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Willis de Die Hard 4. Impressionnant. Le regard surtout. Chirurgical. Des yeux<br />

d’exorciste. Quelque chose s’est noué dans mon ventre et j’ai détesté ça.<br />

- L’armée de Lee souffrait d’une pénurie généra<strong>le</strong> de matière première, a-t-il<br />

continué. Comme on manquait de métal pour fondre des bal<strong>le</strong>s, on envoyait des gars<br />

<strong>le</strong>s récupérer sur <strong>le</strong>s morts. Avec un couteau, ils <strong>le</strong>s extrayaient des cadavres. Même<br />

chose pour la poudre. Le blocus empêchait <strong>le</strong> ravitail<strong>le</strong>ment en salpêtre, à partir<br />

duquel on fabrique la poudre noire. Le président Jefferson Davies a dû promulguer<br />

une ordonnance obligeant <strong>le</strong>s maîtresses de maison à thésauriser <strong>le</strong> contenu des<br />

pots de chambre familiaux. Des col<strong>le</strong>cteurs assermentés passaient <strong>le</strong>s ramasser.<br />

Des excréments, on tirait du nitre et, avec <strong>le</strong> nitre, on fabriquait de la poudre. Ainsi,<br />

chaque fois que <strong>le</strong>s Confédérés chiaient, ils contribuaient à l’effort de guerre.<br />

Quelque part, ça devait <strong>le</strong>s amuser d’expédier <strong>le</strong>ur merde à la face des Yankees.<br />

Il sentait la sueur et <strong>le</strong> tabac. Ses joues, mal rasées, se hérissaient de piquants<br />

poivre et sel. Ses mains me fascinaient, énormes, souillées de terre. Je <strong>le</strong>s ai<br />

imaginées sur moi, et j’ai frissonné.<br />

« Tiens-toi la bride courte, ma petite, me suis-je dit. Pas question d’être un<br />

numéro de plus dans <strong>le</strong> lit de ce GI Joe. »<br />

Il a continué à décrire la batail<strong>le</strong>, <strong>le</strong>s erreurs des généraux. Il a dressé un portrait<br />

au vitriol de Sherman, imbu de lui-même et mal embouché, insultant ses officiers et<br />

<strong>le</strong>s terrorisant au point que ceux-ci n’osaient même plus lui transmettre <strong>le</strong>s<br />

mauvaises nouvel<strong>le</strong>s du front.<br />

- C’était un soldat borné, refusant conseils et mises en garde, négligeant tout ce<br />

qui contrariait ses plans, et méprisant ouvertement l’adversaire. C’est ainsi qu’il s’est<br />

laissé surprendre. Il est parti se coucher. Deux heures plus tard, <strong>le</strong>s Confédérés<br />

chargeaient en poussant <strong>le</strong>ur fameux cri de guerre, surprenant <strong>le</strong>s « b<strong>le</strong>us » en p<strong>le</strong>in<br />

sommeil.<br />

Je n’avais pas envie de subir un cours magistral. Chaque clan avait sa propre<br />

interprétation des événements, et chaque version était entachée de parti pris.<br />

Chaque général était tour à tour qualifié de stratège, d’imbéci<strong>le</strong>, d’alcoolique, de<br />

boucher ou de génie. Diffici<strong>le</strong> de s’y retrouver dans ce méli-mélo.<br />

- Et votre arrière-grand-père, <strong>le</strong> colonel ? Ai-je hasardé.<br />

Tobbey a désigné la partie est du terrain.<br />

- D’après <strong>le</strong> journal de Trueblue, son ordonnance, il se trouvait dans cette zone,<br />

attendant l’ordre de passer à l’attaque. Il commandait un détachement baptisé <strong>le</strong>s<br />

« Renards rouges de Virginie ». C’était une tradition chez <strong>le</strong>s Confédérés, chaque<br />

régiment se donnait un nom flamboyant. Les uniformes étaient très fantaisistes. Ils<br />

n’étaient pas fournis par l’armée, chacun devait fabriquer <strong>le</strong> sien, et cela donnait des<br />

résultats surprenants ou grotesques. Les épouses, <strong>le</strong>s sœurs, <strong>le</strong>s fiancées<br />

rivalisaient d’originalité pour donner au futur héros l’allure la plus martia<strong>le</strong> possib<strong>le</strong> en<br />

multipliant <strong>le</strong>s plumets, <strong>le</strong>s brandebourgs, <strong>le</strong>s épau<strong>le</strong>ttes. Au final, ça donnait un<br />

déguisement de maharadjah, ou assimilé.<br />

- Je ne savais pas, ai-je avoué.<br />

- Si, a continué Tobbey. Quand <strong>le</strong>s détachements sudistes défilaient, ça évoquait<br />

davantage la parade des clowns qu’une armée régulière. Les Yankees en riaient à<br />

gorge déployée. N’empêche, ces clowns <strong>le</strong>ur ont donné du fil à retordre.<br />

Il a marqué une pause avant de reprendre :<br />

- Le détachement du colonel n’échappait pas à la règ<strong>le</strong>. Ses hommes portaient<br />

une queue de renard sur <strong>le</strong> chapeau et une tunique rouge sang bordée de fourrure<br />

de lynx. L’armement était hétéroclite. Chacun avait puisé dans l’arsenal familial : de<br />

vieux pisto<strong>le</strong>ts de duel, des mousquets datant de la guerre d’Indépendance. Un

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