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Lire le livre - Bibliothèque

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m’approchais, il a tressailli et posé la main sur son arme. Je me suis identifiée.<br />

Rassuré, il m’a expliqué que l’avocat de M. Tobbey lui avait demandé de s’occuper<br />

des chevaux en attendant la fin de l’enquête. Nous avons échangé des banalités à<br />

propos du meurtre avant de nous séparer. J’ai rejoint Evita qui broyait du noir.<br />

Nous n’avons pas prononcé un mot jusqu’à minuit. Au loin, <strong>le</strong>s coyotes hurlaient<br />

à la lune. Les détonations ont fini par s’espacer puis par se taire. Les robots étaient<br />

rentrés au garage pour se gaver d’é<strong>le</strong>ctricité. Le festin durerait jusqu’à l’aube.<br />

J’ai aspiré un grand bol d’air, ramassé mon sac, et dit :<br />

- C’est <strong>le</strong> moment. On y va.<br />

Evita m’a imitée. Nous sommes sorties du ranch pour entrer dans la forêt. J’ai eu<br />

l’impression de vivre l’un de ces romans gothiques dont Sarah Jane raffolait.<br />

J’avais l’intention de gagner <strong>le</strong> fortin, au sommet de la colline. Une fois <strong>le</strong> jour<br />

<strong>le</strong>vé, nous pourrions examiner <strong>le</strong>s a<strong>le</strong>ntours au moyen des jumel<strong>le</strong>s sans craindre<br />

d’être importunées par <strong>le</strong>s machines puisque la redoute constituait une zone « hors<br />

feu », selon l’étrange terminologie de Tobbey.<br />

Pendant <strong>le</strong>s deux cents premiers mètres, j’ai contracté <strong>le</strong>s omoplates, comme si<br />

un projecti<strong>le</strong> allait me frapper d’une seconde à l’autre. Par bonheur, <strong>le</strong>s androïdes<br />

étaient bien rentrés se coucher, et nous avons pu progresser sans mauvaise<br />

surprise. Il faisait froid. À mi-hauteur, nous avons contourné l’épave de l’hélicoptère<br />

abattu par <strong>le</strong>s drones. Une carcasse noircie, aux pa<strong>le</strong>s tordues, qui, sous la lumière<br />

lunaire, évoquait une énorme libellu<strong>le</strong> préhistorique embusquée aux abords du<br />

chemin.<br />

Le fortin était vide. J’étais étonnée de la rapidité avec laquel<strong>le</strong> la secte de<br />

Tobbey se désagrégeait, mais sans doute en va-t-il ainsi de tout rassemb<strong>le</strong>ment<br />

lorsque <strong>le</strong> <strong>le</strong>ader charismatique disparaît du jour au <strong>le</strong>ndemain.<br />

Evita sur mes talons, je me suis hissée sur <strong>le</strong> chemin de ronde et j’ai réglé <strong>le</strong>s<br />

jumel<strong>le</strong>s sur la fonction « nuit » qui permettait d’obtenir une image nette colorée en<br />

vert des environs. Les oculaires rivés aux orbites, j’ai fait un panoramique dans<br />

l’espoir de surprendre une trace de vie nocturne. Je n’ai aperçu qu’un coyote en<br />

maraude. Je me suis sentie dépassée par <strong>le</strong>s événements. Peut-être avions-nous<br />

fait une sottise en venant ici. Je me suis fait l’effet d’une mauvaise actrice égarée<br />

dans une série télé. J’ai eu conscience d’imiter maladroitement mon père.<br />

- Bon, a soupiré Evita, je propose qu’on ail<strong>le</strong> dormir, on avisera demain.<br />

Nous sommes redescendues dans <strong>le</strong> dortoir qui puait toujours la chaussette<br />

moisie pour essayer de prendre du repos en attendant <strong>le</strong> jour.<br />

Inuti<strong>le</strong> de préciser que j’ai mal dormi.<br />

Quand <strong>le</strong> ciel s’est éclairci, j’ai secoué Evita. Nous avons déjeuné d’une barre de<br />

céréa<strong>le</strong>s et d’un gobe<strong>le</strong>t de café froid. L’angoisse ne contribuait pas à nous ouvrir<br />

l’appétit. J’ai repris mon poste aux créneaux, pour scruter la forêt. Assez<br />

bizarrement, bien qu’armée de jumel<strong>le</strong>s hyper sophistiquées, j’avais l’impression que<br />

c’était moi qu’on épiait. Les robots, gorgés d’é<strong>le</strong>ctricité, patrouillaient en ronronnant.<br />

Dès que nous poserions <strong>le</strong> pied hors de l’enceinte du fortin, ils nous prendraient en<br />

chasse.<br />

J’ai supposé que Burton MacGraw, en bon éclaireur, avait choisi de <strong>le</strong>ur<br />

échapper en choisissant un territoire peu accessib<strong>le</strong>. Une ravine, par exemp<strong>le</strong>, où <strong>le</strong>s<br />

« <strong>le</strong>ssiveuses » ne pouvaient al<strong>le</strong>r sans courir <strong>le</strong> risque d’une chute définitive. J’ai<br />

donc réexaminé <strong>le</strong> paysage à la lueur de cette hypothèse. Je n’ai pas tardé à<br />

découvrir une fail<strong>le</strong>, profonde d’une dizaine de mètres, serpentant entre <strong>le</strong>s collines.

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