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l’erreur. Dont ton oncle, Shay. Ainsi que mon père et d’autres hommes d’importance qui protègent la
réputation de cette institution.
J’en suis restée bouche bée. Son oncle ?
– Et ils ont censuré Hobbes ? s’insurgea Shay. Je n’ai jamais rien entendu d’aussi ridicule.
– Passons à autre chose, voulez-vous ? demanda M. Selby.
Un voile de sueur était apparu sur son front.
– Pourquoi ? Pourquoi ne pas étudier Hobbes ? s’entêta Shay. C’est sans doute le premier à avoir parlé
de l’état de nature.
J’ai agrippé le bord de mon bureau. Il aurait aussi bien pu s’avancer devant un peloton d’exécution,
une cible accrochée sur le cœur. Je n’arrive pas à croire que je vais encore devoir l’aider.
– Parce que nous avons évolué, crachai-je. Nous pouvons dépasser le monde désastreux de Hobbes et
ne pas nous vautrer dans la violence. La guerre est un maître brutal, tu ne crois pas 1 ?
M. Selby m’adressa un sourire reconnaissant et s’essuya le front avec un mouchoir.
– Merci, mademoiselle Tor. Parfaite occasion de placer Thucydide. Les théoriciens que nous étudions
dans ce cours ont une vision du monde plus optimiste que celle de Hobbes.
Ren tapait sur son bureau avec ses crayons comme avec des baguettes de batterie.
– Je ne sais pas, dit-il. Moi, j’aime bien la sauvagerie.
Tous les Protecteurs de la classe ont éclaté de rire, moi y compris. Les humains se sont recroquevillés
sur leur siège, l’air terrifiés, à part Shay, qui paraissait complètement perplexe. Les jeunes Gardiens
sourirent d’un air narquois en nous jetant des regards dédaigneux.
– Hobbes ne parle pas de sauvagerie, insista Shay, frustré, mais de la lutte constante pour le pouvoir.
Un conflit interminable qui fait tourner le monde. C’est le véritable état de nature. Vous ne pouvez pas
l’ignorer simplement parce que quelques personnages pompeux le trouvent vulgaire.
Ren se tourna vers Shay, l’observant avec admiration et méfiance. Dax regarda son alpha, puis moi, et
enfin Shay. On aurait dit qu’il s’attendait à ce que l’un d’entre nous subisse une combustion spontanée.
Sabine fixait Shay comme si elle essayait de voir à l’intérieur de lui. Logan soupira et se mit à examiner
ses ongles.
Shay jeta un regard suppliant à M. Selby.
– S’il vous plaît, pouvons-nous parler de la guerre de tous contre tous ? C’est sans doute l’idée la plus
importante que j’ai rencontrée en philosophie.
La sueur sur le front de M. Selby formait des gouttelettes qui coulaient sur ses tempes.
– Eh bien, je suppose…
Il leva le marqueur pour écrire au tableau. Un spasme traversa ses doigts et le marqueur tomba par
terre.
– Il faudrait améliorer vos réflexes, monsieur, le taquina Ren.
Un petit rire nerveux s’éleva dans la salle.
Notre professeur ne répondit rien. Le tremblement dans ses doigts s’était communiqué à tout son bras.
Son corps entier fut pris de convulsions. Il se pencha en arrière, battit des bras et s’écroula par terre, pris
de soubresauts violents. De la salive blanche s’accumula aux coins de sa bouche et coula sur sa
mâchoire.
– Oh mon Dieu, il a une attaque ! hurla une humaine, qui, me semblait-il, s’appelait Rachel.
Je n’avais jamais pris la peine d’apprendre leurs prénoms.
Dax se leva précipitamment et alla s’accroupir auprès de M. Selby.
– Tais-toi et va chercher de l’aide ! cria-t-il à la fille qui hurlait toujours.
Elle détala. Plusieurs élèves humains avaient sorti leur téléphone.
– Rangez-moi ça tout de suite ! ordonna Logan. Va juste chercher l’infirmière Flynn, Rachel, cria-t-il
d’une voix forte mais paresseuse.