Le diable en gris - Free

un sort santeria afin de me démontrer son efficacité. John
sortit des pierres des poches de son gilet, ainsi que des
colliers de perles noires et vertes, puis il se mit à
psalmodier d’une façon monotone et interminable. Je
commençais à m’impatienter lorsque, sous mes yeux, sa
peau sembla fondre, comme du beurre marron qui fond
dans une poêle chaude, et il devint un squelette, un homme
fait d’os, toujours habillé, toujours vivant, mais
complètement dépourvu de chair. Dire que j’étais horrifié et
terrifié serait bien en dessous de la vérité. Durant un
moment, je doutai de ma raison, et je pensai que le poids
et les conditions de la guerre m’avaient certainement fait
perdre l’esprit.
» Mais le squelettique John se leva de sa chaise et
s’approcha du moqueur que je gardais toujours avec moi
dans une cage pour me servir de mascotte. Il leva ses deux
mains osseuses et il était manifeste que le pauvre oiseau
était tout à fait affolé. Il poussait de petits cris, agitait ses
ailes, et se jetait éperdument contre les barreaux de sa
cage. John ne lui dit pas plus de deux mots, et cela fut suivi
instantanément d’un fort claquement, semblable à une balle
de fusil heurtant la roue d’une charrette. L’oiseau explosa
aussitôt en un amas de plumes, d’os et d’intestins
horribles, et tomba mort du perchoir de sa cage.
» Petit à petit, la chair de John commença à
réapparaître, telles des ombres s’amoncelant après le
coucher du soleil. Avant qu’une demi-minute se fût écoulée,
il était de nouveau entièrement revêtu de sa peau, et il me
sourit avec une impudence sournoise que je trouvai