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La Folie - MML Savin

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<strong>La</strong> <strong>Folie</strong><br />

chansons de marche, après tout, ne sont que des chansons ... Et nous !<br />

N’avons-nous pas les nôtres ? Un aigle noir a plané sur la ville ... Il a<br />

juré d’être victorieux ... J’ai fait chanter cet aigle noir aux recrues, pendant<br />

une période de réserve. Quel aigle ? Quelle ville ? À la pause,<br />

j’interrogeai les recrues ; j’en ai tiré de singulières réponses... Qui a vu un<br />

aigle ? Aucun de mes zouaves n’en avait vu. L’un d’eux, mieux informé<br />

que les autres, m’a répondu : « l’aigle, c’est Napoléon, mon capitaine !»<br />

Moser chanta l’Aigle Noir : « Et quelle musique ! Plus inepte encore que<br />

les paroles !» <strong>La</strong> vivacité de Moser, qui marchait au pas en chantant son<br />

Aigle, redonnait du courage à Jumièges.<br />

Quand Ilse redescendait de son quatrième, on se purgeait l’esprit de<br />

l’inepte musique. Moser ne demandait pas : « Que-joue-t-on ?» D’abord,<br />

les Variations sur un air de la flûte. C’était l’enchantement de Monsieur<br />

Jumièges. Plus il écoutait ces Variations, plus il avait le désir de les entendre.<br />

Un soir, avant le violoncelle et le piano :<br />

- Connaissez-vous le Duo de Mozart ? dit Moser. Si<br />

j’osais...<br />

Ils étaient en humeur d’oser, Moser le baryton, Ilse soprano.<br />

- Ce sont nos deux voix ... Mais nous ne sommes pas de<br />

l’Opéra de Vienne ...Ce n’est que pour vous faire connaître le Duo.<br />

Pendant qu’Ilse cherchait la partition de <strong>La</strong> Flûte :<br />

- Moi, je suis Papageno, l’oiseleur. Peureux et frivole,<br />

comme un oiseau. Des plumes partout ! Une culotte, une veste de plumes,<br />

une aigrette. Aussi bavard qu’un philologue. Une sorte de gros oiseau...<br />

Moser se gonflait, se sentait des plumes, marchait comme un gros oiseau.<br />

Ilse dans un rôle qui lui convient : la Princesse Pamina, comme Ilse est<br />

princesse. Sa mère est Reine de la Nuit. <strong>La</strong> mère d’Ilse était une fée ! À<br />

toi de commencer, Pamina ...<br />

Moser au piano, plaquant les accords.<br />

- Il faut encore vous dire que Tamino est amoureux de Pamina,<br />

dont il n’a vu que le portrait, et que Pamina n’a jamais vu Tamino.<br />

Elle vient d’apprendre par ce bavard de Papageno qu’elle est aimée de<br />

Tamino. C’est compliqué ! Mais que tout est clair dans la musique ...<br />

Accords au piano. Puis Pamina. Puis Papageno. Les deux voix<br />

s’envolent, l’une après l’autre, la première qui se tait quand l’autre s’envole.<br />

Le même élan, le même balancement dans une aube d’amour, la<br />

même joie, la plénitude de l’amour à seulement rêver l’amour, une ombre<br />

de mélancolie qui n’est que celle de l’amour quand il s’envole. Jumièges,<br />

une main sur les yeux, écoute ce que l’aube chante tous les matins, la<br />

promesse, la certitude du jour dans la première lueur de l’aube. Les roses<br />

s’ouvrent, qui s’effeuilleront. <strong>La</strong> même secrète mélancolie dans les roses

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