage tout empreint d’une suavité<br />

douce, qui réfléchissait la sérénité de cette âme virginale. Le<br />

bruit de la mer venait seul troubler le silence religieux.<br />

C’était quelque chose de grand, de vraiment poétique!<br />

Je pleurai pendant que mes compagnes répondaient aux<br />

paroles sacrées!<br />

Mon excellente maîtresse avait été frappée de mon air d’abattement<br />

et s’informa de ma santé avec sollicitude, craignant surtout<br />

que je ne pusse pas faire le trajet sans me fatiguer<br />

énormément. Je la rassurai de mon mieux, voulant éviter toute<br />

remarque particulière, toute question à laquelle je ne pouvais<br />

répondre.<br />

On partit. Comme la veille, il fallut, pour marcher avec<br />

quelque assurance, laisser bas et souliers, le sable devenant à<br />

chaque instant plus épais et par conséquent plus mouvant. Par<br />

moments on s’enfonçait jusqu’aux genoux et plus d’une chute<br />

grotesque vint faire oublier la fatigue de cette marche rétrograde.<br />

La chaleur était déjà excessive. Nous doublions le pas afin de<br />

trouver plus vite le repos dont quelques-unes avaient un si grand<br />

besoin.<br />

31

Hooray! Your file is uploaded and ready to be published.

Saved successfully!

Ooh no, something went wrong!