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complice rêvée pour une machination criminel<strong>le</strong>. Cruel<strong>le</strong>, el<strong>le</strong> pouvait devenir<br />
larmoyante, passant du rô<strong>le</strong> de bourreau à celui de victime en l’espace de deux<br />
minutes. El<strong>le</strong> ne pouvait s’empêcher de par<strong>le</strong>r, s’épanchant en interminab<strong>le</strong>s<br />
logorrhées. La preuve la plus éclatante de son immaturité, c’était cette obstination à<br />
mettre sur pied la mauvaise blague du colonel fantôme, pour effrayer son père, alors<br />
même qu’avec Willa, el<strong>le</strong> était déjà impliquée dans un complot nécessitant une<br />
grande discrétion. Cette stupidité stratégique avait dû rendre sa sœur aînée fol<strong>le</strong> de<br />
rage. Si Tobbey avait découvert la statue de cire ficelée sur <strong>le</strong> dos du cheval, Sarah<br />
Jane aurait été punie, peut-être exilée dans une pension religieuse, à la frontière de<br />
l’Alaska. Son bannissement aurait anéanti <strong>le</strong> plan imaginé par Willa. Sans Sarah<br />
Jane, pas de kidnapping possib<strong>le</strong>, sans kidnapping, pas de coupab<strong>le</strong> de<br />
remplacement… Bref, tout tombait à l’eau.<br />
J’étais désorientée. Evita avait raison, peut-être valait-il mieux tirer un trait sur<br />
cette histoire et retourner à l’Agence 13 ? Devereaux n’aurait rien à me reprocher<br />
puisque Stan<strong>le</strong>y-Mitchell avait honoré <strong>le</strong> contrat. Au fil des semaines, la police<br />
rechercherait de plus en plus mol<strong>le</strong>ment Sarah Jane… puis plus du tout.<br />
J’ai mâchonné un sandwich au thon, grignoté une mangue dans une espèce<br />
d’état second, submergée par une impression de vide et d’inutilité. Au fond de moi, je<br />
comprenais la réaction de Willa. À une certaine époque de ma vie, j’avais nourri moi<br />
aussi des envies de meurtre très réel<strong>le</strong>s. Envers ma mère, d’abord, puis à l’encontre<br />
de ma patronne, Madame Lucil<strong>le</strong>, qui m’avait fait jeter en prison. Encore une fois, il<br />
ne s’agissait pas de simp<strong>le</strong>s fantasmes, mais de pulsions très puissantes qui<br />
m’avaient amenée à la limite du passage à l’acte et que j’avais jugulées à la dernière<br />
seconde, au prix d’un effort surhumain. Que Willa ait eu envie de punir sa famil<strong>le</strong> me<br />
semblait légitime, du moins en ce qui concernait Tobbey et son épouse. À mon sens,<br />
il n’était pas uti<strong>le</strong> d’étendre la sanction aux petites fil<strong>le</strong>s, même si l’endoctrinement<br />
paternel <strong>le</strong>ur avait pourri la cervel<strong>le</strong>.<br />
J’en étais là de mes réf<strong>le</strong>xions quand <strong>le</strong> cellulaire a sonné.<br />
Une voix de vieillard a résonné dans l’écouteur :<br />
- Bonsoir, c’est Leo Ursharft… Nous nous sommes vus cet après-midi, à la<br />
maison de retraite… Ne m’interrompez pas ou je raccroche. Je vous ai menti. Le<br />
bunker comportait effectivement un abri gigogne… une cache pour <strong>le</strong>s officiers…<br />
Mais vous n’y trouverez rien. El<strong>le</strong> est vide… Comme je vous l’ai expliqué, tous <strong>le</strong>s<br />
gradés ont été massacrés durant <strong>le</strong>s premières minutes du carnage, en essayant de<br />
s’interposer.<br />
- D’accord, ai-je murmuré, et comment y accède-t-on ?<br />
Après une hésitation, il a fini par lâcher :<br />
- À l’intérieur du bunker, il y a une infirmerie. Dans cette pièce, au fond, se trouve<br />
une cabine de radioscopie. La mise en marche de cet appareil est commandée par<br />
un pupitre muni de boutons colorés. L’un d’eux, de cou<strong>le</strong>ur blanche, déc<strong>le</strong>nche en<br />
fait l’ouverture d’une trappe. Il suffit d’appuyer dessus comme s’il s’agissait d’un<br />
manipulateur de code morse, et d’envoyer <strong>le</strong> message « SOS ». Trois traits, trois<br />
points, trois traits. Alors, un panneau blindé s’ouvre dans <strong>le</strong> sol, devant l’appareil de<br />
radioscopie. Il ne reste ouvert qu’une minute, pas davantage, puis se referme<br />
automatiquement. Cette trappe donne accès à ce que vous appe<strong>le</strong>z « l’œuf de<br />
plomb ». Une fois descendu dans ce deuxième abri, il est possib<strong>le</strong> de verrouil<strong>le</strong>r la<br />
trappe de l’intérieur, de manière qu’on ne puisse l’ouvrir du dehors. C’était un<br />
dispositif anti mutinerie. Un refuge au cœur du refuge. Il n’a jamais servi. Vous n’y<br />
trouverez rien. En outre, si la trappe se bloque, vous risquez de vous retrouver