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de l’oubli s’engouffrait dans la grotte.
C’est trop tard. Je laissai mes paupières lourdes se fermer.
Un petit gémissement résonna dans le noir. De la fourrure caressa ma peau ; des griffes raclèrent contre
le sol de pierre.
Mes lèvres s’entrouvrirent et j’essayai de parler. Aucun son ne sortit.
Je sentis quelque chose de tiède et de doux contre ma bouche. Des gouttes d’un liquide chaud
tombèrent sur ma langue, puis se déversèrent dans ma gorge. Elles avaient un goût sucré, comme du miel
sauvage.
Le sang de la meute.
– Bois, Calla, murmura Shay. Tu dois avaler ou tu vas t’étouffer.
Je forçai les muscles de ma gorge à se mettre en mouvement, à faire descendre le sang.
– C’est bien, dit-il en me caressant les cheveux. N’oublie pas de respirer.
Après plusieurs gorgées douloureuses, je réussis à boire plus facilement. Les sensations revinrent dans
mes membres. La douleur arriva la première, mais elle reflua lentement. Ma vision s’éclaircit et la grotte
cessa de vibrer sous moi. Je repoussai le bras de Shay et je m’assis.
Il appuya sur sa peau ouverte.
– Ça suffit ?
– Je crois. Jette un coup d’œil.
J’ai de nouveau soulevé mon T-shirt. Il a hoché la tête.
– Oui, c’est en train de guérir.
Il déglutit et détourna le regard.
– Ce n’est toujours pas joli à voir, cela dit.
J’ai rapidement baissé mon T-shirt.
– Si la guérison a commencé, alors ça ira.
– Bien.
– Et toi, comment te sens-tu ? demandai-je en m’approchant de lui, scrutant son visage.
– Ça va, répondit-il en faisant rouler son cou d’arrière en avant. J’ai eu mal, très mal, mais je me sens
bien maintenant. Enfin, je me sens un peu différent, ajouta-t-il en fronçant les sourcils. Je crois que j’aime
bien ça.
– Tu es différent. Tu es un Protecteur.
Soudain, un loup aux yeux vert mousse, à la fourrure châtain doré, apparut devant moi, remuant la
queue. Puis Shay me sourit.
– Alors, je suis comment en loup ? Bien ? Canon ? Je suis vraiment plus fort maintenant ?
– Oh mon Dieu, soufflai-je, et mon cœur s’arrêta un moment de battre. C’est très grave. C’est un
désastre.
– Pourquoi ? demanda-t-il, son sourire disparaissant. Tu penses que je ne suis pas à la hauteur ?
– Ce n’est pas ça, Shay. Je n’arrive pas à croire que j’ai fait ça. À quoi est-ce que je pensais ?
– Tu ne pensais pas. Tu étais en train de mourir. Nous n’avions pas le choix.
– J’aurais aussi bien pu mourir. De toute façon, je suis morte maintenant.
Il n’y avait plus un loup dans la Caverne d’Haldis, mais deux. Moi et ce nouveau loup étrange.
– Non. Tu n’es pas morte. Tu le serais si tu ne m’avais pas transformé.
– Tu vas laisser ton odeur partout dans la grotte, Shay. Comment allons-nous la dissimuler ? J’ai violé
deux lois ! Je n’ai pas le droit d’être là, et je n’aurais jamais dû te transformer !
Je pensai à la carcasse de l’araignée, à mon sang se déversant sur le sol – je ne pouvais rien faire pour
effacer les preuves.
Il me fit un sourire en coin.
– Tu n’as qu’à ajouter ça à la liste des choses que tu n’étais pas censée faire mais que tu as faites