Les bourses Solidarités Étudiantes - La Guilde Européenne du Raid

entreprendre intelligemment constituent
la raison d’être de SEYES Pullover.
Faire de beaux et bons produits.
Et il était important pour nous de
montrer que c’est aussi le rôle
du secteur privé de s’engager pour
changer les choses. Il existe pléthore
d’associations qui militent et qui accomplissent
leur mission de solidarité. Elles
prônent des modes de fonctionnement,
des valeurs et c’est aux "entreprisescitoyens"
de les appliquer. Selon moi,
associations et entreprises doivent
avancer dans le même sens et leurs
"démarches-activités" sont largement
complémentaires ; elles ne s’opposent
pas. Et puis ce n’est pas le statut juridique
d’une structure marqué sur un
bout de papier qui fait sa citoyenneté et
construit ses valeurs. Ce sont les
hommes qui la portent !
S.E. : Avez-vous été accompagné
dans votre démarche ?
S.M. : Hervé et moi avons toujours
voulu rester indépendants, que ce soit
au niveau financier ou moral. Pour
créer l’entreprise de nos rêves nous
n’allions tout de même pas demander
ce qu’on devait faire ! Nous avons donc
tout réfléchi par nous mêmes, effectué
nos choix et fait nos compromis. Cela
dit, la richesse intellectuelle de
nombreux partenaires (journalistes,
écrivains, associations…) nous a beaucoup
aidé dans nos choix.
S.E. : Quel enseignement en tirezvous
? (difficultés, satisfaction,
bilan, projets...) tant sur le plan
professionnel qu'humain ?
S.M. : J’en retire aujourd’hui beaucoup
de fierté. Quand je lis dans les yeux de
mes parents : « je suis fier de toi mon
fils », je vous garantis que cela vous
donne des ailes. Le confort moral et
la liberté dont je parlais précédemment
sont aussi une réelle satisfaction.
Et enfin, quand je sors du lit le matin,
le sentiment de servir à quelque chose,
se sentir "utile" et faire avancer le
"schmilblik", c’est vraiment gratifiant.
J’ai également tellement appris au
niveau professionnel (relation client,
développement commercial, technique
du textile, création des outils de
communication…). Je pense avoir
vraiment démultiplié ma "valeur sur
le marché du travail" !
Mais bien sûr tout n’est pas rose. Il
faut être prêt à en vouloir, à affronter
les tempêtes, à assumer les coups
durs, savoir rebondir. Je dirais à celles
et ceux qui veulent entreprendre que
la principale qualité pour mener à bien
sa barque est l’adaptabilité. Il faut
toujours réagir au quart de tour et ce
n’est pas toujours évident de mettre
ses "coups de blues" de côté. C’est
d’ailleurs beaucoup mieux de se lancer
avec quelqu’un pour pouvoir partager
tout ça. Le bon comme le mauvais.
Seul, c’est moins évident.
S.E. : Pourquoi la mode éthique
plutôt qu'un autre secteur ?
S.M. : Nous avons choisi la mode car
derrière le rêve que projette cette
industrie se cachent en fait énormément
de points noirs : des gamins qui
cousent nos jeans pour un dollar la
journée, des agriculteurs de coton
dont les poumons sont bourrés de
pesticides chimiques (20 000 décès
par an selon l’OMS !), des teintures
cancérigènes dangereuses pour la
santé… La marge de progrès de ce
secteur est énorme ! Et puis pouvoir
mettre un vrai message derrière une
marque. Just do it ? Oui mais quoi ?
Et bien nous, on fait de l’écologie et
du social : coton biologique issu du
commerce équitable en Inde, respect
des règles de l’OIT sur l’intégralité de la
chaîne de production (liberté syndicale,
pas de travail d’enfant ni de travail
forcé…), teintures écologiques certifiées,
partenariat avec des entreprises
françaises... Pas seulement une optimisation
de notre valeur boursière !
S.E. : Les jeunes intéressés par la
solidarité internationale sont
souvent motivés par le fait de
partir. Pourquoi vous êtes vous
engagés ici plutôt que là-bas ?
S.M. : Ceci regarde chacune et
chacun. En ce qui me concerne, mon
équilibre personnel dépend beaucoup
de la proximité de mes proches. Mes
amis et ma famille occupent une place
primordiale dans ma vie perso.
Et puis comme dit l’adage : « il faut
d’abord balayer devant sa porte ».
Enormément de choses sont à faire
dans ce beau pays qu’est la France
en terme d’emplois notamment
(20 000 chômeurs chaque année dans
le textile ! Une vraie peau de chagrin).
D’ailleurs cela m’énerve beaucoup
S’ENGAGER
d’entendre mes compatriotes critiquer
si vivement le pays. Tout n’est pas
parfait mais nous avons la chance
d’avoir la sécu, des savoir-faire mondialement
reconnus, un patrimoine
historique et culturel de tout premier
ordre… Sachons en profiter et améliorer
la donne. Il n’en tient qu’à nous.
Des actes valent mieux que de vives
critiques.
S.E. : De plus en plus de jeunes
rêvent de s'investir professionnellement
en accord avec leurs
valeurs et convictions. Et créer
leur boîte pour être leur propre
patron. Cela demande courage et
détermination. Avez-vous un
message ou des conseils à faire
passer à ces jeunes?
S.M. : Vivez, sentez, regardez, écoutez,
posez-vous les bonnes questions,
soyez créatifs et enthousiastes au lieu
d’être moroses et sans envie, réfléchissez
par vous mêmes au lieu
d’appliquer des schémas préétablis…
Notre existence ne consiste pas
seulement à avoir un pavillon et un
labrador ! Il faut lui donner du sens.
Et surtout n’oubliez pas que l’on a
20 ans qu’une fois dans une vie et que
ce n’est pas à 50 ans que vous vous
lancerez. La jeunesse est une carte
qu’il faut jouer tant qu’il en est temps.
Et puis la vie, ce n’est qu’une succession
de réussites et d’échecs, cela ne
vous tuera pas. Pas comme une soirée
trop arrosée qui se termine dans un
mur. La peur, voilà notre pire ennemi !
Alors courage.
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AVENTURE N°111 5
Photo © Seyes Pullover