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SHAY TOURNA LA PAGE ET GRIFFONNA QUELQUES NOTES PENDANT que je m’agitais sur mon
siège.
– Je n’arrive pas à croire qu’ils n’autorisent pas les boissons ici, dis-je. Comment suis-je censée lire
tout ça sans café ?
– Tu n’as encore rien lu, Calla, me corrigea-t-il sans me regarder. Tu es restée assise là à me regarder
lire.
– Tu ne m’as rien donné à chercher, rétorquai-je en jetant un coup d’œil au livre ouvert devant lui.
D’ailleurs, tu as trouvé quelque chose d’utile ?
Il fit la moue.
– Écoute, je ne critique pas. Je te demande simplement ce que tu as trouvé jusque-là.
Il s’appuya contre sa chaise.
– Le livre semble divisé en trois parties. De principiis priscis, l’histoire de l’origine de ton monde, je
suppose. Puis une section intitulée De proelio…
Il se tut, me regardant d’un air entendu.
– La bataille, dis-je.
Il hocha la tête et sourit.
– Bizarrement, je me doutais que tu connaîtrais ce mot.
Je souris et étirai mes bras au-dessus de moi. À la simple suggestion d’un combat, mes muscles
tressaillaient d’impatience. J’étais assise depuis des heures, d’abord au lycée et maintenant à la
bibliothèque. Shay me regarda avec amusement avant de retourner à ses notes.
– Peut-être contient-il des détails sur la guerre des Sorciers ? Nous allons vite le savoir.
– Quel est le titre de la troisième partie ?
Il fronça les sourcils, dégageant son front des mèches châtain doré qui l’embarrassaient.
– C’est la seule que je ne comprends pas.
Il ouvrit le livre, tourna plusieurs pages jusqu’à la fin du volume.
– Et c’est de loin la plus courte. Proenuntiatio volubilis.
– Une annonce ?
Je pris un stylo et commençai à gribouiller dans mon carnet.
Shay se tourna vers le dictionnaire de latin.
– Je ne pense pas. Plutôt une prophétie, ou un augure. Mais le second mot, volubilis, implique que ce
n’est pas gravé dans la pierre ; tu sais, comme l’idée de sort, ou de destin. Ce que décrit cette section,
quoi que ce soit, peut être changé, altéré.
– Alors le livre se termine sur la description d’un événement censé se produire dans le futur ?
Sans que je sache pourquoi, cette idée me donnait la chair de poule. Il poussa un grognement dégoûté.
– Non. Je suis allé à la dernière page pour voir s’il y avait une conclusion qui pourrait nous aider à
remettre le reste de l’ouvrage dans son contexte.
Il se rendit à la dernière page. Ma chair de poule s’intensifia.
– Qu’est-ce que ça dit ?
– Crux ancora vitae, répondit-il avec irritation.
– Quoi ?
Je me levai et me mis à faire les cent pas.