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<strong>Auguste</strong> <strong>Blanqui</strong>, <strong>Textes</strong> <strong>choisis</strong> (1971) 12<br />
à prendre <strong>le</strong>s affaires politiques entre <strong>le</strong>urs mains. Le peup<strong>le</strong> veut faire et il fera <strong>le</strong>s<br />
lois qui doivent <strong>le</strong> régir ; alors ces lois ne seront plus faites contre lui ; el<strong>le</strong>s seront<br />
faites pour lui, parce qu'el<strong>le</strong>s <strong>le</strong> seront par lui.<br />
La conclusion à laquel<strong>le</strong> <strong>Blanqui</strong> conduit ses auditeurs est claire : pour<br />
supprimer <strong>le</strong>s maux de la société, il est indispensab<strong>le</strong> de créer une démocratie<br />
politique. Au cours de sa déclaration, il ne fait pas de proposition de caractère<br />
socialiste ; mais la tendance socialiste est indiscutab<strong>le</strong>. Il considère comme but de<br />
la lutte l'établissement de l'égalité socia<strong>le</strong> ; mais, comme mesure concrète pour<br />
améliorer <strong>le</strong> sort des opprimés, il n'indique que la réforme des impôts. Ceci est<br />
assurément dû au fait que <strong>Blanqui</strong> considère naïvement <strong>le</strong> système fiscal comme <strong>le</strong><br />
mécanisme essentiel qui permet aux riches de pil<strong>le</strong>r <strong>le</strong>s pauvres. Ces impôts<br />
« pillards » doivent être supprimés et remplacés par un impôt qui « devra<br />
s'emparer du superflu des oisifs », pour <strong>le</strong> répartir par « un système de banques<br />
nationa<strong>le</strong>s » (idée probab<strong>le</strong>ment inspirée par la propagande saint-simonienne)<br />
« entre cette masse de gens indigents que <strong>le</strong> manque d'argent condamne à<br />
l'inaction 1 ».<br />
Dans son discours du 2 février 1832, <strong>Blanqui</strong> a caractérisé de manière plus<br />
concrète <strong>le</strong>s forces de classes en lutte dans la France de son époque.<br />
Il ne faut pas se dissimu<strong>le</strong>r qu'il y a guerre à mort entre <strong>le</strong>s classes qui<br />
composent la nation... <strong>le</strong> parti vraiment national, celui auquel <strong>le</strong>s patriotes<br />
doivent se rallier, c'est <strong>le</strong> parti des masses.<br />
Dans la France de son temps, <strong>Blanqui</strong> constate l'existence de trois intérêts :<br />
Celui de la classe dite très é<strong>le</strong>vée, celui de la classe moyenne ou bourgeoise,<br />
enfin celui du peup<strong>le</strong>... En 1814 et 1815, la classe bourgeoise fatiguée de<br />
Napoléon, surtout parce que la guerre... nuisait à sa tranquillité et empêchait <strong>le</strong><br />
commerce d'al<strong>le</strong>r, reçut <strong>le</strong>s soldats étrangers en libérateurs et <strong>le</strong>s Bourbons<br />
comme <strong>le</strong>s envoyés de Dieu.<br />
Aussi <strong>le</strong>s Bourbons récompensèrent-ils la bourgeoisie « par la Charte ». Par <strong>le</strong><br />
moyen de la Charte, la haute société et <strong>le</strong>s grands propriétaires, d'une part, la classe<br />
moyenne, d'autre part, se partageaient entre el<strong>le</strong>s <strong>le</strong> pouvoir. « Le peup<strong>le</strong> fut mis de<br />
côté. » « Privé de chefs », démoralisé par la défaite, il se taisait. La bourgeoisie a<br />
prêté son appui aux Bourbons jusqu'en 1825. Mais, par la suite, Char<strong>le</strong>s X,<br />
se croyant assez fort sans <strong>le</strong>s bourgeois voulut procéder à <strong>le</strong>ur exclusion, comme<br />
on avait fait pour <strong>le</strong> peup<strong>le</strong> en 1815<br />
La bourgeoisie devint furieuse.<br />
1<br />
Procès des Quinze, publié par la Société des Amis du Peup<strong>le</strong>, Paris 1832 p. 77-86. (Voir plus<br />
loin : <strong>Textes</strong> <strong>choisis</strong>, p. 73 et suiv.)