Le diable en gris - Free

Le diable en gris - Free Le diable en gris - Free

25.06.2013 Views

coton marron foncé. Son pyjama était soigneusement plié sur l’oreiller. Tout le long du mur, à côté du lit, il y avait des photographies d’automobiles anciennes – Hudson Hornet, Chevrolet Bel Air, Packard Hawk – ainsi que des fanions de l’équipe de football de Richmond, les Kickers. Un jour, John avait punaisé un poster de Pamela Anderson portant un tee-shirt mouillé, mais sa mère avait regardé le poster avec une telle expression de désapprobation qu’il l’avait retiré. Il regarda par la fenêtre. De l’eau de pluie giclait d’une gouttière cassée et tombait dans la cour sombre en contrebas. Il y eut un éclair aveuglant et un autre coup de tonnerre assourdissant. Il eut l’impression que l’orage était juste au-dessus de sa tête. Il retourna dans la salle de bains et grimpa précautionneusement dans la baignoire. Indépendamment du fait qu’il avait fait à pied la plus grande partie du trajet jusqu’à la maison, il avait travaillé seize heures ce jour-là et il était exténué. Il s’allongea sur le dos dans la baignoire et contempla le plafond. Qu’est-ce que son père aurait pensé de lui s’il avait pu le voir maintenant ? Un chef de cuisine dans un restaurant familial, et non un capitaine dans les Marines. Un gâteau à la noix de pécan au lieu de Semper Fi, la devise des Marines. « Toujours prêt. » Il se savonna les cheveux et plongea sa tête sous l’eau pour les rincer, les yeux fermés et les doigts dans les oreilles. Lorsqu’il ressortit la tête pour respirer, il vit que la porte de la salle de bains était grande ouverte. Bizarre, pensa-t-il. Il ne laissait jamais la porte de la salle

de bains ouverte. Sa mère n’était pas le genre de femme à s’asseoir sur le siège des W.-C. et à lui parler pendant qu’il prenait un bain. En fait, elle semblait considérer que le sexe et la nudité n’étaient pas simplement embarrassants mais aussi tout à fait répugnants. Elle disait «ces choses-là » lorsqu’elle en parlait. John se demandait parfois comment il avait réussi à être conçu. — Maman ? appela-t-il. Mais il n’y eut pas de réponse. Elle prenait toujours deux seconal lorsqu’elle se couchait, et elle était sans doute profondément endormie à présent. Il se mit debout dans la baignoire et tendit la main vers la porte pour la fermer. À ce moment-là, il eut brusquement le sentiment que quelqu’un se tenait dans l’embrasure de la porte. Il ne voyait personne, mais il lui semblait entendre une respiration régulière, légèrement rauque. C’était difficile d’en être certain parce que l’eau du bain continuait à clapoter d’un côté et de l’autre, et que le tonnerre continuait à gronder au-dessus du toit de l’immeuble, mais il percevait une tension dans l’air, une proximité. Il abaissa sa main gauche pour couvrir son sexe. — Qui est là ? dit-il, s’attendant presque à ce que sa mère apparaisse. Pas de réponse. Mais le sentiment que quelqu’un se tenait près de lui était encore plus fort maintenant. Il tendit sa main vers la porte en la déplaçant d’un côté et de l’autre, comme s’il cherchait à tâtons dans le noir. Il y eut un énorme coup de tonnerre. Au même moment,

de bains ouverte. Sa mère n’était pas le g<strong>en</strong>re de femme à<br />

s’asseoir sur le siège des W.-C. et à lui parler p<strong>en</strong>dant qu’il<br />

pr<strong>en</strong>ait un bain. En fait, elle semblait considérer que le<br />

sexe et la nudité n’étai<strong>en</strong>t pas simplem<strong>en</strong>t embarrassants<br />

mais aussi tout à fait répugnants. Elle disait «ces choses-là<br />

» lorsqu’elle <strong>en</strong> parlait. John se demandait parfois<br />

comm<strong>en</strong>t il avait réussi à être conçu.<br />

— Maman ? appela-t-il.<br />

Mais il n’y eut pas de réponse. Elle pr<strong>en</strong>ait toujours deux<br />

seconal lorsqu’elle se couchait, et elle était sans doute<br />

profondém<strong>en</strong>t <strong>en</strong>dormie à prés<strong>en</strong>t.<br />

Il se mit debout dans la baignoire et t<strong>en</strong>dit la main vers la<br />

porte pour la fermer. À ce mom<strong>en</strong>t-là, il eut brusquem<strong>en</strong>t le<br />

s<strong>en</strong>tim<strong>en</strong>t que quelqu’un se t<strong>en</strong>ait dans l’embrasure de la<br />

porte. Il ne voyait personne, mais il lui semblait <strong>en</strong>t<strong>en</strong>dre<br />

une respiration régulière, légèrem<strong>en</strong>t rauque. C’était<br />

difficile d’<strong>en</strong> être certain parce que l’eau du bain continuait<br />

à clapoter d’un côté et de l’autre, et que le tonnerre<br />

continuait à gronder au-dessus du toit de l’immeuble, mais<br />

il percevait une t<strong>en</strong>sion dans l’air, une proximité.<br />

Il abaissa sa main gauche pour couvrir son sexe.<br />

— Qui est là ? dit-il, s’att<strong>en</strong>dant presque à ce que sa<br />

mère apparaisse.<br />

Pas de réponse. Mais le s<strong>en</strong>tim<strong>en</strong>t que quelqu’un se<br />

t<strong>en</strong>ait près de lui était <strong>en</strong>core plus fort maint<strong>en</strong>ant. Il t<strong>en</strong>dit<br />

sa main vers la porte <strong>en</strong> la déplaçant d’un côté et de<br />

l’autre, comme s’il cherchait à tâtons dans le noir.<br />

Il y eut un énorme coup de tonnerre. Au même mom<strong>en</strong>t,

Hooray! Your file is uploaded and ready to be published.

Saved successfully!

Ooh no, something went wrong!