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Lire le livre - Bibliothèque

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- Ce sont des gens du Sud. À cause des esclaves, ils ont toujours baigné dans<br />

un climat de sorcel<strong>le</strong>rie. Vaudou, santeria, candomblé… Ceux du Nord ne peuvent<br />

pas comprendre, c’est une autre culture.<br />

- Et toi, tu y crois, au fantôme du colonel ?<br />

- Je crois aux énergies résiduel<strong>le</strong>s qui subsistent après la mort. El<strong>le</strong>s traversent<br />

<strong>le</strong>s sièc<strong>le</strong>s et flottent dans <strong>le</strong>s airs, comme des éclairs de foudre en suspension. La<br />

plupart du temps, el<strong>le</strong>s se dissolvent, mais el<strong>le</strong>s peuvent éga<strong>le</strong>ment choisir de<br />

s’abattre sur quelqu’un. Leurs motivations ne sont pas évidentes. Il ne faut pas prêter<br />

aux fantômes une logique structurée. Ils suivent <strong>le</strong>urs impulsions, comme <strong>le</strong>s<br />

animaux. Ils réagissent de manière disproportionnée, tels des enfants capricieux.<br />

Ainsi, <strong>le</strong> colonel s’acharne sur Tobbey alors que celui-ci a dépensé des fortunes pour<br />

essayer de <strong>le</strong> contenter. C’est injuste, mais il s’en fiche. Il veut obtenir satisfaction.<br />

Être inhumé selon <strong>le</strong>s règ<strong>le</strong>s. Nous avons fait une connerie. Je n’aurais jamais dû<br />

t’écouter. Nous risquons gros, toi et moi, dans cette affaire.<br />

La <strong>le</strong>çon d’occultisme me faisant bâil<strong>le</strong>r, je me suis allongée sur mon lit de camp<br />

sans me dévêtir.<br />

J’ai bien sûr fait des rêves idiots dont je vous épargnerai <strong>le</strong> récit détaillé.<br />

Il a fallu se <strong>le</strong>ver à l’aube. Faute de douche, tout <strong>le</strong> monde puait. En l’absence de<br />

sanitaires, chacun a dû se soulager entre <strong>le</strong>s arbres factices. Une horreur. Evita<br />

arborait une tête en papier mâché, et je ne devais pas avoir meil<strong>le</strong>ure allure. Le<br />

cuistot a fait circu<strong>le</strong>r du café noir brûlant et des sardines à l’hui<strong>le</strong>. L’un des garçons<br />

nous a gentiment proposé des piments. Un autre, du saucisson d’âne mexicain. Un<br />

troisième, des fourmis grillées.<br />

Tobbey a mis fin aux amabilités en jetant deux casques en Kevlar à nos pieds.<br />

- Mettez ça, a-t-il ordonné. C’est du matos de premier choix. Ça vous évitera de<br />

perdre une oreil<strong>le</strong>.<br />

Comme je m’apprêtais à protester, il m’a attrapée par <strong>le</strong> coude pour me forcer à<br />

me re<strong>le</strong>ver.<br />

- Gardez la bouche fermée <strong>le</strong> temps que je vous explique deux ou trois choses,<br />

a-t-il grondé. Vous n’êtes pas dans un parc à thème où l’on fait joujou à la guéguerre.<br />

Ici, pas de paint-ball ou autre connerie de ce genre. Tous <strong>le</strong>s projecti<strong>le</strong>s sont réels.<br />

C’est <strong>le</strong> principe fondamental de ma méthode. Pas de simulation, jamais. On<br />

n’apprend bien qu’en survivant. Le danger démultiplie <strong>le</strong>s sécrétions d’adrénaline,<br />

c’est ce qui fait de nous des super héros. Nos sens fonctionnent mieux, nous<br />

bougeons plus vite, nous voyons plus loin, nous entendons des choses qui<br />

d’ordinaire nous resteraient inaudib<strong>le</strong>s. La peur, c’est comme <strong>le</strong> gaz NOS qu’on<br />

injecte dans <strong>le</strong>s bolides de compétition, pour booster <strong>le</strong> moteur et lui faire cracher <strong>le</strong><br />

feu.<br />

Il a raffermi sa prise sur mon bras. La dou<strong>le</strong>ur a grimpé dans mon biceps.<br />

- Ne vous avisez pas de frimer, a-t-il poursuivi. Suivez l’exemp<strong>le</strong> de mes gars.<br />

S’ils se couchent, s’ils se mettent à courir, à ramper, imitez-<strong>le</strong>s.<br />

- Je ne comprends pas, ai-je lancé en luttant pour me dégager. Qui va nous tirer<br />

dessus ?<br />

- Des robots, a-t-il grogné. Des machines équipées de détecteurs et qui<br />

patrouil<strong>le</strong>nt dans <strong>le</strong>s collines. El<strong>le</strong>s sont programmées pour ouvrir <strong>le</strong> feu sur tout être<br />

humain en mouvement. Dans <strong>le</strong> commerce, on <strong>le</strong>s équipe de projecti<strong>le</strong>s en<br />

caoutchouc, inoffensifs. El<strong>le</strong>s font <strong>le</strong> bonheur des agences de sécurité. Beaucoup<br />

mieux qu’un doberman incontrôlab<strong>le</strong>, qui finit un jour ou l’autre par bouffer la jambe<br />

de son maître. Je <strong>le</strong>s ai bricolées pour qu’el<strong>le</strong>s deviennent plus agressives. El<strong>le</strong>s<br />

sont la c<strong>le</strong>f de voûte de mon programme de formation.

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