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La Folie - MML Savin

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<strong>La</strong> <strong>Folie</strong><br />

- Je pensais qu’elle vous avait écrit son départ ; Sarragosse,<br />

Madrid, Barcelone, une véritable tournée. Elle était si fière, si heureuse !<br />

- Elle m’aura donc laissé un mot à l’atelier.<br />

- Vous n’êtes pas encore monté là-haut ?<br />

- Mais non ! J’arrive. J’ai préféré faire la route la nuit. En<br />

auto, c’est plus agréable.<br />

- Quelle auto ? Moser de plus en plus étonnés.<br />

- Mon auto. Je veux dire : celle de mon oncle Poliche. Enfin,<br />

c’est la mienne à présent . Si Jacques n’avait pas écrit, c’était parce<br />

qu’il ne pouvait tout écrire. Je vous raconterai. Ce serait trop long !<br />

Point de lettre à l’atelier. « Elle aurait pu m’écrire ! Je n’ai pas écrit<br />

... Mais ce n’était pas une raison ...» Ilse n’avait rien écrit sur la feuille du<br />

12, et Jacques ne songea point à regarder les autres feuilles. « Évidemment,<br />

elle a rangé les placards ... Je n’étais pas là pour le lui défendre.<br />

Elle a ciré les parquets. L’ordre ! Je me moque de l’ordre. De l’Espagne<br />

aussi, et de la tournée. Alors, elle n’a pas compris que si j’avais hâte de<br />

revenir, ce n’était que pour la retrouver, et pour lui dire ce qu’il était trop<br />

long d’écrire ? C’était bien la peine de bousculer le notaire ! Elle me<br />

mord le poignet et file pour une semaine je ne sais où, sans laisser<br />

d’adresse ... Serait-elle une fille comme les autres ? »<br />

Il remonta ses valises en maugréant. Il s’était fait une joie de dire<br />

les choses, une à une. C’était une suite de joies, si Ilse avait de la joie à<br />

chacune, comme Poliche aurait voulu. Autrement, il ne sentait plus que<br />

son chagrin. Le billet dans le portefeuille devenait une sombre lettre<br />

d’adieu, navrante et déchirante à la relire.<br />

Toute la nuit, en conduisant, il avait combiné, il s’était représenté<br />

les ébahissements successifs de la fée Vermicelle, qui s’attendait si peu à<br />

tout ce qu’il avait à dire. Il était parti de <strong>La</strong> Châtelière, directement, le<br />

jardinier refermant la grille ; comme un ambassadeur de l’oncle Poliche.<br />

Il avait posé Le Petit Lord à côté de lui, à la place qui était la place d’Ilse.<br />

Il avait tant de joie dans son chagrin qu’il n’en aurait pas eu davantage si<br />

Poliche avait lu Le Petit Lord derrière eux, dans la voiture. Il soutenait de<br />

sa joie cette autre vie de Poliche, dont il était maintenant responsable, qui<br />

n’était un peu de vie que par la joie. Et puis tout dire en riant. « Viens<br />

voir la vieille guimbarde de l’oncle Poliche! Ilse aurait bien vu que la<br />

guimbarde était toute neuve, une 402 Coach du dernier modèle, luisante<br />

et noire, longue, rouge, pour tout dire une somptueuse voiture. Elle n’a<br />

qu’une porte, parce que Poliche n’était pas assez riche pour payer deux<br />

portes ... Prends garde, les sièges sont durs, les ressorts sont un peu cassés...»

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