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<strong>Auguste</strong> <strong>Blanqui</strong>, <strong>Textes</strong> <strong>choisis</strong> (1971) 27<br />
par <strong>le</strong> triomphe absolu des lumières. Il en sera la suite inéluctab<strong>le</strong>, l'expression<br />
socia<strong>le</strong> et politique 1 .<br />
Nous avons parlé d'une influence possib<strong>le</strong> du saint-simonisme sur la pensée de<br />
<strong>Blanqui</strong> relativement à l'histoire. Manifestement, cette influence ne fut pas très<br />
profonde. En tout cas, la périodisation historique de <strong>Blanqui</strong> diffère grandement de<br />
cel<strong>le</strong> des saints simoniens. Chez <strong>Blanqui</strong>, l'apparition de la division du travail<br />
sépare nettement deux périodes différentes de l'histoire des sociétés humaines 2 .<br />
Avant la division du travail, l'individualisme conserve ses traits fondamentaux -<br />
iso<strong>le</strong>ment économique de chaque famil<strong>le</strong> ; <strong>le</strong>s hommes ne connaissent pas<br />
l'échange ; chaque famil<strong>le</strong> produit el<strong>le</strong>-même tout ce qui est nécessaire. Mais, au<br />
cours de cette époque d'économie par groupes isolés, l'humanité traverse trois<br />
phases de développement : Première phase – l'âge de la pierre. L'homme, isolé de<br />
ses semblab<strong>le</strong>s, ne connaît pas d'autre lien social que la famil<strong>le</strong>. Deuxième phase :<br />
suite de l'âge de la pierre et commencement de l'âge du bronze ; rapprochement<br />
des hommes par tribus. Ils vivent de l'é<strong>le</strong>vage et de la chasse ; la terre reste<br />
commune. Point de culture encore, ni d'appropriation du sol. Ébauche de<br />
gouvernement, une hiérarchie, un ou plusieurs chefs. La troisième phase : âge du<br />
bronze, âge du fer. Les hommes passent au travail de la terre qui suit<br />
l'appropriation du sol. Du point de vue historique, selon <strong>Blanqui</strong>,<br />
ce pas apparent vers l'individualisme est au contraire un progrès sensib<strong>le</strong> de<br />
l'association parmi <strong>le</strong>s hommes et un acheminement vers la communauté.<br />
Dans cette période apparaissent <strong>le</strong> pouvoir politique et social de la monarchie<br />
et de l'aristocratie, <strong>le</strong>s castes, <strong>le</strong>s rapports de vassalité. Mais il n'y a « ni échange,<br />
ni monnaie, ni par conséquent exploitation capitaliste », conclut-il. 3<br />
La division du travail introduit une importante nouveauté dans la vie de<br />
l'humanité ; el<strong>le</strong> élève <strong>le</strong> rendement, améliore la qualité de la production. El<strong>le</strong><br />
détruit l'iso<strong>le</strong>ment des individus et établit un nouveau principe : « chacun<br />
travail<strong>le</strong>ra pour tous, tous pour chacun 4 ». Mais ce progrès indiscutab<strong>le</strong> est payé<br />
du « sacrifice de l'indépendance individuel<strong>le</strong> », de « l'esclavage réciproque sous<br />
l'apparence de solidarité ». L'abandon de l'indépendance personnel<strong>le</strong> n'est ni<br />
spontané, ni conscient. « Personne ne l'aurait consenti. » Pas un homme n'aurait<br />
accepté d'échanger <strong>le</strong> sentiment de la liberté personnel<strong>le</strong>... contre <strong>le</strong> collier doré de<br />
la civilisation » 5 .<br />
Le régime de la division du travail n'a dû remplacer l'iso<strong>le</strong>ment individuel<br />
que par une série de transformations réparties sur une période immense. Chaque<br />
1<br />
Critique socia<strong>le</strong>, t. II, 67-75 ; t. I, p. 73 et suivantes.<br />
2<br />
Ibidem, t. II, p. 79 ; t. I p. 3 et suivantes.<br />
3<br />
Critique socia<strong>le</strong>, t. II, p. 77-79.<br />
4<br />
Ibidem, t. I, p. 9.<br />
5<br />
Ibidem, t. I, p. 39-42.