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Le chasseur africain et son monde - Royal Museum for Central Africa

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déclenche pas, à la poudre qui est humide, au bruit que l’on fait dans les environs, à la malchance tout<br />

simplement, mais d’autre part on accusera aussi la défaveur des esprits, le non respect des présages <strong>et</strong> des<br />

interdits, la jalousie <strong>et</strong> le recours à la sorcellerie de la part de l’entourage. La mort du <strong>chasseur</strong> bouleverse<br />

surtout la situation de <strong>son</strong> épouse qui était habituée à profiter la première du fruit de la chasse <strong>et</strong> qui avait un<br />

statut social particulier (ch. 15, 26g , 538, 577, 685, 903).<br />

L’entreprise de la chasse est pleine de suspense. Même si le <strong>chasseur</strong> connaît normalement les<br />

comportements des bêtes <strong>et</strong> qu’il est préparé à m<strong>et</strong>tre en oeuvre les stratégies pour se rapprocher d’elles <strong>et</strong><br />

les abattre (C. Doke, 1931 : 334-337), il reste qu’il y a toujours une part de hasard <strong>et</strong> que le <strong>chasseur</strong> n’est<br />

assuré que quand la bête est par terre. S’il respecte toutes les règles de l’art, le <strong>chasseur</strong> connaît normalement<br />

le succès. Parfois il sera obtenu à <strong>for</strong>ce d’ef<strong>for</strong>ts surhumains. En eff<strong>et</strong>, la bête peut être seulement blessée<br />

<strong>et</strong> il faut alors la poursuivre, parfois pendant longtemps. <strong>Le</strong> <strong>chasseur</strong> maladroit ou paresseux (mukombola,<br />

kayenge, kitondo, munshishinga, mutanga, mushinsola) est l’obj<strong>et</strong> fréquent de moquerie <strong>et</strong> d’ironie<br />

dans les chan<strong>son</strong>s.<br />

C’est en fonction du succès à la chasse que se <strong>son</strong>t créés les rites de dépeçage, de séchage, de<br />

partage <strong>et</strong> de reconnaissance. <strong>Le</strong> r<strong>et</strong>our du <strong>chasseur</strong> est attendu avec ardeur, particulièrement par <strong>son</strong><br />

épouse, surtout si règne la carence de viande. Si le <strong>chasseur</strong> tue un animal <strong>et</strong> qu’il est seul, il coupera la<br />

queue (mukila, mupunga) de l’animal pour servir de preuve de sa chasse, <strong>et</strong> pour s’en servir de fétiche <strong>et</strong><br />

de chasse mouche. Il couvrira le gibier, puis il rentrera au village pour annoncer sa réussite <strong>et</strong> pour prendre<br />

des gens afin d’aider au dépeçage <strong>et</strong> au transport.<br />

Si le <strong>chasseur</strong> chanceux est accompagné de ses aides, <strong>et</strong> s’ils <strong>son</strong>t en nombre suffisant, ce qui ne<br />

sera peut-être pas vrai au cas où il tue un éléphant ou un hippopotame, ils se m<strong>et</strong>tent, pour certains animaux,<br />

comme l’éléphant, à l’exorciser. Ensuite, on peut commencer à le dépecer. Si la chasse a été entreprise pour<br />

un jour, on ramènera la viande telle quelle au village. Si la chasse est prévue pour plusieurs jours <strong>et</strong> il y a<br />

plusieurs <strong>chasseur</strong>s, on dépiaute, on dépèce sur place <strong>et</strong> on se m<strong>et</strong> à sécher la viande sur un séchoir (lutala,<br />

kitala, malinga, butanda, verbe kwanika) pour continuer la chasse ensuite, chaque <strong>chasseur</strong> ayant sa<br />

direction à lui. <strong>Le</strong> dépeçage de certains animaux exige des rites <strong>et</strong> fétiches particuliers (ch. 696). Finalement<br />

quand on a obtenu assez de gibier ou que les jours prévus <strong>son</strong>t terminés, on rentre au village avec le butin. <strong>Le</strong><br />

<strong>chasseur</strong> qui a abattu un grand gibier ayant une queue importante porte c<strong>et</strong>te queue à la ceinture en signe de<br />

trophée <strong>et</strong> de reconnaissance envers les esprits. C<strong>et</strong>te queue constitue un fétiche. On fait le partage avec<br />

les per<strong>son</strong>nes qui ont droit à leur part <strong>et</strong> selon la hiérarchie des per<strong>son</strong>nes : le chef, les parents, les soeurs,<br />

l’épouse, la belle-famille, les enfants, les villageois. <strong>Le</strong> <strong>chasseur</strong> ne doit pas oublier non plus <strong>son</strong> maîtreinitiateur.<br />

C’est une opération délicate <strong>et</strong> le <strong>chasseur</strong> est facilement accusé de ne pas amener toute la bête<br />

au village mais de se réserver la meilleure part <strong>et</strong> d’être avare. Fréquentes aussi <strong>son</strong>t les plaintes des<br />

<strong>chasseur</strong>s pour le manque de reconnaissance pour les choses données <strong>et</strong> pour les ef<strong>for</strong>ts <strong>et</strong> les souffrances<br />

que se donne le <strong>chasseur</strong>. <strong>Le</strong> partage des défenses d’éléphant comporte des règles spéciales (ch. 805).<br />

Aussi longtemps que le succès sourit, le <strong>chasseur</strong> a beaucoup d’amis <strong>et</strong> l’épouse est obj<strong>et</strong> de respect.<br />

Si le <strong>chasseur</strong> tue une grande bête (ch. 187), il sèche la tête <strong>et</strong> il l’amène au village où il la suspend<br />

aux fourches de ses esprits en même temps que les cornes s’il s’agit d’une grande bête à cornes comme le<br />

buffle ou certaines espèces d’antilopes. Quand il a rassemblé assez de têtes, il convoquera ses amis <strong>chasseur</strong>s,<br />

ses proches <strong>et</strong> les villageois. C’est pour la fête des têtes, comme on dit (lyanga, en kilala). C<strong>et</strong>te cérémonie<br />

est exaltée hautement dans les chan<strong>son</strong>s de chasse. Il s’agit de remercier les esprits qui ont permis au<br />

<strong>chasseur</strong> d’obtenir ces trophées (ch. 17, 77, 308, 310). Ce <strong>son</strong>t les mêmes esprits qu’il a invoqués avant<br />

d’aller à la chasse.<br />

Dans le bref exposé consacré au culte de la chasse que nous avons présenté précédemment (L.<br />

Verbeek, 1990 : 30), il fut dit que les chan<strong>son</strong>s de chasse avaient un faible rapport avec le culte. Cela est vrai<br />

pour le culte qui se fait avant la chasse <strong>et</strong> qui ne comporte pas de chan<strong>son</strong>s, mais pour le culte de la chasse<br />

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