25.06.2013 Views

AVEC DU SENS - Vallée de l'Ubaye

AVEC DU SENS - Vallée de l'Ubaye

AVEC DU SENS - Vallée de l'Ubaye

SHOW MORE
SHOW LESS

Create successful ePaper yourself

Turn your PDF publications into a flip-book with our unique Google optimized e-Paper software.

Une visite<br />

originale<br />

L’UbAYE<br />

VUE <strong>DU</strong> CIEL<br />

UBAYE<br />

VALLÉE<br />

Le magazine<br />

<strong>de</strong>s Alpes<br />

n˚<br />

du Sud<br />

09<br />

VITAMINÉ<br />

UN PAYS PLEIN DE PEP’S<br />

DES VACANCES<br />

<strong>AVEC</strong> <strong>DU</strong> <strong>SENS</strong><br />

GRATUIT<br />

SERVEZ-VOUS


ÉDITO<br />

EAUx<br />

sauvages<br />

Les eaux fraîches <strong>de</strong> l’Ubaye vous cueillent d’emblée : ici, l’été<br />

passe en mo<strong>de</strong> « ventilateur naturel ». Dans les contreforts <strong>de</strong><br />

nos montagnes en randonnée, dans nos airs purs en parapente,<br />

vous prendrez la mesure <strong>de</strong> ce que la nature, chez nous, peut<br />

offrir. Transportez-vous ailleurs. Pour un été ou un week-end,<br />

redécouvrez les plaisirs simples, les paysages préservés, les<br />

villages qui vivent au rythme <strong>de</strong>s saisons, les prés entretenus<br />

par la présence <strong>de</strong>s moutons, les produits faits maison par<br />

<strong>de</strong>s cultivateurs respectueux <strong>de</strong> l’environnement. Prenez le<br />

temps d’une pause gourman<strong>de</strong> à l’issue <strong>de</strong> l’ascension <strong>de</strong><br />

l’un <strong>de</strong> nos cols mythiques, à vélo. Prenez le temps <strong>de</strong> vivre.<br />

De vivre plus doux et plus fort à la fois, <strong>de</strong> vivre mieux. De<br />

vivre intensément en puisant dans la nature tout ce qu’elle a<br />

<strong>de</strong> plus sauvage. De plus fondamental, en somme.<br />

Michel Lanfranchi<br />

Prési<strong>de</strong>nt <strong>de</strong> la Communauté <strong>de</strong> communes <strong>Vallée</strong> <strong>de</strong> l’Ubaye<br />

Col du Longet, Lac Bleu, Lago bleu<br />

© Bertrand Bodin<br />

Rédaction : Myriam Cornu<br />

Agence free Presse<br />

Photos : Bertrand Bodin,<br />

Clau<strong>de</strong> Gouron, Camille<br />

Moirenc, Manu Molle, Éric Valli,<br />

Shutterstock, X droits réservés<br />

Conception/Réalisation :<br />

NEW DEAL - RC Grenoble<br />

Impression : Trulli<br />

Édité par : la direction<br />

Tourisme Communauté<br />

<strong>de</strong> communes - <strong>Vallée</strong> <strong>de</strong> l’Ubaye<br />

4, avenue <strong>de</strong>s 3 frères Arnaud<br />

- 04400 Barcelonnette -<br />

www.ubaye.com<br />

Document non contractuel<br />

Photo <strong>de</strong> couverture : Vallon du Laverq, lac et tourbière<br />

Les Eaux-Tortes © Bertrand Bodin<br />

p.25<br />

4 DES VACANCES <strong>AVEC</strong> <strong>DU</strong> <strong>SENS</strong><br />

Écotourisme en Mercantour<br />

9 MOUlIN D’ABRIèS<br />

De bois, <strong>de</strong> pierre et d’eaux fraîches<br />

14 PONTIS, VIllAgE SECRET<br />

Douceur divine<br />

17 PRO<strong>DU</strong>CTEURS DE PAYS<br />

Le safran dans la peau<br />

22 VITAMINÉ<br />

Un pays plein <strong>de</strong> peps<br />

25<br />

p.8 p.14<br />

UNE VISITE ORIgINAlE<br />

L’Ubaye vue du ciel<br />

p.31 p.36<br />

28 ÉCURIE UBAYE<br />

Quand les chevaux murmurent à nos oreilles<br />

31 ROChE-lA-CROIx<br />

Un château fort sous terre ?<br />

36 gUEUlE D’ATMOSPhèRE<br />

Une cabane un peu plus près du ciel<br />

SOMMAIRE


DES VACANCES<br />

<strong>de</strong>s Sagnes<br />

© Bertrand Bodin<br />

avec du sens Tour<br />

dES VAcAncES AVEc dU SEnS 5


Écotourisme<br />

en Mercantour<br />

Sous le label Mercantour<br />

Écotourisme<br />

(une association créée<br />

par les socioprofessionnels<br />

avec le soutien du Parc<br />

national), <strong>de</strong>s séjours<br />

et <strong>de</strong>s journées nous sont<br />

proposées sur le thème<br />

« Visages et paysages<br />

du Mercantour ». Manière<br />

<strong>de</strong> lever le voile sur<br />

<strong>de</strong>s coins secrets <strong>de</strong> l’Ubaye,<br />

<strong>de</strong> rencontrer les hommes<br />

et les femmes qui se cachent<br />

<strong>de</strong>rrière les lieux,<br />

<strong>de</strong> découvrir <strong>de</strong>s parcours<br />

<strong>de</strong> personnes, <strong>de</strong>s projets,<br />

<strong>de</strong>s chemins <strong>de</strong> vie…<br />

Passons dans les coulisses<br />

du montage <strong>de</strong> ces produits<br />

« bio » d’un autre genre.<br />

« Nous avons un patrimoine exceptionnel, il nous faut, à la fois, le<br />

préserver et le transmettre » explique Xavier Fribourg, chargé du<br />

développement local pour le compte du Parc national du Mercantour.<br />

Engagé dans la Charte européenne du tourisme durable, le Parc<br />

officie dans un cadre <strong>de</strong> travail reconnu à l’échelle <strong>de</strong> la communauté.<br />

« Le socle historique, l’une <strong>de</strong>s préoccupations majeures du Parc,<br />

<strong>de</strong>puis le départ, ce sont les sentiers. Ces <strong>de</strong>rniers temps, l’atten tion<br />

se portait tout spécialement sur leur accessibilité à tous les publics<br />

ou presque et la gestion <strong>de</strong>s “points<br />

chauds”, cette attention avait été<br />

encore renforcée sur les sentiers les<br />

plus fréquentés. Mais il ne faut pas<br />

oublier qu’en 2006, une loi a modifié<br />

et amplifié quelque peu le rôle du Parc<br />

qui s’implique dorénavant encore plus<br />

dans la vie <strong>de</strong> la vallée. » D’où une<br />

« Nous avons un patrimoine<br />

exceptionnel, il nous faut,<br />

à la fois, le préserver<br />

et le transmettre »<br />

réflexion sur le tourisme qui mène, tout naturellement, le Parc<br />

national à se pencher sur l’éco-tourisme. Le Parc s’appuie en partie<br />

sur la Communauté <strong>de</strong> communes <strong>de</strong> la <strong>Vallée</strong> <strong>de</strong> l’Ubaye, sur les<br />

hébergeurs, producteurs locaux et sur le réseau <strong>de</strong>s accompagnateurs<br />

en montagne, avec laquelle elle travaille en par tenariat <strong>de</strong>puis une<br />

vingtaine d’années. Certains accompagnateurs, « labellisés », sont<br />

<strong>de</strong> véritables ambassa<strong>de</strong>urs qui relayent les discours du Parc national<br />

auprès du grand public et sont formés et impliqués dans la vie <strong>de</strong> cet<br />

espace privilégié. « L’éco-tourisme en<br />

Mercantour, c’est d’abord un tourisme<br />

dans <strong>de</strong>s espaces protégés. On y<br />

garantit aux visiteurs <strong>de</strong> parcourir <strong>de</strong>s<br />

terrains relativement “vierges”. Il faut,<br />

en échange, qu’ils puissent découvrir<br />

les lieux et leur patrimoine <strong>de</strong> manière<br />

respectueuse. »<br />

dES VAcAncES AVEc dU SEnS 7<br />

« Nous partons à la découverte <strong>de</strong> l’exploitation agricole ovine d’Anne-Clau<strong>de</strong><br />

Rougon, constituée <strong>de</strong> 400 brebis et d’une ferme pédagogique<br />

où cohabitent, ânes, lapins, poules, oies, canards, faisans, chiens <strong>de</strong> berger,<br />

chèvres bouc, béliers et brebis. L’occasion d’échanger sur le fonctionnement<br />

d’un élevage traditionnel d’agneaux label rouge en montagne,<br />

sur la vie paysanne au fil <strong>de</strong>s saisons, le métier d’éleveur, entre traditions<br />

et mo<strong>de</strong>rnité puis nous nous régalons d’un goûter avec les pains<br />

tout chauds sortis du four et <strong>de</strong>s confitures et gâteaux maison. »


Chantal Bonaglia, accompagnatrice en montagne native <strong>de</strong> l’Ubaye,<br />

propose ce genre <strong>de</strong> séjours éco-touristiques avec sa société Rando<br />

Passion. Parmi les vacances qu’elle propose, « Paysages à croquer »,<br />

un savoureux cocktail <strong>de</strong> bala<strong>de</strong>s en montagne et <strong>de</strong> gastronomie,<br />

avec découverte <strong>de</strong> recettes ou <strong>de</strong> savoir-faire typiques. Un mix <strong>de</strong><br />

bon aloi, avec randonnée facile et culture ludique. « Le matin, nous<br />

cheminons dans nos paysages somptueux et l’après-midi, nous<br />

faisons du pain ou <strong>de</strong>s pâtes dans la ferme pédagogique d’Anne-<br />

Clau<strong>de</strong> Rougon. Le len<strong>de</strong>main, nous marchons du côté <strong>de</strong> Saint-Ours<br />

et enchaînons avec un après-midi délicieux chez Carole, pour visiter<br />

les plantations <strong>de</strong> safran les plus hautes d’Europe. Mettre la main à<br />

la pâte, toucher, cueillir, pétrir, goûter, sont <strong>de</strong>s plaisirs pour chacun.<br />

Côté hébergement, les lieux sélectionnés ont tous une “âme” :<br />

maisons aux histoires uniques ou gérants <strong>de</strong> gîtes qui savent prendre<br />

le temps d’échanger avec leurs hôtes. Les repas font partie <strong>de</strong><br />

l’expérience. Recettes ”locales”, produits du terroir et saveurs<br />

d’altitu<strong>de</strong> sont réunis pour faire <strong>de</strong>s soirées <strong>de</strong> vrais moments <strong>de</strong><br />

convivialité un peu hors du temps. »<br />

Mettre la main<br />

à la pâte,<br />

toucher, cueillir,<br />

pétrir, goûter,<br />

sont <strong>de</strong>s plaisirs<br />

pour chacun.<br />

« Partager, prendre du temps :<br />

proposer <strong>de</strong>s produits d’écotourisme<br />

signifie aussi miser<br />

sur la qualité <strong>de</strong>s relations »<br />

résume Xavier Fribourg du Parc<br />

national du Mercantour. « Les<br />

gens sont très curieux <strong>de</strong> tout ce qui tourne autour <strong>de</strong>s savoir-faire<br />

liés à la vie agricole, à la vie en montagne. C’est l’une <strong>de</strong> nos<br />

richesses et c’est cette richesse que nous voulons offrir à nos<br />

visiteurs. »<br />

Plus d’infos :<br />

Retrouvez les produits écotouristiques sur : www.mercantour.eu<br />

www.rando-passion.com • www.ubaye-aventure.com<br />

et tous les opérateurs écotourisme à : Barcelonnette Atelier Galerie<br />

d’Art C Gouron 52, rue Manuel<br />

MoULIN<br />

D’ABRIèS<br />

© Bertrand Bodin<br />

mOUlIn d’AbRIèS 9


DE boIS, DE PIErrE<br />

ET D’EAUx fRAIChES<br />

L’histoire dit que lorsque l’arrière-grand-père, Monsieur Laurent,<br />

s’est présenté au moulin dans l’intention <strong>de</strong> l’acheter, il n’est pas<br />

venu seul. C’est escorté <strong>de</strong> sa fille <strong>de</strong> 20 ans que le paysan du<br />

hameau <strong>de</strong>s Mats en a franchi la porte. Et les bras <strong>de</strong> l’ouvriermenuisier<br />

<strong>de</strong> l’époque lui en sont tombés, ainsi que le sac <strong>de</strong> farine<br />

qu’il portait.<br />

Nous sommes en 1895 et, six mois plus tard, voilà Marie-Antoinette<br />

mariée à Désiré Martin. Et le Moulin d’Abriès entré dans la famille<br />

<strong>de</strong> Robert. En plus <strong>de</strong> la minoterie (trois paires <strong>de</strong> meules fonctionnent<br />

à plein pour la farine), « l’usine Paulet » fait alors scierie et foulon à<br />

draps. On y fait aussi <strong>de</strong> l’huile <strong>de</strong> noix. En 1952, le Moulin passe aux<br />

mains <strong>de</strong> Jules Martin. Deux ans plus tard, Abriès, mo<strong>de</strong>rnisé par le<br />

papa <strong>de</strong> Robert, sort une tonne <strong>de</strong> farine par jour. « Mon père a été<br />

meunier toute sa vie, jusqu’à ce que l’activité s’arrête en 1972, faute<br />

<strong>de</strong> paysans » commente celui qui fait « tourner la boutique »<br />

actuellement, pour le plaisir. Par <strong>de</strong>voir <strong>de</strong> mémoire aussi. « Dans les<br />

années 60-70, avec l’exo<strong>de</strong> rural, tous les jeunes étaient partis : on<br />

ne trouvait plus assez <strong>de</strong> blé pour faire fonctionner les machines. »<br />

« Faire partager<br />

ce savoir,<br />

faire découvrir,<br />

c’est ma passion. »<br />

Robert Martin est meunier.<br />

Meunier <strong>de</strong>puis toujours, meunier<br />

par passion, meunier à la retraite.<br />

C’est par conviction qu’il a rouvert<br />

le moulin <strong>de</strong> son père, après un an<br />

<strong>de</strong> travaux. Pour pouvoir faire<br />

la démonstration d’un savoir-faire<br />

en perdition, celui qui consiste<br />

à « écraser la farine ».<br />

Une enfance passée<br />

au moulin transmet<br />

immanquablement le<br />

virus à Robert. « Je<br />

suis <strong>de</strong>venu meunier<br />

à 16 ans. J’ai travaillé avec mon papa jusqu’à 26 ans - j’allais livrer<br />

la farine un peu partout - avant <strong>de</strong> choisir un autre chemin, plus<br />

viable économiquement. » Le temps <strong>de</strong> la retraite venu, il revient au<br />

moulin et passe une année à le remettre en état. « Je voulais pouvoir<br />

faire visiter ces lieux qui comptent tant pour moi, dans le cadre <strong>de</strong> la<br />

valorisation d’un savoir-faire et <strong>de</strong> la découverte d’un produit<br />

naturel. Je suis né ici, toute ma vie est là. J’ai hérité <strong>de</strong> ce savoir-faire<br />

<strong>de</strong> ma famille. Et du goût du travail au moulin. Faire partager ce<br />

savoir, faire découvrir, c’est ma passion. Les gens me disent “Vous<br />

n’êtes pas un gui<strong>de</strong>”, ils ont raison. »<br />

Robert n’est pas un gui<strong>de</strong>, il est mieux que ça : c’est le meunier luimême<br />

! « Je transmets ma vie <strong>de</strong> meunier. Je reproduis les gestes<br />

ancestraux, les gestes qu’on faisait 300 ans en arrière. »<br />

mOUlIn d’AbRIèS 11<br />

Pour faire l’immaculée fleur <strong>de</strong> farine, on passe<br />

la poudre d’or blanc dans le blutoir, un tambour<br />

<strong>de</strong> soie fine. Les pompons blancs qui servent<br />

à nettoyer la farine le long <strong>de</strong> la soie<br />

sont comme tirés <strong>de</strong> la tenue d’une princesse<br />

d’un autre temps.<br />

Ramenez <strong>de</strong> la fleur <strong>de</strong> farine, pour un petit goût<br />

d’Ubaye dans vos pâtisseries.


© Bertrand Bodin<br />

Ces gestes, nul ne peut les mettre en œuvre s’il ne possè<strong>de</strong> un<br />

« contingent », une licence qui s’achète à l’état, un droit <strong>de</strong> moudre.<br />

À l’origine <strong>de</strong> la farine, il y a évi<strong>de</strong>mment le blé. Robert produit le<br />

sien sur la base d’un blé qui affiche 60 ans d’âge, retrouvé au grenier.<br />

« Il se reproduit tranquillement, je n’en achète pas. Il n’y a pas<br />

beaucoup <strong>de</strong> rentabilité, c’est sûr ! Pour boucler la boucle, je fais<br />

aussi mon propre levain et du pain. Je blute, c’est-à-dire je sépare le<br />

son <strong>de</strong> la farine, à 50 %. La petite particule <strong>de</strong> blé contre la peau, moi<br />

je la laisse, on laisse plus <strong>de</strong> déchets, c’est certain, mais aussi une<br />

meilleure qualité. Aujourd’hui dans les usines, on est à 80 %. Les<br />

déchets allaient à l’époque aux cochons, aux lapins, aux poules. On<br />

<strong>de</strong>vait nourrir tout le mon<strong>de</strong> : la famille plus les bêtes. Le déchet, <strong>de</strong><br />

20 % aujourd’hui, on ne peut plus l’utiliser pour le bétail. » Soisson<br />

- blé barbu, tendre -, florence aurore – blé sans barbe, <strong>de</strong>mi-dur - et<br />

seigle, la bonne recette mixe les trois, selon <strong>de</strong>s pourcentages qui<br />

différent. « Notre mélange savant à nous, c’est le grand-père qui l’a<br />

écrit. » Auparavant, on laissait le blé mûrir <strong>de</strong>ux ou trois mois dans<br />

les coffres en bois <strong>de</strong> l’étage, sans le toucher. Aujourd’hui, on laisse<br />

moins <strong>de</strong> temps au blé… comme à toutes choses. « Pourtant, il faut<br />

que la farine ait ce que nous appelons du « plancher », que le blé ait<br />

été conservé dans le bois, que la farine ne soit pas livrée tout <strong>de</strong><br />

suite. Quand mon blé pousse, il faut que je le trie au moulin, parce<br />

que je n’utilise pas <strong>de</strong> désherbant, il se trouve donc mélangé à <strong>de</strong>s<br />

graines <strong>de</strong> coquelicot, d’ail, <strong>de</strong> chénopo<strong>de</strong>, <strong>de</strong> chardons… » La<br />

vantarelle, sorte <strong>de</strong> gros van, gratte la première petite pellicule du<br />

grain <strong>de</strong> blé, en le projetant contre une grille, une grosse râpe.<br />

« La vraie farine<br />

à l’ancienne<br />

a le goût <strong>de</strong> bois<br />

et <strong>de</strong> pierre. »<br />

Plus d’infos :<br />

Moulin d’Abriès :<br />

http://robert.martin9.free.fr • Tél. 04 92 81 11 42<br />

mOUlIn d’AbRIèS 13<br />

« La qualité vient<br />

du grain <strong>de</strong> blé<br />

mais aussi <strong>de</strong> la<br />

façon dont on<br />

écrase la farine » Les meules en silex, qui proviennent <strong>de</strong> cailloux<br />

récupérés à la Barge, en Haute-Ubaye, ont été fabriquées ici il y a<br />

trois siècles. Le tailleur assemblait les cailloux (une seule meule<br />

trouvée ici est d’un seul tenant : le bloc a été transporté et taillé sur<br />

place), puis le maréchal-ferrant la cerclait. Le meunier s’occupait<br />

ensuite personnellement <strong>de</strong> son surfaçage : son secret <strong>de</strong> farine<br />

tenait là, dans sa façon <strong>de</strong> ciseler la meule. La vraie farine à<br />

l’ancienne a le goût <strong>de</strong> bois et <strong>de</strong> pierre. De fraîcheur aussi, celle <strong>de</strong><br />

l’eau bien crue contre la pierre (la farine n’est pas bonne si elle<br />

chauffe). « Aujourd’hui, on utilise beaucoup d’inox, <strong>de</strong> plastique, le<br />

goût est altéré » déplore le meunier d’Abriès. Et s’il utilise aujourd’hui<br />

<strong>de</strong>s go<strong>de</strong>ts en métal <strong>de</strong> sa fabrication, il laisse pendus à l’entrée les<br />

antiques go<strong>de</strong>ts en couenne (peau <strong>de</strong> cochon). Hommage à ce temps<br />

révolu que ce « <strong>de</strong>rnier <strong>de</strong>s Mohicans » s’attache à faire vivre, au<br />

moins dans les souvenirs.


PONTIS,<br />

© Bertrand Bodin<br />

village secret<br />

On quitte la nationale qui bor<strong>de</strong> le lac d’azur,<br />

scintillant <strong>de</strong> soleil doré et généreux, et on tourne<br />

presque perpendiculairement pour abor<strong>de</strong>r la montée<br />

menant à Pontis. La route serpente sous les montagnes,<br />

traverse la hêtraie où l’astre solaire perce le sous-bois<br />

<strong>de</strong> magie et <strong>de</strong> trouées illuminées.<br />

La route arrive enfin sur une place <strong>de</strong> village<br />

où il fait bon s’arrêter, quelques instants, sur un banc.<br />

POnTIS, VIllAGE SEcRET 15<br />

Douceur DE VIVrE<br />

Nous sommes au carrefour <strong>de</strong> toutes les montagnes,<br />

<strong>de</strong> tous les panoramas les plus beaux… »


Pontis, un nom chantant pour une toute petite commune trait d’union<br />

entre Provence et Dauphiné, une commune dont la dénivelée part <strong>de</strong><br />

782, aux rives du lac <strong>de</strong> Serre-Ponçon, à 2 386 mètres (le sommet du<br />

Morgon). Ici, les flores méditerranéenne et alpine voisinent : lavan<strong>de</strong>s<br />

et carlines, sumacs et mélèzes, les sentiers alentour fourmillent <strong>de</strong><br />

diversité. Mais, réputée pour son haut niveau d’alphabétisation et<br />

<strong>de</strong> culture, c’est l’Ubaye d’antan qui est mise en avant et à l’honneur<br />

sur la place du village. Un petit musée sur le thème <strong>de</strong> l’école<br />

rappelle la présence <strong>de</strong> trois établissements scolaires sur la commune<br />

dans les années 50. Réminiscences <strong>de</strong> ce passé studieux, <strong>de</strong> petits<br />

bancs <strong>de</strong> bois et <strong>de</strong>s ardoises évoquent, dans une remarquable salle<br />

voûtée, l’écriture à la plume et les heures <strong>de</strong> discipline et <strong>de</strong> morale.<br />

Monsieur Louison, ancien maire du village, est fier <strong>de</strong> ce musée <strong>de</strong><br />

« l’instruction publique en montagne » : « Elle a joué un rôle primordial<br />

pour la vallée. » Il peut l’être aussi <strong>de</strong> la belle église qui jouxte le petit<br />

musée : sa faça<strong>de</strong> arbore une esquisse du Morgon tout proche et <strong>de</strong><br />

son cadran solaire qui nous appelle à la fraternité avec sa <strong>de</strong>vise :<br />

« Les sourires donnés nous reviennent toujours ». Une idée <strong>de</strong> celui<br />

qui fut maire pendant près <strong>de</strong> trois décennies : « Nous, êtres humains,<br />

ne représentons rien dans l’immensité et la durée <strong>de</strong> l’univers. Se<br />

sourire, s’ai<strong>de</strong>r, s’entrai<strong>de</strong>r, nous permet <strong>de</strong> servir à quelque chose. »<br />

Bien à l’honneur aussi sur la place du village, le monument aux<br />

morts. Point <strong>de</strong> marbre ici. Un simple mais imposant bloc naturel en<br />

guise <strong>de</strong> montagne salue la mémoire d’Étienne, Maurice, René, Émile,<br />

Jules, Désiré et les autres. Toujours, autour <strong>de</strong> la place centrale, <strong>de</strong>s<br />

jeux d’enfants, <strong>de</strong>s machines agricoles, la mairie. Toute la vie du<br />

village résumée ici, en somme. Une atmosphère paisible, une douceur<br />

<strong>de</strong> vivre qu’on savoure assis sur un banc, les montagnes d’un côté,<br />

le lac <strong>de</strong> l’autre. Depuis cette année, la commune n’a plus qu’un co<strong>de</strong><br />

postal (elle en avait <strong>de</strong>ux jusqu’alors). « Avant que le barrage n’existe,<br />

et avant que le village Ubaye ne soit démoli, ce village détruit<br />

touchait Pontis. Nous sommes au carrefour <strong>de</strong> toutes les montagnes,<br />

<strong>de</strong> tous les panoramas les plus beaux : quand on est sur la Coquille,<br />

on domine la vallée <strong>de</strong> la Durance comme celle <strong>de</strong> l’Ubaye. » Mais ce<br />

charmant coin secret ubayen ne se limite pas à sa jolie place centrale,<br />

si agréable qu’elle soit : le village se compose <strong>de</strong> multiples hameaux<br />

qu’on peut aller découvrir à pied. On peut aussi s’aventurer sur le<br />

chemin <strong>de</strong> la fontaine <strong>de</strong>s Miracles, qui part du hameau <strong>de</strong>s Sartres :<br />

« Mais attention, on dit que les jeunes amoureux partaient s’y<br />

promener à <strong>de</strong>ux et revenaient… à trois » plaisante Monsieur Louison,<br />

passionné par son village qui sait séduire ses visiteurs <strong>de</strong> passage<br />

aussi fort que ses habitants <strong>de</strong> longue date.<br />

Producteurs<br />

DE PAYS<br />

© Bertrand Bodin<br />

PROdUcTEURS dE PAyS 17


Au Moyen-Âge, le safran<br />

était cultivé partout,<br />

pour colorer le tissu.<br />

Plus personne aujourd’hui<br />

n’a le courage <strong>de</strong> se frotter<br />

à ce long, très long,<br />

et minutieux travail.<br />

Personne sauf Carole.<br />

À Meyronnes, elle s’attelle<br />

à ce travail d’autant plus ru<strong>de</strong><br />

que la récolte se fait parfois<br />

sous la neige.<br />

Par-<strong>de</strong>ssus le marché,<br />

son safran d’altitu<strong>de</strong>,<br />

qui emmagasine juste assez<br />

<strong>de</strong> chaleur, ne se développe<br />

pas énormément : il lui faut<br />

donc encore plus <strong>de</strong> fleurs<br />

que les autres safraniers<br />

pour concocter le précieux<br />

trésor. Qu’à cela ne tienne,<br />

Carole Prost vit sa passion<br />

du safran avec un bonheur<br />

communicatif.<br />

Rencontre.<br />

lE SAfRAN dans la peau<br />

PROdUcTEURS dE PAyS 19


Goûters servis avec petites cuillers<br />

en peuplier et verres en amidon<br />

<strong>de</strong> maïs, l’amour <strong>de</strong>s bonnes<br />

et belles choses et le respect<br />

<strong>de</strong> l’environnement sont, chez Carole,<br />

une secon<strong>de</strong> nature.<br />

Du cœur et du cerveau : elle a les idées qui fusent, Carole, et elle y<br />

croit, s’y accroche, réussissant là où on la voyait perdre : pensez donc,<br />

une jolie fille maquillée qui se lance dans l’agriculture ! Sans ai<strong>de</strong><br />

motorisée ni produits, la belle brune poursuit son petit bonhomme<br />

<strong>de</strong> chemin tranquillement, sans bruit et sans fureur, tout en douceur,<br />

exquise et délicate comme le safran.<br />

C’est en été qu’elle nous reçoit volontiers pour les visites. Mais la<br />

culture est décalée : la plante dort à cette pério<strong>de</strong>, la safranière se<br />

met au repos. La visite se fait donc sur photos mais le goûter, la<br />

boutique et le cadre valent le coup à eux seuls. Pour son troisième<br />

été, Carole, qui cultive certainement la plus haute safranière <strong>de</strong><br />

France, plante 10 000 bulbes sur une parcelle qui culmine à 1 600 m<br />

d’altitu<strong>de</strong>. Elle y travaille toute l’année. Érigeant une clôture contre<br />

les sangliers et les chevreuils venus débusquer les oignons enfouis à<br />

20 cm <strong>de</strong> profon<strong>de</strong>ur. Installant <strong>de</strong>s grillages sous la terre, contre les<br />

campagnols convoitant eux aussi son trésor. Plantant vers la fin<br />

juillet, les pluies <strong>de</strong> l’automne venant réveiller la fleur. Ramassant en<br />

octobre-novembre, parfois sous la neige. Se préparant pour le temps<br />

<strong>de</strong> l’émondage, l’extraction du pistil sur la fleur. Séchant ces pistils à<br />

basse température. « Deux mois <strong>de</strong> patience seront nécessaires au<br />

safran pour libérer tous ses arômes, il sera prêt pour la Noël. » Ici,<br />

pas <strong>de</strong> tracteur, pas <strong>de</strong> désherbant. Seulement un travail d’une<br />

infinie patience.<br />

Et d’une infinie délicatesse. Il faut plus <strong>de</strong> 220 fleurs <strong>de</strong> crocus<br />

pour faire 1 gramme <strong>de</strong> safran. Ailleurs 180 suffisent, mais l’altitu<strong>de</strong><br />

complique encore un peu les choses. C’est que Carole récolte ses<br />

fleurs toutes petites, <strong>de</strong> peur que le pistil ne gèle. Pério<strong>de</strong> la plus<br />

intense <strong>de</strong> l’année pour Carole et sa famille, la récolte s’étale sur 5 à<br />

6 semaines pour l’ensemble <strong>de</strong>s fleurs. Tout doit être fait dans une<br />

journée : la cueillette, l’émondage, le séchage, sinon tout est perdu.<br />

Mais le safran n’est pas la seule tasse <strong>de</strong> thé <strong>de</strong> la belle : églantine,<br />

sureau, reine-<strong>de</strong>s-prés, pissenlit, bourgeon <strong>de</strong> sapin, verveine,<br />

prennent vie sous forme <strong>de</strong> compotées, sablés, meringues, sorbets,<br />

sirops, pétillants ou confitures. Autant <strong>de</strong> propositions gourman<strong>de</strong>s<br />

pour <strong>de</strong>s produits qu’elle maîtrise <strong>de</strong> A à Z, du packaging à l’étiquette,<br />

en passant par la cueillette, la transformation. « La seule limite, c’est<br />

que je ne vends que mes cultures transformées, alors <strong>de</strong>s poires oui,<br />

mais pas d’abricots, ni <strong>de</strong> melon. »<br />

Confiture rubis (gelée <strong>de</strong> sureau et fraises<br />

confites), meringues au safran avec les œufs<br />

<strong>de</strong> ses poules ou potimarron confit à la<br />

vanille, les pupilles se réjouissent au moins<br />

autant que les papilles. Tout est beau et<br />

Carole<br />

et le safran,<br />

une histoire<br />

« à la vie,<br />

à l’amour ».<br />

alléchant dans sa boutique-boudoir. « Le safran est une épice très<br />

subtile, il faut le proposer dans <strong>de</strong>s choses très douces, comme une<br />

compote <strong>de</strong> pommes, pour en révéler toute la saveur. » Une douceur<br />

qu’on retrouve dans les manières <strong>de</strong> la propriétaire <strong>de</strong> la safranière<br />

chez qui passer du temps signifie forcément un moment <strong>de</strong> grâce.<br />

À la faveur d’un geste gracieux dans ses cheveux, on découvre un<br />

tatouage sur sa peau laiteuse. Il représente la gardienne du safran<br />

dont les ailes sont serties <strong>de</strong>s initiales <strong>de</strong> ses enfants, Salomé, Ja<strong>de</strong><br />

et Robin. Carole et le safran, une histoire « à la vie, à l’amour ».<br />

Visite-goûter tous les jours 7 jours sur 7 en juillet et août,<br />

<strong>de</strong> 14 h à 19 h.<br />

Plus d’infos : www.safran-ubaye.com<br />

Tél. 06 49 95 00 75 / 06 49 95 00 75 • carole.prost753@orange.fr<br />

Membre du réseau écotourisme<br />

PROdUcTEURS dE PAyS 21<br />

Hébergement<br />

INSOlITE<br />

On peut passer la semaine<br />

dans la yourte qu’elle a<br />

installée sur son domaine.<br />

Toilettes et douche la<br />

complètent, à côté <strong>de</strong> la<br />

boutique pour les amateurs<br />

<strong>de</strong> confort. « J’ai envie que<br />

les gens repartent avec une<br />

expérience en tête, <strong>de</strong>s<br />

sensations. Qu’ils utilisent la<br />

douche solaire avec toute la<br />

montagne <strong>de</strong>vant leurs yeux.<br />

Qu’il puisse couper <strong>de</strong> leur<br />

vie habituelle » sourit Carole.


VITAmInÉ 23<br />

Vitaminé<br />

Un<br />

pays plein <strong>de</strong> pep’s<br />

Une toute petite boule rouge laquée. Un concentré <strong>de</strong> vitamine C. Elles poussent dans la nature à l’état<br />

sauvage en Ubaye, les frêles baies d’argousier qui n’ont pas leur pareille pour renforcer nos défenses<br />

immunitaires. C’est David Viveau, au Villard, qui se<br />

charge <strong>de</strong> les cultiver et d’en extraire jus, sirops et<br />

confitures.<br />

En Ubaye, personne avant lui ne faisait <strong>de</strong> l’argousier. David Viveau<br />

vend ses produits à la Maison <strong>de</strong> Pays à Jausiers. Des jus chargés <strong>de</strong><br />

bienfaits, <strong>de</strong>s confitures pleines <strong>de</strong> vitalité. L’argousier semble être le<br />

fruit connu le plus chargé en vitamine C. Sur les 6 ou 7 producteurs<br />

que compte la France, lui, à 1 500 m d’altitu<strong>de</strong>, produit un peu moins<br />

en quantité mais <strong>de</strong>s baies <strong>de</strong> gran<strong>de</strong> qualité, estampillée agriculture<br />

biologique. « Le label AB, c’était forcément ma ligne <strong>de</strong> conduite. Je<br />

ne désherbe pas à coups <strong>de</strong> produits chimiques, je fais tout à la<br />

main. L’argousier n’aime pas la concurrence, il faut donc s’activer au<br />

printemps et en début d’été. »<br />

S’activer, David Viveau ne fait que ça mais, à 26 ans, il est encore un<br />

débutant : « Pour l’instant, je me lance. Il y a 5 ans, j’ai commencé à<br />

planter. L’argousier met entre 4 et 6 ans à entrer en production,<br />

comme tout fruitier. Les premières années, j’ai attendu, j’ai arrosé<br />

puis, l’an <strong>de</strong>rnier, j’ai commencé à récolter. » Les débuts furent un<br />

peu aléatoires : <strong>de</strong>s pieds qui mouraient, <strong>de</strong>s campagnols qui<br />

mangeaient les racines, <strong>de</strong>s plants qui, commandés en Allemagne,<br />

arrivaient tout secs. « Des erreurs <strong>de</strong> jeunesse… Je dois encore<br />

apprendre » résume l’agriculteur en herbe.<br />

L’argousier semble être<br />

le fruit connu le plus chargé<br />

en vitamine C.<br />

Avant <strong>de</strong> s’installer, David a fait <strong>de</strong>s stages à la Chambre d’agriculture<br />

mais aussi à Berlin : en Allemagne, où il est très connu, l’argousier<br />

pousse à l’état naturel. La vogue <strong>de</strong> santé, <strong>de</strong> bien-être naturel y est<br />

particulièrement active et le succès <strong>de</strong> l’argousier perpétuel. David,<br />

lui, possè<strong>de</strong> 2 000 arbustes sur un hectare et <strong>de</strong>mi, une parcelle <strong>de</strong><br />

famille sur le Villard. Il a effectivement hérité son instinct agricole <strong>de</strong><br />

la famille <strong>de</strong> sa maman. « J’aime travailler en plein air, au rythme <strong>de</strong><br />

la nature. Le plus dur, ça a été l’incertitu<strong>de</strong>, tous ces plants qui<br />

dégénéraient, quel stress ! Mais je ne me suis jamais découragé<br />

parce que je savais qu’ici aussi, en Ubaye, il y en avait plein dans la<br />

nature. Je me disais qu’il n’y avait pas <strong>de</strong> raison, que le terrain est<br />

propice. À vrai dire, <strong>de</strong> toute façon, l’argousier n’est pas exigeant :<br />

les pieds dans le sable, au bord <strong>de</strong> l’eau, suffisent à son bonheur tel<br />

un vacancier en bord <strong>de</strong> mer ! » Ce sont d’ailleurs uniquement les<br />

plants femelles qu’il achète en pépinière, les plants mâles (qui<br />

servent à polliniser les premiers) étant tirés <strong>de</strong> la nature.


La récolte court sur un mois. Elle a lieu à partir <strong>de</strong> la mi-septembre, en<br />

fonction <strong>de</strong>s saisons : « On sait que c’est mûr en goûtant les baies ».<br />

Les toutes petites billes orange, grosses comme une groseille, font<br />

l’objet <strong>de</strong> toute l’attention <strong>de</strong> David. « Il faut tailler en même temps<br />

qu’on cueille, le fruit poussant sur le bois <strong>de</strong> <strong>de</strong>ux ans. La récolte est<br />

compliquée, il ne faut pas tout couper sinon on n’a que du bois l’année<br />

suivante. » Le jeune agriculteur produit ensuite ce jus <strong>de</strong> caractère,<br />

amer. Une amertume à laquelle on se fait vite : « Moi, je mange les billes<br />

telles quelles ». Pour le sirop, 30 % <strong>de</strong> sucre viennent couper l’amertume,<br />

avec les mêmes bénéfices pour notre santé. Ses 500 à 600 bouteilles <strong>de</strong><br />

200 ml sont <strong>de</strong> précieux concentrés <strong>de</strong> vitamine C, A et E, bétacarotène<br />

et aci<strong>de</strong>s aminés. L’hiver arrive qui recouvre ses plants <strong>de</strong> son manteau<br />

protecteur : « Sous la neige, ils ne craignent rien ». David en profite pour<br />

enfiler sa panoplie <strong>de</strong> moniteur <strong>de</strong> ski, sa <strong>de</strong>uxième activité, et file<br />

révéler les secrets <strong>de</strong> la glisse à ses clients <strong>de</strong> l’école <strong>de</strong> ski <strong>de</strong> Saint-<br />

Anne-la-Condamine. Une autre façon <strong>de</strong> rester en excellente forme !<br />

Plus d’infos : Producteur d’argousier Tél. 06 81 61 83 71<br />

Une visite<br />

ORIgINAlE<br />

© Bertrand Bodin<br />

UnE VISITE ORIGInAlE 25


l’UBAYE<br />

vue<br />

du ciel<br />

© Camille Moirenc<br />

Bienvenue dans ce petit pays<br />

qu’on peut pédaler,<br />

courir mais aussi voler :<br />

bienvenue dans les airs<br />

<strong>de</strong> l’Ubaye pour une vue<br />

à 360°. Admirez le lac<br />

<strong>de</strong> Serre-Ponçon, étincelant,<br />

<strong>de</strong>puis les airs.<br />

Survolez les petites maisons<br />

<strong>de</strong>s villages vivants <strong>de</strong> la vallée.<br />

Découvrez les montagnes<br />

comme vous ne les avez<br />

jamais vues.<br />

Depuis le haut !<br />

Vols avec vue. La <strong>Vallée</strong> <strong>de</strong> l’Ubaye propose <strong>de</strong> manière régulière <strong>de</strong>s<br />

conditions anticycloniques, conditions idéales pour les baptêmes <strong>de</strong><br />

l’air en parapente. « L’anticyclone <strong>de</strong>s Açores, un peu <strong>de</strong> flux du Nord,<br />

un peu <strong>de</strong> Mistral, et voilà un ciel parfait pour voler. Nous sommes<br />

un pays <strong>de</strong> montagne mais qui dispose d’une météo <strong>de</strong> Côte d’Azur »<br />

sourit Pierre Turrel, pilote <strong>de</strong> parapente émérite. Pour sa pratique, ce<br />

mélange <strong>de</strong> « Sud » pour les conditions atmosphériques et <strong>de</strong> relief<br />

<strong>de</strong> l’Ubaye fait <strong>de</strong>s merveilles. La vallée affiche un dénivelé conséquent.<br />

1 135 m pour Barcelonnette et 2 600 à 2 800 m pour les sommets<br />

environnants, voilà <strong>de</strong> quoi s’offrir <strong>de</strong> belles virées. « On fait <strong>de</strong>s vols<br />

panoramiques avec une profon<strong>de</strong>ur, une perspective extraordinaires.<br />

La qualité visuelle est époustouflante, pour le passager encore plus<br />

que pour le pilote lui-même. C’est très contemplatif comme pratique. »<br />

Les sensations sont au ren<strong>de</strong>z-vous, mais on plonge surtout dans un<br />

calme olympien, dans le mon<strong>de</strong> <strong>de</strong> l’ailleurs. « Là-haut, on a le temps<br />

d’apprécier la bala<strong>de</strong> qu’on fait en montagne. On adopte un point <strong>de</strong><br />

vue différent, l’échelle change. Et puis contrairement à d’autres<br />

activités aériennes où on est gêné par un cockpit, en parapente, on<br />

peut voir dans tous les sens. »<br />

Le contact direct avec l’air en fait une activité d’une gran<strong>de</strong> sensualité :<br />

comme en moto, on sent les changements <strong>de</strong> température, on hume <strong>de</strong>s<br />

atmosphères différentes. « Dans le cadre d’un baptême en parapente,<br />

on n’est pas sur <strong>de</strong> la performance, du dépassement <strong>de</strong> soi, on est<br />

assis et on profite. » En visitant la vallée en l’air, on le fait dans un<br />

confort maximal, sans pesanteur. Selon les conditions thermiques, les<br />

UnE VISITE ORIGInAlE 27<br />

vols en bi-place font environ 1 000 m <strong>de</strong> dénivelée et une vingtaine <strong>de</strong><br />

minutes. Les baptêmes représentent un moment d’exception accessible<br />

au plus grand nombre : les contraintes physiques se limitent à une<br />

foulée <strong>de</strong> quelques pas qu’il faut pouvoir effectuer pour décoller.<br />

« Même les anciens peuvent nous rejoindre, pas besoin <strong>de</strong> certificat<br />

médical pour voler. Les enfants sont notre meilleur public, ils adorent,<br />

ils profitent pleinement ! Certains clients avouent un peu d’appréhension<br />

avant le vol mais tous disent ensuite que, s’ils avaient su, ils ne<br />

se seraient pas fait <strong>de</strong> souci. » Si aucune compétence n’est requise<br />

pour voler en bi-place dans le cadre d’un baptême, il n’en va pas<br />

évi<strong>de</strong>mment pas <strong>de</strong> même quand on pilote soi-même : « Ce qui me<br />

plaît personnellement, c’est <strong>de</strong> construire mon vol, <strong>de</strong> voir le parcours<br />

que je vais pouvoir réaliser » explique Pierre Turrel. « Pour les pilotes<br />

plus aguerris qui volent seuls, le plus dur dans la vallée, c’est l’accès<br />

aux décollages. Toujours un peu sauvages, ils se méritent. De toute<br />

façon, le parapente est un sport très fin, un sport <strong>de</strong> tête, pour ainsi<br />

dire ». Un sport qu’on pratique la tête dans les nuages mais les pieds<br />

bien sur terre. « La gestion du risque est une préoccupation majeure <strong>de</strong>s<br />

pilotes, d’où la nécessité <strong>de</strong> faire appel aux écoles pour jouer la carte <strong>de</strong><br />

la sécurité : les atterrissages, chez nous, sont parfois un peu rock’n’roll,<br />

il ne faut pas hésiter à venir chercher conseils auprès <strong>de</strong>s professionnels. »<br />

Plus d’infos :<br />

Ubaye Parapente (Mathieu <strong>de</strong> Quillacq) : www.ubaye-parapente.com<br />

Air Pra Loup (Pierre Turrel) : www.airpraloup.com<br />

Incondition’aile Parapente (Pierre Henri, Benoît Lizon) Tél. 06 07 18 80 53


ÉCURIE<br />

Ubaye<br />

© Manu Molle<br />

Déboule une formule<br />

Ford noire et fuchsia qui<br />

s’arrête au stand. Une<br />

fois la bête mise sur<br />

cales par Daniel et<br />

Philippe, le pilote peut<br />

ôter son casque, lui aussi<br />

noir et fuchsia. Le pilote<br />

ou plutôt « la » puisqu’à<br />

la tête <strong>de</strong> la voiture 17,<br />

on trouve Luce, le cheveu<br />

long et l’œil bleu-vert<br />

clair maquillé avec soin.<br />

« Var, Drôme, Hautes-<br />

Alpes, Bouches-du-Rhône<br />

et Alpes-<strong>de</strong>-Haute-Provence, nous sillonnons le Sud <strong>de</strong> la France au<br />

gré <strong>de</strong>s courses <strong>de</strong> côte » sourit la douce et déterminée pilote <strong>de</strong><br />

Draguignan. « Cette course <strong>de</strong> Barcelonnette Le Sauze nous plaît<br />

énormément parce qu’elle se déroule sur une belle route, facile à<br />

retenir. Sur ce tracé peu dangereux, je me régale. Honnêtement, c’est<br />

l’une <strong>de</strong>s plus belles <strong>de</strong> la région, sans conteste ! ». Luce est coupée<br />

par l’arrivée <strong>de</strong> son frère auprès <strong>de</strong> son mari mécano. Après la « miniformule<br />

1 » <strong>de</strong> la première, nous faisons connaissance avec la voiture<br />

du second. L’Opel Speedster arbore le numéro 31 et, surtout, une<br />

sérigraphie droit sortie du <strong>de</strong>ssin animé Cars : il faut dire que Francis<br />

a quatre fils… Oh mais voilà que Flash MacQueen perd sa porte !<br />

Les aléas s’enchaînent sur ce genre <strong>de</strong> journées : ainsi la formule<br />

Ford peine-t-elle à démarrer. « La faute à l’altitu<strong>de</strong> ! La son<strong>de</strong><br />

apprécie moyennement » plaisante Luce qui adore sa monture,<br />

« c’est une bonne auto qui ne nous revient pas trop cher. » Mais fini<br />

la plaisanterie, la fratrie se doit d’approcher le départ à présent :<br />

laissons les pilotes se concentrer.<br />

ÉcURIE UbAyE 29<br />

uand les chevaux<br />

MURMURENT à NOS OREIllES<br />

Une petite centaine <strong>de</strong> bijoux roulants à admirer, à écouter aussi. Des pilotes sur-motivés qui, pour certains, se<br />

donnent ren<strong>de</strong>z-vous chaque été <strong>de</strong>puis plus <strong>de</strong> vingt ans. Comptant pour la coupe <strong>de</strong> France <strong>de</strong> la<br />

montagne, la course <strong>de</strong> côte Barcelonnette Le Sauze propose un tracé sécurisant, aux abords peu<br />

impressionnants. Rencontre avec quelques-uns <strong>de</strong>s participants <strong>de</strong> cette 31e édition.<br />

Cherchant un autre cobaye à questionner sur cette passion <strong>de</strong>s<br />

courses <strong>de</strong> côte, nous rencontrons « Lucky », chargé <strong>de</strong> l’assistance<br />

<strong>de</strong> la voiture 205 avec son antique véhicule <strong>de</strong> pompiers réformé.<br />

Local <strong>de</strong> l’étape, son fils Laurent Dumont, <strong>de</strong> Jausiers, court « contre »<br />

son cousin, Faustin Erard <strong>de</strong> Barcelonnette et entraîne dans sa<br />

passion ses neveux et nièces. Quentin estime que « c’est une très<br />

belle course <strong>de</strong> côte. La montée du Sauze Super Sauze est spéciale :<br />

elle est mythique. » Entre <strong>de</strong>ux vrombissements impressionnants, son<br />

papy souligne que cela fait 31 ans qu’elle se court. Les 87 voitures<br />

<strong>de</strong> cette édition 2012 défilent les unes <strong>de</strong>rrière les autres pour aller<br />

se placer au départ <strong>de</strong>s essais. Toutes customisées, elles véhiculent<br />

fièrement un aspect <strong>de</strong> la personnalité <strong>de</strong>s pilotes et… leur groupe<br />

sanguin, au cas où. La petite fille <strong>de</strong> Lucky encourage son poulain<br />

par téléphone : « Laurent, va les chercher les <strong>de</strong>ux secon<strong>de</strong>s, mais ne<br />

va pas te mettre dans un trou ». La passion affleure partout, quel que<br />

soit l’âge ou le sexe. « Dans<br />

<strong>de</strong>ux ans, je suis co-pilote.<br />

Dans 4 ans, j’ai un volant »<br />

annonce Coralie. Alors que<br />

Luce Pierre termine 18 e<br />

au général (accessoirement<br />

<strong>de</strong>vant son frère et les autres<br />

filles), la relève se tient prête.<br />

« La montée du Sauze<br />

Super Sauze est spéciale :<br />

elle est mythique. »


kart<br />

Une autre façon<br />

<strong>de</strong> prendre le volant<br />

La bannière « Circuit <strong>de</strong> Barcelonnette » flotte crânement sur fond<br />

<strong>de</strong> montagnes et <strong>de</strong> forêts. Sur la piste, on se prend vite au jeu<br />

« Nous acceptons jusqu’à 10 adultes en même temps » explique<br />

Philippe Dellaroli, propriétaire <strong>de</strong>s lieux « ou 6 enfants à partir<br />

<strong>de</strong> 7 ans. On ne mélange jamais les <strong>de</strong>ux sauf dans le kart bi-place<br />

où un enfant <strong>de</strong> 4-5 ans peut prendre place avec un adulte. » Sur ces<br />

petits boli<strong>de</strong>s, on peut filer jusqu’à un peu plus <strong>de</strong> 60 km/heure. Les<br />

parcours chronométrés permettent d’immortaliser les performances<br />

<strong>de</strong>s meilleurs pilotes <strong>de</strong> la journée. Ici, la conduite n’a rien à voir<br />

avec celle d’une voiture, chacun a donc sa chance. Lucie et Marine,<br />

17 ans, adorent « la viteeeesse ! ». Skieuses toutes les <strong>de</strong>ux, elles<br />

s’offrent « le plaisir <strong>de</strong> conduire, vu (qu’elles n’ont) pas encore le<br />

permis ». « On adore le fait d’être près du sol, on sent tous les<br />

tremblements, tout ce qu’il se passe. Les sensations sont uniques ! »<br />

Ouvert toute l’année, le circuit propose, l’hiver, <strong>de</strong> conduire sur<br />

la neige et sur <strong>de</strong>s pistes éclairées à partir <strong>de</strong> 17 heures. Juste<br />

à côté, un circuit <strong>de</strong> mini-voitures et micro-motos attend les<br />

conducteurs les plus précoces : les enfants à partir <strong>de</strong> 2-3 ans.<br />

Plus d’infos :<br />

Karting <strong>de</strong> Barcelonnette Tél. 04 92 81 90 44<br />

Roche-<br />

LA-CroIX<br />

© Bertrand Bodin<br />

ROchE-lA-cROIx 31


Un « château-fort »<br />

Un petit Savoyard en vadrouille dans la région s’extasie « C’est le château <strong>de</strong>s militaires ! »<br />

Tom, notre accompagnateur, n’a pas commencé ses explications, que l’enfant a déjà tout compris.<br />

Pour l’aspect confort dudit château, on repassera. 10° à l’intérieur et une atmosphère, disons, un peu…<br />

humi<strong>de</strong>, pas <strong>de</strong> vue sur la montagne : on peut rêver mieux comme lieu <strong>de</strong> villégiature.<br />

Mais le fort se donne <strong>de</strong> beaux airs avec ses dédales <strong>de</strong> salles et, surtout, il se visite comme un château.<br />

Nous voilà partis pour une visite privée, suspendus aux lèvres <strong>de</strong> Tom Noyez.<br />

SoUS tErrE<br />

ROchE-lA-cROIx 33


La batterie inférieure <strong>de</strong> Roche-La-Croix fait partie du système<br />

Maginot <strong>de</strong> l’Est <strong>de</strong> la France : dans un sens, le col <strong>de</strong> Larche et<br />

l’actuelle frontière Italie-France, dans l’autre le col <strong>de</strong> Vars. « On est<br />

sur une voie <strong>de</strong> passage très fréquentée par les militaires, <strong>de</strong>s<br />

Romains au Duc <strong>de</strong> Savoie qui tente d’envahir la France en 1690, en<br />

passant par François 1 er en 1515. »<br />

La mission du fort ? « Protéger le col <strong>de</strong> Larche » résume Tom Noyez<br />

qui propose <strong>de</strong>s visites quotidiennes. Nous commençons par le<br />

bloc 6, celui du guetteur fusil-mitrailleur, pour lequel on n’a pas eu<br />

le temps d’installer les projecteurs, avantguerre.<br />

Le bloc, situé en bord <strong>de</strong> falaise,<br />

permet d’observer la vallée. On file vers le<br />

fossé diamant avec sa trappe en contrebas,<br />

l’issue <strong>de</strong> secours. Avec les mortiers <strong>de</strong><br />

81 mm et ses tirs <strong>de</strong> 3,2 km <strong>de</strong> portée, on y<br />

croisait le feu avec l’ouvrage <strong>de</strong> Saint-Ours,<br />

visible sur l’autre versant <strong>de</strong> montagne,<br />

se protégeant mutuellement. Mais hop,<br />

direction le bloc 5 : le plus puissant <strong>de</strong>s Alpes.<br />

C’est bien simple,<br />

on se croirait<br />

dans un film…<br />

Sa tourelle à éclipse se soulève <strong>de</strong> 60 cm et pivote sur 360°. Avec<br />

son blindage <strong>de</strong> 5 cm sur 35 cm d’épaisseur d’acier, la coupole pèse<br />

le mo<strong>de</strong>ste poids <strong>de</strong>… 40 tonnes. Tout a été acheminé par <strong>de</strong> petits<br />

véhicules à chenilles <strong>de</strong>puis l’accès <strong>de</strong> Meyronnes, que nous avons<br />

emprunté et où nous imaginons mal ce genre <strong>de</strong> convoi circuler.<br />

Ironie <strong>de</strong> la chose, la coupole a été fondue en Allemagne. Deux<br />

canons <strong>de</strong> 75 mm jumelés pour une portée <strong>de</strong> 12 km, pas moins ! Ça<br />

tombe bien, la frontière <strong>de</strong> Larche se trouve à 10 km à vol d’oiseau.<br />

Quelques éraflures, cicatrices superficielles <strong>de</strong> bombar<strong>de</strong>ment<br />

d’aviation, témoignent d’épiso<strong>de</strong>s âpres.<br />

Mais l’intérieur du fort nous intéresse encore<br />

plus. C’est bien simple, on se croirait dans<br />

un film : on peut aisément imaginer la vie<br />

<strong>de</strong>s 161 soldats qui disposaient d’une<br />

autonomie <strong>de</strong> 3 mois. Ici officiaient <strong>de</strong>s<br />

régiments d’éclaireurs-skieurs, <strong>de</strong>s locaux<br />

majoritairement, adaptés au ru<strong>de</strong> milieu<br />

montagnard qu’ils connaissaient comme<br />

leur poche.<br />

À côté du bloc 1, on trouve l’arrivée du téléphérique qui tractait vivres<br />

et munitions. Menant à l’entrée, un passage protégé pour l’hiver.<br />

« Nous sommes à 1 900 m. Le vent qui souffle d’Ouest en Est fabriquait<br />

toujours une congère ici. Il fallait pouvoir accé<strong>de</strong>r au sas pour<br />

pénétrer à l’intérieur » explique notre accompagnateur. Charly, venu<br />

du Gard, n’en perd pas une miette, tout comme Stella, Océane, Loïc et<br />

Louka, ses petits-enfants. Tout ce que nous raconte Tom (ou presque !),<br />

il le sait, pour l’avoir appris dans les livres. « Cette visite met en<br />

images tout ce que j’ai pu lire ». Passionné par les forts, collectionneur<br />

d’objets militaires (confectionnant même ses propres cotes <strong>de</strong><br />

maille), il s’intéresse fortement au sujet. Mais même <strong>de</strong> jeunes<br />

enfants (4 ans à peine pour ceux qui nous accompagnent aujourd’hui)<br />

sont intrigués par ce labyrinthe <strong>de</strong> pièces <strong>de</strong>stinées à tous les temps<br />

<strong>de</strong> la vie militaire. Il faut dire que Tom est passionnant, nous contant<br />

<strong>de</strong>s histoires incarnées, utilisant un langage très imagé : on s’y croit !<br />

On pénètre dans cet antre militaire et on tombe directement sur les<br />

wagonnets qui transportaient les vivres pour les répartir dans le fort.<br />

Puis sur la chaudière qui <strong>de</strong>vait faire monter la température à<br />

environ 12°, seuil au-<strong>de</strong>ssus duquel ne se forme plus <strong>de</strong> con<strong>de</strong>nsation.<br />

ROchE-lA-cROIx 35<br />

PETIT<br />

CONSEIl<br />

PrAgMAtIQUE<br />

Prenez une polaire<br />

ou un gilet et mettez<br />

un pantalon,<br />

il fait humi<strong>de</strong> et frais<br />

(10°) là-<strong>de</strong>ssous.<br />

Des chauffages d’appoint complétaient le système pour obtenir les<br />

16° réglementaires, température à partir <strong>de</strong> laquelle un homme actif<br />

n’a pas froid. Suivent une cuve <strong>de</strong> 33 600 litres d’eau pompés du torrent<br />

en contrebas, la salle d’opération entièrement carrelée, la cuisine avec<br />

son palan (même vi<strong>de</strong>s, les gamelles sont très lour<strong>de</strong>s). Tom nous<br />

raconte les conserves <strong>de</strong> « singe » (le corned-beef), celles <strong>de</strong> haricots,<br />

le pain <strong>de</strong> guerre qu’il fallait le tremper longtemps avant <strong>de</strong> pouvoir<br />

le manger. Nous arrivons au Poste <strong>de</strong> comman<strong>de</strong> : les yeux du fort,<br />

permettant <strong>de</strong> localiser les avancées <strong>de</strong> l’ennemi. On nous montre une<br />

armoire anti-feu, celle qui contenait les « documents précieux », avec les<br />

coordonnées <strong>de</strong> tir. « Il fallait être le plus précis possible pour économiser<br />

les munitions ». On passe d’ailleurs <strong>de</strong>vant la soute à munitions sensibles<br />

mais le clou du spectacle arrive : l’étage inférieur <strong>de</strong> la tourelle à<br />

éclipse. Les petits mitraillent Tom <strong>de</strong> questions tandis que les grands<br />

s’extasient sur la « clé-prisonnière », le contrepoids <strong>de</strong> 17 tonnes ou le<br />

transmetteur d’ordres mécaniques avec ses « halte au feu », « tirez »<br />

ou « tir terminé ». Pour notre part, c’est la visite qui prend fin… mais<br />

surtout pas l’envie <strong>de</strong> découvrir les autres fortifications <strong>de</strong> l’Ubaye !<br />

Plus d’infos : Gui<strong>de</strong> AVPVU Tél. 06 87 35 93 99


gueule<br />

D’ATMOSPhèRE<br />

© Bertrand Bodin<br />

Michel Fortoul, en photo<br />

(à droite), on appelle ça<br />

« une gueule ».<br />

Et la cabane, elle aussi<br />

a une « gueule ».<br />

De la gueule, comme<br />

on dit vulgairement<br />

en parlant<br />

<strong>de</strong> la décoration<br />

d’un intérieur,<br />

mais pas seulement.<br />

Certes, le cadre<br />

est dépaysant<br />

pour qui débarque<br />

<strong>de</strong> la ville ou <strong>de</strong> l’océan.<br />

Une allure <strong>de</strong> chalet<br />

d’alpage ancien,<br />

« dans son jus ».<br />

Mais pas seulement,<br />

c’est l’ambiance, ici,<br />

qui frappe le cœur.<br />

Ren<strong>de</strong>z-vous sous le col<br />

<strong>de</strong> Restefond-La Bonette,<br />

sur la route la plus haute<br />

d’Europe, sur la route<br />

<strong>de</strong>s gran<strong>de</strong>s Alpes,<br />

au restaurant d’altitu<strong>de</strong><br />

Halte 2000.<br />

GUEUlE d’ATmOSPhèRE 37<br />

Une cabane<br />

un peu plus près<br />

du ciel


C’est Marie, qui nous ouvre grand la porte d’Halte 2000. Ses grandsparents,<br />

Odile et Jean-Rémy Fortoul, tout le mon<strong>de</strong> ici les connaissait<br />

ou presque. La maman <strong>de</strong> Michel avait ouvert la cabane dès 1965,<br />

dans ce chalet d’alpage érigé en 1853. Précurseur en matière <strong>de</strong><br />

tourisme local, le lieu proposait <strong>de</strong>s petites glaces, <strong>de</strong>s boissons,<br />

quelques tartelettes. « C’était sa contribution à elle au développement<br />

du coin, un geste <strong>de</strong> bienvenue en direction <strong>de</strong>s gens qui passaient le<br />

col. » Marie, 25 ans, ai<strong>de</strong> son papa <strong>de</strong>puis quelques années. Étudiante<br />

en peinture à Bruxelles, elle converse d’ailleurs joyeusement avec<br />

Stefan, un Belge qui vient se réchauffer quelques instants au coin du<br />

feu en commandant un vin chaud, en plein mois <strong>de</strong> juillet. « J’ai oublié<br />

<strong>de</strong> prendre un coupe-vent pour la <strong>de</strong>scente, et dieu sait que j’ai<br />

transpiré dans la montée ! » esquisse gentiment le cycliste d’Anvers.<br />

Le restaurant, lui aussi, vit au rythme du col, ses horaires <strong>de</strong> travail<br />

dépen<strong>de</strong>nt <strong>de</strong> l’état <strong>de</strong>s routes, <strong>de</strong> l’ouverture <strong>de</strong> Restefond, mais, en<br />

général, l’accueil <strong>de</strong> la clientèle court <strong>de</strong> mi-juin à fin septembre.<br />

Si le chef n’aime pas le terme « rustique », c’est pourtant lui qui nous<br />

vient à la bouche, en plus <strong>de</strong> l’appétit. Michel lui préfère l’expression<br />

« ambiance familiale ». Et l’ambiance se révèle familiale au sens propre.<br />

À l’origine <strong>de</strong> la cabane, il y a la famille et c’est la famille, encore, qu’elle<br />

rassemble chaque été. Baptiste, son fils, secon<strong>de</strong> le chef. Sa jeune sœur<br />

… c’est le terroir<br />

qu’on y sert<br />

sur un plateau<br />

d’argent.<br />

Noémie, 12 ans, vient aussi très<br />

souvent. « Nous perpétuons<br />

la vie <strong>de</strong> mes parents. Pour<br />

Jean-Rémy, le principe était<br />

simple à l’époque : dans les<br />

années 60, il fallait une activité<br />

complémentaire à l’agriculture<br />

pour faire casser la croûte à 11 enfants. Le tourisme permettait aux<br />

paysans <strong>de</strong> s’élever. Il a créé le Syndicat Intercommunal <strong>de</strong> la <strong>Vallée</strong> <strong>de</strong><br />

l’Ubaye, le <strong>de</strong>uxième <strong>de</strong> France. J’ai l’impression que les gens aiment<br />

savoir qu’il existe encore <strong>de</strong>s choses immuables » confie Michel. « Nous<br />

recevons beaucoup d’Hollandais et <strong>de</strong> Belges qui adorent notre style<br />

<strong>de</strong> vie. Pour eux, c’est un millénaire précé<strong>de</strong>nt qu’on maintient ici. »<br />

De la vian<strong>de</strong> d’ovidés – forcément au pays <strong>de</strong> l’agneau – mais aussi<br />

<strong>de</strong>s charcuteries, <strong>de</strong>s fromages, <strong>de</strong>s champignons, c’est le terroir qu’on<br />

y sert sur un plateau d’argent. Ou plutôt sur <strong>de</strong> simples planches <strong>de</strong><br />

bois, <strong>de</strong> virginales ron<strong>de</strong>lles <strong>de</strong> mélèze, piqué d’un Opinel fièrement<br />

dressé. Un service aussi brut que valorisant pour le produit. Et<br />

réjouissant dans notre mon<strong>de</strong> sophistiqué et parfois ampoulé.<br />

Plus d’infos : Halte 2000 Tél. 06 71 36 28 09 © Bertrand Bodin<br />

39


LES ALPES <strong>DU</strong> SUD À VELO<br />

ITINÉRANCE<br />

RetRouvez notRe<br />

EN gui<strong>de</strong> UBAYE<br />

et découvrez nos cols<br />

et bala<strong>de</strong>s les plus mythiques<br />

Document disponible à la Communauté <strong>de</strong> communes - <strong>Vallée</strong> <strong>de</strong> l’Ubaye - www.ubaye.com<br />

Couv Gui<strong>de</strong><br />

à venir<br />

© ?????????? ???????????

Hooray! Your file is uploaded and ready to be published.

Saved successfully!

Ooh no, something went wrong!