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Auguste Blanqui, Textes choisis - le cras

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<strong>Auguste</strong> <strong>Blanqui</strong>, <strong>Textes</strong> <strong>choisis</strong> (1971) 72<br />

disputer, il épiait en si<strong>le</strong>nce <strong>le</strong> moment de s'élancer sur <strong>le</strong> champ de batail<strong>le</strong> et de<br />

mettre <strong>le</strong>s partis d'accord.<br />

Quand <strong>le</strong>s classes en vinrent à ce point que <strong>le</strong> gouvernement n'avait plus de<br />

ressources que dans <strong>le</strong> coup d'État, et que cette menace d'un coup d'État fut<br />

suspendue sur la tête des bourgeois, comme la peur <strong>le</strong>s prit ! Qui ne se rappel<strong>le</strong> <strong>le</strong>s<br />

regrets et <strong>le</strong>s terreurs des 221 1 , après l'ordonnance de dissolution qui répondit à<br />

<strong>le</strong>ur fameuse adresse ? Char<strong>le</strong>s X parlait de sa ferme résolution d'avoir recours à la<br />

force et la bourgeoisie pâlissait. Déjà, la plupart désapprouvaient hautement <strong>le</strong>s<br />

pauvres 221 de s'être laissé emporter à des excès révolutionnaires. Les plus hardis<br />

mettaient <strong>le</strong>ur espoir dans <strong>le</strong> refus de l'impôt qui eût été bel et bien payé, et dans<br />

l'appui des tribunaux qui auraient presque tous et de grand cœur fait l'office de<br />

cours prévôta<strong>le</strong>s 2 . Si <strong>le</strong>s royalistes montraient tant de confiance et de résolution, si<br />

<strong>le</strong>urs adversaires laissaient paraître tant de crainte et d'incertitude, c'est que <strong>le</strong>s uns<br />

et <strong>le</strong>s autres regardaient <strong>le</strong> peup<strong>le</strong> comme démissionnaire et s'attendaient à <strong>le</strong><br />

trouver neutre dans la batail<strong>le</strong>. Ainsi, d'un côté, <strong>le</strong> gouvernement appuyé sur la<br />

nob<strong>le</strong>sse, <strong>le</strong> c<strong>le</strong>rgé et <strong>le</strong>s grands propriétaires, de l'autre la classe moyenne, prêts à<br />

en venir aux mains, après avoir préludé cinq ans par une guerre de plume et de<br />

bou<strong>le</strong>s 3 , <strong>le</strong> peup<strong>le</strong> si<strong>le</strong>ncieux depuis quinze ans et cru démissionnaire.<br />

C'est dans cette situation que <strong>le</strong> combat s'engage. Les ordonnances sont<br />

lancées, et la police brise <strong>le</strong>s presses des journaux. Je ne vous par<strong>le</strong>rai pas de notre<br />

joie à nous, citoyens, qui frémissions sous <strong>le</strong> joug et qui assistions enfin à ce réveil<br />

du lion populaire qui avait dormi si longtemps. Le 26 juil<strong>le</strong>t fut <strong>le</strong> plus beau jour<br />

de notre vie. Mais <strong>le</strong>s bourgeois ! Jamais crise politique n'offrit <strong>le</strong> spectac<strong>le</strong> d'une<br />

tel<strong>le</strong> épouvante, d'une si profonde consternation. Pâ<strong>le</strong>s, éperdus, ils entendaient <strong>le</strong>s<br />

premiers coups de feu comme la première décharge du piquet qui devait <strong>le</strong>s fusil<strong>le</strong>r<br />

l'un après l'autre. Vous avez tous présente à la mémoire la conduite des députés <strong>le</strong>s<br />

lundi, mardi et mercredi. Ce que la peur <strong>le</strong>ur laissait de présence d'esprit et de<br />

facultés, ils l'ont employé à prévenir, à arrêter <strong>le</strong> combat ; dans la préoccupation de<br />

<strong>le</strong>ur propre lâcheté, ils se refusaient à prévoir une victoire populaire, et tremblaient<br />

déjà sous <strong>le</strong> couteau de Char<strong>le</strong>s X. Mais, <strong>le</strong> jeudi, la scène changea. Le peup<strong>le</strong> est<br />

vainqueur. C'est alors une autre terreur qui <strong>le</strong>s saisit, bien autrement profonde et<br />

accablante. Adieu, <strong>le</strong>urs rêves de charte, de légalité, de royauté constitutionnel<strong>le</strong>,<br />

de domination exclusive de la bourgeoisie ! Ce fantôme impuissant de Char<strong>le</strong>s X<br />

s'est évanoui. Au travers des débris, des flammes et de la fumée, sur <strong>le</strong> cadavre de<br />

la Royauté, <strong>le</strong> peup<strong>le</strong> <strong>le</strong>ur apparaît debout, debout comme un géant, <strong>le</strong> drapeau<br />

tricolore à la main ; ils demeurent frappés de stupeur. Oh ! c'est alors qu'ils<br />

1 Les deux cent vingt et un députés de l'opposition à la Chambre. En réponse au discours de<br />

Char<strong>le</strong>s X du 2 mars 1830, ces députés avaient rédigé une adresse dans laquel<strong>le</strong> ils protestaient<br />

contre <strong>le</strong>s agissements du gouvernement qui ne prenait pas en considération <strong>le</strong>s « désirs du<br />

peup<strong>le</strong> ».<br />

2 Cours d'exception, à procédure expéditive, créées en 1815 pour juger <strong>le</strong>s délits politiques.<br />

3 Il s'agit des bou<strong>le</strong>s que <strong>le</strong>s députés déposaient dans l'urne pour voter.

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