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La Folie - MML Savin

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Un sac 357<br />

avez... » ) une livre de raisins chez la fruitière, du noir et du blanc. C’est<br />

tout un chargement de petits paquets. « Si vous aviez votre sac » insinua<br />

Jacques, mais Liliane ne répond pas qu’il est tout simple de le prendre en<br />

passant dans la voiture. Revenus à la pancarte, la charge des paquets répartie<br />

équitablement, Jacques dit enfin son idée :<br />

- Les cartes postales afin de voir tout ce qu’on peut voir,<br />

un guide par les images. Poliche achetait toujours des cartes avant de visiter,<br />

contre l’usage. Le reste, parce que j’ai eu l’idée que rien ne sera plus<br />

drôle que de déjeuner dans les galeries de la cathédrale ! Attention ne<br />

vous tordez pas le pied ! Ne vous brisez pas le crâne !<br />

L’escalier est étroit et raide ; Jacques grimpe comme un matelot,<br />

Liliane presque aussi agile, sans s’essouffler, car l’honneur des croisés est<br />

en cause. Duguesclin et les croisés seraient chez eux dans les tribunes<br />

ogivales, mais ils jugeraient, comme fait Jacques, qu’il y a trop de poussière<br />

dans la tribune de la nef pour y déjeuner. Sous le prétexte de musée<br />

lapidaire, c’est un encombrement de plâtres cassés, de la poudre de plâtre<br />

partout. Les tribunes du choeur sont très belles, mais rien pour déposer ni<br />

pour s’asseoir. « C’est un domaine réservé aux satisfactions esthétiques »<br />

décide Jacques. Par bonheur, dans cette cathédrale hospitalière, rien ne<br />

ferme à clés. Une petite porte mène à un couloir qui ne mène à rien. Mais<br />

un autre couloir, qui se continue en escalier, mène à une autre porte qui<br />

s’ouvre sur une plate-forme en balcon, et de balcon en balcon, on peut<br />

faire, tout le tour de la cathédrale. Encore des couloirs, des portes, des<br />

balcons, des escaliers. « J’ai treize ans » affirme Jacques. Et Liliane a<br />

bien envie de ne pas en avoir d’avantage. Elle se déride. Elle se surprend<br />

à parler de son enfance. Si les soeurs les menaient en pique-nique dans les<br />

ruines, on peut bien organiser une dînette sur les toits d’une cathédrale !<br />

- Il paraît, dit Jacques, qu’en Italie, on se donne des rendez-vous<br />

dans les églises.<br />

À ces mots, Liliane reprend tout son âge mais Jacques garde ses<br />

treize ans. Il dresse un buffet sur la pierre d’une balustrade. Ordre et propreté<br />

c’est la marine, et ce beau papier sur une marche pour que Liliane<br />

puisse s’asseoir, lui debout qui s’affaire, qui découpe des assiettes dans<br />

du carton de pâtissier.<br />

- Si on avait eu de vraies assiettes ! Nous aurons tout de<br />

même de vraies assiettes, et de quoi changer d’assiette.<br />

Liliane serait-elle secrète au point de cacher qu’elle a des assiettes<br />

et tout le nécessaire pour un pique-nique dans son sac ? Le sac n’est peutêtre<br />

qu’un sac à mystère qui lui sert à jouer la mystérieuse. Jacques lui<br />

aussi cache ce qu’il veut cacher. Le pacte de <strong>La</strong> Châtelière qui condamnait<br />

le mensonge, tolérait le silence, si le silence n’était pas mensonge. Ce<br />

n’est pas toujours le moment d’avouer. Il n’est pas convenable d’avouer à

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