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Lire le livre - Bibliothèque

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et même un bazooka. Un hamac occupait <strong>le</strong> fond du réduit. Des caisses de rations,<br />

empilées <strong>le</strong>s unes sur <strong>le</strong>s autres, semblaient soutenir la voûte tel<strong>le</strong>s <strong>le</strong>s colonnes<br />

d’un temp<strong>le</strong>.<br />

Willa s’est assise en tail<strong>le</strong>ur sur <strong>le</strong> sol et, d’un geste, nous a invitées à l’imiter.<br />

Mal à l’aise, el<strong>le</strong> bougeait gauchement et s’efforçait de sourire d’une façon artificiel<strong>le</strong>,<br />

comme pour nous prouver qu’el<strong>le</strong> n’était pas dangereuse.<br />

- Pourquoi n’êtes-vous pas rentrée au ranch ? ai-je répété.<br />

- Peur de mon père, a-t-el<strong>le</strong> murmuré après une longue minute de si<strong>le</strong>nce. Il<br />

m’aurait fait des reproches. Il aurait peut-être cru que je m’étais débarrassée de<br />

Burton en l’empoisonnant, ou je ne sais quoi… Il ne me l’aurait pas pardonné.<br />

Burton, c’était <strong>le</strong> fils qu’il aurait voulu avoir. Le guerrier idéal. Moi… moi je n’étais<br />

qu’une fil<strong>le</strong>… Une créature de complément… Quand il a disparu, j’ai été tentée de<br />

rentrer. Une nuit, je suis même allée jusqu’aux écuries. Je <strong>le</strong>s ai regardés, tous là,<br />

rassemblés pour <strong>le</strong> dîner, mais je n’ai pas osé franchir <strong>le</strong> seuil. Je savais que la<br />

disparition de Burton mettrait mon père dans tous ses états, qu’il me tarabusterait<br />

pour me faire dire ce qui s’était passé. Il m’aurait rendue responsab<strong>le</strong> de ce malheur,<br />

m’aurait accusée de n’avoir pas su veil<strong>le</strong>r sur mon mari. Alors j’ai fait demi-tour…<br />

Vous comprenez, je n’avais plus ma place parmi eux. Mes sœurs m’ont paru<br />

tel<strong>le</strong>ment… tel<strong>le</strong>ment étrangères. C’était un autre monde.<br />

El<strong>le</strong> essayait de dissimu<strong>le</strong>r ses mains, déformées, cal<strong>le</strong>uses. Des mains<br />

d’homme. L’index droit présentait la trace d’une fracture mal ressoudée. Sur son<br />

avant-bras gauche, j’ai noté la présence d’une cicatrice. Cel<strong>le</strong> laissée par l’extraction<br />

de la balise de repérage. Burton avait fait <strong>le</strong> bon choix en devenant soldat, il n’aurait<br />

eu aucun avenir dans la chirurgie esthétique.<br />

Une nouvel<strong>le</strong> minute de si<strong>le</strong>nce s’est écoulée, interminab<strong>le</strong>.<br />

- Je ne sais pas réel<strong>le</strong>ment ce qui s’est passé, a-t-el<strong>le</strong> enfin repris. Un matin,<br />

Burt est parti en patrouil<strong>le</strong>, comme il en avait l’habitude. C’était son truc. Il aimait<br />

vivre aux aguets. En a<strong>le</strong>rte permanente. Il disait que <strong>le</strong>s robots l’aidaient à se<br />

maintenir en forme. Alors il <strong>le</strong>s défiait, s’amusait à s’en approcher <strong>le</strong> plus possib<strong>le</strong>…<br />

Il était très bon à ce jeu. Et puis un soir, il n’est pas rentré. C’est tout. J’ai attendu un<br />

jour, deux, trois. La nuit du quatrième, je suis sortie explorer <strong>le</strong>s environs ; je n’ai rien<br />

trouvé. J’ai d’abord pensé qu’il avait été atteint par <strong>le</strong> tir d’un robot, et qu’il était là,<br />

quelque part, dans l’incapacité de se déplacer. À plusieurs reprises, il était rentré<br />

b<strong>le</strong>sser, mais légèrement. Rien de grave. J’avais appris à <strong>le</strong> recoudre. J’ai eu beau<br />

fouil<strong>le</strong>r, je ne l’ai pas vu. Nul<strong>le</strong> part.<br />

- Il se serait volatilisé ? a fait Evita sur un ton qui m’a déplu.<br />

Willa a secoué négativement la tête. La boue sèche recouvrant ses cheveux<br />

s’est craquelée.<br />

- Non, a-t-el<strong>le</strong> dit. Je pense que Vince l’a tué. Vince Vaughan… Vous avez<br />

entendu par<strong>le</strong>r de lui ?<br />

Devant mon assentiment, el<strong>le</strong> a continué :<br />

- Il nous traquait depuis <strong>le</strong> début. C’est pour ça que Burt changeait tout <strong>le</strong> temps<br />

de campement. Vince rôdait autour de nous, tendait des pièges à Burton. On <strong>le</strong><br />

sentait là, tout près, sans jamais <strong>le</strong> voir. Il était très doué, lui aussi. Ils se haïssaient<br />

tous <strong>le</strong>s deux.<br />

- Vince était amoureux de vous ?<br />

Willa a éclaté d’un rire chargé d’amertume.<br />

- Vous plaisantez ! S’est-el<strong>le</strong> exclamée. Vince Vaughan voulait être <strong>le</strong> fils préféré<br />

de mon père. Il jalousait la place de Burt. C’était une affaire entre hommes, vous<br />

comprenez ? Un truc un peu troub<strong>le</strong>, entre vassaux et suzerains. Moi, je n’étais

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