La Folie - MML Savin

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La Folie
l’odeur délicieuse de la pipe, il suffoquerait à l’odeur de la pourriture. En
préambule, pour endormir l’interlocuteur. Puis, comme un propos en l’air
:
- Vous n’avez pas reçu un papier au courrier de ce matin ?
- Une convocation des Protecteurs ?
- Non. Ces braves Protecteurs ! Nous ne sommes pas aussi
malins que les autres. Les autres tous ceux qui vivent de la pourriture et
qui se délectent à l’odeur...
Il croise ses longues jambes, il se lève comme pour partir, il laisse
dire qu’on est toujours heureux de sa visite.
- Puisque vous n’avez pas reçu le papier !
- Mais quel papier ?
Il dit enfin quelle sorte de papier. On le cherche, on le présente.
- C’est bien ce que je pensais..
Un double nuage de pipe pour mieux se protéger de l’odeur.
- Et, mon cher Protecteur, vous n’êtes pas inquiet ? C’est
un flegme que j’admire. Puis-je garder ce papier jusqu’à demain ?
Il serre le papier dans son portefeuille; il disparaît, affirmant qu’il
ne peut pas s’avancer davantage. La même visite à chaque Protecteur. À
Saint-Séverin :
- Je parie qu’il y a sur le papier : Je suis las de les porter.
- Seriez-vous magicien ? s’écrie l’autre.
- Non, mon cher, mais archiviste. C’est mon métier. Ce
qu’on peut apprendre par un simple petit papier !
Quand Lebuhotel eut terminé sa collecte, il s’en fut sonner chez
Jumièges.
- Puis-je consulter vos assiettes du temps de la Révolution
?
- Consultez. Trop heureux de collaborer à vos travaux
d’archiviste.
Lebuhotel, considérant les assiettes :
- Alors, vous, ce doit être : J’éclaire la France.
Tu imagines la stupéfaction de Jumièges. Plus stupéfait encore de
tous ces petits papiers qui sortent l’un après l’autre du portefeuille.
- Je n’explique pas, disait Lebuhotel. Je constate. Je rassemble
des documents. Ce n’est qu’un travail préparatoire. L’archiviste
n’a jamais d’autre prétention. Il serait peut-être convenable (je dis en vue
d’une recherche) de rassembler aussi les Protecteurs.
- Je ne crois pas qu’il soit nécessaire de rappeler Moser ni
Richard ...
- Pas encore, dit Lebuhotel. Je ne m’avance pas. Je ne voudrais
pas m’avancer à la légère. On accuserait mon imagination. À vous