plaies vesicales d'origine gyneco-obstetricale : mise au ... - Lazraq info
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ARTICLE<br />
ORIGINAL<br />
RESUME<br />
PLAIES VESICALES D’ORIGINE GYNECO-OBSTETRICALE :<br />
MISE AU POINT A PROPOS DE VINGT CAS<br />
M.F. TAZI, Y. AHALLAL, M. AHSAINI, M.J. EL FASSI, M.H. FARIH<br />
Les <strong>plaies</strong> vésicales sont des complications classiques de la<br />
chirurgie gynéco-obstétricale. Elles restent rares vu le nombre<br />
considérable d’interventions pratiquées. L’efficacité des<br />
traitements est directement proportionnelle à la précocité<br />
du diagnostic.<br />
Il s’agit d’une étude rétrospective, sur une période de 5 ans,<br />
de 20 cas de <strong>plaies</strong> vésicales d’origine gynéco-obstétricale.<br />
Nous avons relevé l’âge, les antécédents chirurgic<strong>au</strong>x, les<br />
types d’intervention gynéco-obstétricale, les types de lésions,<br />
les méthodes thérapeutiques pratiquées ainsi que les<br />
complications immédiates et tardives.<br />
L’âge moyen était de 40 ans et 5 patientes avaient un<br />
antécédent de césarienne. La plaie vésicale avait eu lieu<br />
dans 15 cas lors d’une césarienne et dans 5 cas lors d’une<br />
hystérectomie. Les lésions concernaient le dôme vésical dans<br />
10 cas et la paroi postérieure dans 10 cas. La réparation des<br />
lésions vésicales s’est faite par voie exovésicale dans les<br />
lésions du dôme et par voie endovésicale dans les lésions<br />
de la paroi postérieure. Les suites opératoires étaient marquées<br />
par la survenue de fistules vésico-génitales chez 3 patientes,<br />
d’infections urinaires chez 2 patientes et d’un lâchage de<br />
sutures vésicales chez une patiente ayant nécessité une<br />
reprise chirurgicale.<br />
Les princip<strong>au</strong>x facteurs de risque de survenue de <strong>plaies</strong><br />
vésicales lors d’interventions gynéco-obstétricales sont les<br />
antécédents de chirurgie pelvienne, la parité et le volume<br />
utérin. La réparation par voie endovésicale est indiquée pour<br />
les lésions trigonales et sus-trigonales alors que la voie<br />
exovésicale est réservée <strong>au</strong>x lésions du dôme vésical. Le<br />
drainage des urines, pierre angulaire du traitement, se fait<br />
par une sonde urétrovésicale. L’évolution est en général<br />
bonne mais peut être grevée de complications à type<br />
d’infections urinaires ou de fistules vésico-génitales.<br />
Mots clés : <strong>plaies</strong> ; vessie ; chirurgie gynéco-obstétricale<br />
Correspondance : Dr. Y. AHALLAL. 152, lotissement Zouhour<br />
VN, Meknès, Maroc, E-mail : dryouness@gmail.com<br />
INTRODUCTION<br />
La plaie vésicale est une complication classique de la<br />
chirurgie gynéco-obstétricale ; ceci est dû <strong>au</strong> rapport<br />
étroit existant entre la vessie d’une part et l’utérus et<br />
le vagin d’<strong>au</strong>tre part. Sa fréquence varie entre 0,3% à<br />
2% selon les <strong>au</strong>teurs [1, 2, 3].<br />
Service d’Urologie, CHU Hassan II, Fès, Maroc<br />
-17-<br />
ABSTRACT<br />
J Maroc Urol 2010 ; 17 : 17-21<br />
BLADDER INJURIES DURING GYNECO-OBSTETRICAL<br />
SURGERY : A REPORT OF 20 CASES<br />
Bladder injuries are recognized complications in front of<br />
<strong>gyneco</strong>-obstetric surgery. Those injuries are relatively rare to<br />
the large number of interventions. The efficiency of<br />
conservative treatment is directly bound up with early<br />
diagnosis.<br />
A retrospective cases review of bladder injury during a time<br />
period of 5 years identified 20 bladder injury cases. Information<br />
was obtained on the women’s age, the previous surgical<br />
history, the <strong>gyneco</strong>-obstetric interventions’ types, the kinds<br />
of lesions, the therapeutic methods employed and finally the<br />
complications.<br />
The average woman age was 40 years old. 5 patients had a<br />
caesarean section antecedent. 15 bladder injuries happened<br />
during caesarean sections, and 5 during a hysterectomy. Half<br />
of the lesions were localised in the bladder anterior wall<br />
whereas the other half were localised in the bladder posterior<br />
wall. The fixing was made by a cystotomy for the bladder<br />
posterior wall lesions. The main surgical complications were<br />
urinary vaginal fistulas for 3 patients, urinary infections for<br />
2 others and a suture desertion for one woman.<br />
The risk factors of bladder injuries during <strong>gyneco</strong>-obstetric<br />
surgery are mainly the patients’ history of pelvic surgery, the<br />
parity and the size of the uterus. The fixing by cystotomy is<br />
relative when it comes to posterior bladder wall lesions.<br />
Bladder drainage by suprapubic or transurethral catheter is<br />
maintained on free flow for 10 days. The outcome is quite<br />
good in most of the cases, but it can be disturbed by<br />
complications such as urinary infections or vaginal fistulas.<br />
Key words : injuries ; bladder ; <strong>gyneco</strong>-obstetrical surgery<br />
Le diagnostic est souvent posé en per-opératoire face<br />
à une fuite d’urines, sinon si une plaie vésicale est<br />
suspectée, un test <strong>au</strong> bleu de méthylène permet d’en<br />
faire le diagnostic [4]. Mais parfois, le diagnostic est<br />
fait tardivement <strong>au</strong> stade de péritonite urineuse ou de<br />
fistule vésico-génitale.<br />
Le traitement de ces <strong>plaies</strong> est strictement chirurgical<br />
et dépend de la localisation de la plaie [1, 4].
Plaies vésicales d’origine gynéco-obstétricale<br />
Le meilleur traitement reste préventif par :<br />
• Une vidange vésicale systématique avant toute<br />
chirurgie gynéco-obstétricale [5].<br />
• Un bon décollement vésico-utérin tout en restant<br />
collé à l’utérus avant toute hystérectomie, avant<br />
l’hystérotomie <strong>au</strong> cours de la césarienne et dans toute<br />
chirurgie par voie basse.<br />
Un traitement bien conduit mini<strong>mise</strong> le risque de<br />
survenue des complications et permet ainsi une guérison<br />
de la patiente [6].<br />
A travers une série de 20 cas de <strong>plaies</strong> vésicales d’origine<br />
gynéco-obstétricale, nous étudierons les facteurs<br />
prédisposants, les localisations et le traitement des<br />
<strong>plaies</strong> vésicales et en déduirons les moyens de<br />
prévention.<br />
PATIENTES ET METHODES<br />
20 patientes ont été recensées entre janvier 2004 et<br />
septembre 2006. Durant cette période, 1636<br />
interventions gynéco-obstétricales ont été pratiquées.<br />
Les paramètres étudiés étaient l’âge, les antécédents<br />
gynéco-obstétric<strong>au</strong>x, les types d’interventions ayant<br />
occasionné les <strong>plaies</strong> vésicales, le degré d’urgence de<br />
celles-ci, le timing de l’intervention, le type de<br />
tr<strong>au</strong>matisme, le type de réparation et les éventuelles<br />
complications.<br />
RESULTATS<br />
Notre série comporte 20 cas de <strong>plaies</strong> vésicales<br />
secondaires à une chirurgie gynéco-obstétricale sur<br />
une période s’étendant de janvier 2004 à septembre<br />
2006 où 1636 interventions ont été pratiquées, soit<br />
une fréquence de 1,1%.<br />
L’âge moyen de nos patientes était de 40 ans pour des<br />
extrêmes allant de 25 à 50 ans.<br />
Nous avons relevé un antécédent de césarienne chez<br />
5 patientes, 8 patientes (40%) étaient primigestes. 65%<br />
(soit 13 patientes) des <strong>plaies</strong> vésicales sont survenues<br />
lors d’interventions pratiquées entre 21h et 8h du matin.<br />
40% (soit 8 patientes) des interventions gynécoobstétricales<br />
occasionnant une plaie de vessie se sont<br />
déroulées entre 2h et 8h du matin.<br />
Dans 90% des cas, un gynécologue-obstétricien en<br />
formation était responsable de la survenue de la plaie<br />
vésicale.<br />
16 patientes (80%) étaient opérées en urgence : 15<br />
avaient bénéficié d’une césarienne et une patiente avait<br />
bénéficié d’une hystérorraphie pour rupture utérine.<br />
Une hystérectomie par voie h<strong>au</strong>te pour fibrome utérin<br />
avait été pratiquée chez 2 patientes et une hystérectomie<br />
par voie basse pour prolapsus génital a été pratiquée<br />
chez 2 patientes.<br />
-18-<br />
M.F. TAZI et coll.<br />
Une plaie du dôme vésical a été perpétrée chez la<br />
moitié des patientes qui avaient bénéficié d’une<br />
cystorraphie exovésicale tandis que l’<strong>au</strong>tre moitié avait<br />
présenté une plaie trigonale ou sus-trigonale réparée<br />
par voie endovésicale.<br />
Le drainage des urines avait été assuré par une sonde<br />
urétro-vésicale de Folley n°22 ch. pendant 12 jours.<br />
L’évolution était marquée par la survenue de fistule<br />
vésico-génitale chez 3 patientes, d’infections urinaires<br />
chez 2 patientes et d’un lâchage de sutures vésicales<br />
chez 1 patiente ayant nécessité une reprise chirurgicale.<br />
DISCUSSION<br />
Les lésions vésicales secondaires à la chirurgie gynécoobstétricale<br />
sont rares mais risquent de se produire lors<br />
d’interventions chirurgicales pelviennes vu le rapport<br />
anatomique étroit existant entre la vessie d’une part et<br />
le tractus génital féminin d’<strong>au</strong>tre part.<br />
Dans la série de R<strong>au</strong>t publiée en 1991, durant l’année<br />
1988, 607 hystérectomies vaginales, 77 laparotomies<br />
exploratrices et 14 interventions de Wertheim ont été<br />
effectuées. De plus, il y avait 292 césariennes<br />
segmentaires inférieures (LSCS) et 4 hystérectomies<br />
pour rupture utérine. Pour ces 994 interventions<br />
pratiquées, 13 <strong>plaies</strong> vésicales étaient répertoriées, ce<br />
qui donne une incidence de 1,23% [1].<br />
Dans la série de Rajasekar publiée en 1997, sur les<br />
11284 césariennes qui étaient pratiquées en 18 ans,<br />
16 <strong>plaies</strong> vésicales sont survenues dont 2 étaient<br />
associées à une plaie urétérale ce qui donne une<br />
incidence de 1,4 pour 1000 césariennes [4].<br />
Dans la série de Lamb<strong>au</strong>die publiée en 2000, sur les<br />
1604 hystérectomies réalisées, ont été relevées 15<br />
<strong>plaies</strong> vésicales, ce qui donne une incidence de 0,9%<br />
(table<strong>au</strong> I) [2].<br />
Série<br />
Notre série<br />
Lamb<strong>au</strong>die [2]<br />
Amirikia et al. [7]<br />
Dargent et al. [8]<br />
Kovac [9]<br />
Table<strong>au</strong>. I. Incidence des <strong>plaies</strong> vésicales<br />
lors d’interventions gynéco-obstétricales<br />
Nombre d’interventions<br />
1636<br />
1604<br />
6435<br />
894<br />
611<br />
Plaies vésicales<br />
20 (1,4%)<br />
15 (0,9%)<br />
22 (0,3%)<br />
18 (2%)<br />
10 (1,6)<br />
L’étude des facteurs de risque de survenue des <strong>plaies</strong><br />
vésicales lors de la chirurgie gynéco-obstétricale permet<br />
d’en diminuer l’incidence en sélectionnant une<br />
population à risque [10].<br />
Dans notre série, le facteur de risque prépondérant est<br />
la présence d’un utérus cicatriciel, facteur de risque<br />
présent chez 9 des 20 patientes recensées.
Selon la littérature, les facteurs favorisant la survenue<br />
de <strong>plaies</strong> vésicales lors d’interventions gynécoobstétricales<br />
sont la présence d’antécédents chirurgic<strong>au</strong>x<br />
(chirurgie abdominale) et gynéco-obstétric<strong>au</strong>x (utérus<br />
cicatriciel) ainsi que la présence de remaniements<br />
anatomiques pelviens (irradiation, inflammation, gros<br />
myome) [10, 11].<br />
Dans un article publié en 2005, Phipps a étudié les<br />
facteurs favorisant la survenue de <strong>plaies</strong> vésicales <strong>au</strong><br />
cours de la césarienne. Le facteur de risque majeur<br />
soulevé est l’antécédent de césarienne mais <strong>au</strong>ssi le<br />
travail prolongé avant la césarienne, la rupture utérine<br />
concomitante, l’âge avancé ainsi qu’un indice de masse<br />
corporel élevé [6]. L’<strong>au</strong>teur n’avait pas trouvé de<br />
différence significative de risque de survenue de ces<br />
<strong>plaies</strong> vésicales selon le type de l’hystérotomie, la<br />
chorioamniotite, la position du fœtus et l’âge<br />
gestationnel.<br />
Dorairajan avait montré lors d’une étude publiée en<br />
2004 que le risque de survenue de <strong>plaies</strong> vésicales<br />
iatrogènes était accru lors de l’hystérectomie vaginale<br />
avec utérus h<strong>au</strong>t et lors de la chirurgie carcinologique<br />
[3].<br />
La plaie vésicale survient lors d’interventions gynécoobstétricales,<br />
que ça soit lors de césariennes, de<br />
coelioscopie, d’hystérectomies vaginales ou lors de<br />
laparotomies :<br />
* Lors de la césarienne, la plaie de vessie survient,<br />
même si la vessie est sondée, lors de l’ouverture<br />
péritonéale, du décollement vésico-utérin ou lors<br />
de l’incision segmento-corporéale verticale. Le risque<br />
est bien sûr majoré lors d’interventions itératives, en<br />
cas d’accolement épiploïque, lorsque la face<br />
postérieure de la vessie est anormalement h<strong>au</strong>te où<br />
il y a un risque de plaie de vessie lors de l’incision<br />
pariétale [12].<br />
* Lors de la laparotomie, lorsque le péritoine est ouvert<br />
avec le fascia transversalis, il f<strong>au</strong>t commencer le plus<br />
h<strong>au</strong>t possible pour éviter la vessie qui peut, par<br />
négligence, être lésée lors de l’incision.<br />
En cas de chirurgie itérative, sous la paroi le statut<br />
viscéral est modifié, et est à priori “inconnu” à c<strong>au</strong>se<br />
des adhérences postopératoires. A la partie basse de<br />
la cicatrice, la vessie peut monter bien <strong>au</strong>-dessus de<br />
la symphyse pubienne, ce qui peut la menacer <strong>au</strong>ssi<br />
bien en incision médiane qu’en transversale.<br />
Pour éviter la vessie, un bon repère anatomique est<br />
l’ouraque : il n’y a jamais de vessie là où se trouve<br />
l’ouraque.<br />
* Lors de l’hystérectomie vaginale, les <strong>plaies</strong> vésicales<br />
relèvent d’une f<strong>au</strong>sse route de dissection de l’espace<br />
vésico-utérin, elles sont le plus souvent médianes,<br />
franches, <strong>au</strong> nive<strong>au</strong> du bas fond. Elles sont fréquement<br />
le résultat d’une dissection difficile <strong>au</strong> nive<strong>au</strong> du<br />
plan vésico-utérin, mais sont parfois liées à des<br />
mouvements impromptus des valves qui sont<br />
introduites en baïonnette dans l’espace vésico-utérin<br />
qui sont censées compléter le décollement et protéger<br />
la base vésicale.<br />
-19-<br />
J Maroc Urol 2010 ; 17 : 17-21<br />
* Lors de la coeliochirurgie, <strong>au</strong> cours de leur traversée<br />
abdominale, les instruments peuvent léser la vessie<br />
si elle n’est pas vide ou si elle est attirée par une<br />
chirurgie antérieure. Lors de la dissection de l’espace<br />
vésico-utérin, la coagulation, et ce d’<strong>au</strong>tant plus que<br />
la dissection est difficile, doit être réalisée le plus<br />
près possible de l’utérus afin d’éviter les <strong>plaies</strong> ou<br />
les brûlures de la paroi vésicale, entraînant une<br />
nécrose thermique qui se manifestera secondairement<br />
par une fistule. Pour mieux repérer les limites de la<br />
vessie, il est également possible d’injecter 200 à<br />
300cc de bleu de méthylène dans la sonde urinaire.<br />
Outre la visualisation vésicale, ce test très simple a<br />
le grand avantage, en cas de dissection difficile, de<br />
faciliter le diagnostic peropératoire d’une éventuelle<br />
plaie de vessie [14, 15, 16].<br />
Il f<strong>au</strong>t effectuer ce test <strong>au</strong> moindre doute quant à<br />
l’intégrité vésicale de façon à mini<strong>mise</strong>r le risque de<br />
<strong>plaies</strong> vésicales passées inaperçues.<br />
Dans notre série, l’intervention qui a été majoritairement<br />
en c<strong>au</strong>se dans les <strong>plaies</strong> vésicales est la césarienne qui<br />
a été pratiquée chez 75% des patientes recrutées. La<br />
plaie vésicale est engendrée soit lors de l’incision<br />
pariétale, soit lors du décollement vésico-utérin qui est<br />
d’<strong>au</strong>tant plus laborieux que la durée du travail est<br />
importante et qu’un antécédent de chirurgie pelvienne<br />
est relevé.<br />
La plaie vésicale peut également être concomitante à<br />
une rupture utérine et dans ce cas elle n’est pas<br />
iatrogène.<br />
Mäkinen avait publié en 2001 une étude comparant la<br />
survenue de lésions vésicales selon la voie d’abord :<br />
laparotomie, voie vaginale et laparoscopique. Il y avait<br />
une nette prédominance de la voie coelioscopique,<br />
cependant les chirurgiens qui avaient pratiqué plus de<br />
30 interventions avaient nettement moins de<br />
complications urologiques que ceux qui en avaient<br />
pratiqué moins de 30. Ainsi, chez des praticiens<br />
expérimentés, il n’y <strong>au</strong>rait pas de différence significative<br />
de risque de survenue de plaie vésicale selon la voie<br />
d’abord [10].<br />
Selon Lamb<strong>au</strong>die, qui a étudié les complications des<br />
hystérectomies pour lésions bénignes, il y a eu 15 <strong>plaies</strong><br />
de vessie chez 15 patientes sur 1604 hystérectomies<br />
sans différence significative entre les trois voies d’abord<br />
pour les 1248 hystérectomies vaginales, 166<br />
hystérectomies abdominales et 190 hystérectomies<br />
coelio-vaginales [2].<br />
Dans notre série, 65% (soit 13 patientes) des <strong>plaies</strong><br />
vésicales sont survenues lors d’interventions pratiquées<br />
entre 21h et 8h du matin, tendance qui est confirmée<br />
par Rajasekar qui confirme que la majorité des <strong>plaies</strong><br />
vésicales surviennent la nuit et <strong>au</strong> petit matin [4].<br />
Rajasekar explique cette répartition temporelle de<br />
survenue des <strong>plaies</strong> vésicales par le fait qu’elles<br />
surviennent <strong>au</strong> moment où les obstétriciens “junior“<br />
n’étaient pas directement assistés [4]. Cette remarque<br />
a été confirmée par notre étude où, dans 90% des cas,
Plaies vésicales d’origine gynéco-obstétricale<br />
un gynécologue-obstétricien en formation était<br />
responsable de la survenue de la plaie vésicale.<br />
Dans la série de Rajasekar, l’indication de la césarienne<br />
qui revient le plus souvent est la disproportion foetopelvienne<br />
où le travail prolongé entraîne une ischémie<br />
de la paroi vésicale <strong>au</strong>gmentant le risque de survenue<br />
des <strong>plaies</strong> iatrogènes de vessie [4]. Cette indication<br />
survient en seconde place derrière l’utérus cicatriciel<br />
qui est dans notre série l’indication la plus retrouvée<br />
pour les césariennes qui ont occasionné des <strong>plaies</strong><br />
vésicales [5].<br />
Le diagnostic de la plaie vésicale se fait en per-opératoire<br />
par la présence d’un écoulement d’urines dans le<br />
champ opératoire, la présence d’urines hématiques<br />
(dans tous les types d’interventions) ou de bulles d’air<br />
(chirurgie coelioscopique) dans le sac à urines, d’où<br />
l’importance de la surveillance peropératoire du sac à<br />
urines.<br />
Au moindre doute quant à l’étanchéité de la vessie, il<br />
f<strong>au</strong>t pratiquer un test <strong>au</strong> bleu de méthylène ou <strong>au</strong>x<br />
bulles d’air s’il s’agit de chirurgie coelioscopique [10,<br />
12].<br />
Lors d’une hystérectomie vaginale, certains opérateurs<br />
injectent de façon systématique du bleu de méthylène<br />
dans la vessie en début d’intervention afin de ne pas<br />
négliger une éventuelle plaie vésicale [12].<br />
La technique chirurgicale dépend de la topographie<br />
de la lésion vésicale, de son étendue et de la présence<br />
de lésions associées [10, 11] : la voie exo-vésicale est<br />
réservée <strong>au</strong>x lésions du dôme et la voie endovésicale<br />
est réservée <strong>au</strong>x lésions trigonales et sus-trigonales car<br />
elle offre une meilleure exposition et un meilleur<br />
repérage des méats urétér<strong>au</strong>x.<br />
Après une bonne exposition des limites de la plaie, les<br />
<strong>plaies</strong> vésicales peuvent être suturées par du fil<br />
résorbable 2/0 soit en deux plans : plan muqueux et<br />
plan séro-musculeux ; ou bien en un seul plan réalisant<br />
des points tot<strong>au</strong>x incluant la muqueuse, la musculeuse<br />
et la séreuse. On peut réaliser les sutures par des points<br />
séparés ou par un surjet. Une épreuve d’étanchéité<br />
peut être réalisée en fin de suture. Le drainage vésical<br />
fait partie intégrante du traitement et doit se faire par<br />
une sonde urétro-vésicale de calibre 20 à 22 ch. En<br />
effet, Margolin avait montré, lors d’une étude<br />
rétrospective comparant le drainage postopératoire des<br />
urines par sonde uréthro-vésicale et par cystostomie,<br />
que la cystostomie ne diminuait pas le risque de<br />
survenue de fuites urinaires [5]. La durée du sondage<br />
est d’<strong>au</strong> minimum 10 jours et peut aller jusqu’à 15<br />
jours. La plupart des <strong>au</strong>teurs préconisent une durée de<br />
sondage comprise entre 10 et 12 jours.<br />
L’évolution est bonne en général, mais peut être grevée<br />
de complications :<br />
• Les infections urinaires, vu le prolongement de la<br />
durée d’hospitalisation et la présence de la sonde<br />
vésicale, c’est la raison pour laquelle Dhanasekaran<br />
préconise l’administration systématique d’une<br />
antibioprophylaxie.<br />
-20-<br />
M.F. TAZI et coll.<br />
• La lithiase de vessie qui peut être soit d’origine<br />
infectieuse ou secondaire à la présence de corps<br />
étranger en intra-vésical.<br />
• Le lâchage des sutures se manifestant par une issue<br />
importante d’urine par le drain de Redon situé dans<br />
la loge vésicale nécessitant une reprise chirurgicale.<br />
Aucun cas de lâchage de sutures n’a été rapporté<br />
dans la littérature. Dans notre série, nous avons noté<br />
un cas de lâchage.<br />
• Mais la complication la plus redoutée reste la fistule<br />
vésico-génitale. La fistule est vésico-vaginale quand<br />
le vagin a été ouvert (hystérectomie totale à titre<br />
d’exemple) et vésico-utérine après une césarienne<br />
[12, 15, 16]. Dans ce cas, la communication se fait<br />
entre l’hystérotomie et la vessie. Dans les<br />
hystérectomies subtotales, la communication se fait<br />
entre le col restant et la vessie. En effet, Dargent et<br />
Rudigoz décrivent, dans une série personnelle, 13<br />
<strong>plaies</strong> de vessie, dont 11 ont été suturées<br />
immédiatement et deux passées inaperçues qui se<br />
sont compliquées de fistules nécessitant une<br />
réintervention [8]. La fistule vésico-génitale est<br />
suspectée lorsque la patiente rapporte une fuite<br />
urinaire permanente. La fistule survient généralement<br />
1 à 3 semaines après l’intervention chirurgicale mais<br />
peut se manifester juste après l’intervention.<br />
Puisque les <strong>plaies</strong> vésicales d’origine gynéco-obstétricale<br />
sont des complications qui restent rares vu le nombre<br />
important d’interventions gynéco-obstétricales réalisées,<br />
il est difficile pour les gynéco-obstétriciens d’apprendre<br />
de leurs erreurs, ainsi le meilleur traitement des <strong>plaies</strong><br />
vésicales <strong>au</strong> cours de la chirurgie gynéco-obstétricale<br />
est préventif, cette prévention repose sur le respect de<br />
certaines pratiques : une connaissance parfaite de<br />
l’anatomie de la région, une vidange vésicale<br />
systématique avant toute chirurgie gynéco-obstétricale<br />
avec une surveillance peropératoire continue du sac<br />
à urines, un bon décollement vésico-utérin tout en<br />
restant collé à l’utérus avant toute hystérectomie, avant<br />
l’hystérotomie <strong>au</strong> cours de la césarienne et dans toute<br />
chirurgie par voie basse, la protection par une valve<br />
antérieure lors de l’hystérectomie par voie basse, une<br />
traction soutenue de l’utérus durant toute intervention<br />
[10].<br />
Tostain insiste sur la suture immédiate de la plaie et<br />
donc sur sa reconnaissance, <strong>au</strong> besoin par un test <strong>au</strong><br />
bleu de méthylène, afin d’éviter les complications à<br />
type de fistules uro-génitales [17].<br />
La prévention intervient <strong>au</strong>ssi en postopératoire par la<br />
surveillance régulière de la perméabilité de la sonde<br />
urétro-vésicale. En effet, l’obstruction complète ou<br />
incomplète de la sonde expose <strong>au</strong> risque de fistule<br />
vésico-vaginale ou vésico-utérine en fonction de<br />
l’intervention initiale.
CONCLUSION<br />
Les antécédents gynéco-obstric<strong>au</strong>x ont été constatés<br />
dans 25% des cas. La césarienne était responsable de<br />
la majorité des <strong>plaies</strong> vésicales. Afin de diminuer la<br />
morbidité de ces interventions, il est important de<br />
définir une population à risque en fonction des<br />
antécédents de chirurgie pelvienne et d’endométriose,<br />
de la parité et du volume utérin. Leur diagnostic doit<br />
être fait de façon précoce par un test <strong>au</strong> bleu de<br />
méthylène afin de réparer cette complication dans le<br />
même temps opératoire et par la même voie d’abord.<br />
Cependant, le meilleur traitement reste préventif par<br />
une bonne vidange vésicale, un décollement minutieux<br />
de l’espace vésico-utérin et une surveillance régulière<br />
de la perméabilité de la sonde urétro-vésicale en postopératoire.<br />
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