Travail complet au format pdf - Gymnase Auguste Piccard
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8 Conclusion<br />
Il semblerait donc que les gens du public, en conflit <strong>au</strong> sujet de l’œuvre<br />
révolutionnaire du Sacre du printemps, aient été entraînés malgré eux dans son monde<br />
sonore et visuel, à tel point de perdre tout contrôle. Ce qui est fascinant est que moins<br />
d’une année après le scandale, le 5 avril 1914 à Paris, lorsque la pièce fut présentée en<br />
version de concert, elle connut un succès énorme : le compositeur fut porté à bout de<br />
bras par ses admirateurs. Cette réaction de nouve<strong>au</strong> impressionnante montre que le<br />
public avait réalisé que le Sacre du printemps était tout s<strong>au</strong>f une menace envers<br />
l’esthétique. En cherchant à reconstituer une impression <strong>au</strong>ssi frappante que celui du<br />
réveil du printemps, Stravinsky avait naturellement développé un langage musical<br />
nouve<strong>au</strong>. Bien que ce langage comporte énormément de « f<strong>au</strong>sses notes » selon les<br />
normes harmoniques de la musique Romantique, il n’est d’<strong>au</strong>cune manière dissonant :<br />
car la dissonance signifierait que la rencontre des notes manquerait d’accord et serait<br />
désagréable. Dans le Sacre il n’y a que de la be<strong>au</strong>té dans les relations entre les sons.<br />
Après avoir travaillé sur cette œuvre je réalise combien l’idée de la dissonance est<br />
ainsi relative. Je pense que le premier accueil du Sacre met en évidence un des plus<br />
grands malentendus <strong>au</strong> sujet de la musique du siècle passé : si les compositeurs<br />
développent des nouve<strong>au</strong>x langages qui peuvent sembler désagréables à des oreilles<br />
non familiarisées, ce n’est pas parce que les anciens styles <strong>au</strong>raient été « explorés »<br />
jusqu’<strong>au</strong> bout, mais parce qu’il y a tellement de mondes sonores qui n’ont pas encore<br />
été découverts, et qui demandent un langage de plus en plus complexe. Si le Sacre<br />
réussit à créer un climat surréel si tangible, c’est par une énorme complexité, dont ce<br />
travail ne fait que gratter la surface.<br />
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