26.06.2013 Views

Untitled

Untitled

Untitled

SHOW MORE
SHOW LESS

Create successful ePaper yourself

Turn your PDF publications into a flip-book with our unique Google optimized e-Paper software.

provoquer : par exemple, nous avions deux énormes femmes nues qui,<br />

s'inspirant du film de John Waters Pink Flamingos, se pelotaient dans un<br />

parc à bébés. Parfois, nous trouvions un thème pour le show. Au cours<br />

d'un de nos concerts, une fille est montée sur scène avec des bigoudis<br />

dans les cheveux et un oreiller planqué sous sa chemise pour faire croire<br />

qu'elle était enceinte. Elle était debout devant une planche à repasser, et<br />

pendant que nous jouions, elle défroissait un drapeau nazi. Un peu plus<br />

tard au cours du show, elle s'est vautrée sur la table à repasser et a mimé<br />

un avortement. Puis elle a enveloppé un faux fœtus dans le drapeau à<br />

croix gammée et l'a présenté en offrande à une télévision allumée devant<br />

elle. C'était tout simplement pour faire comprendre que la télévision est<br />

un moyen de communication fasciste, et que la famille américaine moyenne<br />

sacrifie ses enfants devant l'autel de cette baby-sitter bon marché et<br />

ennuyeuse à mourir : ou du moins nous essayions de le faire comprendre.<br />

Les shows ne se déroulaient pas tous comme prévu. Au cours d'un de<br />

nos premiers concerts à Tampa, nous avions rempli une boîte géante avec<br />

500 grillons dont je voulais me recouvrir le corps. Mais, lorsque j'ai ouvert<br />

la boîte, ils étaient tous morts. La puanteur qui s'en dégageait est une des<br />

odeurs les plus rances que j'aie jamais respirées, et cette odeur a imprégné<br />

mes mains aussi longtemps que celle de la chatte de Tina Pott. J'ai<br />

instantanément vomi, tout comme la demi-douzaine de personnes collées<br />

à la scène (dont Jeordie White, notre futur bassiste). J'avais commencé<br />

le concert sans idée particulière en tête, j'en tenais une pour finir :<br />

le dégoût est contagieux.<br />

Les défenseurs des droits des animaux s'acharnaient constamment<br />

contre nous; d'ailleurs, ils ne nous ont jamais lâchés. Pourtant, à part le<br />

malheureux incident des grillons, nous n'avons jamais tué aucun animal<br />

— juste des effigies d'animaux. Lors d'un de nos spectacles les plus humoristiques,<br />

il y avait une vache grandeur nature que nous avions mis une<br />

semaine à construire avec du papier mâché et du grillage. Influencé par<br />

Willy Wonka, Apocalypse Now et un des magazines zoophiles de Grandpère,<br />

j'ai enfoncé mon poing dans le cul de la vache pour en extirper des<br />

litres de chocolat dont j'aspergeais les spectateurs tandis que Pogo jouait<br />

un sample des déclamations de Marlon Brando dans Le Dernier Tango<br />

à Paris : « Tant que tu n'es pas dans le cul de la mort, bien profond, vastu<br />

trouver les entrailles de la peur? Et alors, peut-être... » Pour contrarier<br />

davantage les défenseurs des droits des animaux, on a acheté des<br />

chats et des cochons articulés qui réagissent au son de la voix et on a<br />

pendu au-dessus de la scène des sacs-poubelle remplis d'intestins : les<br />

jouets bougeaient de façon spasmodique, au rythme de la musique, presque<br />

comme des êtres vivants, le sang coulait. Les militants pensaient que nous<br />

torturions les animaux, alors qu'en fait, c'était eux que nous torturions.<br />

Sur scène, seuls les droits de l'homme étaient violés — nous-mêmes, les<br />

filles que nous enfermions dans des cages, les fans —, mais ça, personne<br />

ne s'en souciait.<br />

Chaque concert était une nouvelle performance artistique. Les clubs<br />

nous engageaient surtout pendant les vacances et on essayait de se renouveler<br />

à chaque fois. Pour le jour de l'an, au cours de la première partie,<br />

je portais un smoking et un haut-de-forme. Pour la seconde, une fille du<br />

nom de Terri s'est habillée comme moi, perruque noire, smoking, hautde-forme<br />

et godemiché très réaliste scotché autour de sa taille. Lorsqu'elle<br />

est montée sur scène, tout le monde a cru qu'il s'agissait de moi, la bite<br />

à l'air, ce qui n'était pas vraiment une nouveauté. Tandis que le groupe<br />

balançait Cake and Sodomy, j'ai rampé vers elle et je lui ai taillé une pipe.<br />

C'est peut-être ce soir-là que la rumeur est née, comme quoi je m'étais<br />

fait retirer des côtes afin de me sucer tout seul.<br />

Le 14 février, avec Missi, on a essayé de se faire arrêter dans une boîte<br />

du coin, afin de passer la Saint-Valentin en prison. La boîte appartenait<br />

à un type de la mafia qui croulait sous les bijoux en or et dont les employés<br />

avaient tous des casiers judiciaires beaucoup plus longs<br />

que notre play-list. Ce soir-là, les flics étaient partout :<br />

Missi est arrivée, topless, avec un loup sur le visage.<br />

Cette fois, j'étais du bon côté de la pipe. J'ai provoqué<br />

les flics en leur demandant de m'arrêter au nom<br />

des lois en vigueur en Floride. Mais ils ne l'ont pas<br />

fait. Ils avaient la patte trop bien graissée.<br />

Missi s'est révélée une parfaite collaboratrice,<br />

même en dehors de la scène. (Comme la fois où<br />

elle avait frappé Nancy au Squeeze.) Notre relation<br />

est devenue intime au mois de décembre :<br />

j'étais déterminé à changer de conduite et, pour<br />

une fois, à être fidèle. Surtout qu'au départ, à la<br />

différence de mes autres relations amoureuses, celle-là était basée sur une<br />

solide amitié. Étant aussi plus âgé, je me sentais obligé de l'éduquer et de<br />

la façonner comme si elle était ma protégée.<br />

Notre relation a débuté à peu près au moment des meurtres de Gainesville,<br />

lorsque huit lycéens ont été poignardés. À la suite de cette histoire,<br />

j'ai pris des photos de Missi, nue, recouverte de sang, exactement<br />

comme si elle venait de se faire brutalement égorger. J'ai fait des polaroïds<br />

de ses tétons, de sa chatte, de sa bouche — comme si tout son corps<br />

tailladé trempait dans le sang. Sur certains clichés, je lui ai recouvert la<br />

tête avec un sac en plastique noir pour faire croire qu'elle avait été<br />

asphyxiée, ou bien je lui dissimulais la tête à l'aide d'une étoffe également<br />

noire et je lui grimais le cou pour faire croire qu'elle avait été décapitée.

Hooray! Your file is uploaded and ready to be published.

Saved successfully!

Ooh no, something went wrong!