Le diable en gris - Free

de sang sur les carreaux vert pâle. L’eau lui cinglait le
visage et il était presque aveuglé.
Son dos fut tailladé en une série de coups portés en
diagonale qui traversèrent ses omoplates et ses côtes. Il
sentit la lame glisser sur ses os. Il agita ses mains
ensanglantées autour de lui pour essayer d’empêcher son
agresseur invisible de continuer à le frapper, mais il n’y
avait personne, et il réussit seulement à décorer la cabine
de douche d’une horrible parodie écarlate d’une peinture
gestuelle.
— Jean, chuchota-t-il.
Avec un léger «pop ! », la pointe d’une lame fendit sa
peau juste au-dessus de ses poils pubiens. Il y eut un
instant d’hésitation, puis la lame elle-même fut enfoncée
profondément à travers les couches de graisse souscutanée
et dans les muscles de son ventre. Il cria : «Nonnon-nonnon-non
! » parce que la lame était si froide et la
douleur au-delà de ce qu’il pouvait supporter. Il essaya de
se mettre debout, ses mains ensanglantées glissant
éperdument sur les carreaux, et il y parvint presque. Puis il
dérapa et tomba de nouveau à genoux. À ce moment-là, la
lame l’éventra et remonta jusqu’au sternum, où elle resta
bloquée pendant une seconde avant d’être dégagée.
Ses intestins se déversèrent de la cavité de son
estomac et s’amoncelèrent en un tas flasque dans la
cuvette qui débordait. Il les regarda – ils étaient jaunâtres,
luisants et striés de sang – et se demanda s’il devait
essayer de les ramasser et de les enfoncer dans son
estomac. Il avait vu un Marine tenter de le faire à Dong Ha.