Le diable en gris - Free

profondément inquiétante. Je suis un homme pieux, mais
être témoin d’une manifestation de magie païenne si
puissante ébranla ma foi jusqu’en son cœur.
» Le colonel Meldrum m’expliqua que, en temps de
guerre, les Africains de l’Ouest pouvaient demander à leurs
différents dieux de prendre possession d’eux, et que John
avait été temporairement possédé par un dieu redoutable
appelé Oggun, lequel incarne la guerre, la mort, et l’acte de
massacrer. Même ici en Amérique, m’apprit-il, nos
esclaves continuaient à vénérer Oggun, en disant à leurs
maîtres qu’ils vénéraient saint Pierre. C’était Oggun qui
l’avait rendu capable de tuer le moqueur uniquement au
moyen de la peur, parce que la pauvre créature s’était
retournée de l’intérieur vers l’extérieur plutôt que d’affronter
la terreur que Oggun lui inspirait.
» Je commençai alors à comprendre ce que le colonel
Meldrum me proposait. Si nous formions une brigade
d’une douzaine de volontaires, dit-il, son serviteur John
pouvait effectuer les invocations et les incantations
nécessaires pour que ces volontaires soient possédés par
certains des dieux de la santeria les plus puissants et les
plus belliqueux. Ils feraient de tels ravages parmi les
troupes de l’Union qui progressaient, et sèmeraient une
telle terreur primitive, que l’ennemi fuirait le champ de
bataille et n’aurait jamais le courage de revenir.
» Je demandai au colonel Meldrum de me laisser un peu
de temps pour réfléchir à sa proposition. Après tout, nous
étions des chrétiens, combattant pour une cause
chrétienne, et recourir aux croyances païennes de l’Afrique