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<strong>Auguste</strong> <strong>Blanqui</strong>, <strong>Textes</strong> <strong>choisis</strong> (1971) 30<br />
Des trois jougs que <strong>le</strong> plébéien subit, <strong>le</strong> plus lourd est celui du capital. Les<br />
deux autres lui servent de gendarmes.<br />
Le triomphe de César sur la République a été rendu possib<strong>le</strong> par <strong>le</strong> fait que <strong>le</strong>s<br />
masses se sont mises du côté de César. Le césarisme dut son succès à la haine<br />
généra<strong>le</strong> contre la tyrannie des usuriers. Mais <strong>le</strong>s masses n'ont rien gagné à cette<br />
révolution.<br />
« Le sabre n'était plus aux mains des usuriers », mais l'usure dirigeait Rome,<br />
comme auparavant. « À ces deux fléaux, s'en était joint un troisième, <strong>le</strong><br />
Christianisme ... ! » « Tous ensemb<strong>le</strong>, ils engloutirent <strong>le</strong> vieux monde. »<br />
Le christianisme engendré par la civilisation antique l'a détruite. Entre Rome et<br />
<strong>le</strong> monde contemporain se place <strong>le</strong> règne véritab<strong>le</strong> du christianisme ; <strong>le</strong> moyen âge,<br />
époque de barbarie 1 .<br />
Dans la société féoda<strong>le</strong>, qui s'est é<strong>le</strong>vée sur <strong>le</strong>s ruines de Rome,<br />
la nob<strong>le</strong>sse et <strong>le</strong> c<strong>le</strong>rgé se partagent la puissance. L'homme d'argent est la proie<br />
de l'homme de guerre... [Mais <strong>le</strong> monde] a remonté peu à peu <strong>le</strong>s pentes de la<br />
civilisation. Aujourd'hui, <strong>le</strong> revirement est comp<strong>le</strong>t.<br />
Le capitalisme domine la société, obsédé par la cupidité, la chasse au profit.<br />
Il a saisi la portée de l'association et ce magnifique instrument de progrès est<br />
devenu entre ses mains... [une arme) pour exterminer la petite et moyenne<br />
industrie, <strong>le</strong> moyen et <strong>le</strong> petit commerce.<br />
... Sur <strong>le</strong>s ruines du bourgeois modeste s'élève, plus savante et plus terrib<strong>le</strong><br />
que <strong>le</strong> vieux patriciat, cette trip<strong>le</strong> féodalité financière, industriel<strong>le</strong> et<br />
commercia<strong>le</strong> qui tient sous ses pieds, la société entière 2 .<br />
La société marche à l'abîme, comme saisie d'une<br />
furie aveug<strong>le</strong>... En vain <strong>le</strong> cri presque universel réclame l'égalité. Chaque jour, la<br />
tranchée se creuse plus profonde entre deux castes uniques, l'opu<strong>le</strong>nce et la<br />
misère. Les situations intermédiaires disparaissent. Toutes <strong>le</strong>s conquêtes de la<br />
science deviennent une arme terrib<strong>le</strong> entre <strong>le</strong>s mains du Capital contre <strong>le</strong> Travail<br />
et la Pensée 3 .<br />
Résumant ses considérations sur l'histoire, <strong>Blanqui</strong> en arrive à la généralisation<br />
suivante :<br />
1<br />
Voir manuscrits de <strong>Blanqui</strong> ; cité par E. MASON : « <strong>Blanqui</strong> and Communism » Political<br />
Science Quarterly, 1929, XLIV, p. 505.<br />
2<br />
Critique socia<strong>le</strong>, t. I, p. 176 et suivantes.<br />
3<br />
Critique socia<strong>le</strong>, t. I, p. 74.